DU MÊME AUTEUR Arbres d'Hellade (1912). Athéna (1912). Dionysos et les nymphes (1913). Apollon (1913). L'ardent voyage (1921). De sable et d'or (1921). La sagesse (1924). Les poèmes de Sainte-Marthe (1926). Printemps d'automne (1930). Les pêcheurs (1931). Féerie (1931). Bergamasque (1931). Sous un cœur blessé (1932). Aux Cahiers de la Quinzaine : L'élégie italienne (1933). En préparation, pour paraître aux Cahiers de la Quinzaine Intermèdes féeriques. Dernier cahier des amours. A mon grand frère Alfred Lombard qui n'est mon cadet que par l'âge. ' WàtSÉêl WÊÈ& « lÊiSÉSillfè MiiiK» MU . 1 5.Vf.i'....'. ,.'.... ■ JK i «I r) '■ i, . \ rffl# . " * ■ Avant de s'en aller aux guerres de Vamour Qui déferlaient je ne sais pas sur quel rivage, Mon cœur se prosterna sous la plus sainte image Et nous avons prié jusqu'au lever du jour. Ce fut un lever grave et glorieux et tendre, Parfumé de résine et pénétré de sel. En haut d'une falaise on vit s'ouvrir le ciel : Et l'aurore monta qui paraissait descendre. 10 Fernand Mazade Nous avons admiré renaître avec lenteur Les fleurs, les fruits, dans les jardins qui se dévoilent. Un peu de temps encor trembleraient des étoiles ; Mais déjà les clochers se gonflaient de chaleur. Alors, se dépêchant de venelle en venelle, De halliers en huiliers et d'amont en aval, La cymbale et le fifre ont jeté le signal D'adieux que la douleur de l'écho se rappelle. Et, tandis que sonnaient à la fois et d'accord Les hymnes de bataille et les psaumes de rêve, S'est élancé mon cœur vers la lande et la grève, Sous l'aigrette de neige et sous l'enseigne d'or. Soupçonnait-il que son armure était mal close Et qu'entre les rinceaux de la cuirasse et lui Quelque chose saignait, quelque chose avait lui : Blessure qui semblait la flamme d'une rose ? Il portait un anneau taillé dans un saphir. Il portait une épée à la garde fantasque. Mêlés à du soleil, sur le timbre du casque, Les rayons de Vénus venaient se réfléchir. PREMIER CAHIER 11 Et par le chemin jeune où le matin se penche, Et par la vieille route où rampe le matin, Ont longuement, au trot amblé du cheval zain, Flotté l'enseigne rousse avec l'aigrette blanche. Le fifre et la cymbale ensemble s'étaient tus. Les musiques de rêve et les airs de bataille, A travers la poussière et parmi la broussaille, S'étaient l'un après l'autre assoupis et perdus. Des vallons, des coteaux s'évadait le mystère. Entre les nymphéas et malgré les roseaux, Nous pouvions jusqu'au fond voir l'âme des ruisseaux. Moins belle maintenant était l'heure trop claire. Noirs dans l'éclat diurne, encor mouillés d'aigail, Des boucs tournaient' et retournaient sous les genièvres : Et, non loin d'eux, on entendait l'appel des chèvres Dont le pâtre insensé n'ouvrait pas le bercail. Nous pouvions même entendre, au milieu de l'haleine Du vent oriental qui monte de la mer, Le bruit menu, le bruit ingénu qu'un pivert Fait en creusant du bec une écorce de chêne. CŒUR EN GUERRE. La corneille cria, puis cria le vautour, Et le paon s'est perché sur une haute branche. En une immense et lente et subtile avalanche A sur nous commencé de retomber le jour. Un arôme rôda de varech et de cèpe. Les grenouilles glissaient des saules chevelus. Avec la mirabelle, aux courbes des talus, La grenade s'ouvrait où s'enfonça la guêpe. PREMIER CAHIER 13 Vers un site rocheux soudainement porté, A disparu mon cœur en perdant son armure. Vainqueur dans l'admirable et lointaine aventure, Reviendra-t-il à Pâque? ou pour la Trinité? Reverrons-nous ce cœur aux archaïques charmes, Expansif et jaloux, timide et turbulent, Si vite dédaigneux et plus vite brûlant, Né parmi le réseau des danses, sous les larmes? Le reverrai-je à Pâque? Attendrai-je Noël Avant que de nouveau je le sente en moi battre? Où va-t-il? Voudrait-il que pour lui Cléopâtre Remontât des enfers ou descendît du ciel? Près d'un étang qui berce un esquif nostalgique, Au pied d'une colline où mûrit le maïs, Vous réveillera-t-il, équivoque Thaïs, Païenne volupté, délice évangélique? Féminine apparence ayant l'ardeur qu'il a Et sa mélancolie, âme et spectre d'Hélène, Vous rencontrera-t-il aux replis de la plaine Où l'orgueil de souffrir et d'aimer l'appela? 14 Fernand Mazade J'imagine parfois qu'il touche au but, qu'il touche A la bouche suave, aux cheveux radieux, Et qu'en ouvrant les yeux, et d'un geste des yeux, La Belle au bois l'attire à la candide couche, Ou que de Cendrillon en robe de vapeurs, Aux mouvements légers et craintifs comme un souffle, Il flatte les orteils, il baise la pantoufle Dans l'enclos que cultive un couple d'enchanteurs. Peut-être en la futaie où les biches sommeillent, Sous l'orme où la chevêche ulule par instant, Vous a-t-ihrecréée, amante de Tristan, Yseult de qui la joie épouvantait les veilles. Et peut-être, sur l'étalon au trot amblé, Reviendra-t-il avec la légendaire coupe Et, paré de rubans naïfs, ayant en croupe La dame que chérit le feu roi de Thulé. O Seigneur, j'y croyais (je dois y croire encore)! Et, fidèle, attendant de mon cœur le retour, J'ai sur la tour de guet, j'ai du haut de la tour Suivi l'arche du soir et le char de l'aurore. PREMIER CAHIER 15 Du rossignol s'est tu le chatoyant désir; Déjà s'endort le grincement de la cigale. Les astres sont éteints de la zone estivale : Du signe de la Vierge il n'est qu'un souvenir. Les brugnons sont cueillis lorsque brunit l'olive; Sous les plongeantes faux se couche le regain. Devant l'âtre où pétille un faisceau d'aubépin, Le lard nouveau se hâle au fer d'une solive. Je croyais! et, parmi mon espoir anxieux, J'ai vu des boucs se prolonger l'obscène ronde, Pendant que s'effaçait de la brande profonde Le dernier rendez-vous des derniers demi-dieux. Le pêcheur a foulé le sable du rivage Et le contrebandier la poudre du coteau. La sarcleuse de vigne a fermé son couteau. La vendeuse de pain dégrafe son corsage. Dans les basses maisons du quartier sans honneur S'écarte nuit et jour la courtine de serge : Je devine à quel taux la servante d'auberge Se montre complaisante au triste voyageur. 16 Fernand Mazade Et vainement j'ai vu, le long de la coudrette, Le long de la prairie et du breuil embaumants, Le long des deux ruisseaux, passer beaucoup d'amants. Nul d'eux ne méritait la neige de l'aigrette. Aucun d'eux, ô Seigneur, ne portait l'anneau bleu, Le magique saphir qui fiance aux chimères. Pas un de ces mortels aux verves éphémères N'avait à la poitrine une rose de feu. Certes, de la forêt les ingénus oracles, Le golfe auréolé de plumes d'alcyons, Les rochers écumants de solaires rayons, Le zénith étoilé nous gardent leurs miracles. Sans doute, à nos regards, sources, landes en pleur, Cadences des labours, vous demeurerez belles. L'âme entière n'est pas, hélas, dans les prunelles : Et comment vous aimer si je n'ai plus de cœur? De trop promptes amours nous n'avons pas envie. Mais Pàque est déjà loin : Pâque et la Trinité. Combien de fois l'automne a vendangé l'été! Sur la tour finirai-je, homme en rêve, ma vie? PREMIER CAHIER 17 Au front de Briséis niche un lézard troyen. Sous l'algue Calypso s'abîme avec son île. La reine de Saba se dissout dans l'argile. Des flancs d'Hérodiade il ne subsiste rien. La tendresse et l'effroi lui mouillant les paupières, Bérénice a quitté le lit impérial. Elle retrouverait le brasier nuptial Si la ramenait l'onde au climat de mes pères. De moi tout le printemps pourrait encor jaillir. Avant que son destin de bergère s'achève, Va-t-on de ses agneaux séparer Geneviève Pour mon bonheur céleste et mon humain plaisir? A-t-on fait cliqueter un glaive régicide Qui ravisse Bertrade ou sauve Brunehaut? A-t-on de Mélusine assailli le château? A-t-il coulé du sang sur les jardins d'Armide? Où? quand se sont donnés les combats? Quels combats? Personne n'a souci de ces étranges guerres. Et, j'ai beau regarder, mon cœur ne revient guères; Et, j'ai beau l'appeler, mon cœur ne revient pas. 2 LE RETOUR. Mon cœur est revenu. L'odeur Des jardins printaniers, en fleur Dans les soirs d'améthyste, Ne le peut réjouir. Mon cœur Est revenu si triste! Il était jeune à son départ. Qu'il semblait beau sous l'étendard, Criant le nom d'Hélène! Il est revenu tout hagard Et seul comme la haine. PREMIER CAHIER 19 Haineux, lui, l'enthousiasmé Qui brûlait du besoin d'aimer Et du désir de plaire! Quels anges noirs l'ont désarmé, Et seul que va-t-il faire? On m'a dit qu'après le printemps Mûriront aux rameaux flottants Les amandes sonores Et qu'après les soirs haletants Danseront les aurores. J'ose espérer que voudra Dieu, Afin d'atténuer un peu De ce cœur la détresse, Lui rappeler parfois le feu Qui ravit ma jeunesse. LES BATELEURS. Ces grimaciers ont plus de force qu'on le croit. S'ils sont maigres de cœur, le lard gonfle leur face. S'ils manquent de génie et s'ils manquent de grâce, Ils savent le secret de barbouiller la loi. Qu'importe qu'ils aient pris l'âne pour palefroi Et le cimier trop haut pour leur âme trop basse? C'est la difformité triomphante qui passe. Meurs devant les bouffons, fuis vite ou cache-toi. PREMIER CAHIER 21 Afin de débusquer de la forêt de hêtres L'ombre d'Yseult et les suprêmes enchanteurs, Ils viennent de voler le glaive des ancêtres. Tu n'as plus d'arme! Où vaincrais-tu les bateleurs Qui, sur leur friperie, osent nouer l'écharpe Dont la reine ceignit sous d'amoureuses fleurs Les princes du Graal et les sonneurs de harpe? LE RÊVE. Qui m'avait promis le tambour Et le flambeau des hymênées? Mes amours d'ombre illuminées Et de chimère couronnées Ne sont qu'un amour de l'amour. Les femmes qu'en mes bras je presse N'ont ni la tête ni le cœur Qui puissent charmer ma langueur Et ne me laissent qu'une odeur De batelage et de tristesse. Et, comme un fou, parmi la nuit Et lorsque le soleil s'élève, Et par les jardins et la grève, Mon rêve cherche un autre rêve Qui serait aussi fou que lui. FLAMME TRISTE. D'où nous as-tu tirés, Seigneur? Que sommes-nous? Où vont les oiseaux bleus qu'il nous plairait de suivre? Pourquoi, si l'homme meurt, le condamner à vivre? Du tombeau, du berceau, lequel est le plus doux? Serait-il que nps vœux s'achèvent en poussière, Eux qui de limon seul n'ont pas été pétris? L'ange qui, les yeux clos, guide nos pieds meurtris Porte-t-il la clé d'ombre ou l'arme de lumière? 24 Fernand Mazade En de lointaines nuits, peut-être ai-je régné Sur un pays bercé d'incessante musique Et par un éternel clair d'étoiles baigné. Mon esprit nageait-il au fil du rêve unique? Il n'aurait su prévoir les temps et les milieux Où je promènerais un feu mélancolique Dans le cœur le plus tendre et le plus oublieux. SITE. Ce site ancien m'était inconnu : Un sable où meurt le sel d'une lame, De longs bateaux sans voile ni rame! Jamais ici je n'étais venu, Venu jamais avec une femme. Des nids de joncs, un ciel de saphir, Une adorable odeur de merise! Et ce sous-bois caressé de brise : Que j'y voudrais trouver souvenir D'âpre délice ou de jDeine exquise! Site réel où les bleus du jour Jusqu'au milieu de la nuit s'allongent, Où la fleur vole, où les oiseaux plongent! S'il t'avait vue, ô ma jeune amour, Je le dirais plus beau que mes songes. LE PASSÉ. A l'heure d'occident et d'arrière-saison Où l'oiseau migrateur revient piller la mare, Je vais sentir, je sens une angoisse bizarre Précipiter mon souffle et voiler ma raison. Très lointaine, secrète et merveilleuse aimée Enfant associée à mes premiers plaisirs Et dont l'image, à la merci de mes désirs, Dans leur embrasement s'est vite consumée PREMIER CAHIER 27 Mortelle qui, tel soir, répondant à mes vœux (C'est le soir que l'amour des hommes se proclame), M'ouvris tes bras profonds, profonds jusqu'à ton âme, Et me sacras sous l'effluve de tes cheveux : Maîtresse inaugurale et sans doute ingénue, De qui l'aveugle dieu trop tôt me délia, Dernière sœur d'Héro, d'Yseult, d'Ophélia, Que ta forme suave est-elle devenue? Où rêves-tu? Pour qui soupires-tu? Pourquoi N'ai-je contre ton sein plus vu briller la harpe? Tu n'aurais pas voulu que se rompît l'écharpe : Si tombèrent les fleurs, n'en accuse que moi. Les bonheurs quelquefois d'une parole meurent. Qu'ai-je dit? Aussitôt nous nous serons fâchés, Trop sensibles amants, inhabiles archers, L'un dont saigne le cœur, l'autre dont les yeux pleurent. Je crois que tu pouvais arrêter mon départ : Je crois qu'il eût suffi de faire un petit geste. N'avions-nous pas reçu Je précepte céleste? Nous avons renoncé l'azur de l'étendard. 28 Fernand Mazade Oh, l'aventure triste et la banale chose! Que de tendres beautés et que de jeunes fous Ont souffert, souffriront ou souffrent comme nous, Si désespérément et pour la même cause! Sur les mille chemins par mes songes suivis, Je n'ai jamais revu ton adorable trace. Et quand l'ai-je cherchée? Et quelle était ta race, Et quel était ton nom? Et qui sait si tu vis! A te ressusciter mes prières sont vaines. Mais chaque fois qu'avec l'aveu du soir flatteur J'invoque ton reflet, j'appelle ton odeur, Une onde d'innocence illumine mes veines. T'ai-je connue en un bosquet de myrte amer, Par un temps ambigu de paresse et d'orage? M'as-tu choisi, t'ai-je choisie en un village Qu'endormait, qu'éveillait le tambour de la mer? Quel âge avions-nous? Toi, l'âge de Marguerite? Et moi n'avais-je pas l'âge de Siébel? A tes pensers que promettait le vent du ciel? Et qu'avait sous tes doigts prédit la marguerite? PREMIER CAHIER 29 Je ne me souviens pas de tes frêles atours : D'un collier qu'avait dû te léguer une ancêtre, Des rubans, de l'anneau que je t'offris peut-être! Je ne me souviens plus, moi qui t'aime toujours, Si sur ton col neigeux, sur tes épaules pâles, Tes cheveux descendaient en un rythme châtain, Ou s'ils étaient obscurs comme notre destin, Ou s'ils étincelaient comme un feu de cymbales. Je ne me souviens pas s'il était pluvieux, Ton pays, si ta ville était calme et féconde. J'ai quitté ma chimère, ayant changé de monde; J'ai quitté ta magie, ayant changé de dieux. Le climat le plus pur dont je garde mémoire Avait une colline où nichaient des ramiers, Avait une prairie enclose de pommiers, Avait une fontaine où les bœufs allaient boire. Est-ce là, quand la nuit lançait son javelot, Là, sur une terrasse aux ombres violettes, Que ton cœur contemplait la marche des planètes Et que parlait ton âme à la fuite de l'eau? 30 Fernand Mazade Il existait aussi, parmi quelque mystère, Une grotte où, gardiens d'un féerique trésor, Se lovaient des serpents aux sclérotiques d'or Et sur qui s'éployait un hibou solitaire. Il existait, en haut d'un rocher, une tour Qu'incendiaient soudain des signaux de marine Et dans laquelle une princesse pérégrine Etait de volupté morte aux bras d'un pastour. Serait-ce qu'une fois de dansant crépuscule, Mes doigts s'étant posés par hasard sur les tiens, Tu frémis, tu rougis, tu blêmis, je dis : Viens! Et par hasard tu vins, d'un pas de somnambule? Et serions-nous partis à cet instant fatal, Vers un levant trop beau, du côté des surprises, Avec d'immenses vœux d'extases imprécises, Énervés par la flamme et le poison du bal? Un de ces hymnes lents qui font pâmer les filles S'exhalait-il d'un bois cerné par des étangs? Étions-nous en automne, étions-nous au printemps, Ou si les campagnards aiguisaient leurs faucilles? _■■" / 'A: PREMIER CAHIER 31 Sans doute, dans tes bras je me suis abattu, Étourdi des parfums nés de ta chevelure. Te le rappelles-tu, l'accent de mon parjure? Le goût de mes baisers, te le rappelles-tu? Moins à l'oubli la femme incline d'habitude. L'amour est sous l'éclair son unique vaisseau. Moins distraite que nous, moins diverse, il lui faut Plus de passé pour éblouir sa solitude. Tes émois, tes désirs n'auront pas déserté Le brusque jouvenceau, l'amant frappé de fièvres. Son nom sera resté dans les rets de tes lèvres; Au fond de ton regard le sien sera resté. Ta pensée et ta chair ont demeuré sanglantes : Les maux que je t'ai faits, rien ne les a guéris. Et tu m'as pardonné de n'avoir pas compris Ton pudique tumulte et tes chaleurs tremblantes. Heureuse, redonnée à qui te désola, Tu vas me ramener à la suprême étreinte. L'anneau brisé, le fruit meurtri, la lampe éteinte, Tu vas me rappeler tout cela. Tout cela? 32 FernancL Mazade Un soir que nous avons, sans consulter la Parque, Pris la mer furieuse et qu'aveuglés de sel, Aveuglés de jeunesse, aveuglés d'éternel, Nous nous sommes mêlés dans les sauts de la barque? Un jour que, dédaigneux d'un casanier conseil, Au fil des champs de blés, de maïs et de seigles, En poursuivant un vol de colombes et d'aigles, Nous nous sommes perdus au milieu du soleil? Parle-moi. Je t'attends : j'écoute, ô ma maîtresse, Initiale amante aux yeux bleus! aux yeux noirs! J'écoute : et le silence alarme les miroirs. Au mur sombré et glacé vacille ma caresse. Tu te tais. Revenue un instant à mon seuil, Tu laisses s'effeuiller la rose et les verveines, Tu laisses s'épuiser la coupe et les fontaines Et s'écraser sous un mensonge mon orgueil. Veuf, délire mon cœur aux angles d'une chambre. Ton regard ne luit pas comme je l'avais cru. Ton sourire s'efface à peine reparu Et repart ton odeur d'adolescence et d'ambre. PREMIER CAHIER 33 Tu te tais. Oui, je sais! tu n'es plus là. Jamais Tu ne seras plus là, toi que je rendais ivre, Toi qui m'as enseigné le délice de vivre, Corps charmé qui m'aimas, corps charmant que j'aimais. Par l'ombre où ton espoir comme le mien s'achèvent, En vain à ce moment tu me cherches aussi. Tout est fini pour nous qui ne pouvons ici (Qui ne pourrions ailleurs) ressouder nos deux rêves. Pour la dernière fois peut-être, ton soupir Dans le site naïf évoque mon fantôme : « Était-il Siébel ou Tristan, le jeune homme Dont ma seule douleur garde le souvenir? » LE PARFUM. Que, nue et chaste, entre les houx Elle se montre ou sous les saules, Reconnaîtrais-j e ses épaules, Reconnaîtrais-je ses genoux? Reconnaîtrais-je son visage? Il me souvient subitement Qu'un flot d'or enthousiasmant Environnait sa tête sage. PREMIER CAHIER 35 Je ne puis pas dire si ses Yeux furent grands comme le monde. Je puis dire qu'elle était blonde (C'est presque tout ce que je sais) Et qu'une odeur dansante et pure Et lumineuse, semblait-il, L'odeur d'une rose d'avril S'exhalait de sa chevelure. Cher parfum qui m'aviez charmé, Comment se peut-il que vos charmes Ne rappellent pas à mes larmes Le nom de l'enfant que j'aimai? FANTÔMES. Par des temps où s'amuse une immense laideur, Où se couche le sage, où la folle se lève, Que disais-tu qu'il n'est plus de sang ni de sève? Pour sauver le royaume, il suffit d'un vainqueur. Pour embaumer la route, il suffit d'une fleur! Un matin que dansaient les rocs nus et la grève, Quelques hommes, portant la croix, portant le glaive, T'ont suivi, toi qui tiens la rose de ferveur. L'ANNEAU. J'allais rêver Au bord de l'eau Quand j'ai trouvé Sur le pavé Ce bel anneau. Il est ancien, En métal vert Comme la mer. Est-il païen? Il sonne clair. PREMIER CAHIER 41 Est-il chrétien? Il m'a semblé, 0 mon destin, Qu'il te convient. Aussi je l'ai Mis à mon doigt. Anneau d'honneur Et de douleur, Anneau d'un roi : Le roi de cœur. LA HARPE. Mon cœur secrètement nourrit, qui le dévore, La flamme d'un amour peut-être sans objet. Yseult aux blonds cheveux existe-t-elle encore A qui ma jeunesse songeait? D'odorantes langueurs de la colline tombent. Les bœufs dans l'herbe morte allongent leurs naseaux. Le soleil de midi fait gémir les colombes Sur les pins qui bordent les= eaux. PREMIER CAHIER 43 Tandis qu'à la façon d'un navire un nuage Unique se balance au bleu du firmament, Le bleu des flots amers vers l'étranger rivage Semble s'en aller lentement. Malgré son vieil attrait et qui reste le même, La terre dont j'étais épris ne me plaît pas A présent que ses feux, de la femme que j'aime, Ont cessé de porter les pas. Quand le jour à l'ouest quittera son écharpe, Je voudrais être mis, comme Tristan blessé, Au gré de Dieu, sur une barque, avec ma harpe, Et seul parmi la mer laissé. CRÉPUSCULE. Celle qu'autrefois j'aimai, Trop tard je me la rappelle. C'était la fleur la plus belle D'un jardin qui se fermait. Un automne de Provence, Comme il en était jadis, Fait d'azur et de rubis, D'ardeur et de nonchalance PREMIER CAHIER 45 Un de ces automnes purs Et cependant équivoques Où tendrement vous suffoquent Les effluves des fruits mûrs. Dans les courbes du rivage, Aux coudes des chemins creux, Les lèvres des amoureux Taisaient un désir sauvage. De la cime d'une tour, . A l'occident des collines, Obliquaient les javelines Que lançait encor le jour. Déjà revenaient les voiles Au pas assombri de l'eau; Et bientôt, sur le bouleau, Émergeraient des étoiles. Il me semble (il me sembla) Qu'à cette heure taciturne, Avec un oiseau nocturne, Une alouette vola. 46 Fernand Mazade Ce fut, crépuscule double, Le couchant et le levant : L'aube d'un amour d'enfant Dans un soir d'automne trouble. DÉTOUR. Laissez-le partir pour les bords d'Hellade Vers qui soupiraient son rêve et ses vers. Au seuil des vallons sur le golfe ouverts, L'attend la dryade avec l'oréade. Pendant qu'ondulait la flamme au grand mât, Il a débarqué dans les asphodèles. Il entend le lit des ruisseaux fidèles Parler des jardins qu'Hélène embauma. 48 Fernand Mazade D'une chair de reine il veut la caresse : Ne refusez pas d'exaucer son vœu. Il vous reviendra cette nuit, mon Dieu Au trot écumant de la centauresse. Repu de phantasme et de volupté, Il sera l'élu de la onzième heure. Le chemin qui mène à votre demeure Peut être au pays de l'Aphrodité. HIVER. Au pays où vole et plonge L'oiseau qui persuada (L'air sentait le réséda, L'œillet, le myrte) Léda, Je ne suis allé qu'en songe. Avignon pompeux et nu, Arles si mélancolique, Aix qui dort dans la musique Des fontaines, puis la crique De Saint-Cyr m'ont retenu. Voici venir la macreuse : L'amandier s'est effeuillé; Et sous le soleil voilé, Mon cœur demeure gonflé De nostalgie amoureuse. PEUT-ÊTRE. J'ai découvert, au bord d'un bois où les haleines Du vent ont la froideur, la douceur de la mort, Un site que l'humeur des goémons endort Et qu'avait assoupi la poussière des faînes. Entre deux longs écueils qui, comme des carènes, S'enflent dans une écume argentine, le port S'arrondit où le flot du levant mène encor Le rire des tritons et le chant des sirènes. PREMIER CAHIER 51 C'est ici qu'autrefois des Achéens joyeux Ont suspendu le vol de la voilure oblique : Les filles du parage ont d'helléniques yeux. Et si, par la clarté du croissant pathétique, Je disais cette nuit l'amour de l'égipan, Peut-être sous un ciel devenu catholique Ferais-je s'éveiller la Nymphe au bois dormant. LE NOM. ■ Au jardin, qui passe si tard Dans les fleurs de la marjolaine? Vous me dites que c'est Hélène : Est-ce l'Hélène de Ronsard? N'est-ce pas plutôt la princesse Que, gerbe de rêve et d'ardeur, Emporta le joli pasteur Du côté que le jour se dresse? PREMIER CAHIER 53 Une enfant marche à petits pas, Une enfant qui se voit à peine. Vous me dites que c'est Hélène : Et le nom ne m'étonne pas. Jamais n'avaient pensé mes fièvres Que l'heure des dieux avait fui : Et ce nom, presque chaque nuit, L'appelaient mes bras et mes lèvres. HÉLÈNE. Spectres, faux semblants, symboles captieux, Qu'étonnants sont vos nombres! Quand on croit vivants tant de rois et de dieux Dont l'ombre a pris les ombres, Comment se peut-il que l'on ait jamais'cru Les personnes mal sûres Qui dirent qu'aux bains de Polyxa mourut La sœur Des dioscures? PREMIER CAHIER 55 Honnis soient les gens qui pensèrent que par Une reine sauvage Fut pendue Hélène au faîte d'un rempart Sur l'égéen rivage! Lorsque tout vieillit, se flétrit, tombe, meurt, Se dissout, s'évapore, La fille du Cygne a l'équitable honneur De respirer encore. En un monde avare, elle, immuablement Prodigue et radieuse, S'éjouit d'offrir à mon enchantement Sa bouche curieuse. Sous le peigne bleu, ses cheveux ont l'éclat Qu'ils avaient le soir pâle Que Pirithoos en chantant la vola Brûlante et virginale. Autour de son col s'enroule l'or léger Des adultères chaînes Qu'au jardin de Sparte y passa le berger Venu des mers troyennes, 56 Fernand Mazade De son buste insigne, en lys épanoui, Glisse au bas de la robe L'écharpe de feu que d'un geste ébloui Dénoua Déiphobe. Et de tout le corps d'Hélène une senteur S'exhale qui m'enivre Et donne à mes sens, à mon âme, à mon cœur L'héroïsme de vivre. RÉVEIL. Quand proche était mon cœur, j'avais l'esprit lointain. Mes pas glissaient le long de l'herbe encor mouillée Par le dernier aigail du magique matin. La Nymphe au bois dormant s'est soudain éveillée Sur le bord du ruisseau dont les fuyants soupirs Reflétaient des bouleaux la fourche et la feuillée. Les souvenirs qu'on croyait morts, les souvenirs De jeux et de ferveurs, d'amour et de bataille, Se mariaient dans l'air à de jeunes désirs. 58 Fernand Mazade Trois paons auréolaient une meule de paille; Et, laissant de sa laine aux épines des houx, Courait un bélier gris dont battait la sonnaille. La Nymphe au bois dormant, c'était peut-être vous. CONSEIL. Tu n'es pas l'enchanteur qui jadis transformait En vaches, en brehis, les panthères, les onces, Et qui, d'un marécage où les nègres s'enfoncent, Avait fait un neigeux sommet. Mais, puisque la nature à tes doigts le permetj Greffe des roses sur les ronces. PREMIER CAHIER 61 Une fenêtre s'ouvre à la façon d'un livre. L'auberge et le moulin recommencent de vivre. Un vieillard matineux d'air virginal s'enivre. Et, le cotillon court sur la jambe qui luit, Une enfant, dont le sein fut par l'avril séduit Et toute pâle encor des songes de la nuit, Apporte au puits banal une cruche de cuivre. EN SONGE. En songe j'ai vu, par l'humide fougère, Le long du bois taillis, Dans le soleil luire une jeune bergère Sans chien et sans brebis. Portant comme il sied la cape en laine sombre Avec le chapeau clair, Elle allait, d'un pas dont j'admire le nombre, Du côté de la mer. PREMIER CAHIER 63 Elle m'a frôlé de sa jeunesse chaude : J'ai senti la douceur Et la pureté de ses yeux d'émeraude Se poser sur mon cœur. D'une flûte, au bord attachant de ses lèvres, A chanté le métal; Et je n'entends plus passer dans les genièvres Les voix qui me font mal. COMPRENEZ-MOI. Presque à l'instant que vous descendiez la colline, La bergère m'a dit qu'un agneau s'est noyé Qui voulait, trop joueur, traverser la ravine; Mais un oiseau féerique et d'un nom oublié, L'oiseau dont la chanson ressemble à du silence, A commencé son nid dans un azerolier. Le zéphyre du soir aux treilles se balance. Jamais je ne me suis senti si vacillant Entre le beau regret et la tendre espérance. Premier cahier 65 Comprenez-moi. Sur l'arc de l'aqueduc croulant, Sur le village bleu, sur les toits de verdures, Le clocher paternel verse un angélus blanc; Et là-bas, dans la rade où saignent les brûlures D'un soleil invincible et qui pourtant se meurt, La mer, sous la forêt des mâts et des voilures, Allonge une entraînante et menteuse douleur. INDÉCISION. Entre le soir et l'aurore, Tel rêve vient nous charmer Qu'un autre rêve dévore : Et tout près d'aimer encore, Tu t'effarouches d'aimer. Il sonne une heure incertaine Au clocher de tes chansons; Mais du jour est sur la plaine. Regarde dans la fontaine S'entre-croiser les poissons. PREMIER CAHIER 67 Ne tente ni d'être sage Ni de croire à ton orgueil. Viens voir parmi le feuillage Onduleux à ton image Voltiger un écureuil. De l'heure brune à la blanche, Tu changeas trois fois de vœux. Iris, jonquille ou pervenche? Si tu sais vers qui je penche, Tu ne sais ce que tu veux. LE MIROIR. D'où venait-elle avec son miroir, Le jeune flot de sa chevelure Dansant au trot de l'étalon noir? Elle semblait chercher l'aventure. Elle a sauté dans l'herbe en riant : Et j'entendis frémir la ramure. Parmi ses yeux d'un vert orient Se reflétaient des yeux que j'ignore. Leur long regard était trop brillant. PREMIER CAHIER 69 Mais d'un élan que le printemps dore, Elle a levé le miroir vers moi : Et j'ai pu voir combien je l'adore. J'ai pris sa main avec un effroi A qui soudain l'espoir se mélange. Elle a changé ma bague de doigt. Et d'une voix où la bête et l'ange S'accorderaient pour notre salut, Elle m'a dit une histoire étrange! Elle m'a dit ce qu'elle a voulu. LE YARLET. Volontiers, ce matin, je croirais plus en vous Que je ne crois en moi-même, Et le varlet de cœur, le varlet rouge et doux, Je le prendrais pour emblème. Volontiers je verrais votre fragile main Faire un geste qui décide, Et je suivrais la courbe et l'ombre d'un chemin Où votre regard me guide. PREMIER CAHIER 71 Sans doute à quelque source où vient boire un ramier S'achèverait cette route; Et dans l'eau, qui déjà réfléchit un rosier, Vous vous mireriez sans doute. Puis, pour accompagner les paroles du vent Et celles de la fontaine, Vous me diriez tout bas le rondeau qu'en rêvant Chantait au varlet la reine. IMPRUDENCES. Comme sur le front de la dormeuse insigne, Brûle en vos cheveux quelque soleil obscur; Et dans votre sein coule un secret d'azur Comme dans le sein de la fille du Cygne. Dès qu'on apporta, garrottés tous les deux Et poussant des cris de peur et de colère, L'affreux sanglier et le loup sanguinaire, J'ai dit de couper les liens de ces gueux. LA CORBEILLE. Le crêpe que ta main vaniteuse et naïve Avait noué sur le rucher, Allons ensemble l'arracher. Ton éperdu désir de paraître fautive Prouve que tu n'as pas péché. Mais l'heure vient (elle t'approche, elle te touche) D'être coupable, ô mon amour! L'ombre se marie au labour : Sois modeste devant le soleil qui se couche : Incline-toi comme le jour. Et demain nous pourrons apporter à l'abeille L'offrande que tu ne sais pas. Renverse-toi parmi mes bras, Corbeille de jasmins et de roses, corbeille D'amaryllis et de lilas! LE MYSTÈRE. Comment se peut-il que sans se connaître On se livre, ainsi que nous l'avons fait, De toute sa force et dans tout son être? Quelle bête folle en nous triomphait? Quel ordonnateur de sages supplices Nous incendiait et nous étouffait? Je songe aux secrets graves que tu glisses Au sang d'un mortel que tu ne sais pas. Et pourquoi vins-tu m'offrir tes délices? 76 Fernand Mazade Qui dans ma maison suspendit tes pas? Lorsque je t'aurai prise jusqu'à l'âme, Sans mieux me savoir tu te reprendras. Je ne suis qu'un homme, et toi qu'une femme. OMBRE. Vous aimais-je? Mon cœur n'avait pas entendu Vos pas approcher sur le sable;. Et de ciel fasciné, je restais étendu Dans la lumière inépuisable. Les airs pâles tournaient sur un axe en cristal : La terre et l'eau paraissaient blanches. Nous étions aux grands jours où l'été provençal Achève d'effeuiller les branches. 78 FernancL Mazade Personne plus que moi n'avait chéri jamais La clarté, même furieuse. Déjà, pourtant (vous aimais-je?), je vous aimais : Je vous aimais, ô ténébreuse! Et sur mon front, mes yeux et ma bouche éblouis, Vos cheveux en guirlande sombre S'étant soudain et tous ensemble épanouis, J'ai compris la splendeur de l'ombre. JALOUSIE. Cette eau, qui sinue avec un bel ennui, Eût rafraîchi mieux tes nerfs, ton sang, tes moelles, Lorsque reviendra la pudeur de la nuit. Pourquoi n'as-tu pas attendu que s'étoilent Les cieux les plus bleus du monde et les plus doux, Avant de quitter l'un après l'un tes voiles? Des feux du soleil tu me connais jaloux Et de tous les yeux indiscrets qu'il éclaire A côté de nous et même loin de nous. 80 Fernand Mazade L'épervier te voit en regagnant son aire Et les pigeonneaux en sortant de la tour, Et le hanneton, la guêpe, l'éphémère. Et je souffre aussi de ce qu'ivres de jour Les saules tremblants, les acanthes hagardes, Le myrte qu'Hellas dédiait à l'amour, Le fourbe silence et le bruit te regardent. LA GROTTE. Un été frénétique, une amour véhémente M'accablent de leur feu pareil. Je mérite un moment de grâce reposante, A l'abri du double soleil. Jusqu'au déclin du jour, je quitterai la bouche Fine et profonde, les longs yeux, Les bras initiés et, splendeur de la couche, La poitrine et les flancs joyeux. 82 Fernand Mazade Près du verger sauvage où les nomades mordent Aux fruits marqués par les oiseaux, Je prendrai le chemin que les tamaris bordent Et qui finit sous les roseaux. Dans le golfe, où déjà s'arrêtent les sillages Saturés de brome et de sel, Viennent sur des reflets de mâts et de cordages S'éteindre des reflets de ciel. Au pied de la falaise, une grotte est ouverte. Elle a su mes rêves d'enfant : Et j'y respirerai la fraîcheur blanche et verte Que du large apporte le vent. LES CYGNES. Parmi l'azur du bassin, l'azur Du double cygne endormi se baigne Près des reflets d'un arbre et d'un mur. Les feux du soir tournent sur ton peigne Tandis, jolie et fiévreuse enfant, Que sous ma main ton petit cœur saigne. Le pastoureau suivi par un faon, La bergerette avec une chèvre Ont traversé l'herbage bouffant. 84 Fernand Mazade Dans la garigue où gîte le lièvre, Où le garenne a brouté le thym, La brise a pris l'odeur du genièvre. Sur le silence un bruit argentin S'élance, tombe et se décolore, Un bruit d'azur s'allume et s'éteint. La brise eut-elle un éclair sonore? Les cygnes bleus auraient-ils crié? Ton cœur longtemps va saigner encore Si e'est l'amour qui le fait saigner. LE ROSSIGNOL. Dès que (pour un instant, un seul instant peut-être) Vous avez de mon rêve interrompu le mal, Auriez-vous bu le vin fatal? C'est à peine si j'ose en vous te reconnaître, Enfant que j'avais vue au bosquet matinal. On ne distingue pas les lys des tubéreuses Parmi l'obscurité qui bouge autour de nous. Mais je vois trembler vos genoux Et que (vous soupirez) des cernes bleus se creusent Sous les longs cils de vos yeux noirs devenus fous. Que dans le vent du sud vos craintes s'évaporent : Et, puisqu'en ce moment tels sont vos vrais désirs, Préparez-moi des souvenirs! Pour éblouir la nuit d'étincelles sonores, Le rossignol attend la fin de vos soupirs. NAÏVETÉ. Perverse, sois naïve! Pour Que longtemps enpore m'enchante Le tourbillon de ton amour, Epie une étoile filante Et jette au milieu de son vol Le vœu qu'avep le fleuve chante Toute l'année un rossignol. CHATIMENT. Pour les belles-de-nuit prêtes à se rouvrir Les doigts aériens versent de la rosée. Sous les pins, les agneaux sont à la reposée : Et je sens tout à coup mon cœur triste à mourir. Le visage du ciel en souriant se mire Sur la rivière où rêve un cygne adonisé. D'un parfum de bonheur mon seuil est courtisé Et mon esprit surpris par le chagrin chavire. LE COTILLON VERT. Très vite en moi, trop vite la fête, L'ennui, le deuil s'étaient succédé. Homme hésitant, homme décidé Et de hasard comme un coup de dé, Je m'assoupis sur l'escarpolette. Il court, il vole à travers le buis, Par les œillets, le long de l'airelle, Une senteur de sève nouvelle Qui dans mon sang tout à coup rappelle Le jeune dieu des anciennes nuits. 90 Fernand Mazade D'amour j'entends parler à mon rêve La brune vierge en cotillon vert. Des cris d'aiglons égratignent l'air; A l'horizon palpite la mer; Et dans mon cœur la lune se lève. Mais le dieu part comme il arriva. Un autre songe écarte ce songe. Seule l'odeur d'œillets se prolonge. La vierge brune a dit un mensonge; Et de mon cœur la lune s'en va. LES RAMIERS, Ces oiseaux blancs qu'un chasseur vient de m'apporter, J'aimerais humblement vous en faire l'hommage, Saine Simplicité, sainte Simplicité. Des reines de l'esprit vous êtes la plus sage. N'êtes-vous pas aussi la plus belle? Pourquoi Ne m'avez-vous jamais montré votre visage? Sans doute n'ai-je pas observé votre loi : Je me suis pris dans les réseaux de l'artifice. Pardonnez-moi, déesse : ayez pitié de moi. 92 Femand Mazade Si c'est trop que mon âme entre à votre service, Laissez-la cependant quelquefois vous bénir, Daignez être parfois à ses efforts propice. J'espère qu'aujourd'hui vous voudrez accueillir (Avec, visible ou non, le geste qui protège), Claire Simplicité, mon moins trouble désir, Une coupe d'eau pure et ces ramiers de neige. PETIT NAVIRE. Sur l'eau qui mire Le rocher brun, Il était un Petit navire. Et ce petit, Sous les étoiles, A toutes voiles Il est parti. 94 Fernand Mazade Vers quelle terre A-t-il volé? Vers vous, Thulé? Vers toi, Cythère? Les gens du bord Sont-ils en fête, Ou si les fouette L'aile du nord? Et si les flatte La calme riuit, Ou si les suit Quelque pirate? Comme une fleur, Le mât de hune Au clair de lune Porte mon coeur. Des mers s'allongent Dans mes yeux clos. Les matelots, Ce sont mes songes. ESCALE. D'azur se sont lassés les vols des hirondelles. Les cerfs désaltérés ont quitté le miroir Des sources qui doubla leurs lascives prunelles. Sous les voûtes de feu qui s'étôilaieht de noir, Inconstant pour toujours aux belles infidèles, Je voulais être seul : je croyais le vouloir. Mais n'aurai-je plus soif? n'aurai-je ]3lbâ dés ailes? LANGUEUR. Surchargé de petites chaînes, Meurtri par de fragiles peines, Tu t'es étendu sur le sol Entre des lys et des verveines; Et ton geste élégant et mol Me rappelle le jour d'Athènes Où tu vis, près de deux fontaines, Un cygne sous un parasol. CONSCIENCE. N'avoir su qu'une fleur entre tous les jardins : Sur une seule chair avoir conduit ses mains, Avoir posé sa bouche, avoir cloué son âme. 0 bonheur sans secret, sans magie et sans drame, Bonheur de n'aimer qu'une femme, Combien je vous honore et comme je le plains Le mortel à qui les destins Ont dans le sang mis trop de flamme! CAPRICE. Entre les bois d'ormeaux et de lauriers, Derrière un flot d'écarlate farouche, L'astre du jour agonisant se couche. Nous sommes seuls. Salin comme ta bouche, Sourit le golfe à nos pas mariés. La barque mouille, apportant d'Italie Le luth fané, les rubanés tambours, Le collier d'ambre et le loup de velours. On peut jouer au théâtre d'amours L'acte de joie et de mélancolie. Sur le coteau va refleurir le pur Aldébaran que je te sais propice. A l'orient déjà la lune glisse Qui versera parmi notre caprice De l'ombre blanche et du parfum d'azur. HYMÉNÉE. Les pêcheurs ont fini de ramener leurs voiles. L'amphore de la nuit s'épanche sur les îles. Les calanques, les caps et le détroit se voilent. Mais les piliers du ciel et son dôme rutilent : Et, dans un tournoîment grandiose de squales, De conques, de coraux, de poulpes, de reptiles, Un prince de la mer épouse mille étoiles. LA MARGUERITE. Tandis que fuit le ruisseau lucide, Allons ensemble au penchant des prés, Autour du saule, autour du cyprès, Choisir la fleur qui, pourtant candide, Sait de l'amour les changeants secrets. Elle dira les vérités mêmes : « Je t'aime un peu, je t'aime beaucoup; Je t'aime un peu, beaucoup, comme un Belle, je t'aime autant que tu m'aimes A la folie, et puis plus du tout. » Ne pleure pas, ma douce petite. « A la folie », était-ce un plaisir? D'ailleurs, l'été donne du loisir. Les prés n'ont pas qu'une marguerite. Le désir part : il va revenir. LA GERBE. Les souffles de la mer se haussent aux fenêtres Des tours qu'un vol d'aiglons émeut. Ce pays vous plaira que foulèrent les reîtres : Pays de bruit, pays de feu. Plus que l'heure qui part, l'heure neuve témoigne Que me poursuivent vos attraits : Plus de vos yeux, plus de vos lèvres je m'éloigne, Et plus de mon rêve ils sont près. 102 Fernand Mazade Le matin que se sont quittés nos hras flexibles, Vous avez, d'un geste innocent, Quels germes de poisons attachants et terribles Semés aux sources de mon sang? Dès lors, au fond de moi votre vœu vous invite : Un vœu qui ne sait pas finir. Au fond de moi levait, croissait, mûrit, s'agite Votre désir de mon désir. C est le temps où du sud accourt la moissonneuse (« A la folie », a dit la fleur). La gerbe comme vous naïve et vénéneuse, Venez la cueillir dans mon cœur,. LA GUÊPE. Sans doute versiez-vous encore quelques larmes; Et les émois de votre sein à demi nu Ont sans doute ajouté des charmes à vos charmes. Et peut-être poussé par un vice ingénu, Porté, me semble-t-il, par des ailes de crêpe, Ce que nous appelions l'amour est revenu. Des bocages mouillés monte une odeur de cèpe. Le phosphore du golfe allume vos cheveux. C'est l'heure des fruits mûrs : c'est l'heure de la guêpe Prenez ma main : et dites-moi ce que je veux; L'IGNORANCE. Les célestes regards des mille nuits du monde, Les regards d'émeraude ou de saphir ou d'or, Sur le miroir des mers se reflètent encor, Sans qu'un seuld'euxpénètreau cœur del'eau profonde. En nul séjour, pas même au jardin où déjà Se penche le visage enivré de l'automne, Aucun de mes appels n'a réveillé personne Qui sût ma nostalgie et qui la partageât PREMIER CAHIER 105 Les abysses pourtant ont de la transparence, Et facile à toucher semble un cœur féminin. Mais est-il rien de sûr sinon mon ignorance? Puisse me la garder un propice destin! Le long des flots luisants, parmi la nuit stellaire, Un homme comme moi doit chercher le divin Qui ne reste divin que tant qu'il est mystère. SUR L'EAU. A mon pauvre être ivre de mystère C'est vainement que vous demandez Quand notre esquif touchera la terre. A la clarté somptueuse des Soleils couchants, je vois la guitare Près de la poupe"et le jeu de dés; Je vois une ancre avec une amarre; Je vois vos yeux et votre manteau : Et chaque objet m'enchante et m'effare; PREMIER CAHIER 107 Vous demandez où va le bateau Et si l'amour doit être cruelle Comme le feu, comme le couteau. Bientôt la barque abordera-t-elle? Je ne sais pas d'où souffle le vent. Saurais-je mieux pourquoi, jeune belle, Je vous ai fait pleurer si souvent? POUR L'AZUR. Mon inconstance même a besoin d'absolus. C'est sans peur que si haut ma faiblesse regarde; Et je ne pense pas que ce soit par mégarde Que je prends des chemins où l'on ne passe plus. Il arrive parfois qu'à mes pieds s'ouvre un gouffre. Alors, pour vous rejoindre, il faut un long détour. De cela se fatigue et se froisse l'amour. Si je vous fais souffrir (pardonnez-moi), je souffre. PREMIER CAHIER 109 A l'envers de mon front, dans le fond de mes yeux, Sourit, soupire et meurt un peuple de fantômes. Je n'ai pas le désir de fréquenter les hommes. Je rêve du plaisir de fréquenter les dieux. Ceux-ci n'ofïrent-ils pas à mes sens éphémères La merveille éternelle et diverse des ciels : Les flots du jour et, dans la nuit, les archipels Des étoiles, et les éclairs et les tonnerres? On eut peut-être tort quand on m'a reproché De ne me savoir pas courber comme une bête. 0 ma petite enfant, si j'ai haussé la tête, C'est que j'ai de l'azur voulu me rapprocher. CŒUR D'OCTOBRE. Le papillon et la libellule Ont retrouvé par le crépuscule La rose blanche et la rose sang. Le vent du sud revient en dansant. En souriant l'automne recule. Voici s'ouvrir le soir embaumé Comme un matin du milieu de mai. Un rossignol, renaissant dans l'ombre, Redit le chant magnifique et sombre A notre cœur de nouveau charmé. 0 notre cœur! faible cœur de femme, Frêle cœur d'homme, ô muscle où se trame Le tissu triste et beau de l'amour! Organe creux, si léger, si lourd, Gonflé de brume et scellé de flamme! SOIR. Maintenant je me dis que beaucoup trop d'ivresse, Trop d'atours et trop de détours, Trop d'allégresse et de tristesse et de paresse Auront compliqué nos amours. En vain demandez-vous de l'huile pour les lampes Dont vous ne cherchez plus l'ardeur. Le sang bleu que je vois vaciller à vos tempes N'a plus soif du sang de mon cœur. 112 Fernand Mazade Et vainement aussi, ma petite, voudrais-je Que dans le pré qui se flétrit Revînt des demi-dieux complices le cortège Avec l'eau du fleuve tari. Vos baisers ont déjà la fadeur de la cendre. Nous nous regardons sans nous voir : Et je cueille aux derniers replis d'un rêve tendre Un renouveau qui n'a qu'un soir. ÉPHÉMÈRES. D'une libellule Le destin est court. La belle-de-jour Passe au crépuscule. Au bois rajeuni Dormait la chevrette. Est-ce un gypaète Qui tua son nid? 114 Fernand Mazade Montait de l'ancrage Un chant du matin : Un chant qui s'éteint Au soir du pacage. As-tu vu couler L'eau de la fontaine Entre la varenne Et le châtelet? Riait une blonde Au moment du flux. Elle ne rit plus Depuis qu'a fui l'onde. Dans l'air du levant Dansait une rouge. Rien d'elle ne bouge : A changé le vent. Brûlait une brune Parmi l'aube en fleur, Et la flamme meurt Au clair de la lune. PREMIER CAHIER 115 Le temps qu'à s'ouvrir Met une tulipe : Vite se dissipe L'heure du plaisir. A L'INCONNU. Je te dédie un petit temple de feuillage : Un ciste couronné par les fleurs d'un sureau, Au seuil de la prairie où la chèvre sauvage Mène son chevreau. Accepte des gâteaux que pénètrent encore Les essences du feu qui parfuma le four Et nés d'un blé broyé dans un cuivre sonore Au lever du jour. PREMIER CAHIER 117 Je te donne une coupe en terre de Corinthe Autour de quoi j'ai peint des symboles de dieux Et qu'une bien-aimée a remplie, avec crainte, De vin radieux. Et, l'automne venu, je t'offrirai la figue (Sans faire s'envoler la guêpe qui la mord), Le brugnon, la grenade ouverts à la prodigue Reine de la mort. BERGER. Brebis, je sais que vous étiez blanches, Sans nul agneau, sans aucun bélier, Lorsque à ses soins je vous confiai. Il vous fait paître au bosquet d'oeillet Ou, quelquefois, au breuil de pervenches. Avant de mettre une cape en laine Et de venir en ce pays-ci, L'homme avait eu beaucoup de souci : Souci de gloire et d'amour aussi, D'amour fugace et de gloire vaine. Je lui dirai des chants illusoires. Il hochera le front lentement. Mes yeux suivront son geste indolent : Et je verrai dans le soir tombant, 0 mes brebis, que vous êtes noires. NATURE MORTE. Les tapis ont perdu leurs ondes. Les rideaux N'ont plus l'or de l'embrasse et l'azur de la frange. Des portraits de l'Amour restent seuls les bandeaux. Ai-je laissé la cage ouverte? La mésange S'est sans doute envolée au chant du couvre-feu. Le panier n'ira pas à l'extrême vendange. On ne voit près du lit que nul songe n'émeut, On ne voit près du lit d'une pudeur funèbre Qu'un flambeau renversé sur la table de jeu Entre le sept de cœur et le neuf de ténèbre. SCIENCE. J'ai voulu savoir ce qui te faisait battre Et de tes arrois mesurer la vigueur Et de tes émois pénétrer la langueur. Ton charme tragique et ton attrait folâtre, Je les ai tous deux approchés, ô mon cœur! Pourquoi rechercher ce qu'un cheveu de brune Recèle d'acide et renferme de sel? Le vœu de connaître est le désir cruel. Plus que les enfants qui demandent la lune Je plains les savants qui labourent le ciel. Qu'elle fût joyeuse ou qu'elle fût austère, J'ai dérangé l'ombre! et, croyant voir le jour, Les rêves se sont envolés de la tour. Moi qui me disais l'amoureux du mystère, J'ai trop regardé les jeux de mon amouri Au soir éclos, il me semble que je vous vois. Vous aurez, sous le front alourdi d'améthystes, Les yeux d'azur, les yeux étincelants et tristes, Les jeunes yeux cernés par des vœux d'autrefois. Vous viendrez sur ce tertre où mon cœur vous invente, Femmes qui m'aimerez quand je ne serai plus, Et vous regarderez, en aval des palus, S'allumer sur le golfe une rose mouvante< 122 Fernand Mazade Ce que je lui disais : qu'elle embaume la nuit D'angoisse tendre et de langoureuse espérance, Qu'elle est musique en même temps qu'elle est silence : Ce que je lui disais, femmes, dites-le lui. Et dites-lui (je crois qu'elle le sait) de dire A votre amour pour moi (l'amour sur ce tombeau) Que toujours j'ai choisi le rêve le plus beau Et que ce fut toujours le rêve qui déchire. TABLE DE CE CAHIER Du MÊME AUTEUR : . . 3 Premier cahier des amours 5 A mon grand frère 7 Avant de s'en aller 9 Cœur en guerre 12 Le retour 18 Les bateleurs 20 Le rêve 22 Flamme triste 23 Site 25 Le passé 26 Le parfum 34 Printemps 36 Fantômes 38 L'anneau 40 La harpe 42 Crépuscule 44 Détour 47 Hiver 49 Peut-être 50 124 TABLE DE CE CAHIER Le nom 52 Hélène 54 Réveil 57 Conseil 59 Le village 60 En songe 62 Comprenez-moi 64 Indécision 66 Le miroir 68 Le varlet 70 Imprudences 72 La corbeille 74 Le mystère. 75 Ombre 77 Jalousie 79 La grotte 81 Les cygnes 83 Le rossignol 85 Naïveté 86 Châtiment 87 Le cotillon vert 89 Les ramiers 91 Le petit navire 93 Escale 95 Langueur 96 Conscience 97 Caprice 98 Hyménée 99 La marguerite 100 La gerbe 101 La guêpe 103 L'ignorance 104 Sur l'eau 106 Pour l'azur 108 Cœur d'octobre i . HO tablé de ce casier 125 Soir 111 Éphémères 113 A l'inconnu 116 Berger 118 Nature morte 119 Science 120 Au soir éclos 121 Table de ce cahier 123 Nous avons donné le bon à tirer après correc¬ tions pour trois mille exemplaires de ce premier cahier le jeudi 15 février 1934. Le gérant: Marcel Péguy MAYENNE, IMPRIMERIE FLOCH. 22-2~1934 Dans les vingl-deux cahiers de leur quatrième série, année scolaire 1902-1903, nos cahiers ont publié : IV-l. — Anatole France. —l'affaire Crainquebille, — édi¬ tion complète • épuisé IV-2. — Moselly. —l'aube fraternelle épuisé IV-3. — Charles Péguy. — de Jean Cosle 20 » IV-4. — Antonin Lavergne. — la médaille. — la lettre de convo¬ cation 6 » IV-5. — Textes et commentaires. — Emile Zola 8 » IV-6. — Charles Péguy. — inventaire des cahiers .... 6 » IV-7. — Villon, Tolstoï, Tharaud, Gillet. — cahier de Noël. . . épuisé IV-8. — René Salomé. — Monsieur Matou et les circonstances de sa vie 20 » IV-9. — Charles Péguy. — almanach des cahiers pour l'an 1903 6 » IV-10. — Romain Rolland. — Vies des hommes illustres, — Beethoven épuisé FV-11. — Édouard Berth. — la politique anticléricale et le socialisme épuisé IV-12. — Vient de paraître. — Henri Bergson. — Introduction à la métaphysique, — conclusion 8 » IV-13. — cahier de courriers. — Félicien Challaye. — impres¬ sions sur Java. — François Dagen. — courrier d'Algérie 6 » IV-14. — Romain Rolland. -— Le temps viendra. — trois actes épuisé IV-15. — Pierre Baudouin. — la chanson du roi Dagobert. — première chansonnée 6 » IV-16. — Gabriel Trarieux. — les Vaincus. — Joseph d'Ari- mathée. — trois actes 8 t IV-17. — Charles Péguy. — Affaire Dreyfus. — Débats par¬ lementaires. — Intervention Jaurès 15 » IV-18. — Charles Péguy. — Affaire Dreyfus. — Cahiers de la Quinzaine. — Débals parlementaires 20 » IV-19. — Gaston Raphaël. —le Rhin allemand 8 • IV-20. — Charles Péguy. — Affaire Dreyfus. — Cahiers de la Quinzaine. — reprise politique parlementaire 20 » IV-21. — Edgar Quinet 8 » ÎV-22.— Maurice Kahn. — courriers de Macédoine. . . 6 » Nous mêlions le présent cahier dans le commerce; premier cahier de la vingt-qualrième série; un cahier blanc de 128 pages; in-16 grand fésus; nous le vendons dix francs.