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Afrique Équatoriale française — Un volume. Territoires africains sous mandat français (Cameroun et Togo) — Un volume. Madagascar — Un volume. Côte française des Somalis — La Réunion — Établissements français de l'Inde — Un volume. Établissements français dans l'Océanie — Nouvelle-Calédonie — Un vo¬ lume. Martinique — Guadeloupe — Guyane — Saint-Pierre et Miquelon — Un volume. EXPOSITION COLONIALE INTERNATIONALE DE PARIS COMMISSARIAT GÉNÉRAL INDOCHINE DOCUMENTS OFFICIELS Centre de Documentation sur l'Asie du Sud-Est et le % Monde Indonésien EPHE VI* Section fi SE Y \ m % id paris Société d'Éditions Géographiques, Maritimes et Coloniales 184.Boulevard Saint-Germain.( vi«i Indochine II iïSlfriffÉwil m l ICI US UC LU Ufin/juyjllt. UC.I tviuiv !' —-!• Palais du Gouverneur Général, a Saigon. Pl. i. ORGANISATION ADMINISTRATIVE ET POLITIQUE Au point de vue administratif, l'Indochine 1 est constituée par la réu¬ nion, sous un même gouvernement doté de la personnalité civile, de six pays jouissant eux-mêmes, sous certaines réserves, d'une personnalité civile distincte et indépendante, savoir : la Cochinchine, l'Annam, le Tonkin, le Cambodge, le Laos et le territoire de Kouang-Tchéou-Wan. Au point de vue politique et international, ces six pays se répartis¬ sent ainsi : une colonie proprement dite, la Cochinchine; deux pays de protectorat proprement dits, l'Annam et le Cambodge; deux pays de protectorat à administration mixte : le Tonkin et le Laos; une possession à bail : le territoire de Kouang-Tchéou-Wan. Ainsi, à l'exception de la Cochinchine, il existe dans les différentes possessions qui constituent cette union coloniale une administration indi¬ gène juxtaposée à l'administration française et contrôlée dans une cer¬ taine mesure par celle-ci. De plus, l'administration française comporte deux degrés principaux : une administration générale pour toute l'Union et autant d'administra¬ tions locales qu'il y a de pays distincts composant cette union, chaque administration locale comportant elle-même une administration provin¬ ciale et une administration municipale. 1. Décrets du 20 octobre 1911. 6 INDOCHINE I L'ADMINISTRATION FRANÇAISE g 1. — ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE L'INDOCHINE Elle ressortit à un Gouverneur général qui, d'une part, est en Indo¬ chine le seul mandataire qualifié du Gouvernement français, d'autre part, représente vis-à-vis de ce Gouvernement les intérêts généraux de l'ensemble des territoires dont la haute direction lui est confiée. C'est de la première de ces deux qualités que le chef de la Colonie tient sa mission essentielle, qui est d'assumer personnellement, sans que cette attribution spécifique et exclusive puisse être déléguée, la direction de l'évolution politique, sociale, financière et économique du groupement. Pour l'accomplissement de cette mission, il est investi non seulement d'une autorité hiérarchique sur les chefs d'administration locale qui collaborent avec lui à l'œuvre commune, mais encore de pouvoirs régle¬ mentaires propres qui découlent soit d'un mandat général et permanent (auquel cas il peut par décision spéciale déléguer tout ou partie de ces pouvoirs au secrétaire général du Gouvernement général ou aux chefs d'administration locale), soit de délégations spéciales l'habilitant expres¬ sément (et en principe à titre exclusif) à régler par voie d'initiative ou d'approbation certaines matières financières, administratives ou de police. En sa qualité de représentant des intérêts généraux de l'Indochine, la mission essentielle du Gouverneur général consiste à assurer, au moyen des ressources du budget général, la satisfaction de besoins supérieurs et d'intérêt commun auxquels aucun des budgets locaux ne pourrait suffire, et à guider d'après un plan d'ensemble des pays qui, ethnique- ment différents, n'en forment pas moins une unité géographique définie et un même groupement économique. Toutefois, à ce dernier point de vue, le Gouverneur général ne doit pas (sauf le cas où les intérêts géné¬ raux dont il a la responsabilité rendraient nécessaire une action directe de sa part) intervenir personnellement dans la conduite des affaires des administrations locales. Le Gouverneur général a comme collaborateur immédiat le secrétaire général du Gouvernement général qui, en vertu d'une délégation spéciale l'administration française 7 et permanente, règle toutes les questions d'ordre administratif, financier, économique ou autres que le Gouverneur général ne s'est pas réservées. C'est lui qui, en principe, assure l'intérim du Gouverneur général; le Ministre des Colonies peut, toutefois, désigner un autre intérimaire. En dehors du secrétaire général du Gouvernement général, les prin¬ cipaux collaborateurs du chef supérieur de la Colonie sont, au point de vue civil : le directeur des finances, le directeur de l'instruction pu¬ blique, le directeur de l'administration judiciaire, l'inspecteur général des travaux publics, le directeur des douanes et régies, le trésorier géné¬ ral, l'inspecteur général des mines et de l'industrie, l'inspecteur général des services sanitaires et médicaux, l'inspecteur général de l'agriculture, de l'élevage et des forêts, le directeur des postes, télégraphes et télé¬ phones, le directeur de la police et de la sûreté générale; au point de vue militaire, le général commandant supérieur des troupes et le comman¬ dant de la marine. Avec l'assistance du directeur des finances, auquel il a donné déléga¬ tion à cet effet, le Gouverneur général dispose d'un budget commun à toute l'Indochine, qui est le budget général, et administre un domaine également commun, qui est le domaine colonial. Quatre assemblées siègent auprès du chef de la Colonie. L'une, consul¬ tative, le Conseil de Gouvernement, composée de hauts fonctionnaires, ci-dessus mentionnés, du député de la Cochinchine et des délégués élus au Conseil supérieur des Colonies, l'assiste dans la préparation des actes administratifs; l'autre, le Grand Conseil des intérêts économiques et financiers, composé de représentants élus français et indigènes des di¬ verses assemblées locales et de quelques notabilités françaises et indi¬ gènes désignées par le chef de la Colonie, lui fait connaître les aspirations du pays : elle possède des attributions consultatives en toutes matières d'ordre économique ou financier qui lui sont soumises par le Gouver¬ neur général (pour certaines questions — projet de budget général no¬ tamment — cette consultation est obligatoire) et des attributions déli¬ bérantes en matière de contributions indirectes (sauf en matière de douane) ou taxes assimilées et d'emprunts. En matières militaire et maritime d'une part, en matière d'hygiène publique d'autre part, le Gouverneur général est assisté par deux assem¬ blées consultatives : le Conseil de défense et le Conseil supérieur d'hy¬ giène. INDOCHINE § 2. - ADMINISTRATION LOCALE DE CHACUN DES PAYS DE L'INDOCHINE A la tête de chacun des pays qui constituent l'Union Indochinoise se trouve un chef d'administration locale. Ces hauts fonctionnaires exer¬ cent leurs pouvoirs sous la direction supérieure et le contrôle du Gou¬ verneur général, sous les ordres directs duquel ils sont placés. Les chefs d'administration locale sont toutefois investis d'une autorité complète sur le pays confié à leur direction immédiate, et ils disposent à cet effet d'une entière initiative et de pouvoirs réglementaires de droit commun les habilitant à statuer sur les matières d'administration et de police non réservées à une autre autorité par des textes spéciaux. Quoique s'exerçant sur un champ plus restreint, leur pouvoir propre de décision est donc de la même essence que celui du Gouverneur général, c'est-à- dire d'essence politique, et il en résulte que tous les services civils fonc¬ tionnant sur leurs territoires respectifs, à l'exception du service judi¬ ciaire, leur sont subordonnés, même s'il s'agit de services techniques, et sauf en ce cas à éviter d'intervenir sans nécessité dans le domaine des instructions d'ordre technique que les agents de ces services reçoi¬ vent de leurs chefs directs. Les chefs d'administration locale peuvent recevoir délégation spéciale des pouvoirs réglementaires du Gouverneur général pour les matières à l'égard desquelles une telle délégation est possible. En Cochinchine, le chef de l'administration est un Gouverneur. Il est assisté de deux assemblées, l'une consultative, le Conseil privé, l'autre délibérante, le Conseil colonial. En Annam, au Cambodge, au Tonkin et au Laos, ce même chef d'administration prend le titre de Résident supé¬ rieur et est assisté de trois assemblées consultatives : l'une nommée le Conseil de Protectorat, les deux autres élues : le Conseil des intérêts français représentant l'élément français, la Chambre des représentants du peuple (au Tonkin et en Annam) ou l'Assemblée consultative indi¬ gène (au Cambodge et au Laos) assurant la représentation de l'élément indigène. Cette dernière assemblée existe seule au Laos, où ies deux premières n'ont pu encore être constituées. Lorsqu'il s'agit de questions d'ordre économique, les chefs d'administration locale peuvent et même parfois doivent prendre l'avis de certaines assemblées élues, qui sont l'administration française 9 les Chambres de Commerce et les Chambres d'Agriculture (Cochinchine et Tonkin) ou les Chambres mixtes de Commerce et d'Agriculture (Cam¬ bodge, Annam, Laos). Le chef de l'administration locale du territoire de Kouang-Tchéou- Wan porte le titre d'Administrateur en chef du territoire. Ce haut fonc¬ tionnaire est assisté d'un conseil consultatif indigène. Chaque chef d'administration locale exerce son autorité par l'inter¬ médiaire de services placés sous sa direction immédiate et exclusive, et ayant action seulement sur le pays intéressé. Chacun d'eux dispose d'un budget dit budget local, spécial au pays intéressé, et administre un do¬ maine local également spécial à ce pays. A noter, toutefois, que le bud¬ get du territoire de Kouang-Tchéou-Wan constitue simplement une an¬ nexe du budget général et que l'Administrateur en chef n'en est que l'ordonnateur secondaire. g 3. — ADMINISTRATION PROVINCIALE Elle est assurée sous la direction du chef de l'administration locale, par des administrateurs des Services civils qui sont chargés, chacun, d'une circonscription. Ces circonscriptions portent dans toute l'Indo¬ chine le nom de provinces. Les administrateurs qui les dirigent portent en Cochinchine le titre de « administrateur de la province de... », en Annam, au Tonkin et au Cambodge celui de « administrateur, résident de France à... », au Laos, celui de « administrateur, commissaire du Gouvernement à... ». Certaines régions du Tonkin et du Laos limitrophes de la frontière chinoise, ont été organisées en territoires militaires, dirigés par des officiers supérieurs prenant le titre de « commandant du territoire », mais placés, eux aussi, sous l'autorité administrative du chef du gouver¬ nement local. En Cochinchine, il existe vingt et une provinces : Bac-Lieu, Baria, Bentré, Bien-Hoa, Cap Saint-Jacques, Cantho, Chaudoc, Cholon, Gia- Dinh, Gocong, Hatien, Long-Xuyên, Mytho, Bach-Gia, Sadec, Soctrang, Tân-An, Tây-Ninh, Thudaumot, Travinh, Vinh-Long, plus les îles de Poulo-Condore. Le Tonkin comprend vingt-trois provinces : Bac-Giang (chef-lieu Phu- Lang-Thuong), Bac-kan, Bac-Ninh, Hadong, Haiduong, Hoa-Binh, Ha- 10 INDOCHINE nam (chef-lieu Phu-Ly), Hung-Yen, Kien-An, Lang-Son, Lao-Kay, Nam- Dinh,Ninh-Binh,Phuc-Yen,Phu-Tho, Quang-Yên, Son-La, Son-Tay, Thai- Binh, Thai-Nguyên, Tuyên-Quang, Vinh-Yen et Yen-Bay, plus quatre territoires militaires ayant respectivement leur chef-lieu à Moncay, Cao- Bang, Ha-Giang et Lai-Chau. En Annam il y a seize provinces : Binh-Dinh (chef-lieu Qui-Nhon), Binh-Thuân (chef-lieu Phan-Thiêt), Darlac (chef-lieu Ban-Me-Thuot), Ha-Tinh, Khanh-Hoa (chef-lieu Nhatrang), Kontum, Haut-Donnai (chef- lieu Dalat), Nghê-An (chef-lieu Vinh), Phan-Rang, Phu-Yên (chef-lieu Song-Câu), Quang-Binh (chef-lieu Dong-Hoi), Quang-Nam (chef-lieu Faïfo), Quang-Ngai, Quang-Tri, Thanh-Hoa, Thua-Thiên (chef-lieu Huê). Au Cambodge existent les treize provinces de Battambang, Kampot, Kandal (chef-lieu Phnom-Penh), Kompong-Cham, Kompong-Speu, Kom- pong-Thom, Kratié, Prey-Veng, Pursat, Stung-Treng, Kompong-Chnang, Soai-Riêng et Takeo. Au Laos il y a dix provinces : Attopeu, Bassac (chef-lieu Ban-Houei- Sai), Hua-Phan (chef-lieu Sam-Neua), Luang-Prabang, Saravane, Sa- vannakhet, Tran-Ninh (chef-lieu Xieng-Khouang) et Vientiane, plus un territoire militaire, le cinquième, ayant son chef-lieu à Phong-Saly. Le territoire de Kouang-Tchéou-Wan, en raison de sa faible étendue, n'est pas subdivisé en provinces. Dans certaines provinces très étendues et sur le territoire de Kouang- Tchéou-Wan ont été créées, dans le but d'en faciliter l'administration, des délégations ou centres administratifs : ces délégations ne constituent pas des circonscriptions autonomes. En Cochinchine, chaque chef de province est assisté d'une assemblée consultative : le Conseil de Province; au Tonkin et en Annam, ces assemblées, avec un caractère un peu différent, portent le nom de Conseils provinciaux de notables et, au Cambodge, de Conseils de Rési¬ dence. En Cochinchine, il existe dans chaque province un budget provincial. En Annam, au Tonkin et au Cambodge, ces mêmes budgets provinciaux ont été supprimés depuis plusieurs années; au Laos, ils n'ont jamais fonctionné. Il entre dans les vues de l'administration de les rétablir, dans un avenir prochain, dans tous les pays à l'exception du Laos. Ce rétablissement est en bonne voie de réalisation au Tonkin. Outre leurs fonctions administratives, tous les chefs de province et l'administration française 11 aussi la plupart des chefs de délégation exercent des fonctions d'ordre judiciaire (officier de l'état civil, officier de police judiciaire, etc.); cer¬ tains d'entre-eux sont même investis d'attributions judiciaires propre¬ ment dites. g 4. — ADMINISTRATION MUNICIPALE Il existe dans les villes de Saïgon, Hanoï, Haiphong, des municipalités administrées par un conseil municipal élu, présidé par un maire, assisté d'adjoints. Le maire de Saïgon est lui-même élu. Dans les autres muni¬ cipalités, un administrateur des services civils, nommé par le Gouver¬ neur général, en fait office; chacune d'elles possède un budget, un do¬ maine et des services propres . A côté de ces municipalités, dont le régime dérive d'une adaptation de la loi de 1884 1, existent dans certains centres importants (Cholon, Tourane, Phnom-Penh, Vientiane, Tchékam, Dalat, Nam-Dinh, Hai- duong, Vinh, Thanh-Hoa, Hué, Qui-Nhon, Bac-Liêu, Cantho et Rach-Gia) des organisations municipales moins complexes. Ces communes sont ad¬ ministrées par une commission municipale nommée et présidée par un administrateur des Services civils (généralement le chef de la province) ; elles sont également dotées d'un budget et d'un domaine propres. Enfin, en dehors des municipalités, la plupart des chefs-lieux de pro¬ vince de l'Indochine et, aussi, certaines agglomérations importantes, ont été érigés en centres urbains. Ces centres urbains qui n'ont ni assem¬ blée ni budget particulier (sauf celui de Luang-Prabang) 2 sont admi¬ nistrés par le chef de province au même titre que le reste de sa circons¬ cription, et ne s'en distinguent que parce que certains règlements de police y sont applicables, certaines taxes spéciales peuvent y être per¬ çues au profit du budget local du pays intéressé (sauf à Luang-Prabang, où elles sont perçues au profit du budget du centre urbain), et parce que les terrains situés à l'intérieur de leurs limites sont soumis à un régime de concession différent de celui qui régit les terrains ruraux. 1. Décret du 11 juillet 1908. 2. Arrêté du Gouverneur général du 30 août 1916. 12 INDOCHINE II L'ADMINISTRATION INDIGÈNE L'organisation de l'administration indigène et les relations existant entre cette administration et l'administration française différent suivant le statut des pays constituant la fédération que représente l'Indochine. La situation, à cet égard, d'un pays de souveraineté française, comme la Cochinchine, diffère de celle des pays de protectorat proprement dits, comme l'Annam et le Cambodge, des protectorats à administration mixte comme le Tonkin et le Laos, ou de la possession à bail de Kouang- Tchéou-Wan. § 1. — L'ADMINISTRATION INDIGÈNE EN COCHINCHINE En Cochinchine, l'Administration des chefs de province s'exerce dans sa plénitude, c'est-à-dire aussi bien à l'égard des indigènes que des autres habitants de la circonscription, et d'une façon directe : même en ce qui concerne l'administration particulière des cantons et villages de cette colonie, il n'existe pas d'administration indigène proprement dite, dirigée par des fonctionnaires indigènes selon des règlements indi¬ gènes; les chefs et sous-chefs de canton qui représentent les villages vis-à-vis de l'administration française de la Cochinchine, les conseils de grands notables qui administrent lesdits villages relèvent directe¬ ment de l'autorité des chefs de province et appliquent à leurs admi¬ nistrés des règlements français. l'administration française 13 g 2. - L'ADMINISTRATION INDIGÈNE DANS LES PAYS DE PROTECTORAT : ANNAM ET CAMBODGE a) Anna m. ORGANISATION DES POUVOIRS. Suivant la constitution traditionnelle de l'Empire, le chef suprême de l'administration est le Roi assisté d'un Conseil secret, ou Co Mat, dont la composition est variable. Au-dessous se trouvent les ministres ou Thuong Thu, chargés de l'exé¬ cution des décisions royales. Il y a six Ministères, qui sont les Minis¬ tères de l'Intérieur, des Finances, des Rites, de la Guerre, de la Justice et des Travaux Publics. Pratiquement, depuis l'établissement du Protectorat, le Conseil du Co Mat est composé des six Ministres, et se réunit en Conseil des Mi¬ nistres, sous la présidence du Résident supérieur, pour l'examen des affaires importantes. Les décisions administratives, les actes réglementaires (décisions ou ordonnances royales) du Gouvernement annamite, pour être rendus ap¬ plicables, sont soumis à l'approbation du Résident supérieur. Provisoirement et pendant la minorité et l'absence du Roi, ses pou¬ voirs rituels ont été confiés à un haut dignitaire de la Cour ayant le titre de Régent de l'Empire, et ses pouvoirs en matière d'administration proprement dite sont confiés au Résident supérieur, agissant d'accord avec le Conseil du Co Mat, et cela en vertu d'une convention intervenue à la suite du décès de Sa Majesté Khai-Dinh (6 novembre 1925). L'administration du Royaume est assurée par un corps de fonction¬ naires ou Mandarins, divisés en Mandarins civils et militaires. La hié¬ rarchie pour chaque ordre comprend neuf degrés, divisés chacun en deux classes. Les mandarins de l'échelon le plus élevé ont le titre de Colonne de l'Empire (Tu Tru). Ils sont au nombre maximum de quatre. Actuellement ce sont le Régent et des Ministres qui ont le rang de Colonne d'Empire. L'Administration indigène se divise en Administration centrale et en Administration provinciale. d4 indocHine ADMINISTRATION CENTRALE. Outre le Conseil du Co Mat et les divers Ministères déjà cités, les principaux organismes administratifs de la capitale sont : 1° Le conseil du Ton Nhon, ou des membres de la famille royale, sorte de conseil de discipline et tribunal pour les affaires où sont inté¬ ressés des membres de la famille royale. Ce conseil est présidé par le Résident supérieur, en principe, et effectivement par un membre de haut rang de la famille royale. 2° Le Do Sat Vien, ou Conseil de Censure chargé de contrôler les actes des fonctionnaires et de veiller à la stricte application des lois et règlements. Ce Conseil, très important autrefois, a vu son importance diminuer depuis l'établissement du protectorat, les autorités françaises étant chargées, en vertu des traités et accords, du contrôle général de l'administration indigène. 3° Le Noi Vu Phu ou Trésorerie royale, qui, avec le Ministère des Finances, est chargé de l'exécution du budget autonome du Gouverne¬ ment annamite. 4° Le Kham Thien Giam ou Observatoire, chargé de l'établissement du calendrier annuel et du choix des dates favorables pour les fêtes rituelles et autres actes importants. 5° Le Quoc Su Quan ou bureau des Annales. Enfin trois institutions sont plus strictement attachées à la personne de l'Empereur, ce sont : I) Le Noi Cac, ou Secrétariat Royal, qui assure la conservation des originaux des ordonnances et décisions royales, ainsi que leur notifi¬ cation aux services intéressés. Ce service est également chargé de l'ap¬ position du sceau royal sur divers documents importants. II) La maison militaire du Roi ou Thi Ve Xu, chargée du service inté¬ rieur du Palais, sous la Direction d'un haut Mandarin ayant titre de Ministre du Palais. III) Le Can Tin Ty, ou Intendance du Palais. Pour assurer les relations entre la Cour et la Résidence Supérieure, trois fonctionnaires français, ayant titre de Délégués du Résident Supé¬ rieur, sont accrédités auprès du Gouvernement Annamite (un pour le Ministère de la Justice, un pour les Ministères de l'Intérieur et de la Indochine II Cliché Service Aéronautique de V Indochine. Hanoi : au premier plan, la ville indigène ; au fond, la ville française. i'administration française 15 Guerre, un pour les Ministères des Finances, des Rites et des Travaux Publics), et sont chargés de préparer, de concert avec les services inté¬ ressés, les solutions des questions soumises à la décision du chef de l'Administration locale. ADMINISTRATION PROVINCIALE. Les Mandarins chargés de l'administration et aussi de la justice indi¬ gène, fonctions qui, en Annam, se confondent, sont : d'une part, les Mandarins provinciaux résidant au chef-lieu de la province et y cen¬ tralisant les affaires sous le double contrôle du Résident, qui représente le Protectorat, et des autorités annamites de Hué; d'autre part les Man¬ darins de l'Intérieur qui exercent leurs fonctions administratives au siège des circonscriptions, dénommées Phu, Huyên ou Chau, entre les¬ quelles est partagé le territoire de la province. Dans les provinces exclusivement peuplées ou en majeure partie peuplées d'Annamites, les Mandarins provinciaux sont : le Tong Doc ou le Tuan Phu (suivant l'importance de la province), chef annamite de la province; le Bo Chanh, chargé de l'administration proprement dite et des questions relatives aux impôts; l'An Sat, chargé de la Justice. Dans les provinces peuplées en majeure partie par des indigènes non annamites, il n'existe qu'un seul Mandarin provincial avec le titre de Quan Dao (Phang Rang, Kontum, Haut Donnai et, depuis 1930, Darlac). Les Mandarins de l'Intérieur, chacun dans sa circonscription, et sous les ordres des Mandarins provinciaux, règlent les affaires administra¬ tives et assurent l'instruction des affaires judiciaires. Dans les régions annamites, ils portent le titre de Tri Phu ou de Tri Huyên; dans les régions non annamites, ils sont appelés Tri Chau ou Tho Tri Huyên. Les cantons, entre lesquels est réparti le territoire de chaque phu, huyên ou chau, et les communes dont la réunion forme chacun de ces cantons sont administrés, les premiers par des chefs ou sous-chefs de canton (chanh tong et pho tong), les secondes par un conseil de notables, qu'un Ly Truong représente à l'égard des tiers. Aucune réglementation d'ensemble n'a été prise encore en Annam pour fixer le statut de ces agents, définir leurs attributions et déterminer la hiérarchie des nota¬ bles des villages, toutes choses régies par des usages locaux très anciens. INDOCHINE. T. II, 2 16 INDOCHINE b) Cambodge. ADMINISTRATION CENTRALE INDIGÈNE. Le Roi du Cambodge est assisté à Phnom-Penh par un Conseil des ministres présidé par le Résident supérieur, et composé de cinq minis¬ tres placés à la tête des départements suivants : Palais, Finances et Reaux-Arts (Présidence de la Commission permanente) ; Guerre, Ins¬ truction publique et Travaux publics; Marine, Commerce, Agriculture et Industrie; Justice; Intérieur et Cultes. Chacun de ces ministres est assisté d'un suppléant. Ce Conseil comporte en outre un secrétaire géné¬ ral et un secrétaire. Le Conseil des Ministres délibère hors la présence du Roi, auquel il soumet ensuite les mesures à prendre. Un fonctionnaire des services civils est délégué par le Résident supé¬ rieur auprès du Gouvernement cambodgien. Le budget de la liste civile, dont les recettes sont constituées en ma¬ jeure partie par une subvention du budget local, est préparé par le ministre du Palais et contrôlé par un fonctionnaire de la Résidence supéireure. Existent encore à la Cour de Phnom-Penh les trois organismes spé¬ ciaux suivants : un conseil de la famille royale, composé de huit princes ou princesses à la désignation de Sa Majesté et jouant le même rôle que le Ton Nhon Phu à Hué; un tribunal de conciliation chargé de régler à l'amiable toutes contestations civiles pouvant survenir entre les différentes personnes habitant le palais; une commission d'avance¬ ment du personnel du palais, composée du Secrétaire général du palais, du ministre du Palais et du contrôleur de la liste civile. ADMINISTRATION PROVINCIALE INDIGÈNE. Elle est assurée par un personnel dénommé Krom Rothabal, et entiè¬ rement distinct du personnel de l'ordre judiciaire. Les circonscriptions administratives indigènes du Cambodge sont, par ordre d'importance croissante, le khum, le khand, le srok, correspondant à peu près à la commune, au canton, au phu et huyên annamites, et le khet dont les limites se superposent exactement à celles de la circons- i,'administration française 17 cription résidentielle, à laquelle cette division administrative indigène se trouve assimilée. Les fonctionnaires indigènes sont nommés et promus par O. R. et affectés par décisions du ministre de l'Intérieur, ordonnances et déci¬ sions rendues exécutoires par le Résident supérieur. Ils appartiennent au cadre des kromokars et remplissent les fonctions de balat-khand, balat-srok, balat-khet (adjoint à un chef de Khand, de Khet ou de srok) et de chaufai-khand, ou au cadre des montrey et remplissent les fonc¬ tions supérieures (chaufai-khand ou chaufai-srok; chaufai-khet, inspec¬ teur des affaires administratives indigènes, suppléant de Ministre, et secrétaire du Conseil des Ministres). Les fonctions de bureaux sont rem¬ plies par des fonctionnaires subalternes appartenant au cadre des smiens. ADMINISTRATION COMMUNALE INDIGÈNE. La commune cambodgienne ou khum est administrée par un maire ou mékhum qui est le chef de la commune, y représente l'autorité ad¬ ministrative et exerce une autorité effective sur tous les notables ou kromchumnum dont l'assemblée constitue le Conseil du khum. Ces kromchumnum dont le nombre est proportionnel à celui des phum, ou hameaux que comprend le khum, sont élus par les contribuables du khum. Ils élisent dans leur sein le mékhum, lequel choisit parmi eux des chumtup ou adjoints. § 3. L'ADMINISTRATION INDIGÈNE DANS LES PAYS A ADMINISTRATION MIXTE : TONKIN ET LAOS a) Tonkin. Tandis que, dans les pays de protectorat proprement dits, l'adminis¬ tration indigène est distincte de l'administration française et coexiste avec elle, au Tonkin elles se trouvent réunies en la personne de leur chef supérieur qui, pour toutes deux, est le Résident supérieur, et, s'il en est ainsi, c'est parce que les pouvoirs de l'ancien Kinh Luoc (Vice- Roi représentant l'Empereur d'Annam au Tonkin) ont été dévolus à ce haut fonctionnaire par l'O. R. du 26 juillet 1897. Cette dévolution a natu¬ rellement rendu le contrôle exercé par l'administration française sur les 18 INDOCHINE actes des autorités indigènes de ce pays beaucoup plus étroit qu'en Annam. Il faut ajouter que, par suite d'une délégation qui lui a été consentie par le Gouvernement annamite (accord du 6 novembre 1925, mentionné supra), le Résident supérieur est actuellement qualifié pour légiférer au Tonkin par voie d'arrêté en toute matière indigène et sous le contrôle du Gouverneur général, sauf en matière constitutionnelle et rituelle. ADMINISTRATION CENTRALE INDIGÈNE. De ce qui vient d'être dit il résulte qu'elle se confond avec l'adminis¬ tration du Protectorat au Tonkin. ADMINISTRATION PROVINCIALE INDIGÈNE. Malgré le régime du Protectorat dont l'arrêté du Résident supérieur du 20 septembre 1929 qui constitue la nouvelle charte du personnel de l'administration et de la justice rappelle les principes, au Tonkin, en raison même du fait que le chef de ce protectorat représente le Roi d'Annam, les mandarins provinciaux collaborent plus étroitement qu'en Annam avec les chefs de province et ils n'ont de rapports avec la Cour de Hué qu'en ce qui concerne les questions rituelles : encore ces rapports ne peuvent-ils exister que par l'intermédiaire des résidents. Aux termes de l'arrêté organique précité, il y a désormais au Tonkin deux ordres de mandarins : les mandarins de l'ordre administratif, chargés de l'administration des provinces; les mandarins de l'ordre judi¬ ciaire (tu phap) chargés du service de la justice indigène. Le premier ordre de fonctionnaire se subdivise en deux groupes : 2°) Fonctionnaires du grade de tong dôc de 1™ classe au grade de tri phu ou tri huyên stagiaire inclusivement, servant dans le delta et certaines régions voisines; 2°) Fonctionnaires du grade de ton dôc de 1" classe au grade de tri-chau de 3e classe, appelés à servir exclusivement dans la haute ré¬ gion (provinces et territoires militaires de Rac-Kan, Cao-Rang, Lang-Son, Moncay, Lao-Kay, Hoa-Rinh, Son-La, Lai-Chau, Tuyen-Quang, Yen-Bay, Ha-Giang et partie des provinces de Bac-Giang, Ha-Nam, Phu-Tho et Thai-Nguyen). l'administration française 19 Les mandarins provinciaux (tong doc, tuan phu, bo chanh) assurent sous le contrôle de l'administrateur-résident l'administration de la pro¬ vince. Ils veillent à l'application des lois et règlements et au maintien de l'ordre public. Ils correspondent seuls directement avec les chefs de circonscription et réciproquement, sauf en cas d'urgence; ils surveillent et contrôlent ces fonctionnaires et les autorités communales et canto¬ nales. Les mandarins chefs de circonscription (tri phu, tri huyên, tri chau) sont chargés, sous le contrôle du mandarin provincial, d'assurer le res¬ pect des lois et règlements et l'exécution des ordres de l'autorité dans toute l'étendue de leur ressort. L'administration cantonale et communale indigène est assurée au Tonkin comme en Annam par des chanh tong et pho tong (chefs et sous- chefs de cantons) des ly truong et pho ly (maires et adjoints). Mais tandis que dans ce dernier pays l'administration provinciale a pu tou¬ jours éviter d'intervenir dans l'organisation de la commune annamite, au Tonkin cette importante question a fait l'objet d'une réforme. Les villages annamites constitués en communes y sont administrés par un conseil administratif dit conseil des tôc biêu assisté d'un conseil des ky mue. Le conseil des tôc biêu est chargé de l'administration de la commune et de la gestion des intérêts communaux. Le conseil des ky mue qui comprend les inscrits âgés de 30 ans au moins, titulaires de certains diplômes et grades de mandarinat, ou ayant exercé des fonc¬ tions cantonales et communales, donne obligatoirement son avis sur les décisions prises par le conseil des tôc biêu. Les communes les plus importantes (comptant au moins 500 inscrits) possèdent un budget communal dont l'exécution est surveillée par les autorités cantonales, les mandarins chefs de circonscription et les auto¬ rités provinciales. b) Laos. Aux termes de l'avis exprimé récemment par le Conseil de législation du Conseil supérieur des Colonies, le Laos devrait être considéré comme une Colonie. Cependant, l'ensemble de ce pays n'est pas soumis à un régime uniforme. Dans le Luang-Prabang subsiste un roi qui légifère et règle par ordonnances les affaires intérieures de son territoire. Cette 20 INDOCHINE partie du Laos constitue donc en fait un pays de protectorat spécial, dont l'administration a d'ailleurs fait l'objet d'une convention (24 avril 1917). Dans le reste du Laos il n'y a pas d'autorité indigène : le rôle qu'aurait joué celle-ci y est rempli directement par l'administration française. ROYAUME DE LUANG-PRABANG. Administration centrale indigène. — Le Souverain de ce Royaume est assisté d'un Hasanam Luang ou Conseil du Royaume qui constitue le Gouvernement royal. Ce conseil qui comprenait, avant la convention du 24 avril 1917, le Chao Maha Oupahat, Président, leurs Excellences Chao Ratsavong, Chao Ratsabout, Chao Ratsamphanthavong et Chao Ratsaphakhinay, n'est plus composé, depuis sa réorganisation par or¬ donnance royale du 15 octobre 1927, que de trois membres : Le directeur de l'Intérieur, Président du Conseil. Le directeur de la Justice et des Cultes. Le directeur des Finances, Travaux publics, Commerce et Agricul¬ ture. Ce Conseil se réunit sur la convocation de son président et délibère sur les mesures à prendre. Les délibérations sont soumises à l'appro¬ bation du Souverain. Les décisions du Souverain font l'objet d'ordon¬ nances royales qui sont rendues exécutoires par le Résident supérieur. Administration provinciale indigène. — Le personnel préposé à cette administration est le même que celui en service au Laos, mais l'appli¬ cation des règles concernant son statut est assurée, sur les propositions du Commissaire du Gouvernement, par voie d'ordonnances royales ren¬ dues exécutoires par le Résident supérieur. LAOS PROPREMENT DIT. De fait que l'administration indigène du pays n'avait jamais été orga¬ nisée (sinon sur le territoire relevant de la souveraineté du roi de Luang- Prabang), l'autorité française, n'ayant trouvé en vigueur que des règle¬ ments indigènes confus, purement locaux et mal définis, leur a peu à peu substitué les siens. Toutes les mesures concernant l'administration indigène font l'objet d'arrêtés du Résident supérieur pris sur la proposition des chefs de l'administration française 21 province. Cette administration est basée sur la division du pays en muong (circonscription territoriale indigène en pays laotien) et en kong (districts excentriques peuplés de races non laotiennes). En ce qui concerne les muongs, le personnel administratif indigène comprend : au sommet de la hiérarchie, des chao muong dont chacun est chef d'un muong et ne dépend que du Commissaire du Gouverne¬ ment ou de son délégué; comme échelons intermédiaires, des oupahat et des phousouei qui, sous les ordres du chao muong, sont chargés de l'établissement et du contrôle des rôles d'impôts, du recouvrement des taxes et de l'exécution des divers services du muong; enfin des samiens qui occupent des emplois administratifs inférieurs, notamment dans les bureaux. En ce qui concerne les kong, leur administration est confiée à des nai kong qui peuvent être assistés par des agents auxiliaires. Enfin les villages laotiens sont dirigés chacun par un nai ban, assisté d'un pho ban et conseillé par l'assemblée des anciens de la commune. Ces villages sont groupés en cantons dirigés par un tasseng. § 4. - L'ADMINISTRATION INDIGÈNE A KOUANG-TCHÉOU-WAN C'est par la convention du 27 mai 1899 que la Chine a cédé à bail à la France pour 99 ans les territoires limitrophes de la baie de Kouang- Tchéou-Wan et les îles de cette baie, en vue de l'établissement d'une station navale et d'un dépôt de charbon. Un décret du 5 janvier 1900 incorpora administrativement cette concession à l'Indochine en la pla¬ çant sous l'autorité du Gouverneur général de l'Union. Un arrêté du 27 janvier 1900, modifié ultérieurement par celui du 20 novembre 1905, y organisa ensuite l'administration et la plaça sous la direction d'un fonctionnaire portant le titre d'administrateur en chef du territoire. L'administration indigène a été maintenue autant que possible dis¬ tincte de l'administration française, mais la commune chinoise, ne cons¬ tituant pas comme en pays annamite un organisme solide, a tendance à perdre sa personnalité. A la tête de chaque village est placé un chef de village assisté d'un conseil de notables, qui a pour principale attribution la répartition de l'impôt global entre les habitants. Un groupe de villages constitue un district administré par un kong koc, fonctionnaire élu par les Conseils 22 INDOCHINE de notables et placé sous le contrôle de l'administration française. Le kong koc est l'intermédiaire qualifié entre les autorités françaises et la population : quelques-uns jouissent d'une autorité et d'un prestige consi¬ dérables. Un Conseil consultatif, constitué à raison d'un conseiller élu par dis¬ trict, intervient principalement pour le vote du budget et l'institution de nouveaux impôts. III RELATIONS ENTRE L'ADMINISTRATION INDOCHINOISE, LE GOUVERNEMENT MÉTROPOLITAIN ET L'ÉTRANGER | 1. •—- RELATIONS AVEC LE GOUVERNEMENT MÉTROPOLITAIN. Aux termes du décret du 20 octobre 1911, le Gouverneur général est le « dépositaire de pouvoirs de la République dans l'Indochine fran¬ çaise ». Il représente, à ce titre, un organe de décentralisation dont l'ac¬ tion est substituée dans la Colonie à celle directement exercée par le ministre des Colonies sur les possessions coloniales dites à gouverne¬ ment autonome; mais, en raison du mandat qui lui est ainsi confié, il est entièrement responsable devant le Gouvernement, représenté à son égard par le ministre des Colonies, de l'exercice de ses pouvoirs et des conséquences de ses décisions. C'est donc sous le contrôle et au nom de ce ministre qui, lui,- est responsable devant le Parlement, que le Gouverneur général accomplit les actes de sa haute fonction. Théoriquement, il résulte de ce principe que le Gouvernement peut, par un décret ou un arrêté ministériel, décider que les arrêtés à prendre par le Gouverneur général sur telle ou telle matière devront soit être soumis à l'approbation préalable du ministre, soit être approuvés par lui ou par le Président de la République dans un certain délai, sauf à de¬ venir caducs. Toutefois, depuis les décrets du 20 octobre 1911 qui ont modifié dans le sens d'une très large décentralisation les rapports exis¬ tant entre le département des Colonies et le Gouvernement de l'Indo¬ chine, le Ministère intervient assez rarement dans la réglementation L'ADMINISTKATION FI1ANÇA1SE 23 locale et laisse le plus souvent au Gouvernement général un pouvoir entier de décision à ce sujet. g 2. RELATIONS AVEC L'ÉTRANGER. Jusqu'en 1925, l'Indochine nommait des agents commerciaux dans les pays voisins. Par arrêté en date du 9 mai 1925, ce cadre a été supprimé. Le poste d'attaché commercial à San-Francisco, maintenu quelque temps encore en vue d'organiser aux Etats-Unis une propagande touristique en faveur de la Colonie, a été supprimé à son tour au début de 1930. L'activité des échanges commerciaux entre l'Indochine et les Pays où elle était représentée ne justifiait pas les lourdes charges imposées au budget général par l'entretien de ces postes qui, par ailleurs, se trou¬ vent toujours doublés dans les villes où ils étaient établis, soit par un agent commercial de France, soit par un consul. Les intérêts commer¬ ciaux de la Colonie ont donc été confiés à ces derniers qui déjà, sur d'autres points, se trouvaient en liaison avec elle. Quoique n'ayant pas de représentation propre, l'Indochine en effet est en contact permanent avec tous les postes diplomatiques et consulaires français d'Extrême-Orient qui lui font parvenir une documentation régulière. La plupart reçoivent dans ce but une aide financière impor¬ tante de la Colonie, soit sous forme de frais de représentation ou de subvention pour l'entretien de leur poste et la rétribution d'auxiliaires, soit encore par la nomination de fonctionnaires indochinois rétribués par la Colonie aux lieu et place d'agents de carrière émargeant au budget des Affaires étrangères. Il est à noter que l'Indochine est la seule de nos possessions dont le budget présente cette particularité. En matière diplomatique, le Gouverneur général est chargé de repré¬ senter le Gouvernement français vis-à-vis des autres puissances en Extrême-Orient. A ce titre, il a seul qualité pour correspondre directe¬ ment avec tous nos agents diplomatiques et consulaires en ces pays. Mais il ne peut engager aucune négociation diplomatique sans l'auto¬ risation du Gouvernement et les négociations ainsi engagées par lui ne deviennent exécutoires que si elles sont ultérieurement approuvées par le Gouvernement ou ratifiées par le Parlement selon le cas. Les établissements diplomatiques ou consulaires de France en Extrême-Orient avec lesquels le Gouverneur général a ainsi le droit 24 INDOCHINE exclusif de correspondre sont : en Chine et sous la direction de la Léga¬ tion de France à Pékin, la délégation des Affaires étrangères à Yun- nan-Fou, un consulat (Yunnan-Fou), une chancellerie consulaire (Mong- Tseu) et une agence consulaire (Ho-Kéou) au Yunnan; un consulat (Long- Tchéou) au Kouang-Si; un consulat à Hong-Kong; quatre consulats (Can¬ ton,, Hoi-How, Swa-Tow et Pak-Koi) au Kouang-Tong, un consulat général à Shanghaï; enfin cinq consulats à Fou-Tchéou, Han-Keou, Tcheng-Tou, Tien-Tsin et Tchung-King — au Japon et sous la direction de l'Ambassade de France à Tokio, deux consulats à Yokohama et à Kobé — en Corée, un consulat à Séoul — au Siam et sous la direction de la Légation de France à Bangkok, deux consulats à Oubone et à Xieng-Mai — dans les établissements anglais du détroit de Malaca, un consulat à Singapore — aux Philippes, un consulat à Manille — aux Indes Néerlandaises, un consulat général à Batavia — aux Indes anglaises, un consulat général à Calcutta et un consulat à Bombay — à Ceylan, un consulat à Colombo. § 3. — LES REPRÉSENTANTS ÉTRANGERS EN INDOCHINE. Etablie par sa situation géographique comme un observatoire avancé de l'Eurasie entre l'océan Indien et le Pacifique, l'Indochine ne saurait se désintéresser des problèmes qui se posent au point de vue politique, social et économique dans ce vaste continent et aussi dans les pays du Pacifique dont elle est si proche. Les principales puissances sont représentées dans l'Indochine fran¬ çaise. Elle-même entretient des rapports étroits avec les pays voisins, tant pour la défense de nos intérêts que pour le développement de nos oeuvres sociales et civilisatrices. Les représentants étrangers en Indochine comprennent soit des consuls de carrière, soit des agents consulaires. Ce sont : A Saigon : un consul général de Grande-Bretagne, un consul d'Alle¬ magne, des Etats-Unis d'Amérique, du Japon, un agent consulaire de Belgique, du Danemark, de Finlande, d'Italie, de Norvège, des Pays- Bas, du Portugal, de Siam, de Suède, de Suisse. A Hanoï : un consul général du Japon, un consul d'Allemagne, un agent consulaire de Belgique, d'Italie, du Portugal. l'administration française 25 A Tourane : un agent consulaire de Belgique. Les consulats d'Allemagne, fermés en 1914, ont été rétablis en 1929. Il faut enfin noter la création, prochaine sans doute, des consulats chinois prévus dans le traité sino-indochinois (convention du 16 mai 1930). L'attitude des ressortissants étrangers établis dans la Colonie n'a ja¬ mais provoqué aucune divergence de vues entre leurs consuls et l'auto¬ rité française, cette dernière ayant toujours entretenu avec les repré¬ sentants étrangers des relations parfaitement courtoises. Il n'existe pas en Indochine d'attachés commerciaux étrangers en titre. Néanmoins, la plupart des agents consulaires, étant en même temps directeurs de firmes commerciales, trouvent par leur situation même de grandes facilités pour favoriser les échanges commerciaux entre l'Indochine et les Pays qu'ils représentent. § 4. — l'indochine et les œuvres françaises en extrême-orient. Le budget général de l'Indochine pour l'exercice 1930 prévoyait comme contribution aux dépenses des légations, consulats et œuvres françaises à l'Etranger un total de 314.500 piastres. C'est à notre Colonie asiatique qu'incombe en effet la charge de soutenir un grand nombre d'œuvres et d'entreprises qui contribuent au rayonnement de la France dans tout l'Extrême-Orient, notamment — sans parler de sa participa¬ tion aux congrès et expositions du Pacifique — en Chine, au Japon et au Siam. En Chine, depuis la création des chemins de fer de l'Indochine et du Yunnan qui comptent 464 kilomètres de rail en territoire chinois, la pro¬ vince du Yunnan fait fréquemment appel aux techniciens français pour l'aménagement et l'équipement moderne de son territoire. C'est ainsi que l'aviation yunnanaise, essentiellement constituée par des appareils français, a été formée par des instructeurs français. De même, au Kouang-Si, la création d'une école d'aéronautique dont la direction serait confiée à des pilotes français est en projet; seules les difficultés politiques dont souffre cette province en ont retardé jus¬ qu'ici la réalisation. Le Se-Tchoan s'est également adressé au Gouvernement général de l'Indochine pour recruter un personnel de techniciens français en vue 26 Indochine A Haïphong : un agent consulaire de Grande-Bretagne, de Norvège, du Siam. de la création de lignes aériennes commerciales sur son territoire. L'Indochine assume d'autre part l'entretien (personnel et matériel) de cinq hôpitaux, à Yunnan-Fou, Mong-Tseu, Canton, Pak-Hoi et Hoi- Hao auxquels il faut joindre l'infirmerie consulaire de Long-Tcheou. La Colonie accorde également son appui aux œuvres françaises d'en¬ seignement en Chine, soit sous forme de subventions à des établisse¬ ments libres (œuvres scolaires du Yunnan, du Kouang-Si et de Hai-Nan), soit en assumant toute la charge d'établissements dont le personnel est détaché de ses services (Yunnan-Fou et Pak-Hoi). La situation géographique de l'Indochine a toujours conféré une im¬ portance particulière aux rapports diplomatiques qu'elle entretient avec la Chine. Un fait nouveau et significatif à cet égard s'est produit en 1928 : les traités sino-français de 1886, 1887 et 1895 étant arrivés à expiration, le Gouvernement général a envoyé à Nankin des experts chargés de le représenter à côté du ministre de France et de participer ainsi à la conclusion des nouveaux accords. Au Japon, le budget général prévoit des subventions assez impor¬ tantes pour certains établissements d'enseignement français : l'Athénée français de Tokyo, la Maison franco-j aponaise de Tokyo et l'Institut franco-japonais de Kyoto. Limitrophe du Siam par la plus grande longueur de ses frontières terrestres, l'Indochine entretient avec ce Royaume des rapports cons¬ tants, encore resserrés par la création de la Haute Commission perma¬ nente franco-siamoise du Mékong, instituée en vertu de la convention franco-siamoise du 25 août 1926, et chargée d'étudier et de soumettre aux deux gouvernements des projets d'accords sur toutes les questions relatives à la frontière fluviale qui sépare les deux pays. Les sessions de cet organisme international ayant eu lieu jusqu'à présent à Vien- tiane, le Résident supérieur au Laos a assumé, en vertu des textes orga¬ niques, les hautes fonctions de Président de la Commission. Au Siam également, les œuvres françaises reçoivent de la Colonie une aide efficace, sous forme de subvention à l'Alliance française au Siam, à l'hôpital Saint-Louis et à divers Etablissements français d'en¬ seignement. l'administration française 27 § 5. LE SERVICE DES AFFAIRES EXTÉRIEURES. L'importance sans cesse grandissante des relations de l'Indochine avec l'extérieur rendait nécessaire la création au Gouvernement général d'un organisme spécialisé qui s'en occupât uniquement. Le service des Af¬ faires extérieures, créé par un arrêté du 25 mai 1927 et rattaché à la direction des Affaires politiques, a dans ses attributions toutes les ques¬ tions de principe intéressant la politique indochinoise en Extrême- Orient, la politique française dans les Pays du Pacifique Nord, Est et Sud et dans ceux de l'Océan Indien, les affaires de chancellerie concer¬ nant ces pays, la presse étrangère locale. Une documentation intéres¬ sante peut ainsi être réunie au Gouvernement général et méthodique¬ ment exploitée en vue d'une politique d'ensemble cohérente, assurant à l'Indochine le rôle de premier plan qu'elle doit logiquement remplir dans le développement de l'influence française en Extrême-Orient. L'ARMÉE I. - ORGANISATION Les unités stationnées sur le territoire de l'Union indochinoise for¬ ment les troupes du groupe de l'Indochine. Elles sont placées sous les ordres d'un général de division, Commandant Supérieur des troupes, qui a rang de Général commandant de corps d'armée. Au point de vue du commandement territorial, l'Indochine constitue une région placée sous l'autorité du Général Commandant Supérieur et divisée en trois groupes de subdivisions. Les forces françaises en Indochine se répartissent de la façon sui¬ vante : a) La division Annam-Tonkin (D. A. T.), placée sous les ordres d'un général de division qui exerce en même temps son autorité sur le groupe de subdivisions de Hanoï, comprend deux brigades d'infanterie, soit : 5 bataillons européens; 1 bataillon mixte; et 8 bataillons indigènes. b) La division Cochinchine-Cambodge (D. C. C.), placée sous les or¬ dres d'un général de division commandant le groupe de subdivisions de Saïgon et le point d'appui de la Fotte « Saïgon-Cap Saint-Jacques », comprend une infanterie divisionnaire et une artillerie divisionnaire, soit : 3 bataillons d'infanterie européenne; 5 bataillons de tirailleurs indigènes; et 3 groupes mixtes d'artillerie. c) La brigade de Tong (B. T), placée sous les ordres d'un général de brigade commandant le groupe de subdivisions de Tong, comprend : 2 bataillons d'infanterie européenne; et 7 bataillons d'infanterie indigènes. l'administration française 29 d) L'artillerie d'Indochine, sous les ordres d'un général de brigade, comprend : 1 régiment d'artillerie à 4 groupes, faisant office d'artillerie de corps; et 2 directions d'artillerie chargées du service de l'armement et des constructions militaires. e) L'aéronautique d'Indochine, comprenant 4 escadrilles, sous les ordres d'un lieutenant-colonel. f) Le service de l'intendance et le service de santé, placés respective¬ ment sous l'autorité d'un intendant général et d'un médecin général. g) Enfin des unités ou des services spéciaux, tels que le service de la justice militaire, les compagnies de télégraphistes, le détachement de secrétaires d'Etat-Major, les sections de commis et d'ouvriers d'adminis¬ tration, le dépôt de remonte, les bureaux et les sections de recrutement, les unités de transition. II. — CONSTITUTION DES TROUPES Les troupes stationnées sur le territoire de l'Indochine se composent d'environ un tiers de militaires européens et deux tiers de militaires indigènes. 1° Européens. — Les Européens et assimilés servant en Indochine proviennent des corps d'infanterie coloniale et d'artillerie coloniale stationnés dans la métropole, du 1er régiment étranger, ainsi que des nationaux français et assimilés résidant en Indochine. Ces militaires constituent, en gros, les catégories suivantes : appelés et engagés par devancement d'appel du contingent local; les métis non reconnus résidant en Indochine sont incorporés dans les mêmes conditions que les jeunes gens du contingent local, sous réserve de s'engager avant l'époque de la révision à réclamer la nationalité fran¬ çaise à l'âge de la majorité légale et d'avoir été élevés pendant huit ans dans une famille ou une école française; engagés spéciaux du contingent métropolitain : ceux-ci ont la faculté de se faire libérer en Indochine sous réserve de justifier de moyens d'existence honorables; ils conservent, pendant deux ans après leur mis en congé libérable, le droit de se faire rapatrier aux frais de l'Etat; engagés et rengagés, à terme fixe ou résiliable, pour le service général 30 INDOCHINE des Colonies ou pour le service en Indochine exclusivement (si les inté¬ ressés, nés à la Colonie, y sont fixés à demeure) ; un certain nombre de militaires de cette catégorie proviennent des « vieilles Colonies » ou des « Quatre-Communes » de plein exercice du Sénégal. 2° Indigènes. — Le décret du 8 avril 1923 règle d'une manière uni¬ forme le recrutement des militaires indigènes dans les différents pays de l'Union Les modalités d'application de ce décret sont fixées par arrêtés du Gouverneur général et adaptées aux circonstances locales ainsi qu'aux conditions politiques et sociales des diverses races indochinoises. La durée du service des appelés est uniformément de trois ans. Les engagements sont en principe de quatre ans. Les montagnards ne peu¬ vent se recruter que par voie d'engagements dont la durée est limitée à deux ans. Les appelés perçoivent, au moment de leur incorporation, une prime de cinq piastres. Les engagés perçoivent une prime de quinze piastres par année après les trois ans de service auxquels ils sont astreints. Les montagnards, se recrutant uniquement par voie d'engagement, perçoi¬ vent une prime de quinze piastres par année dès la première année de leur service. Les militaires indigènes peuvent contracter des rengagements, renou¬ velables jusqu'à quinze ans de services; certains d'entre eux (adjudants- chefs et adjudants ou titulaires d'emplois spéciaux) peuvent contracter des rengagements après quinze ans de services. A l'exception de certains protégés français qui jouissent d'un statut particulier (Cambodgiens, montagnards de la haute région tonkinoise), tous les militaires indigènes sont astreints au service extérieur. La durée des séjours qu'ils accomplissent hors de leur Colonie d'origine est fixée à trois ans. Les militaires désignés pour servir à l'extérieur constituent des détachements de relève à destination de la métropole et du corps d'occupation de Chine. III. — ORGANISATION DÉFENSIVE Les régions-frontières particulièrement menacées par des incursions de bandes armées sont constituées en territoires militaires, dans les¬ quels les pouvoirs militaires et civils sont détenus par le même chef. Le 1.6 an matin, après deux jours de lutte au cours desquels les villages fortifiés situés en avant de Sontay, sur les bords du lleuve, étaient successivement tombés entre'nos mains, nos troupes {infanterie de marine, fusiliers marins, légion étrangère et tirailleurs algériens) prenaient définitivement position devant la ville.— A onze heures, elles étaient rendues aux points d'où elles devaient s'élancer aussitôt que le signal de l'assaut aurait été donné. Un feu des plus vifs fut alors ouvert sur la place tant par les canonnières embossées sur le fleuve que par l'artillerie de cam¬ pagne et dura jusqu'à cinq heures. — A ce moment le mur d'enceinte n'olfrait plus qu'un amas de térre et de débris sur lequel la colonne d'assaut s'éîança, renversant tout devant elle et ne faisant aucun quartier. Sontay était pris : pourtant la citadelle demeurait encore au pouvoir de l'ennemi. La nuit'arrivant, on ne pouvait songer à tenter un second assaut; seulement, les dispositions furent prises pour la continuation de la lutte. Mais le lendemain, la ville était vide de ses défenseurs : Pavillons noirs, Annamites, Chinois, tous avaient fui pendant la nuit. — Le 17 au matin, Sontay était occupé sans combat : C'est là un très brillant succès pour nos armes, mais qui ne nous a pas coûté moins de 85 hommes tués dont 4 officiers et 240 blessés dont 15 officiers. Quant aux pertes de l'ennemi, elles ont été considérables; sans compter l'effet moral qui est tel que la paix s'impose âprès COttô Vjctoirô IMAGERIE PELLERIN à ÉPTNAL Déposé La Prise de Sontay par l'Amiral Courbet, en 1883 (Imagerie d'Epinàl) Indochine :— Guerre du Tonkiu. PRISE DE SONTAY. — 16 et 17 Décembre 1883- Actualité. Ce sont : l'administration française 31 Au Tonkin. — Le 1er territoire militaire (Moncay) ; Le 2e territoire militaire (Cao-Bang) ; Le 3e territoire militaire (Ha-Giang) ; Le 4e territoire militaire (Lai-Chau) ; Au Laos. — Le 5e territoire militaire (Phong-Saly). L'organisation actuelle des territoires militaires résulte de l'arrêté du 16 avril 1908 dont les dispositions essentielles furent reproduites dans tous les textes ultérieurs. Les territoires militaires sont administrés, sous la haute direction du Résident supérieur, par des officiers supérieurs investis de toutes les attributions administratives et judiciaires conférées aux Résidents chefs de Province. Les Commandants de territoires militaires sont placés sous l'autorité du Général Commandant Supérieur pour toutes les questions ressortissant au commandement militaire territorial. La répression de la piraterie sur les frontières terrestres du Tonkin est assurée dans les conditions fixées par le règlement bilatéral du 7 mai 1896 pour l'exécution d'une police mixte sur la frontière sino- annamite. La frontière est divisée en un certain nombre de zones sou¬ mises chacune à la juridiction d'une Commission mixte, comprenant un commissaire français et un commissaire chinois. Les commissaires français (résidents ou commandants de territoires militaires) relèvent directement du Résident Supérieur au Tonkin; les commissaires chi¬ nois dépendent du Vice-Roi et du Gouverneur de la Province. Les organes d'exécution de la police frontière sont, de chaque côté de la frontière, des postes jumelés tenus par les troupes régulières et com¬ mandés par des officiers, délégués du commissaire de Police-Frontière. Les délégués français et chinois exercent, chacun sur son territoire, une surveillance active sur les rassemblements suspects, s'emploient à les disperser et se communiquent mutuellement les renseignements qu'ils reçoivent à ce sujet; ils en rendent compte au Commissaire dont ils dépendent. En Cochinchine, l'importance de la région de Saigon et du Cap- Saint-Jacques a rendu nécessaire la création d'un Commandement du point d'appui de la flotte « Saïgon-Cap-Saint-Jacques ». Ce comman¬ dement est confié au général de division commandant la division Cochin- INDOCHINE. T. II. 3 32 INDOCHINE chine-Cambodge qui, pour cette raison, est nommé à ces fonctions par Décret Présidentiel. L'organisation défensive du Point d'Appui com¬ prend des troupes à terre, de l'artillerie de côte, des dispositifs de défense des rivières et des organisations de défense contre les attaques aériennes. En cas de conflit, les forces défensives de la Colonie peuvent être renforcées par des réserves. Les réserves européennes sont constituées, comme dans la Métropole, par les Français résidant en Indochine qui sont encore soumis aux obligations militaires prévues par la loi de recrutement. Les réservistes indigènes sont classés en deux catégories, suivant qu'ils ont fait ou non du service actif; les premiers accom¬ plissent dans les réserves une durée de service égale à la différence entre quinze ans et la durée de leur service actif s'ils ne jouissent pas d'une pension proportionnelle, entre vingt-cinq ans et la durée de leur service actif s'ils sont pensionnés; les secondes sont susceptibles d'être appelés sous les drapeaux entre vingt et trente-cinq ans. Les réservistes indigènes sont soumis à des périodes d'exercice et à des revues d'appel. Les forces françaises en Indochine sont dotées d'un matériel iden¬ tique à celui des unités de la Métropole; toutefois, eu égard à leur taille, les tirailleurs indigènes sont armés du fusil modèle 1902, dit « indochinois ». Les mitrailleuses sont bâtées en vue de leur utilisation éventuelle dans des régions montagneuses. L'artillerie réunit du maté¬ riel de campagne hippomobile et automobile et du matériel de mon¬ tagne porté à dos de mulets. Le Commandement dispose en outre de chars de combat et d'autos-mitrailleuses. IV. - FORCES SUPPLÉTIVES Outre les troupes régulières, relevant directement de l'autorité du Général Commandant Supérieur, des forces de police concourent au mantien de l'ordre et de la sécurité intérieure. La Garde Indigène, dans les Pays Protégés; La Garde Civile, dans la Colonie de la Cochinchine; Les Partisans, dans les Territoires Militaires et provinces-frontières du Tonkin. La Garde Indigène est une force de police organisée en Brigades, chaque Brigade correspondant approximativement à une Province ou l'administration française 33 à un Territoire Militaire. L'effectif d'une Brigade, variable avec l'impor¬ tance du territoire sur lequel elle est stationnée, comprend, outre le cadre français, cent cinquante indigènes en moyenne. Les cadres fran¬ çais se recrutent parmi les anciens officiers et sous-officiers de 1 'armée active, agréés et nommés par le Gouverneur général; ils ont une hié¬ rarchie particulière. La Garde civile de Cochinchine ou Milice n'a pas de cadres français; son instruction militaire est faite par le personnel français de la Gen¬ darmerie coloniale. Les Partisans, employés pour la première fois par le lieutenant-colonel Pennequin en 1889, ont vu leur organisation sanctionnée en 1892, comme conséquence de la création des Territoires Militaires. Le colonel Gal- liéni fixa, de 1893 à 1896, les principes d'organisation et la méthode d'emploi de ces forces auxiliaires. Choisis par les autorités indigènes parmi les habitants aisés, énergiques et vigoureux, ils reçoivent de l'autorité militaire un fusil et des cartouches. Habitués au pays et au climat, combattant avec leurs procédés propres, sachant comme les pirates se rendre invisibles et ruser, les Partisans rendent d'appré¬ ciables services comme agents de renseignement et de sûreté, à condi¬ tion d'être employés dans leur région et de participer à la défense de leurs rizières et de leurs troupeaux. En période d'opérations, l'autorité militaire leur alloue une solde. V. — MISSION SOCIALE DE L'ARMÉE EN INDOCHINE Indépendamment du rôle de défense qui incombe avant tout à l'Armée, il serait injuste de passer sous silence les nombreuses manifestations de son activité dans le domaine économique et social. A côté des officiers chargés, dans les Territoires Militaires, de fonc¬ tions administratives et judiciaires, nous citerons : Le Service Géographique qui fut longtemps sous l'autorité directe du Général Commandant Supérieur et comptait alors à son Etat-Major. Devenu indépendant en 1926 et relevant directement depuis cette date du Gouverneur Général, ce Service compte encore plus de cinquante officiers et sous-officiers détachés hors-cadres; Le Service de l'Assistance Médicale auquel participent de nombreux médecins militaires; 34 INDOCHINE L'Aéronautique Militaire qui perfectionne sans cesse les liaisons aériennes intérieures et extérieures de la Colonie, assure en cas d'urgence le transport aérien des malades ou blessés graves, et exécute, pour le compte des Administrations et des particuliers, de nombreuses recon¬ naissances photographiques de but scientifique et économique; Le Service de l'Education Physique dans les Ecoles, qui doit être assuré par des moniteurs militaires, tant que la Direction de l'Instruc¬ tion Publique en Indochine ne disposera pas d'instructeurs suffisam¬ ment qualifiés pour prendre ce Service à sa charge. LA MARINE Placée sous le commandement d'un Capitaine de Vaisseau, la Marine en Indochine comprend les organismes suivants : a) SERVICES A TERRE I. — L'Arsenal de Saigon avec quatre directions : Constructions Navales, Intendance Maritime, Service de Santé et Travaux Maritimes. II. — L'Unité « Marine Saigon » qui englobe le Dépôt des marins indochinois (caserne Francis Garnier) et la Direction du Port. b) BÂTIMENTS I. — L'Escadrille des avisos de 2e classe. II. — Les canonnières de Côchinchine. III. — La Mission Hydrographique. SERVICE A TERRE L'Arsenal, situé au confluent de la rivière de Saigon et de l'Arroyo de l'Avalanche, possède l'outillage nécessaire pour la réparation des bâti¬ ments de guerre et de commerce. Deux bassins de radoub dont un de 150 mètres, un dock flottant de 350 tx, des ateliers à métaux et à bois, des magasins, etc. L'outillage, quelque peu désuet, se modernise cependant chaque jour, et des immeubles nouveaux sont en construc¬ tion pour remplacer les anciens locaux maintenant insuffisants. La Direction des Constructions navales, à la tête de laquelle est placé un Ingénieur en Chef du Génie Maritime, est chargée de l'exploitation 36 INDOCHINE de l'Arsenal. Plus de 1.000 ouvriers indigènes encadrés par des agents techniques, et dirigés par des ingénieurs venus de la Métropole, assu¬ rent cette exploitation. Les travaux exécutés sont très variés : réparations de bâtiments de guerre et de commerce, constructions neuves de bâtiments de petit tonnage : chaloupes, chalands, etc., tant pour le compte de Services publics que pour celui de sociétés privées. La Direction de l'Intendance Maritime, placée sous l'autorité d'un commissaire en chef de la Marine, directeur et ordonnateur secondaire des dépenses, comprend deux groupes: un groupe du matériel englobant les services des approvisionnements de la flotte, des subsistances, de l'habillement et des transports; et un groupe financier comprenant les services de la solde, de la centralisation financière et des pensions. C'est l'Intendance qui administre le personnel de la Marine, fait la liaison avec les services financiers de la Colonie, assure le ravitail¬ lement de l'Arsenal et des bâtiments en matériel naval, combustible, matières grasses, habillement et vivres. De plus, elle approvisionne les services de l'Intendance de la métro¬ pole pour certaines denrées coloniales, en particulier le riz et le poivre. La Direction du Service de Santé, à la tête de laquelle est placé un médecin chef de la Marine, assure le service médical de la Marine à Saigon. Elle dispose pour cela de l'Infirmerie de la caserne Francis- Garnier et de l'Ambulance de l'Arsenal. Outre l'administration des soins médicaux au personnel de la Marine, le service approvisionne les bâtiments en médicaments, et surveille l'application d'une hygiène et d'une prophylaxie particulièrement impor¬ tantes dans les pays chauds. De plus, un laboratoire d'analyse est annexé à l'Arsenal et est dirigé par un pharmacien-chimiste de la Marine. La Direction des Travaux Maritimes est placée sous l'autorité d'un Ingénieur de Direction de Travaux. Ce service, chargé de la construc¬ tion et de l'entretien des divers ouvrages et immeubles de la Marine, est particulièrement actif en ce moment, par suite de la modernisation de l'Arsenal et des constructions neuves nécessitées par l'arrivée pro¬ chaine de sous-marins à la Colonie. L'Unité Marine est sous les ordres directs d'un lieutenant de vaisseau. La caserne Fra,nçis-Garnier sert de dépôt aqx indigènes de plus eq l'administration française 37 plus nombreux qui s'engagent dans la Marine (143 en 1929. Les cadres, variables suivant les besoins, sont toujours au complet). C'est là que les recrues reçoivent les premiers rudiments de leur instruction mili¬ taire et nautique. De plus, la caserne reçoit, en subsistance, les équipages des bâtiments en réparation dans l'Arsenal, et les détachements de passage à Saigon par paquebots. La Direction du Port, munie de remorqueurs, de chalands et de tout le matériel nécessaire à cet effet, assure les mouvements des bâtiments de guerre et prête son concours au commerce local : prêts de matériel, passages au bassin de radoub, etc. BATIMENTS Les avisos de deuxième classe (« Inconstant », « Malicieuse », « Alerte ») sont utilisés pour des missions diverses à la mer : transport d'autorités, liaisons avec les forces d'Extrême-Orient, surveillance des côtes et protection de nos nationaux. Généralement, l'un de ces avisos est détaché au Tonkin. Les canonnières de Cochinchine (« Avalanche » et « Commandant- Bourdais ») remplissent en rivière le même rôle que les avisos à la mer. Elles naviguent et étudient le pilotage dans les arroyos de la région et dans le delta du Mékong. La Mission Hydrographique, commandée par un capitaine de frégate, comprend le « Lapérouse » et les deux bâtiments sondeurs : « Octant » et « Astrolabe ». Ces bâtiments complètent l'hydrographie de la côte (levés de plan et sondages) qui permettent d'établir les cartes marines. ORGANISATION JUDICIAIRE La diversité des races qui peuplent l'Indochine, la varité des régimes politiques auxquels elles sont soumises, ont exigé une organisation judiciaire complexe et conduit à la création de tribunaux français statuant soit en matière française, soit en matière indigène, et de tri¬ bunaux indigènes proprement dits. Chacune de ces juridictions a dû être dotée d'une législation spéciale mise en harmonie avec les néces¬ sités locales. Les tribunaux français sont compétents pour statuer soit en matière française, soit en matière indigène, dans toutes les affaires concernant les Français et assimilés, les sujets français, les Annamites originaires des concessions françaises, les protégés français étrangers au pays et les étrangers. Les tribunaux indigènes connaissent des affaires qui intéressent exclu¬ sivement des indigènes. JUSTICE FRANÇAISE La Justice française est rendue par des Cours d'Appel, des Cours criminelles, une Commission criminelle (au Tonkin), des Tribunaux de première instance, des Justices de paix à compétence étendue, des tribunaux résidentiels, des Justices de paix. Deux Cours d'appel siègent respectivement à Hanoï et à Saïgon, leur organisation et leur fonctionnement sont les mêmes que ceux des Cours de la Métropole. Chacune d'elles comprend un premier président, deux présidents de Chambre, des conseillers, un greffier en chef. Le Minis¬ tère public est représenté auprès de chaque Cour par un procureur général assisté d'avocats généraux et de substituts. l'administration française 39 Le ressort territorial de la Cour d'appel de Saigon comprend les territoires de la Cochinchine, du Cambodge, du Bas-Laos et du Sud- Annam; celui de la Cour d'appel de Hanoï, ceux du Tonkin, du Nord- Annam, du Haut-Laos et de Kouang-Tchéou-Wan. Ces Cours connaissent des appels formés contre les jugements rendus en premier ressort et en toutes matières par les tribunaux inférieurs. La Cour de Saigon statue en outre sur les appels interjetés contre les décisions des tribunaux consulaires de Cihne, sauf ceux du Yunnan dont l'appel est reçu par la Cour d'appel de Hanoï, compétente en matière civile, commerciale et correctionnelle. Les crimes commis dans le ressort de chaque Cour d'appel par des Français ou des étrangers sont jugés par deux Cours criminelles, sié¬ geant respectivement à Saigon et à Hanoï et composées de trois membres de la Cour d'appel, dont l'un préside, et de quatre assesseurs tirés au sort sur une liste de 60 notables français dressée chaque année par une commission spéciale. Les crimes commis par des Annamites, sujets français, ou des Asia¬ tiques assimilés dans le ressort de la Cour d'appel de Saigon sont jugés par cinq Cours criminelles siégeant à Saigon, Mytho, Vinh-Long, Cantho et Pnom-Peuh, composées de trois magistrats, dont un membre de la Cour d'appel, président, et de deux assesseurs désignés par voie du sort sur une liste de vingt notables indigènes, établie pour chacun des ressorts de ces cours criminelles. A Phnom-Penh, les assesseurs sont Cambodgiens. La Cour criminelle de Hanoï est présidée et composée de la même façon; sa compétence territoriale s'étend à tout le ressort de la Cour d'appel. Il y a pour toute l'Indochine une Chambre d'annulation qui siège à Saigon : elle est composée du premier président de la Cour de cette ville et des quatre plus anciens conseillers. Elle connaît des pourvois formés contre les jugements rendus en dernier ressort par les juges de paix, ou par les tribunaux statuant en matière de simple police, ou par les mêmes tribunaux statuant en matière civile indigène. Ses décisions ne sont susceptibles d'aucun recours. La Commission criminelle, juridiction d'exception, n'existe que pour le Tonkin; elle a été créée pour permettre d'assurer une répression plus rapide des crimes et délits intéressant la sécurité du protectorat ou 40 INDOCHINE le développement de la colonisation française, commis par des sujets annamites ou assimilés justiciables des tribunaux français. Dans ces cas, le Gouverneur général peut dessaisir la juridiction ordinaire et renvoyer l'affaire devant la Commission criminelle composée d'un Rési¬ dent de 1™ classe, président, du Résident de la province où le crime a été commis, d'un magistrat et d'un capitaine. La Commission procède à l'instruction et au jugement de l'affaire. Ses décisions peuvent faire l'objet d'un pourvoi devant le Conseil du Protectorat pour violation de la loi. Si le condamné ne se pourvoit pas, la sentence est exécutée dans les 24 heures. Si au contraire il déclare se pourvoir, le Gouverneur géné¬ ral, sur l'avis du Conseil de Protectorat, statue par simple arrêté et peut en cas de rejet, ordonner l'exécution immédiate. Si l'arrêt est cassé, l'affaire est renvoyée devant une autre commission spécialement dési¬ gnée à cet effet. Dans les centres les plus importants existent des Tribunaux de pre¬ mière instance constitués par un Juge unique, un magistrat du minis¬ tère public et un greffier. Dans les centres secondaires ont été instituées des Justices de paix à compétence étendue ne comportant qu'un seul magistrat qui cumule les fonctions du Siège et du Parquet. En dehors des territoires compris dans les ressorts des Tribunaux de première instance ou des Justices de paix à compétence étendue, la justice est rendue par les Résidents chefs de province, investis des fonctions de Juges de paix à compétence étendue. Ces trois catégories de juridictions ont les mêmes attributions : elles jugent, suivant les règles de leur compétence, les affaires civiles, les affaires commerciales là où il n'y a pas de Tribunaux de commerce, et les délits correctionnels. Des Tribunaux de commerce mixtes, composés du président du Tri¬ bunal civil et de deux Juges consulaires élus, fonctionnent dans les ressorts de Saigon, Hanoï, Haïphong et Phnom-Penh. Il existe à Saigon une Justice de paix ordinaire dont la compé¬ tence et le fonctionnement sont déterminés conformément aux règles qui régissent les Justices de paix de la Métropole. Les procès qui naissent entre les particuliers et les diverses adminis¬ trations publiques sont portés devant les Conseils du Contentieux admi- l'administration français» 41 nistratif de l'Indochine siégeant l'un à Hanoï et l'autre à Saïgon. Ces Conseils sont composés d'un magistrat du siège appartenant à la Cour d'appel, président, de deux administrateurs des Services civils licenciés en droit ayant au moins dix ans de services effectifs, conseillers, et d'un administrateur des Services civils, Commissaire du Gouvernement. Les Conseils du Contentieux administratif tiennent deux séances par mois. Leurs décisions peuvent faire l'objet de recours en Conseil d'Etat. A la tête de l'organisation judiciaire est placé un directeur de l'Admi¬ nistration judiciaire nommé par décret sur la proposition du Gouver¬ neur général, et choisi parmi les premiers Présidents ou les Procureurs Généraux du cadre de l'Indochine. Il exerce toutes les fonctions, il a toutes les attributions administratives qui étaient autrefois dévolues au Procureur général de l'Indochine en sa qualité de chef du Service judiciaire. Il remplit le rôle de conseiller juriste du Gouvernement général et assure l'unité de direction nécessaire à la bonne marche du service. Il est le chef du Service de la Justice indigène au Tonkin, JUSTICE INDIGÈNE En Cochinchine il n'y a pas de tribunaux indigènes, ce sont les juri¬ dictions françaises qui statuent et appliquent en matière civile les lois et coutumes indigènes, et en matière répressive le Code pénal métropo¬ litain, modifié à l'usage des indigènes par le décret du 31 décembrè 1912. Il a été récemment créé des Justices de paix indigènes dont la com¬ pétence est analogue à celle des Juges de paix français. Les Juges de paix indigènes connaissent des affaires qui concernent exclusivement des Annamites ou assimilés. Au Tonkin, la Justice indigène est assurée sous le contrôle du direc¬ teur de l'Administration de la Justice en Indochine, chef de la Justice indigène au Tonkin, par un personnel spécial de mandarins judi¬ ciaires qui est placé à ce titre, comme les mandarins administratifs, sous l'autorité des Résidents chefs de provinces et du Résident Supérieur au Tonkin. La réforme entreprise à la suite des critiques soulevées par le mau- 42 INDOCHINE vais fonctionnement de la justice mandarinale aboutit à l'élaboration de quatre codes (organisation judiciaire, procédure civile, procédure pénale, lois pénales) qui entrèrent en application dès 1918. L'organisa¬ tion judiciaire comprend : a) Dans chaque circonscription, un tribunal de premier degré, cons¬ titué par un juge unique, qui est chef administratif de la circonscrip¬ tion; il connaît des contraventions de simple police et, en matière civile et commerciale, des affaires de peu d'importance; il a en outre des attributions analogues à celles des officiers de police judiciaire; b) Des tribunaux de deuxième degré composés de l'administrateur de la circonscription, président, assisté du plus haut fonctionnaire indi¬ gène de la province ; ils connaissent des contestations civiles et com¬ merciales, des délits correctionnels et des crimes; c) Un tribunal de troisième degré constitué par la 2e Chambre de la Cour d'appel, le Président étant assisté d'un conseiller et d'un manda¬ rin annamite de l'ordre judiciaire ayant le grade de Tông Dôc. Cette juridiction connaît des appels des jugements rendus en premier ressort par les tribunaux provinciaux de second degré, des demandes en annu¬ lation formées contre les jugements rendus en dernier ressort par les tribunaux de premier et de deuxième degré, enfin des demandes en révision, dans les conditions indiquées par le Code pénal, des règle¬ ments de compétence et des renvois. Au Cambodge une nouvelle organisation judiciaire complète fonc¬ tionne depuis 1922. Elle comprend : 1° Des Justices de paix; le juge de paix est soit un magistrat, soit un fonctionnaire administratif; il connaît des affaires de simple police, des affaires civiles peu importantes; il est officier de police judiciaire; 2° Des tribunaux de première instance établis au chef-lieu de chaque circonscription résidentielle; ils sont composés d'un juge et d'un gref¬ fier; ils connaissent, en matière civile, sans appel, des litiges dont le montant n'excède pas cent piastres et, sous réserve d'appel, des demandes indéterminées ou supérieures à cent piastres; en matière pénale, ils jugent en dernier ressort les contraventions de police, et, à charge d'appel, les infractions correctionnelles; 3° Une juridiction d'appel siégeant à Phnom-Penh, composée de trois magistrats, dont l'un préside, et d'un greffier. Sa compétence territo- l'administration française 43 riale s'étend à l'ensemble des territoires du Royaume. Elle connaît en matière civile des appels contre les décisions rendues en premier ressort par les tribunaux inférieurs; en matière pénale des appels formés contre les jugements correctionnels rendus par les tribunaux de pre¬ mière instance. Ses décisions ne peuvent être attaquées que par la voie de l'annulation. 4° Une juridiction criminelle dont le siège est à Phnom-Penh mais qui peut exceptionnellement se réunir au chef-lieu d'une circonscrip¬ tion. Elle est constituée par trois magistrats de la juridiction d'appel dont l'un préside, deux assesseurs tirés au sort sur une liste de notables cambodgiens et un greffier. Sa compétence territoriale s'étend à l'en¬ semble des territoires du Royaume. Elle connaît des infractions punies de peines criminelles. Ses décisions ne peuvent être attaquées que par la voie de l'annulation; 5° Enfin, une juridiction d'annulation constituée par trois magistrats dont un préside, et un greffier. Elle joue un rôle analogue à notre Cour de Cassation; elle statue en droit et non en fait; elle rejette les pour¬ vois formés contre les décisions concernant des procédures régulières et conformes au droit; elle les admet dans le cas contraire. Les magistrats cambodgiens sont nommés au concours et sur présen¬ tation de certains diplômes. Un magistrat français, placé hors cadre à la disposition du Résident Supérieur au Cambodge, exerce les fonctions de Conseiller Juriste du Protectorat auprès du Gouvernement cambodgien; l'ensemble du Ser¬ vice judiciaire cambodgien est placé sous son contrôle. En Annam ce sont les mêmes fonctionnaires qui sont chargés concur¬ remment de diriger l'administration et de rendre la justice. La seule législation applicable est le code de Gia Long et les différentes ordon¬ nances royales. Les matières civile et pénale ne se différencient pas. Le tri huyên juge toutes les affaires de la circonscription, de quelque impor¬ tance qu'elles soient. Toutes ses décisions sont soumises à l'appréciation du mandarin chef de la province (Tuân Phu ou Tông Dôc) qui con¬ firme, infirme ou amende, et transmet au Résident qui formule ses observations par écrit. Puis l'affaire est envoyée au ministre compé¬ tent qui statue à son tour et fait approuver sa décision par le Résident Supérieur. Dans les affaires particulilèrement graves, le dossier est sou- 44 Indochine mis au Roi qui peut toujours évoquer devant lui telle affaire qu'il juge à propos. Au Laos, la Justice a été organisée par arrêtés du Gouverneur géné¬ ral. Des codes élaborés en tenant compte des us et coutumes ont été mis en application en 1923. Le Résident Supérieur au Laos est le chef de la Justice indigène. Il existe au Laos : 1° Des tribunaux de premier degré, constitués par un juge-président assisté de deux assesseurs et d'un greffier; en matière civile et commer¬ ciale ils jugent en premier et dernier ressort lorsque l'objet du litige ne dépasse pas cinquante piastres et, à charge d'appel, les demandes plus importantes; en matière pénale, ils connaissent des affaires correc- ionnelles en premier ressort seulement et des contraventions en pre¬ mier ou dernier ressort, suivant qu'ils prononcent l'emprisonnement ou l'amende; 2° Des tribunaux de deuxième degré établis au siège de chaque pro¬ vince, et composés de l'administrateur président, assisté d'un assesseur indigène ayant voix délibérative et d'un greffier; en cas de partage, la voix du président est prépondérante. Ces tribunaux connaissent un appel des causes jugées en premier ressort par les tribunaux de pre¬ mier degré, lis jugent en premier ressort : a) Les affaires civiles et commerciales où sont parties certains digni¬ taires; b) Les contraventions et les délits commis par ces derniers; c) Les affaires criminelles, avec l'assistance d'un deuxième assesseur qui n'a pas voix délibérative; 3° Un Tribunal supérieur d'appel et d'annulation siégeant à Vien- tiane, composé d'un magistrat des Parquets généraux ou des Cours d'appel de l'Indochine, détaché au Laos, président, et de deux asses¬ seurs, l'un le directeur des Bureaux de la Résidence Supérieure, l'autre an haut fonctionnaire laotien; le chef du 2e bureau remplit les fonc¬ tions de greffier. Cette juridiction connaît : à) En appel et sous réserve, de tous les jugements rendus en premier ressort par les tribunaux de second degré en matière civile, commer¬ ciale et criminelle; b) En annulation, des jugements rendus en dernier ressort par les tribunaux de premier et de second degré. l'administration française 45 La voie de l'annulation n'est ouverte que pour incompétence, excès de pouvoir ou violation des lois laotiennes. La convention par laquelle le Gouvernement chinois a cédé à bail à la France le territoire de Kouang-Tchéou-Wan prévoit « qu'il sera admi¬ nistré pendant 99 ans par la France seule ». L'organisation judiciaire de ce territoire a fait l'objet de divers arrêtés du Gouverneur général qui ont établi les juridictions suivantes : 1° Au premier degré, un juge chinois qui connaît en dernier ressort des affaires civiles et commerciales jusqu'à la valeur de cent piastres, et des contraventions et délits qui ne comportent pas condamnation à la prison; 2° Au second degré, un tribunal mixte composé d'un fonctionnaire, président, de deux assesseurs indigènes et d'un greffier. Ce tribunal connaît de toutes les contraventions de police passibles de peines d'em¬ prisonnement et des infractions correctionnelles ou criminelles; il est aussi juge d'appel des décisions rendues en premier ressort par le tri¬ bunal de premier degré. Ses sentences ne peuvent être exécutées qu'après approbation d'une commission composée de l'Administrateur en chef, président, du Juge de paix à compétence étendue, de l'administrateur- adjoint de Tché-Kam et de deux juges chinois. Cette commission peut, pour tout motif de fait ou de droit, annuler ou réformer les jugements soumis à son examen; elle statue sur pièces et sa décision, qui est défi¬ nitive, est substituée de plein droit au jugement annulé ou réformé. Les juges chinois de ces différentes juridictions sont choisis par l'administrateur en chef du Territoire sur une liste de dix notables et nommés pour trois ans. ORGANISATION FINANCIÈRE Depuis le décret du 31 juillet 1898, l'organisation financière de l'indo- chine est la suivante : L'Union Indochinoise, composée d'une colonie, la Cochinchine, et de quatre pays de protectorat ou de régime mixte : l'Annam, le Tonkin, le Cambodge et le Laos, a une pei'sonnalité propre, elle a un budget, appelé budget général de l'Indochine, alimenté par des impôts indirects. Chacun des pays de l'Union a, lui aussi, sa personnalité et son bud¬ get, appelé, par rapport à celui de l'Indochine, budget local; ce budget est alimenté par des impôts directs. LES DÉCRETS DU 20 OCTOBRE 1911 Les principes posés en 1898 ont été consacrés par les quatre décrets du 20 octobre 1911, qui constituent la charte politique et administrative de l'Indochine. Le premier de ces décrets définit les attributions dévolues au Gouver¬ neur général. Le second réglemente le Conseil de Gouvernement, c'est-à-dire l'assemblée consultative destinée à assister le Gouverneur général dans l'exercice de ses fonctions. Ce deuxième décret doit être rapproché du décret du 4 novembre 1928, qui a organisé un Grand Conseil des Inté¬ rêts économiques et financiers ayant, en certaines matières, notamment au point de vue fiscal, des attributions délibératives. Le troisième organise le Gouvernement de chacun des pays de l'Union Indochine II. Pl. III. Cliché Gouv. Général Indochine, Arrachage du riz avant le repiquage, en Cochinchine l'administration françaisè 47 (colonie de Cochinchine ayant à sa tête un gouverneur, pays de protec¬ torat où un résident supérieur exerce les pouvoirs qu'il tient des traités en vigueur). Le quatrième décret adapte l'organisation financière de l'Indochine à son organisation administrative. ÉTUDE SOMMAIRE DE L'ORGANISATION FINANCIÈRE DE L'INDOCHINE (4e DÉCRET DU 20 OCTOBRE 1911) Les recettes et les dépenses du Gouvernement général et des divers pays composant l'Indochine française sont groupées dans les budgets suivants : 1° budget général; 2° budgets locaux des pays énumérés ci-dessus; 3° budget du territoire de Kouang-Tchéou-Wan (annexe du budget général) ; 4° budget de l'Exploitation des Chemins de fer (annexe du budget général) ; 5° budget des fonds d'emprunt (annexe du budget général). Ces budgets sont groupés et administrés conformément aux règles suivantes : Le budget général groupe les dépenses d'intérêt commun à l'Indo¬ chine. Il est alimenté par : 1° Les recettes des services mis à sa charge; 2° Le produit des régies et des contributions indirectes; 3° Le produit des droits de toute nature perçus à l'entrée et à la sortie dans toute l'Indochine sur les marchandises et les navires, à l'excep¬ tion des droits consentis au profit des Chambres de commerce ou des municipalités. Le budget général peut recevoir des subventions de la Métropole ou être appelé à verser des contributions à celle-ci. Le montant de ces subventions et contingents est fixé annuellement par la loi de finances (art. 33 de la loi du 15 avril 1900 et décret du 20 octobre 1911). Le budget général peut recevoir également des contributions des divers budgets locaux ou leur attribuer des subventions. Le montant de ces contributions ou subventions figure dans le budget; il est arrêté défi¬ nitivement par l'acte approuvant le budget. Le budget général est arrêté par le Gouverneur général en Conseil INDOCHINE. T. II. 4 48 INDOCHINE de Gouvernement, après consultation du Grand Conseil des Intérêts économiques et financiers, et approuvé par décret. Au cas où cette approbation ne serait pas intervenue à la date de l'ouverture de l'exer¬ cice, le Gouverneur général a qualité pour rendre le budget provisoi¬ rement exécutoire par arrêté pris en commission permanente du Conseil de Gouvernement. Les actes modifiant le budget sont arrêtés et rendus exécutoires dans les mêmes conditions que le budget lui-même. Les taxes et contributions indirectes autres que les droits de douane sont établies par le Gouverneur général en Conseil de Gouvernement, mais après avoir été votées par le Grand Conseil des Intérêts écono¬ miques et financiers, qui a sur ce point des attributions délibératives. Le mode d'assiette et les règles de perception sont approuvées par décret. Quand aux droits de douane à l'importation, leur fixation en Indochine, pays assimilé à la Métropole au point de vue douanier, est réglée par la loi du 13 avril 1928, qui prévoit des modalités d'adapta¬ tion. Le Gouverneur général est ordonnateur du budget général. Il peut déléguer les crédits du budget général au Gouverneur de la Cochin- chine, aux Résidents supérieurs et à l'administrateur du Territoire de Kouang-T chéou-W an. Quant aux divers pays de l'Union, le décret du 20 octobre 1911 a confirmé qu'ils possédaient leur autonomie financière sous les réserves déterminées ci-après : les budgets locaux de la Cochinchine, de l'An- nam, du Tonkin, du Cambodge, du Laos et de Kouang-Tchéou-Wan sont alimentés par les recettes propres aux territoires de ces colonies ou protectorats, à l'exception de celles attribuées au budget général ou aux communes et aux Chambres de commerce. Ils pourvoient à toutes les dépenses autres que celles inscrites au budget général ou aux budgets des municipalités ou des Chambres de commerce. Les budgets de l'Annam, du Tonkin et du Cambodge sont établis par le Résident supérieur en Conseil de Protectorat, après discussion devant le Conseil des Intérêts français économiques et financiers. Au Laos, aucun de ces Conseils n'existant, le budget est établi par le Résident supérieur seul. En Cochinchine, le budget est voté par le Conseil colo¬ nial et arrêté par le Gouverneur en Conseil privé. Les chefs d'administrations locales sont ordonnateurs de leurs bud- l'administration française 49 gets; l'administrateur en chef de Kouang-Tchéou-Wan est ordonnateur secondaire du budget annexe de son territoire. Le mode d'asssiette, la quotité et les règles de perception des impôts, taxes et redevances de toutes natures profitant aux budget locaux du Tonkin, de l'Annam et du Cambodge sont, sous réserve des droits des souverains protégés, établis par le Résident supérieur en Conseil de protectorat, après consultation obligatoire du Conseil des intérêts français économiques et financiers; au Laos, ils sont, sous les mêmes réserves, établis par le Résident supérieur seul. Les arrêtés pris par ces fonctionnaires ou les ordonnances royales qui les remplacent sont soumis à l'approbation du Gouverneur général en Conseil de Gouver¬ nement. Aucune perception ne peut être effectuée avant que cette appro¬ bation soit intervenue. Pour Kouang-Tchéou-Wan, le mode d'assiette, les quotités, les règles de perception des impôts, taxes et redevances de toute nature sont éta¬ blis par le Gouverneur général en Conseil. En Cochinchine, colonie française dotée d'un Conseil colonial, celui-ci vote les impôts, et ses délibérations sont approuvées par le Gouverneur général en Conseil. Les budgets annexes sont établis en vertu des mêmes règles que les budgets auxquels ils sont annexés. Il existe en outre en Indochine des budgets provinciaux et munici¬ paux. CONTROLE DU BUDGET (décret du 30 décembre 1912) Si les règles générales relatives aux finances indochinoises sont éta¬ blies par le 4e décret du 20 octobre 1911, les détails de la préparation, de l'exécution et du contrôle du budget sont réglementés par le décret du 30 décembre 1912, code financier commun à toutes les colonies. Contrôle. — Dans chaque colonie, le Ministre des Colonies peut orga¬ niser le contrôle des dépenses engagées pour le service local et celui de l'Etat. L'agent chargé de ce contrôle est nommé par décret; en Indochine cet êô tfrSOCaiNE agent est, en vertu du décret du 23 mars 1907, le Directeur du Contrôle financier. En outre, tout projet d'arrêté ou de décision ayant une influence sur les finances de la colonie doit être communiqué au directeur du Contrôle financier avant signature. Les projets de budget doivent être visés par lui (décret du 23 mars 1907 et décret du 30 décembre 1912, articles 354 et suivants). Les inspecteurs des Colonies en mission exercent en outre leur contrôle, conformément aux instructions générales du service et aux instructions spéciales qui leur sont données par le Ministre. La comptabililté administrative des ordonnateurs est contrôlée par le rapprochement de ses résultats avec ceux des écritures du trésoriei- payeur. Ce rôle incombe au Conseil placé auprès de chaque Gouverneur général, Gouverneur ou Résident supérieur. A cet effet, une commission de trois membres choisis dans le Conseil est nommée par le Gouverneur: elle reçoit communication des comptes administratifs et des comptes des comptables, appuyés des pièces justificatives. Les procès-verbaux de la Commission, énonçant le résultat des com¬ paraisons qu'elle a dû établir, sont examinés et ratifiés par le Gouver¬ neur en Conseil, et mis à l'appui du compte définitif de l'exercice qui est transmis aux ministres des Colonies et des Finances. Quant aux comptables, ils sont soumis, comme les ordonnateurs, au contrôle du directeur du Contrôle financier et de l'Inspection des Colo¬ nies. En outre, leur situation de caisse et de portefeuille est vérifiée par un fonctionnaire désigné par le Gouverneur général, et constatée par un procès-verbal. Le Trésorier-Payeur est tenu de vérifier inopinément, aussi souvent que possible et au moins une fois par an, les caisses et les écritures des Trésoriers particuliers, des préposés du Trésor et des per¬ cepteurs de la Colonie. Enfin, les comptables sont soumis à un contrôle judiciaire (Cour des comptes ou Conseil privé). RECETTES DU BUDGET Les trois derniers comptes administratifs établis font apparaître, pour le budget général, les rendements suivants pour les impôts, taxes et revenus divers. l'administration française 51 1926 1927 1928 Service des Douanes et Régies Piastres. 61.929.482 00 Piastres. 74.156.713 61 Piastres. 74.855.343 07 Service de l'Enregistrement, des Do¬ maines et du Timbre 5.092.265 68 7.343.389 24 7.376.392 08 Exploitations industrielles 2.909.809 82 3.262.678 69 3.934.601 21 Intérêts et revenus de capitaux 963.655 56 736.880 73 959.955 09 Produits des services administratifs.. 319.086 43 507.865 73 601.067 35 Produits divers 2.677.741 62 1.520.119 34 1.679.227 68 Total des recettes ordinaires 73.892.041 11 87.527.647 34 89 406.586 48 Recettes extraordinaires (prélève¬ ments sur la caisse de réserve). 6.625.000 00 1.550.388 00 4.800.000 00 80.517.041 11 89.078.035 34 94.206.586 48 LES BANQUES INDOCHINOISES Au premier rang des banques indochinoises vient la banque de l'In¬ dochine, société anonyme au capital de 72.000.000 francs. Cette société a, en Indochine, le privilège de l'émission des billets de banque en vertu du décret du 21 janvier 1875. Renouvelé en 1888 puis en 1900, ce privi¬ lège est arrivé à expiration le 21 janvier 1920 et a été, depuis cette date, renouvelé provisoirement par décrets de six mois. Aux termes de la Convention du 20 janvier 1920, modifiée par celle du 27 février 1921, la banque de l'Indochine s'est engagée à servir une redevance au Gouvernement général de l'Indochine sur toute la partie de sa circulation fiduciaire excédant le triple de son encaisse métallique. En outre, le total des billets en circulation ne doit pas être supérieur à 175 millions de piastres. Un projet de loi portant renouvellement du privilège d'émission de la banque de l'Indochine a été adopté par la Chambre des Députés, le 2 février 1931 et par le Sénat le 6 mars. Aux termes de cette loi, le privilège de l'émission des billets concédé à la banque de l'Indochine est prorogé de vingt-cinq ans, pour être exercé en Indochine, dans les établissements français de l'Océanie, la Nouvelle-Calédonie, les établis¬ sements français de l'Inde, la côte française des Somalis. Le capital de la banque est porté à 120 millions de francs par la création de 96.000 52 INDOCHINE actions nouvelles, dont 8.000 réservées à l'Etat et 40.000 aux colonies où la banque doit exercer son privilège. La redevance versée sur la circu¬ lation fiduciaire, et qui ne pourra être inférieure à 20 millions de francs par an, sera employée à la création et au fonctionnement du crédit agricole et des institutions destinées à favoriser le développement de l'agriculture dans ces colonies, auxquelles la banque devra en outre consentir diverses avances sans intérêt. La banque de l'Indochine effectue aussi toutes les opérations des banques ordinaires, et c'est une très importante banque d'affaires, dont l'action s'étend sur tout l'Extrême-Orient, et particulièrement sur la Chine. Les principales banques privées exerçant leur activité en Indochine sont la banque Franco-Chinoise pour le commerce et l'industrie, la so¬ ciété Financière Française et Coloniale, la Hongkong Shanghaï Banking Corporation, la Chartered Bank of India, Australia and China, la Futien Bank, la China and Southern Bank Limited, la Yokohama Specie Bank Limited, etc. MONNAIES L'unité monétaire de l'Indochine française est la piastre qui est sta¬ bilisée en fait au cours de dix francs depuis la convention passée entre le Gouvernement français et la banque de l'Indochine les 16 et 18 no¬ vembre 1929. Cette stabilisation a été établie en droit par le décret du 31 mai 1930, aux termes duquel la piastre indochinoise est constituée par 655 milligrammes d'or au titre de 900 millièmes. Les monnaies en usage sont la piastre métallique d'argent, au titre de 900 millièmes, et des pièces divisionnaires d'argent de 20/100 de piastre et 10/100 de piastre (20 « cents » et 10 « cents ») au titre de 680 millèmes. La sapèque en laiton n'a pas de régime légal, sa valeur varie dans les divers pays de l'Union; au Tonkin, elle est acceptée pour un demi-cent. Les billets émis par la banque de l'Indochine sont de 100, 20, 5 pias¬ tres et 1 piastre. Leur convertibilité en or est assurée aux porteurs et à vue, l'administration française 53 DOMAINE Le texte organique du domaine en Indochine est l'arrêté du Gouver¬ neur général en date du 15 janvier 1903, modifié par l'arrêté du 4 mars 1912. Le domaine comprend le domaine public et le domaine privé. DOMAINE PUBLIC. Le domaine public se compose de l'ensemble des choses qui ont pour destination d'être asservies à l'usage ou à la protection de tous, et sur lesquelles la puissance publique exerce sa souveraineté. Il embrasse notamment les voies de communication et leurs dépendances, les ports maritimes, les rivages de la mer, les ouvrages destinés à la défense du territoire et leurs dépendances, les lignes télégraphiques et télépho¬ niques, les voies ferrées et leurs dépendances. DOMAINE PRIVÉ. Le domaine privé est réparti entre l'Etat, l'Indochine (domaine colo¬ nial), et les différents pays de l'Union indochinoise (domaines locaux). a) Domaine de l'Etat. Le domaine de l'Etat comprend les arsenaux, casernes, hôpitaux, ma¬ gasins, prisons, champs de manœuvre, champs de tir et généralement tous établissements militaires ne concourant pas matériellement et direc¬ tement du territoire. b) Domaine de l'Indochine. Le domaine privé de l'Indochine ou domaine colonial comprend : 1° Les immeubles qui sont occupés par le Gouvernement général et les services généraux, et ceux qui ont été ou seront acquis pour son compte, soit à titre gratuit, soit à titre onéreux, aux frais du Budget général; 2° Les biens des personnes qui décèdent sans héritiers ou dont les successions sont abandonnées; 54 INDOCHINE 3° Les objets déposés dans les greffes des tribunaux, dans les lazarets et dans les bureaux de douane, les colis confiés aux entrepreneurs de roulage et de messageries, les sommes versées dans les caisses des agents des postes et les valeurs déposées ou trouvées dans les boîtes et guichets des bureaux de poste lorsque ces objets, sommes et valeurs, ne sont pas réclamés par les ayant-droit dans les délais réglementaires; 4° Les objets et valeurs dont la confiscation est prononcée par les tribunaux. c) Domaines locaux. Dans chacun des pays de l'Union indochinoise, le domaine local com¬ prend : 1° Les immeubles occupés par les services locaux et ceux qui ont été ou seront acquis pour son compte, soit à titre gratuit, soit à titre oné¬ reux, aux frais du budget local; 2° Les terrains vacants et sans maîtres; 3° Les bois et forêts sous réserve des droits de propriété et d'usage régulièrement acquis; 4° Les lais et relais de la mer, les îles, îlots et atterrissements qui se forment dans le lit des fleuves navigables ou flottables. DOUANES ET RÉGIES Depuis 1898, date de la création de l'Union Indochinoise par le Gouverneur général Doumer, l'administration des Douanes et Régies est chargée de percevoir en Indochine les impôts indirects ressortissant aux droits de douane et aux taxes de régies. Par décret du 27 juillet 1930, le service des Douanes et Régies a été placé sous les ordres du Direc¬ teur des Finances de l'Indochine. Jusqu'à ces derniers temps, la loi de 1892, qui formait la base du régime douanier colonial, était encore en vigueur dans ses dispositions essentielles, bien qu'elle ne fût plus adaptée aux conditions économi¬ ques. Par cette loi, l'Indochine était rangée dans la catégorie des colonies dites assimilées : les produits métropolitains étaient admis en franchise en Indochine et, réciproquement, les produits de la colonie entraient en France en exemption de droits, sauf cependant les sucres, sirops, mélasses qui étaient soumis aux droits du tarif métropolitain, et les cafés, thés, épices qui bénéficiaient seulement d'une détaxe. La loi du 13 avril 1928 a maintenu pour l'Indochine le régime de l'assimilation, mais a supprimé ces exceptions. D'autre part, cette loi facilite la procédure relative à l'octroi des dérogations aux tarifs doua¬ niers métropolitains demandées par l'Indochine. Une simple délibéra¬ tion du Conseil de Gouvernement portant demande de dérogation a pour effet de suspendre la mise en vigueur d'un nouveau tarif doua¬ nier appliqué dans la métropole. La demande de dérogation est trans¬ mise au Ministre des Colonies qui doit statuer dans les trois mois de sa réception, après avis des ministres du Commerce, de l'Agriculture et des Finances, sinon la délibération du Conseil du Gouvernement est considérée comme approuvée. 56 INDOCHINE Ce nouveau régime, Beaucoup plus libéral que l'ancien, a pris toute sa valeur efficiente depuis la promulgation, en Indochine, du décret du 20 janvier 1929 approuvant les deux délibérations du Conseil de Gou¬ vernement des 23 novembre 1928 et 21 juin 1929, qui fixent les quotités du tarif spécial à l'Indochine. Remarquons toutefois que ces tarifs ne sont pas appliqués au Laos ni à Kouang-Tchéou-Wan, qui demeurent encore en dehors de l'Union douanière indochinoise. Les régies et monopoles sont sous l'autorité directe du Gouverneur général qui, par des arrêtés, en détermine les modalités. Le personnel des Douanes et Régies comprend des Européens et des indigènes répartis en 337 postes. Les perceptions de ce service ont atteint, en 1929, le total de 75.286.240 piastres, ce qui donne, au taux de 10 francs, 752.862.100 francs; c'est-à- dire les 9/10 des recettes totales du budget général. Voici un résumé succinct des taxes relatives aux Douanes et Régies : DOUANES CDÉTAIL DES PERCEPTIONS). 1° Droits de douane à l'importation et à l'exportation suivant les tarifs en vigueur (des exemplaires en sont déposés au Commissariat général de l'Exposition et à l'Agence Economique de l'Indochine, 20, rue la Boétie, Paris). Les droits à l'importation frappent seulement les marchandises étran¬ gères à leur entrée en Indochine. Les droits à l'exportation frappent seulement certaines marchandises indochinoises à destination de l'étranger (décret du 24 mars 1926). 2° Taxe de statistique, fixée à huit centièmes de piastre (0 $ 08) d'après la nature des objets importés ou exportés et suivant les unités de per¬ ception en usage dans la métropole, (sauf en ce qui concerne la sortie de l'Indochine des combustibles minéraux et produits des carrières pour lesquels le tarif de quatre cents est maintenu, arr. du 20-3-30). 3° Taxe de plombage, fixée à dix centièmes de piastre (0 $ 10) par colis, pour les expéditions en transit international, et à cinq centièmes de piastre (0 $ 05) par colis, pour les expéditions en transit ordinaire. 4° Droit de transit, de 20 % du droit d'import pour les marchandises étrangères empruntant le territoire indochinois, c'est-à-dire 20 % des l'administration française 57 droits d'import en vigueur antérieurement à l'application des décrets des 28 mars et 29 juin 1921. Le premier modifiait les droits du tarif gé¬ néral, le second, les coefficients (Cette taxe est en cours de modification.) 5° Droit de navigation sur les barques de mer jaugeant moins de 160 tonneaux (arrêtés du 11 octobre 1899 et du 20 juillet 1926). 6° Droit de francisation et de congé pour les navires ayant leur port d'attache en Indochine (arrêté du 17 juin 1928). 7° Des taxes de péage, d'accostage, de passagers et des droits sani¬ taires, au profit soit des Chambres de Commerce soit des ports intéressés (Saïgon, Haiphong, etc), soit des budgets locaux. RÉGIES (DÉTAIL DES PERCEPTIONS). 1° Alcools. — Arrêté du 18 octobre 1921 (arrêté organique). Taxe de consommation : alcools européens : 1 $ 70 par litre d'alcool pur (arrêté du 5-7-1930). Les cidres, poiré, bière, hydromel, vinaigre, sont exonérés de la taxe de consommation. Les boissons non dénommées acquittent la taxe de consommation sur la quantité totale d'alcool qu'elles contiennent. (Ar¬ rêté du 12-2-27.) Les vins ordinaires naturels (provenant de la fermentation du raisin frais ou du jus de raisin frais) ne titrant pas plus de 15° sont exonérés de la taxe de consommation. (Arrêté du 12-2-27.) Les vins vinés ne titrant pas plus de 12° sont exonérés de la taxe de consommation. Les vins vinés titrant plus de 12° acquittent la taxe de consommation sur la quantité d'alcool excédant 12°. (Arrêté du 12-2-27.) Les vins de liqueur, les vermouths, les mistelles acquittent la taxe de consommation sur la quantité totale d'alcool qu'ils contiennent. (Arrêté du 12-2-27.) Les alcools non rectifiés, préparés pour la consommation des indigènes dans les conditions déterminées par le titre III de l'arrêté du 18-10-1921 payent seulement 0 $ 45 par litre d'alcool pur. (Arrêtés du 21-12-26 et 5 juillet 1930.) Les vins de Chine, alcools parfumés (alcools de camomille, de nénu¬ phar, etc.); les liqueurs à base d'alcool de riz; les alcools vieillis, et en général tous les alcools indigènes de luxe payent 0,65 par litre d'alcool pur. (Arrêtés du 21-12-26 et 5 juillet 1930.) INDOCHINE 2° Sels. — Taxe de consommation : 2 $ 25 par 100 kilogrammes pour les sels produits ou importés en Indochine. (Arrêté du 18-10-21). 3° Allumettes chimiques. — Taxe de consommation : 0 $ 0625 par paquet de 10 boîtes de 50 allumettes au maximum (Arrêté du 20 mars 1930.) Taxe de manutention sur les allumettes importées : 3 $ par caisse de 7.200 boîtes d'allumettes (O. S. du 14 janvier 1909.) Taxe représentative des frais d'exercice : 0 $ 015 par paquet de 10 boîtes de 50 allumettes au maximum. (Arrêtés des 11-2-26 et 26-12-28.) N.-B. — En plus de la taxe de consommation les allumettes supportent les frais d'exercice si elles sont fabriquées dans la Colonie, ou une taxe représentative de ces frais (0,015) si elles sont importées. Les fabricants locaux peuvent se libérer des frais d'exercice en payant la taxe repré¬ sentative. 4° Tabacs. — Taxe de circulation : 1° Tabacs en feuilles ou coupés, mais non préparés pour être chiqués ou fumés : 0 $ 20 le kilog. (Arrêté du 19-4-06). 2° Tabacs de qualité inférieure préparés pour être fumés ou chiqués en vrac ou en ballots : 0,30 le kg. (Arrêté du 19-4-06.) 3° Tabac dit chinois : 0,75 le kg. (Arrêté du 19-4-06.) 4° Tabacs préparés pour être fumés ou chiqués, en boîtes ou paquets, ou revêtus d'étiquettes ou de marques de fabrique, et cigarettes : 1,60 par kg. (Arrêté du 20-3-30.) 5° Cigares, 3,20 (Arrêté du 20-3-30). 5° Huiles minérales : Taxe de consommation sur les huiles minérales propres à l'éclairage : 2 $ 20 par 100 kgs. (Poids brut). (Arrêté du 17 octobre 1921.) 0 $ 06 par caisse dite de commerce (30 kgs net). minérales. Huiles et ® mo's consécutifs. essences 1 Taxe de magasinage : par séjour en entrepôt Dans le cas où les huiles et essences minérales seraient logées dans des récipients autres que les caisses de commerce, le poids net de 30 kgs. sert de base au calcul de la taxe de magasinage à raison de 0$06 pour chaque lot de 30 kgs. Arrêté du 11- 6-12 modifié par arrêté du 17 mars 1920. Passé ce délai, l'administration française 59 „ "i , ... [ 0 fr. 75 par caisse de commerce ou j , Huiles / Assurance obligatoire \ , / , „A . , . , ., . / Arrête du 11 minérales. contre l'incendie. Pf 0t de 30 kgS (p0lds net) et juin 1912. j ^ pB/F 8.11. j Matières \ inflammables et J incendiaires f „ , | 3 fr. 00 par mois par M3 ou frac- (Arrêté du 11 , > laxe de magasinage. autres que les ( j tion de M3. ( juin 1912. huiles et es- \ sences minérales. ] Autres matières \ ( inflammables et ( Assurance obligatoire \ 0 fr. 25 pour chaque lot de 100 kgs / Arrêté 1 du 11 incendiaires, j contre l'incendie. j et par an. j juin 1912. ! Arrêté du 11-6-1912 modi¬ fié par ceux du 17 mars 1920 et 5 novembrel930. 6° Cartes à jouer. Taxe de circulation : A) à l'usage des Asiatiques : par 100 kgs nets 30Ï00 B) à portrait français ou étranger jeu de 32 cartes, par jeu 0S04 — 52 — 0«06 Arrêté du 16-2-1922. 7° Poudres et artifices. Taxe de consommation : a) Poudres noires 0,'s50 par kg b) — pyroxilées 1 $50 — F Arrêté du c) Cartouches chargées (contenant de la poudre noire). 5S00 les 100 kg( 24-11-1913. d) Cartouches chargées (contenant de la poudre pyroxilée). 7 S 50 — e) Artifices et pétards pour divertissements 4S00 — 8° Opium. — L'achat, la fabrication et la vente de l'opium constituent un monopole dont l'exploitation est confiée à l'administration des Douanes et Régies (Arrêté du 18 octobre 1921.) Les prix de vente de l'opium ont été fixés par arrêté du 30 avril 1930. 9° Taxe de 2 % ad valorem sur les produits importés et exportés et sur les produits du cru. (Arrêtés du 8 avril 1927, 18 mai 1928 et Circulaire du 11 mars 1929.) Les produits miniers ont fait l'objet d'une taxation spéciale (Arrêtés du 10 mars 1928 et du 18 février 1929.) ORGANISATION DU SERVICE DES POSTES, TÉLÉGRAPHES ET TÉLÉPHONES SERVICE DU PERSONNEL Le service est assuré par lin personnel européen et un personnel indi¬ gène. Le personnel européen comprend : 1° Des fonctionnaires et agents métropolitains détachés dans les condi¬ tions de l'article 33 de la loi du 30 décembre 1913 et dont le statut est fixé par le décret du 29 décembre 1917. Le décret du 8 juillet 1929 fixe les cadres du personnel détaché. 2° Des fonctionnaires locaux régis par l'arrêté du Gouverneur général du 20 juin 1921 (statut commun des divers cadres locaux) et par celui du 28 avril 1928 (arrêté organique du cadre local des P. T. T.). Le personnel indigène comprend : a) Un cadre supérieur (receveurs et commis). b) Un cadre secondaire (receveurs secondaires, secrétaires, mécani¬ ciens). ■ c) un cadre subalterne (chefs de chantier et surveillants, ouvriers spé¬ cialistes, facteurs interprètes chinois, facteurs indigènes, courriers con¬ voyeurs) . l'administration française Tableau numérique du personnel européen. 61 Inspecteur Général, Directeur régional ou Directeur, Chef de service Directeurs Ingénieur Inspecteurs Receveurs de 2e classe Receveurs de 3e classe Rédacteurs principaux et rédacteurs Agents instructeurs Contrôleurs principaux et contrôleurs Commis principaux et commis Dames téléphonistes Brigadiers facteurs et facteurs Agents mécaniciens principaux et agents mécaniciens Conducteurs de travaux Chefs d'équipe et chefs monteurs Surveillants CADRE MÉTROPO¬ LITAIN 1 4 1 17 2 20 3 25 33 SERVICES POSTAUX L'exécution de ces servives est assurée : 1° Par des bureaux de plein exercice qui participent à toutes les opé¬ rations; ' I 2° Par des bureaux limités qui n'acceptent pas les envois avec valeur déclarée ni les mandats internationaux et qui ne participent au service des recouvrements et des remboursements ainsi qu'à l'émission et au paiement des mandats que jusqu'au maximum de 200 $ dans le régime intérieur et de 2.000 francs dans le régime franco-colonial; 3° Par des bureaux secondaires ouverts seulement au service des objets ordinaires et recommandés; 4° Par des bureaux ruraux qui assurent seulement l'expédition et la distribution des correspondances ordinaires. 62 INDOCHINE Le tableau suivant indique la progression du nombre des bureaux des trois premières catégories pendant la période 1920-1929 : ANNÉE NOMBRE DE BUREAUX TOTAUX PRINCIPAUX LIMITÉS SECONDAIRES 1920 168 35 144 347 1921 170 35 150 355 1922 178 35 153 366 1923 177 45 150 372 1924 180 47 148 375 1925 186 47 153 386 1926 194 47 157 398 1927 201 44 153 398 1928 208 43 149 400 1929 221 52 141 414 Les transports postaux à l'intérieur de l'Indochine sont assurés par chemin de fer (1.945 kilomètres), par voie fluviale (9.300 kilomètres), par automobiles (9.259 kilomètres), par courriers à cheval ou à pied (9.100 kilomètres). Il n'existe pas encore en Indochine de lignes aériennes régulières assu¬ rant le transport du courrier postal. Seuls, des transports postaux occasionnels par avion ont lieu entre Hanoï, Tourane et Saïgon lors des vols d'entraînement effectués par les appareils de l'aviation militaire. La création de lignes aériennes régulières actuellement à l'étude amé¬ liorera notablement les relations postales entre localités séparées par des distances considérables. La durée du trajet le plus rapide entre Hanoï et Saïgon (1.757 kilo¬ mètres) est de 60 heures; par avion elle pourra être réduite à 12 heures. SERVICE DES COLIS POSTAUX Le service des colis postaux jouit de la plus grande faveur auprès du public indochinois qui l'utilise pour le transport des marchandises Indochine II. Pl. IV. Cliché Gouv. Général Indochine. Creusement d'un canal en Cochinchine, province de Rach-gia mmmmmt . l'àdminitsration française 63 Principales taxes. PAYS EUROPE (y compris l'Algérie, la Tunisie et le Maroc français) Algérie, Tunisie Allemagne, Autriche Belgique, Luxembourg Espagne France Grande-Bretagne Italie Maroc français Pays-Bas U. R. S. (Russie d'Europe) ASIE Chine : Shanghaï Yunnan Hong-Kong Japon Iles Philippines (Manille) Straits Settlements Ceylan Indes anglaises, Inde portugaise Inde française Indes Néerlandaises AMÉRIQUE New-York San Francisco Washington AFRIQUE Madagascar Réunion (La) AUSTRALIE Nouvelle-Calédonie Nouvelles-Hébrides OCÉANIE Tahiti VOIE VOIE T. S. F. CA LE Franc-or Franc-or 3.30 3.77 3.38 3.80 3.23 3.80 3.33 3.80 3.10 3.77 3.355 3.80 3.33 3.85 3.70 3.92 3.31 3.80 3.90 3.80 1.70 1.70 1.15 2.55 1.30 1.30 2.60 2.60 1.55 1.55 1.55 1.99 1.99 1.89 1.70 1.70 4.70 4.75 3.95 5.45 4.21 5.45 3.44 4.20 3.69 4.10 3.40 4.175 4.15 4.435 4.76 5.875 INDOCHINE. T. II. 5 t>4 INDOCHINE de faible volume aussi bien dans les relations avec la Métropole et les pays étrangers que dans les relations intérieures. La plupart des bureaux de poste participent actuellement à l'échange des colis postaux de toutes catégories et du poids maximum de 10 kilos. Durant les dix dernières années, le nombre des colis postaux échangés à l'intérieur a suivi la progression due notamment aux échanges de plus en plus importants de colis avec valeur déclarée et contre rembourse¬ ment. Par contre, pendant la même période, le trafic des colis à destination ou en provenance de l'extérieur a été marqué de fluctuations divei'ses dues surtout aux variations du cours de la piastre. SERVICE TÉLÉGRAPHIQUE Les communications télégraphiques sont assurées en Indochine, tant dans le régime intérieur que dans les relations internationales : 1° Par des lignes terrestres; 2° Par des postes fixes de T. S. F.; 3° Par les câbles de la Compagnie « Eastern Extension Telegraph ». A l'exception des établissements ruraux, tous les bureaux sont ouverts au service télégraphique. TARIFS Intérieur : 3/100 de piastre par mot, avec minimum de cinq mots. International : variable suivant la destination et la voie utilisée. SERVICE TÉLÉPHONIQUE Le service téléphonique, dont la création remonte à 1893, a suivi une progression très accentuée. Le réseau qui comprenait en 1901 3 bureaux et 72 kilomètres de lignes, était en 1920 desservi par 8 bureaux et 900 ki¬ lomètres de lignes. l'administration française 65 Ci-après le tableau statistique pour la période de 1920 à 1929 inclus : 1920 1921 1922 1923 1924 1925 1926 1927 1928 1929 Nombre conversations échangées. . 699.115 573.655 954.331 2.027.8(i9 3.048.556 3.380.214 4.019.061 5.301.030 8.584.611 9.550.263 o "d ! oT d a .•asë ■d D 103.601 93.000 132.6(10 159.872 199.718 252.337 362.460 391.196 452.825 488.631 t- d aS cw ^ d to d o o tarifs Gratuit entre abonnés d'un même réseau ou groupe de réseaux, 10/100 de piastre pour conversations échangées à partir des cabines publiques. 15/100 de piastre par 100 kilomètres pour conversations interurbaines avec minimum de 20 cents. service radiotéléphonique Ce service de création récente ne fonctionne actuellement que dans les relations entre la France et l'Indochine (Saigon). Tarif par unité de conversation de trois minutes : 555 francs français. SERVICE DES ARTICLES D'ARGENT Les tableaux suivants font apparaître les variations du trafic dans les différentes relations intérieures, franco et intercoloniales et internatio¬ nales. Il est à remarquer que l'emploi de la voie télégraphique pour envoi de fonds n'est autorisé qu'à l'intérieur de la Colonie et dans les relations entre l'Indochine et la France, l'Algérie, la Tunisie et la zone française du Maroc. 66 INDOCHINE I. — Régime intérieur : MANDATS ÉMIS MANDATS PAYÉS ANNÉES Nombre Montant Nombre Montant 1920 355.081 26.335.298 $ 354.213 26.298.143 $ 1921 356.010 30.491.573 354.817 30.444.361 1922 397.982 33.547.600 394.178 33.521.258 1923 456.843 36.967.990 455.120 36.922.711 1924 541.859 38.599.911 499.656 38.550.514 1925 546.221 42.038.800 544.892 42.038.700 1926 539.999 38.142.101 536.952 38.119.785 1927 543.082 38.782.980 539.869 38.755.451 1928 553.685 39.171.541 558.967 39.100.700 1929 587.952 40.906.499 585.554 40.878.631 II. — Régime franco-colonial et intercolonial : MANDATS ÉMIS MANDATS PAYÉS ANNÉES Nombre Montant Nombre Montant 1920 157.260 2.828.934 $ 41.661 771.972 $ 1921 130.063 3.598.690 16.551 . 497.502 1922 159.193 4.103.463 14.715 445.427 1923 231.189 4.795.740 13.180 286.289 1924 303.433 5.343.435 16.260 296.033 1925 323.406 5.631.836 16.208 380.652 1926 287.924 5.609.994 18.205 424.246 1927 188.416 5.359.074 15.706 493.874 1928 200.065 5.972.254 18.292 585.569 1929 191.579 6.605.524 19.153 734.450 III. — Régime International : MANDATS ÉMIS MANDATS PAYÉS ANNEES Nombre Montant Nombre Montant 1920 1.202 57.428 $ 180 5.262 $ 1921 599 30.325 182 5.164 1922 536 20.792 158 5.717 1923 1.203 70.460 937 28.964 1924 1.338 75.267 1.252 41.121 1925 1.799 97.488 1.653 101.975 1926 2.215 116.103 1.540 67.391 1927 2.106 115.608 2.873 99.985 1928 2.410 121.217 3.065 107.661 1929 2.827 169.601 2.499 96.205 l'administration française 67 SERVICE TECHNIQUE La statistique ci-dessous fait ressortir l'effort des services techniques de l'Indochine; ils se sont particulièrement exercés : 1° Dans le développement des communications téléphoniques inter¬ urbaines. Plus de cinquante bureaux ont été ouverts pendant cette pé¬ riode au service téléphonique. 2° Dans l'extension des grands réseaux urbains, par le développement des lignes souterraines; dix villes indochinoises possèdent actuellement des réseaux souterrains. 3° Dans la mise en service sur les grandes communications télégra¬ phiques d'appareils rapides, Baudot et Hughes; la liaison directe Hanoï- Saigon (1.700 km.) est assurée au Baudot depuis 1923. 4° Dans la reconstruction, soit sur voie ferrée, soit sur route, des artères aériennes importantes au moyen d'appuis solides, en ciment armé ou en fer, pour les mettre à l'abri d'une destruction rapide. Il convient de remarquer en outre que l'éloignement de la Métropole et les difficultés rencontrées sur place pour se procurer du matériel, ont obligé la Colonie à se suffire de plus en plus à elle-même. Aussi de vastes ateliers ont-ils été créés à Hanoï et Saigon, équipés pour le travail du bois et du fer, la petite mécanique, la fonderie, etc... Enfin, un gros effort a été fait pour améliorer les bâtiments de l'admi¬ nistration des P. T. T. Les recettes de Hanoï et de Saïgon vont être considérablement agran¬ dies pour tenir compte du développement du service, et pour permettre l'installation de commutateurs automatiques et doter ainsi les deux grandes villes de l'Indochine des procédés les plus modernes en télé¬ phonie. 68 INDOCHINE TÉLÉGRAPHE TÉLÉPHONE c/3 Longueur des Aooareils en Longuour en km. Longueur en km. * en S conducteurs en du du réseau H > 2 km. service réseau urbain interurbain 3 «? ■< UI sur route sur voie ferrée Morse Hugues Baudot Aérien Sou¬ terrain Aérien Sou¬ terrain km. km. km. km. km. km. km. 1920 15.335 11.252 754 26 391 3.510 1.549 76 19-21 15.374 14.367 868 26 454 4.092 1.610 84 25.200 1922 15.883 16.055 918 27 4 doub. 490 4.418 2.068 109 50.400 1923 16.008 16.575 932 27 3 quad. 4 doub. 521 4.695 6.740 362 166.800 1924 16.841 18.623 942 30 3 quad. 4 doub. 933 8.400 7.036 370 225.120 1925 17.093 20.374 960 30 3 quad. 4 doub. 1.283 11.555 7.253 381 230.520 1926 17.281 21.186 980 31 6 quad. 4 doub. 1.680 15.126 7.619 407 241.720 1927 17.338 21.917 1.002 36 6 quad. 2 doub. 1.922 17.304 8.003 421 241.720 1928 17.484 22.369 1.040 37 6 quad. 2 doub. 1.984 17.856 8.370 441 241.720 1929 17.796 23.026 1.072 38 6 quad. 2 doub. 2.123 20.007 9.162 482 265.720 SERVICE RADIOTÉLÉGRAPHIQUE Le service radiotélégraphique de l'Indochine, créé en 1909, est ratta¬ ché à la Direction des Postes et Télégraphes depuis 1927. Il comporte un personnel français (ingénieurs, chefs de poste, sous- chefs de poste, mécaniciens) et un personnel indigène (sous-chefs de poste auxiliaires, radiotélégraphistes et mécaniciens). Il est chargé de l'exploitation des postes de T. S. F. relevant direc¬ tement de la Colonie, du contrôle du grand poste de Saigon exploité par la Compagnie générale de T. S. F. pour le compte de la Colonie, du contrôle des postes radioélectriques privés et des postes de bord, enfin, de la centralisation et de l'étude de toutes les questions relatives à la radioélectricité. Il est dirigé par un chef de service résidant à Hanoï. A la date du 1er mai 1930, l'Indochine disposait de 18 postes de T. S. F. ouverts au service public : l'administration française 69 1° Le grand poste de Saïgon qui assure les liaisons extérieures sui¬ vantes : France (télégraphie et téléphonie), Madagascar, Nouméa, Tahiti, Etats-Unis, Iles Philippines, Indes néerlandaise, Chang-Haï, Djibouti, Di¬ vision navale d'Extrême-Orient, Stationnaire du Pacifique. D'autres liai¬ sons (en particulier Hong-Kong et Japon) sont actuellement à l'étude. 2° Dix-sept postes exploités directement par la Colonie, savoir : Hanoï, Saïgon (petit poste), Fort-Bayard, Nao-Tchéou, Moncay, Kien-An, la Cat Ba, Tourane, Padaran, Mytho, Poulo Condor, Phu-Quoc, Dalat, Vien- tiane, Luang-Prabang, Lai-Chau et Sam-Neua qui assurent : 1° Les liaisons intérieures de l'Indochine. 2° Les liaisons avec les navires en mer. 3° Les liaisons extérieures suivantes (depuis Hanoï), France, Yunnan- Sen, Hong-Kong, Macao, Chang-Hai, Japon, Djibouti, Tchung-King, D'autres liaisons sont actuellement à l'étude. Tableau des recettes successives (en piastres indochinoises). ANNÉES CENTRE Radio-élec¬ trique de Saïgon POSTES EXPLOITÉS DIRECTEMENT PAR LA COLONIE TOTAL GÉNÉRAL Liaisons extérieures Liaisons avec les navires Liaisons intérieures Total 1921 )) 5.000 8.450 4.072 17.522 17.522 1922 14.328 6.565 6.850 4.475 17.890 32.218 1923 16.548 5.054 7.163 4.278 16.495 33.043 1924 89.000 8.685 6.249 4.653 19.587 108.587 1925 127.000 17.353 6.372 4.114 27.839 154.839 1926 170.000 26.701 6.636 6.778 40.115 210.115 1927 205.000 36.278 12.429 14.810 63.517 268.517 1928 268.618 154.367 11.401 10.147 175.915 444.533 1929 407.392 227.339 13.320 10.291 250.950 658.342 1930 500.000 325.000 13.000 12.000 350.000 850.000 (provisions) SERVICE DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES. CHAMBRES DE COMMERCE ET CHAMBRES MIXTES DE COMMERCE ET D'AGRICULTURE I. — ACTIVITÉ DU SERVICE DES AFFAIRES ÉCONOMIQUES / La direction des Affaires Economiques ayant été supprimée par arrêté du 22 septembre 1927, les bureaux de législation, de réglementation, de documentation et de statistique de ladite direction ont été rattachés au Gouvernement général et incorporés en un seul service, prenant le nom de Service des Affaires Economiques. Un arrêté du 26 août 1929 a organisé l'Inspection Générale des Mines et de l'Industrie, et a reconstitué auprès d'elle le service de la statistique générale. Les attributions relatives aux statistiques et aux publications périodiques (Annuaire Statistique, Annuaire Economique, Bulletin Eco¬ nomique) ont donc été confiées, à partir de cette date, à la nouvelle inspection. Cette réduction d'attributions, qui le décharge d'une besogne tech¬ nique, place le service des Affaires Economiques dans son vrai rôle, qui est celui d'un organe de réglementation et de documentation économi¬ ques. Ses attributions se trouvent définies, ainsi qu'il suit, par l'arrêté organique du 14 février 1930 : Réglementation du commerce et des professions commerciales, pro¬ priété commerciale, crédit commercial, relations avec les Chambres de commerce de l'Indochine et avec la Chambre de commerce internatio¬ nale. Contrôle des sociétés d'assurances sur la vie et de capitalisation, véri¬ fication avant enregistrement des statuts de ces sociétés; Documentation économique, étude des questions économiques, rela¬ tions avec l'Agence Economique de l'Indochine à Paris; t.'administration française 71 Examen des tarifs douaniers, des taxes d'exportation, des tarifs des chemins de fer, des taxes et droits de port, etc... au point de vue exclusif de leur répercussion économique, sous réserve des attributions de l'Ins¬ pection Générale des Mines et de l'Industrie, en ce qui concerne les industries ayant pour objet l'extraction, la préparation, la transforma¬ tion physique ou chimique ou l'élaboration mécanique des substances minérales; Participation à la préparation du plan de mobilisation générale de la colonie (mobilisation économique). Les principales questions d'ordre réglementaire, traitées par le service des Affaires Economiques, sont relatives à l'application, en Indochine : 1° Du décret du 8 juillet 1927, instituant un registre de commerce; 2° Du décret du 29 septembre 1927 sur la tenue des livres de compta¬ bilité des commerçants étrangers opérant dans la Colonie. Le décret du 8 juillet 1927 a été promulgué le 31 août 1929, et cinq arrêtés, pris à la même date, en ont déterminé les modalités d'applica¬ tion. Ces textes ont été insérés au Journal Officiel de l'Indochine du 18 septembre, et la réglementation est entrée en vigueur à compter du 18 décembre 1929. L'institution d'un registre de commerce en Indochine se trouve com¬ plétée par la promulgation, à la date du 3 mars 1930, du décret du 29 septembre 1927, astreignant les commerçants étrangers qui opèrent dans la Colonie, à tenir leurs livres de comptabilité en une langue uti¬ lisant les caractères latins et les chiffres arabes. L'administration qui entendait procéder avec tous les ménagements désirables, a décidé, par un arrêté du même jour, de ne soumettre aux dispositions du décret précité que les commerçants payant une patente (droit fixe) égale ou supérieure à 500 $. En ce qui concerne la législation des sociétés d'assurances sur la vie et de capitalisation, le Gouverneur général ne pouvait, sous le régime du décret du 12 avril 1916, refuser l'enregistrement d'une entreprise étrangère que pour une infraction aux lois, notamment à celles qui régissent les sociétés. Un décret du 19 août 1929 a modifié cette situation, en soumettant les demandes d'enregistrement des sociétés étrangères à l'agrément préalable du Gouverneur général. Le service des affaires économiques constitue également un organe de documentation économique, qui centralise tous documents et étudie 72 INDOCHINE toutes questions d'ordre économique, notamment celles se rapportant à la défense nationale. Il prépare les réponses aux demandes de rensei¬ gnements commerciaux qui proviennent soit des services métropolitains ou locaux, soit des particuliers résidant en Indochine, en France ou à l'Etranger, et s'occupe des collections d'échantillons de produits indo- chinois destinées aux comités de propagande coloniale et à l'Agence Economique de l'Indochine. Par ailleurs, le Service des Affaires Econo¬ miques ne cesse de se tenir, sous le couvert des chefs d'administration locale, en contact avec les Chambres de Commerce et les différents groupements économiques importants de la Colonie; il leur communique les demandes de représentations commerciales ou de mises en relations commerciales formulées par des firmes métropolitaines ou étrangères, ainsi que les renseignements qu'il peut obtenir sur l'activité productive et commerciale des principaux pays avec lesquels l'Indochine peut avoir des rapports d'ordre économique. II. - CHAMBRES DE COMMERCE ET CHAMBRES MIXTES DE COMMERCE ET D'AGRICULTURE A. — CHAMBRES DE COMMERCE. Il existe en Indochine des Chambres de Commerce et des Chambres mixtes de Commerce et d'Agriculture. Les Chambres de Commerce de l'Indochine sont actuellement régies par le décret du 27 mai 1922, complété par ceux du 8 février 1929 et du 17 février 1930 et par des arrêtés réglementaires d'institution. Ce sont des établissements publics qui constituent, auprès de l'Admi¬ nistration indochinoise, les organes des intérêts commerciaux et indus¬ triels de leur circonscription. Les Chambres de Commerce comprennent des membres français et des membres indigènes, élus pour quatre ans, renouvelables par moitié tous les deux ans, et indéfiniment rééligibles. Le mode d'élection est fixé par l'arrêté constitutif de chaque Chambre. Le Gouverneur de la Cochin- chine et les Résidents supérieurs ont entrée aux Chambres de Commerce des pays qu'ils administrent et y ont voix consultative. Leurs attributions sont les suivantes : 1° Donner les avis et renseignements qui leur sont demandés par l'administration françuse 73 l'Administration, ou qu'elles croient devoir lui fournir spontanément, sur les questions industrielles et commerciales, notamment sur les chan¬ gements projetés dans la législation commerciale, sur les tarifs des douanes, sur les tarifs et règlements des établissements à l'usage du commerce; 2° Présenter des vœux sur les moyens d'accroître la prospérité de l'in¬ dustrie et du commerce; 3° Assurer, sous réserve de certaines autorisations, l'exécution des tra¬ vaux et l'administration des services nécessaires aux intérêts dont elles ont la garde. L'administration doit obligatoirement les consulter : 1° Sur les règlements relatifs aux usages commerciaux; 2° Sur la création, dans leur circonscription, de nouvelles chambres de commerce, de bourses de commerce, d'offices d'agents de change et de courtiers maritimes, de tribunaux de commerce, de magasins géné¬ raux et de salles de vente publiques de marchandises neuves aux en¬ chères et en gros; 3° Sur les taxes destinées à rémunérer les services de transports con¬ cédés dans leur circonscription par l'autorité publique; 4° Sur toutes les matières déterminées par les lois ou règlements spéciaux; 5° Sur les tarifs de main-d'œuvre pour le travail dans les prisons. Les Chambres de Commerce peuvent être autorisées à fonder, et à administrer des établissements à l'usage du commerce tels que maga¬ sins généraux, entrepôts, etc... Elles peuvent, par arrêté du Gouverneur général, pris en Conseil de Gouvernement, après avis de l'Inspecteur général des Travaux Publics, être déclarées concessionnaires de travaux publics. Les Chambres de Commerce font face à leurs dépenses ordinaires au moyen d'une imposition additionnelle au principal de la contribution des patentes. Une subvention peut être allouée par le budget local en cas d'insuffisance des recettes. Des emprunts peuvent être contractés, sur autorisation donnée par arrêté du Gouverneur général, pris en Conseil de Gouvernement; tou¬ tefois, si l'emprunt est projeté en vue de l'exécution de travaux publics ou de l'établissement de services publics, l'autorisation doit être accor¬ dée par décret. 74 INDOCHINE Les Chambres de Commerce de l'Indochine sont les suivantes: 1° celles de Hanoï et de Haipliong (Tonkin), actuellement régies par l'arrêté du 27 octobre 1922, complété et modifié par les arrêtés des 13 février 1923, 13 juin et 30 octobre 1925, 20 juillet 1926 et 12 février 1927; 2° Celle de Saïgon (Cochinchine), actuellement régie par l'arrêté du 9 août 1922, modifié par les arrêtés des 14 mai 1923, 20 juillet 1926, 12 février et 26 mars 1927. B. — CHAMBRES MIXTES DE COMMERCE ET D'AGRICULTURE. Le petit nombre de commerçants et d'agriculteurs français fixés en Annam, au Cambodge et au Laos n'ayant pas permis d'instituer dans ces pays des Chambres de Commerce et d'Agriculture indépendantes, on a été amené à créer des organes mixtes, réglementés actuellement par le décret du 10 octobre 1922. Ce sont des établissements publics dont le statut peut être résumé comme suit : Les Chambres mixtes de Commerce et d'Agriculture, sont, auprès des pouvoirs publics de la Colonie, des organes consultatifs professionnels des intérêts agricoles et commerciaux de leur circonscription. Elles comprennent des membres français et des membres indigènes. Les membres français sont élus pour quatre ans, renouvelables par moitié tous les deux ans, et indéfiniment rééligibles. La composition du collège électoral est déterminée par l'arrêté du Gouverneur général créant la Chambre. Les Résidents supérieurs sont admis aux délibérations des chambres de leur ressort avec voix consul¬ tative. Les chambres mixtes de Commerce et d'Agriculture ont toutes les attri¬ butions dévolues aux Chambres de Commerce de l'Indochine et toutes celles des Chambres d'Agriculture. Elles sont au nombre de quatre : 1° celle du Nord-Annam à Vinh, régie par arrêté du Gouverneur général du 30 octobre 1925, modifié par les arrêtés des 9 novembre 1928 et 1" février 1929; 2° celle de Tourane, réorganisée par arrêté du 11 mai 1923; 3° celle du Cambodge régie par arrêté du 30 décembre 1922, modifiée par les arrêtés des 16 avril 1923, 25 octobre 1927,18 juillet 1928 et 28 mars 1929; 4° celle du Laos instituée par arrêté du 28 avril 1928, complété par l'arrêté du 15 juin 1928. L'AGRICULTURE, L'ÉLEVAGE ET LES FORÊTS i CULTURES RIZ Les cultures alimentaires sont celles qui occupent la plus grande place en Indochine. Parmi elles, la plus importante de beaucoup est celle du riz, base de l'alimentation des habitants, à quelque race qu'ils appartiennent. La plante a peut-être eu son berceau dans l'Indochine même, et sa culture remonte aux premières civilisations : aussi est-elle généralisée dans tout le pays. Il en est résulté un grand nombre de variétés adap¬ tées aux différents milieux, ou à divers besoins, et une grande diversité dans les procédés de culture. Les types diffèrent par leur aspect extérieur, ou par leurs propriétés; les uns sont barbus, d'autres, plus fréquents, mutiques; les balles ou le grain sont diversement colorés; la semence est tantôt allongée, tantôt presque arrondie; d'aucuns, dits riz gluants, ont un grain qui s'agglu¬ tine en cuisant et qui colle aux dents, on les réserve pour la confection de pâtisseries et surtout pour la fabrication de l'alcool; les autres, appe¬ lés riz durs, sont les plus employés dans l'alimentation et ceux qui s'ex¬ portent le plus, donc les plus cultivés. Au point de vue de leur mode de végétation et des procédés de cul¬ ture qu'on leur applique, on distingue les riz des terres basses, les riz de montagne, les riz flottants. Les derniers, cantonnés dans la zone inon¬ dée du Grand Lac, au Cambodge, et dans les régions analogues rive- 76 INDOCHINE raines des bras du Mékhong, en Cochinchine, couvrent 60.000 hectares dans les seules provinces de Chau-Doc et de Long-Xuyen. Leur parti¬ cularité est d'avoir une tige qui s'allonge parfois de plusieurs mètres, à mesure que la crue monte. Pour toute préparation, le sol est débar¬ rassé des herbes que l'on coupe à ras de terre, puis, quand il est suffi¬ samment humecté, au début de la saison des pluies, des trous sont pra¬ tiqués de place en place à l'aide d'un bambou, et les semences, préala¬ blement mises à tremper pour déterminer le départ de la germination, y sont déposées. Ensuite, la crue submerge le tout; la végétation accom¬ plit ses phases. La maturation est achevée au moment du retrait des eaux et la récolte se fait, le plus souvent, à sec. Les riz de montagne se cultivent, comme les céréales d'Europe, en sol non inondé. Suivant les régions et selon le degré de civilisation des habitants, les travaux préparatoires sont plus ou moins soignés. Cer¬ taines peuplades se contentent de débroussailler par le feu et de confier les semences à l'humus de la forêt mélangé de cendres, en les déposant dans des trous. Ailleurs, la semaille a lieu à la volée, sur une terre fertilisée par des apports d'engrais, plusieurs fois labourée et hersée. Contrairement à ce que leur nom laisse supposer, ces riz ne sont pas particuliers à la montagne. Ils sont cultivés jusqu'en plaine, mais toujours en terre non inondée, arrosée seulement par l'eau des pluies. Certaines variétés peu¬ vent se cultiver d'ailleurs aussi bien par le procédé qui vient d'être indi¬ qué que par le système du repiquage décrit plus loin. Les riz des terrains bas, appelés aussi riz ordinaires, parce que ce sont les plus répandus, se cultivent en terre inondée, soit dans le fond de cuvettes qui conservent l'eau naturellement, soit dans des casiers artificiels garnis sur leur pourtour de petites levées de terre qui retien¬ nent l'eau. Suivant le cas, tous les travaux aratoires se font sous l'eau, ou bien les premiers labours, notamment ceux qui servent à l'enfouissement des fumiers, se font à sec. Mais les dernières façons ont toujours lieu en sol submergé. Elles consistent à malaxer complètement la couche arable, pour la réduire en boue, et à égaliser la surface dans un plan horizontal. Il est procédé ensuite au repiquage. Préalablement, des pépinières ont été établies sur des emplacements appropriés, faciles à irriguer. Le sol en a ainsi été réduit à l'état de l'administration française 77 boue claire, et la semence, après avoir été trempée et mise à germer dans des paniers, a été répandue à la surface, à raison de 100 litres en¬ viron par are. On a laissé ensuite le sol prendre de la consistance, pour favoriser le développement des racines, que des assèchements répétés font se multiplier. L'on n'arrose que si la dessication s'exagère. De quatre à six semaines après la semaille, les jeunes plantes ont atteint 30 à 40 centimètres. Elles sont arrachées et rassemblées en petits botil- lons que l'on transporte à la rizière. Deux ares de pépinière suffisent pour planter un hectare. Les jeunes plants, réunis par pincées, sont repiqués dans la boue à 15 ou 20 centimètres d'écartement. Les travaux d'entretien consistent ensuite en désherbages, destruc¬ tions des parasites et arrosages. Suivant les variétés, on peut moissonner de trois à six mois après la semaille. Les meilleures sortes, dans les conditions les plus favorables, arrivent à produire jusqu'à 4.000 kilogrammes de paddy par hectare, mais beau¬ coup demeurent en dessous de 1.500. La moyenne est d'environ 2.400 ki¬ logrammes en Cochinchine, 1.800 kilogrammes au Tonkin. Mais ce der¬ nier pays a l'avantage de deux saisons propices au riz, dans le delta au moins. Les terres basses, cuvettes s'asséchant plus ou moins en hiver, ou casiers proches des réservoirs d'eau, sont consacrées à la récolte dite du cinquième mois, de janvier à juin; les autres produisent le riz dit de saison ou du dixième mois, de juillet à novembre. Les dépressions les plus profondes du bas-delta contiennent trop d'eau en été pour être à nouveau cultivées, mais durant toute la saison des pluies le reste du pays se prête à la culture du riz. Certaines terres privilégiées, au Ton¬ kin, produisent ainsi les deux récoltes. Jusqu'en 1912, personne ne s'était sérieusement préoccupé de remé¬ dier au défaut d'homogénéité de ces riz, déjà plus ou moins mélangés dans le semis, mais souvent aussi emmagasinés pêle-mêle. L'on ne se souciait guère d'augmenter leur qualité et leur rendement. Mais, pendant la guerre, un service génétique a été instauré en Cochin¬ chine en vue de la sélection et de la propagation des meilleurs variétés. Sa propagande va être reprise, avec des moyens d'action beaucoup plus développés, par l'Office Indochinois du Riz qui vient d'être créé par décret du 10 avril 1930. La Cochinchine ne fait, à proprement parler, qu'une seule récolte 78 INDOCHINE par an, et c'est presque exclusivement du riz. Quinze provinces sur vingt- deux, à part quelques aréquiers et cocotiers près des cases, n'ont pas d'autre culture. Cinq seulement, dans l'Est, n'y consacrent que les bas- fonds et présentent des parties surélevées couvertes de forêts, vers lesquelles s'orientent les planteurs d'hévéa et de canne à sucre. A travers toute l'Indochine, de vastes espaces propices à la rizière demeurent en friche, bien que, d'année en année, par une progression lente, mais continue, surtout au Tonkin et en Cochinchine, leur mise en valeur se poursuive. Le tableau ci-dessous donne, pour chaque pays de l'Indochine, la su¬ perficie des rizières et la production en paddy : Pays de l'Union. Superficie des rizières. Production en paddy. Cochinchine 2.283.000 hectares 2.844.000 tonnes Cambodge 637.000 — 800.000 — Tonkin et Nord-Annam. . . . 1.570.000 — 2.051.000 — Annam 642.000 — 632.000 — Laos 450.000 — 340.000 — Total. . . . 5.582.000 hectares 6.667.000 tonnes La population indochinoise consomme les deux tiers environ de cette production. Le reste est exporté. Le commerce du riz est presque entièrement dans les mains des Chi¬ nois. L'exportation se fait surtout sous forme de riz blanc, de brisures et farines, de riz cargo (mélange de paddy et de paddy décortiqué), et de paddy. L'exportation moyenne est de 1.500.000 tonnes (de riz), et varie de 1.400.000 à 1.800.000 t. La plus grande partie de ce riz va dans les autres pays d'Extrême-Orient (Chine, Japon, Indes Néerlandaises). La France importe le riz indochinois pour les distilleries, amidonne- ries, féculeries et alimentation. Elle pourrait en consommer bien davan¬ tage, car il est d'une qualité excellente et soutient la comparaison avec les plus beaux riz étrangers. MAÏS Le maïs est, loin après le riz, la céréale la plus cultivée. Nous laissons de côté le blé, localisé dans la région de Trung-Khanh-Phu, au Tonkin, les orges, nue et vêtue, de Kouang-Tchéou-Wan, les millets divers du Tonkin et du Nord-Annam, le sarrasin cultivé par les Thos et par les Indochine II. Pl. Y. éâfiâë Cliché Gouv. général Indochine. Barrage de Ta-sa, province de Cao-bang (Tonkin) - - * '• ~ ' ———•—--=^--^=£E^—~~== ■ l'administration française 79 Meos, au Tonkin. Mais nous ne pouvons nous dispenser de signaler à l'at¬ tention le maïs, si parfaitement adapté au climat de l'Indochine qu'au Tonkin l'on en fait deux récoltes annuelles. Il en existe des variétés différenciées par leur taille, par la consis¬ tance de leur grain et par sa coloration. Sur les hauts plateaux, des plantes de très haute taille, dépassant parfois quatre mètres de hauteur et à épis dépassant vingt-cinq centimètres, à grain blanc, crème, jaune- doré, rouge violacé ou brunâtre, viennent presque sans soins; leur écou¬ lement est malheureusement impossible, faute de routes, et les sur¬ faces que les montagnards leur consacrent sont en somme peu éten¬ dues. En plaine se retrouvent les mêmes colorations, mais sur des types de dimensions plus réduites. Certains ne dépassent pas 1 m. 20. Le maïs occupe surtout en Indochine les terrains des plaines trop élevées pour pouvoir être irriguées et, dans les hautes vallées, les berges des fleuves. On le cultive souvent dans les rizières après la récolte du riz. Les superficies cultivées en maïs et la production des différents pays sont données dans le tableau ci-dessous : Superficie consacrée au Pays de l'Union. maïs, en hecares. Production en tonnes. Cochinchine 13.600 hectares 15.500 tonnes Cambodge 30.200 — 46.250 — Annam 39.150 — 44.000 - Tonkin et Nord-Annam . . . 67.000 — 97.000 — Total. . . . 150.000 hectares 202.750 tonnes Les ressources que cette céréale peut offrir au commerce d'exporta¬ tion sont demeurées ignorées plus longtemps que pour le riz. Une pre¬ mière sortie, 446 tonnes, s'est effectuée en 1902. De nouvelles tentatives, moins importantes encore ont été faites en 1903 et 1904. Puis le déclan- chement eut lieu en 1905 avec 16.000 tonnes. L'exportation était de 133.000 tonnes en 1913 et de 140.000 tonnes en 1929. PLANTES FÉCULENTES ET LÉGUMINEUSES Le manioc occupe les terres sèches des confins des deltas, il est cultivé pour la consommation des indigènes; de même la patate, poussant sur terrains pauvres, argileux ou sablonneux; les taros de toute espèce se trouvent près des habitations. Toutes ces plantes féculentes forment un INDOCHINE. T. II. 6 80 INDOCHINE sérieux appoint à la nourriture des indigènes, particulièrement en temps de sécheresse, et contribuent ainsi à atténuer les disettes, incon¬ vénient des monocultures. En dehors des féculents et pour augmenter la ration azotée, déficiente en général dans la ration du travailleur qui se nourrit surtout de riz, le paysan annamite cultive beaucoup de légumineuses : haricots, doli- ques et sojas. Ces plantes sont cultivées soit seules, soit associées avec le maïs, comme en France, ou avec le mûrier, le manioc, etc... légumes. — Les Annamites et Cambodgiens cultivent une très grande quantité de légumes : pastèques, potirons, courges, tomates, aubergines, choux-raves, gombos, salades diverses, champignons, etc... fruits. — On trouve sur les marchés les bananes, les ananas, oranges, mandarines, citrons, pamplemousses, papayes, goyaves, pommes can¬ nelles, mangues, mangoustans, letchis, etc... sucre. — La canne à sucre est cultivée surtout en Annam et Cochin- chine. Les indigènes en extraient un sucre brun, au moyen de presses verticales actionnées par des buffles. On compte en Annam 25.000 hectares de canne à sucre donnant 35.000 tonnes de sucre brun, et en Cochinchine 8.000 hectares donnant 16.000 tonnes de sucre. La plus grande partie de ce sucre est consommé sur place; 2 à 5.000 tonnes sont exportées vers la Chine. La canne à sucre est également consommée crue, coupée en tronçons; certaines variétés sont très prisées comme friandises. Des entreprises industrielles préparent également du sucre blanc, dont la production moyenne peut être évaluée à 2.000 tonnes. Il faut noter que l'Indochine ne subvient pas à ses besoins en sucre; elle en importe en moyenne 22.000 tonnes. ÉPICES ET CONDIMENTS poivre. — Le poivre se cultive surtout au Cambodge (Kampot) et en Cochinchine (Ha-Tien, Baria). La production est en grande partie entre les mains des Chinois. Pays de l'Union. Superficie en hectares. Production en tonnes. Cochinchine Cambodge . 187 hectares 1.071 — 460 tonnes 8.457 — l'administration française SI La cannelle d'Annam est très appréciée en Chine où elle trouve ache¬ teur à des prix bien supérieurs à ceux qu'elle obtiendrait en France. Les centres de production sont le Thanh-Hoa et le Quang-Nam. Les cardamomes proviennent surtout du Cambodge et s'exportent en Chine. On trouve également du curcuma et du gingembre. thé. -— Le thé est un produit qui prend de l'importance en Indochine et peut en prendre bien davantage, avec les améliorations apportées à la culture et à la fabrication. Plusieurs grosses plantations dotées d'usines à l'outillage perfectionné, se sont montées depuis cinq ans au Tonkin et en Annam. Le théier est cultivé un peu en Cochinchine (540 hectares), mais sur¬ tout en Annam (9.160 hectares) et au Tonkin (11.200 hectares). La pro¬ duction de l'Indochine peut être évaluée à 5.500 tonnes, dont la plus grande partie est consommée sur place soit à l'état de feuille fraîche, soit après une préparation rudimentaire. La consommation du thé est considérable en Indochine, car il entre annuellement plus de 2.000 tonnes de thé de Chine. Grâce à la technique industrielle et aux triages, le thé indochinois commence à prendre une certaine place en France. L'exportation moyenne est de 920 tonnes, provenant surtout de l'Annam et du Tonkin. Le café est en Indochine une culture nouvelle. Les superficies plan¬ tées sont actuellement les suivantes : Pour une production d'environ 2.000 tonnes, l'Indochine exporte près de 400 tonnes de café. Mais la consommation locale est déjà forte, l'im¬ portation se chiffrant par contre à 700 tonnes. Les cafés produits par 1' « Arabica » du Tonkin sont cotés parmi les meilleurs du monde. STIMULANTS Pays de l'Union. Superficie en hectares. Production en tonnes. Tonkin. . . . Annam. . . . Cochinchine. . 3.000 hectares 5.600 - 350 — 1.500 tonnes 370 — 42 — 82 INDOCHINE STUPÉFIANTS ET MASTICATOIRES Le tabac se cultive sur les terres rouges de l'Est de la Cochinchine, dans les provinces de Phu-Yên, Binh-Dinh, Quang-Ngai, Quang-Tri et Quang-Binh en Annam, de Hai-Duong, de Bac-Kan et de la haute région au Tonkin. Cette culture prend de l'extension et doit satisfaire à la consommation indigène, qui préfère le tabac très chargé en nicotine. Cependant certains tabacs cultivés par les peuplades des montagnes ont d'autres qualités, et la preuve est faite qu'ils donnent, par une meil¬ leure fermentation, un tabac de goût européen. TEXTILES En premier lieu vient le coton, cultivé en Annam et au Cambodge. Production en tonnes Pays de l'Union. Tonkin et Nord-Annam Cambodge Autres pays Total. Superficie en hectares. 10.000 hectares 12.500 — 1.600 — 24.100 hectares de fibres. 950 tonnes de fibres 1.370 - 180 — 2.500 tonnes défibrés Le coton est cultivé surtout sur les berges du Mékong, dans la pro¬ vince de Kompong-Cham; il fournit une soie courte (20 à 25 millimètres), de belle couleur et très appréciée. Ce coton est en partie utilisée en Indochine, en partie exporté sur la Chine (exportation moyenne : 1.000 tonnes). Cependant là encore, l'Indochine ne se suffit pas, car elle im¬ porte annuellement 5.300 tonnes de fibres. (Consommation évaluée à 6.800 tonnes). La ramie, disséminée dans toute l'Indochine, n'est pas cultivée en grand. Elle est utilisée sur place pour la fabrication de filets de pêche. Le jute, qu'on trouve en de nombreux points du Tonkin et de l'An- iïam, est également cultivé par les indigènes, produisant des lanières non rouies vendues aux Chinois, et par certains colons européens pro¬ duisant de la fibre très appréciée, mais en très petite quantité. Des études se poursuivent pour la production de fibres textiles en l'administration française 83 vue de la fabrication de sacs de riz; l'Indochine importe actuellement de Singapoure pour plusieurs millions de francs de « gunnies », sacs fabriqués avec les jutes de l'Inde. PRODUITS INDUSTRIELS caoutchouc. — La production du caoutchouc est devenue une des plus importantes pour l'Indochine grâce au développement considé¬ rable et rapide des plantations d'hevea brasiliensis dans le Sud Indo¬ chinois. Actuellement les surfaces plantées et les productions sont : Moyenne des dernières années. Pays de l'Union. Superficie en hectares. Production en tonnes. Cochinchine 84.000 hectares 9.300 tonnes Cambodge 6.000 — 400 — Annam 1.500 — 140 — Total. . . . 91.500 hectares 9.840 tonnes Ce caoutchouc est exporté à peu près entièrement et, en 1929, l'expor • tation a dépassé 10.000 tonnes. La sélection, fondée surtout sur la mise en exploitation de plantations provenant de graines sélectionnées, et surtout de plants greffés avec des clones d'élite, permet d'envisager des rendements satisfaisants et de supporter les risques des crises souvent aiguës du marché mondial. SÉRICICULTURE La production de la soie procède à la fois de la culture et de l'éle¬ vage : culture du mûrier, nécessaire à la nourriture du ver-à-soie, et élevage des chenilles. Le mûrier est cultivé en Indochine sur plus de 10.000 hectares, soit sur les terres basses et alluvionnaires, soit sur les pentes des berges ou des collines. Les travaux de sélection du mûrier et des races de vers à soie indi¬ gènes ou exotiques sont poursuivis dans les stations séricicoles et de grainage du Gouvernement. 84 INDOCHINE CULTURE INDIGÈNE ET CULTURE EUROPÉENNE La culture indigène souffre du manque de capitaux, et de l'insuffi¬ sance du cheptel. Les gros propriétaires, les concessionnaires et les grosses sociétés de colonisation disposent en général du capital nécessaire, mais il leur manque souvent la doctrine technique qui leur permettrait la mise en œuvre rationnelle de ce capital. Les Services agricoles de l'Indochine s'efforcent d'améliorer les mau¬ vaises conditions du travail indigène et de résoudre les divers pro¬ blèmes agronomiques qui se posent aussi bien dans les cultures indi¬ gènes que dans les cultures de colonisation. ORGANISATION DES^SERVICES'AGRICOLES Les services agricoles se composent d'un organisme central : l'Inspec¬ tion générale de l'agriculture, de l'élevage et des forêts qui assume une triple fonction : а) Le contrôle technique et professionnel des Services de l'agriculture, vétérinaire et zootechnique, et des forêts; б) La direction des études et travaux d'intérêt général; Chacun des cinq pays de l'Union possède un chef du « Service local d'Agriculture », sous la direction duquel des ingénieurs sont affectés à des secteurs englobant plusieurs provinces. Ces ingénieurs de secteurs sont en contact permanent avec les cultivateurs indigènes et les conces¬ sionnaires, et sont à même de leur donner des conseils judicieux et d'étudier les améliorations, suivant les conditions mêmes du pays (cli¬ mat, main-d'œuvre, etc...), des méthodes de travail. D'autre part, des stations expérimentales ont pour objet l'étude scien¬ tifique des principales cultures, tandis que des stations plus spécialisées ne s'occupent que d'une branche de l'agriculture : stations séricicoles, magnaneries et établissements de grainage, stations de culture pota¬ gère, etc... Les plus importantes de ces stations sont : Tonkin. — Stations de Phu-Ho et de Tuyen-Quang : café, thé, et cul¬ tures diverses de la moyenne région. l'administration française 85 Annam. —- Stations de Cao-Trai : caféier et textiles pour le Nord- Annam. Station de Lang-Hanh : quinquina pour le Lang-Biang. Cochinchine. — Station de Ong-Yen : caoutchouc et cultures diverses. Cambodge. — Station de Battambang : riz, maïs. Laos. — Station de Xieng-Khouang : thé, produits forestiers. Station des Boloven : quinquina et cultures de colonisation pour le Bas-Laos. Les laboratoires scientifiques d'agronomie dépendent de l'Institut des recherches agronomiques, établissement créé en 1925, et qui comprend une section nord-indochinoise et une section sud-indochinoise. Cet éta¬ blissement relève directement de l'Inspecteur général de l'agriculture, de l'élevage et des forêts. Son personnel est réparti dans les divisions de chimie, de phytopathologie et entomologie, génétique, botanique et technologie forestière. Les objectifs principaux suivants ont été fixés aux différentes divi¬ sions : Division de botanique : continuation de l'étude de la flore de l'Indo¬ chine, en liaison avec le Muséum d'histoire naturelle de Paris. Division de chimie : étude systématique des terres volcaniques et des terres de rizière. Division de phytopathologie : contrôle phytosanitaire à l'entrée et désinfection. Etudes des maladies et parasites des plantes de grande culture et du riz. Division de génétique et quarantaine : recherche sur place, introduc¬ tion et création de races et hybrides à haut rendement pour les cultures de colonisation, notamment l'hévéa et la canne à sucre, quarantaine des plantes à l'importation, etc. (Station de Gia-Ray). D'autre part, en 1927, a été créé un bureau d'études d'hydraulique agricole, où des ingénieurs spécialisés (ingénieurs du génie rural) étudient la mise au point et la gestion des périmètres d'irrigation établis par les Travaux publics. CLIMATOLOGIE ET MÉTÉOROLOGIE AGRICOLES L'étude des conditions de l'agriculture en Indochine a décelé au début une lacune importante dans la documentation climatologique et météo- 86 INDOCHINE rologique. Cette lacune était fort gênante pour les services techniques de l'agriculture, car les facteurs climatiques commandent, pour chaque espèce ou variété de plantes, soit la possibilité de la culture, soit telle technique appropriée. C'est en 1926-1927 que, grâce à un accord entre l'Observatoire Central de l'Indochine et l'Inspection générale de l'Agriculture, la création d'un réseau de postes d'observations de météorologie agricole a pu être réa¬ lisée. Il est peu de populations rurales au monde à qui le crédit soit plus nécessaire qu'à celles d'Extrême-Orient : les conditions précaires de l'agriculture, l'extrême densité de la population, le développement de l'usure, la fréquence des inondations, typhons et épizooties, en sont les principales causes. Les premières sociétés de crédit agricole s'organisèrent en Cochinchine en 1913, sous la forme de la mutualité. Actuellement, chaque province cochinchinoise a un établissement de crédit mutuel et, dans ce seul pays, le nombre total des prêts nouveaux s'est élevé en 1929 à 4.545, pour une somme totale de 6.195.000 piastres. Dans les autres pays de l'Union, le crédit populaire agricole fut orga¬ nisé en 1926 et 1927. Un compte spécial d'un million de piastres fut ouvert à la banque de l'Indochine pour financer les opérations des ban¬ ques provinciales. Depuis, l'institution s'est rapidement développée. Actuellement, 10 banques sont en fonctionnement et 4 en voie de création. Elles sont réparties entre le Tonkin (6 banques), l'Annam (4 banques) et le Cambodge (4 banques). Les chiffres ci-dessous donnent une idée de l'importance des affaires traitées par les 10 banques qui sont actuellement en fonctionnement : CRÉDIT POPULAIRE AGRICOLE 1928 1929 Nombre de prêts Montant total des prêts Valeur moyenne des prêts 3.442 22.656 356.067 2.067.825 103.45 91.27 Malgré les prévisions pessimistes, il a été constaté qu'aux échéances le taux des remboursements est plus élevé que dans les institutions ana^ l'administration française 87 logues de la métropole, alors qUe le nombre des prorogations est beau¬ coup plus faible. La convention relative au renouvellement du privilège de la banque de l'Indochine, et annexée à la loi récemment votée, stipule que cette banque mettra des fonds importants à la disposition des caisses locales de crédit agricole. OFFICE DU RIZ L'Office du riz autonome a pour but l'amélioration de la production rizicole, base de l'économie indochinoise. Il s'occupera de toutes les questions d'ordre agricole, industriel et commercial relatives au riz; il sera constitué, dès le début, par une station centrale pourvue de labo¬ ratoire et par des stations régionales. Par décret du 10 avril 1930, l'Office du riz a acquis la personnalité civile. ENSEIGNEMENT AGRICOLE L'enseignement agricole comporte deux degrés : les Ecoles Pratiques de Tuyên-Quang (Tonkin) et de Ben-Cat (Cochinchine) > et l'Ecole supé¬ rieure d'Agriculture et de Sylviculture de Hanoï qui donne un cadre d'agents techniques, auxiliaires compétents des ingénieurs d'agriculture et des inspecteurs des forêts. II SERVICES VÉTÉRINAIRES Comprennent les services locaux des cinq pays de l'Union indochi¬ noise. Chaque service local est divisé en secteurs vétérinaires. Les services vétérinaires sont représentés à l'Inspection générale de 88 INDOCHINE l'Agriculture, de l'Elevage et des Forêts par l'inspecteur des services vétérinaires. Il y a un chef de service local pour chaque pays de l'Union. Les secteurs vétérinaires sont surveillés par des vétérinaires français, assistés de vétérinaires indochinois et d'aides-vaccinateurs. Les services vétérinaires ont pour but la prévention et la guérison des maladies, l'hygiène et l'utilisation des animaux, la lutte contre les épi- zooties, la surveillance des mouvements de bétail (transit, export, im¬ port), l'inspection des viandes, du lait, du poisson et de toutes les den¬ rées alimentaires. Les services vétérinaires s'efforcent de conserver et d'améliorer les races locales par sélection et par croisement avec des reproducteurs améliorateurs (pur-sang arabe pour le cheval, taureaux Sind pour le bovin, Dishley-Mérinos pour le mouton). Les services vétérinaires, manquant de personnel, n'ont pu s'occuper de l'Union, et l'Institut Pasteur de Nhatrang qui est à proprement parler une section vétérinaire des Instituts Pasteur d'Indochine réalise la sta¬ tion vétérinaire expérimentale idéale. Cet établissement fournit les Ser¬ vices vétérinaires en sérums et vaccins. Depuis cette année il prépare le vaccin contre la peste bovine par extraits d'organes formolés. Ce vaccin est d'une efficacité certaine, d'une innocuité absolue. Aussi les populations rurales le demandent avec insistance depuis qu'elles en ont reconnu les bons effets. La peste bovine qui jusqu'à présent mettait en danger le cheptel indochinois fait beaucoup moins de ravages depuis l'application de ce nouveau vaccin et il est permis de penser que, grâce à sa généralisation, on arrivera à vaincre cette terrible maladie. Les services vétérinaires manquant de personnel n'ont pu s'occuper d'installations expérimentales pour l'élevage des volailles et du petit bétail, qui offre cependant en Indochine un très grand intérêt. Ces sta¬ tions permettraient d'étudier les maladies qui déciment les basses-cours, d'améliorer les races déjà existantes, d'en introduire de nouvelles et de rechercher lesquelles s'adaptent le mieux aux conditions de l'élevage indigène. En ce qui concerne l'élevage du cheval, l'infusion du pur-sang arabe semble prouver à l'heure actuelle que l'on peut obtenir un excellent cheval 1/2 sang ou 3/4 de sang annamite-arabe susceptible de rendre l'administration française 89 de bons services et de contribuer heureusement à la remonte de l'armée. L'introduction de taureaux de race Sind a été très satisfaisante. Ces animaux s'acclimatent bien en Indochine, sont très demandés par les laitiers des grandes villes qui, grâce à ces reproducteurs, obtiennent des vaches métisses donnant de 5 à 6 litres de lait par jour. ENSEIGNEMENT VÉTÉRINAIRE Il existe à Hanoï une école vétérinaire de l'Indochine dépendant de l'Université indochinoise. Les élèves sont recrutés parmi les bacheliers ou les candidats pour¬ vus du brevet d'études de l'Enseignement primaire supérieur franco- indigène et ayant subi avec succès le concours permettant l'accès à l'Université indochinoise. L'école est dirigée par un directeur choisi parmi les vétérinaires français. Les cours sont professés par des professeurs de l'Université et par des vétérinaires français chargés de cours. L'enseignement est réparti sur quatre années : Première année. — Botanique, zoologie, physique, chimie, anatomie comparée. Deuxième année. — Anatomie comparée, physiologie, physiologie comparée, histologie normale et pathologique, pathologie générale, para- sitologie, zootechnie générale, hygiène, extérieur et zootechnie spéciale, thérapeutique, pharmacologie, matière médicale, embryologie, térato¬ logie. Troisième année. — Pathologie interne, pathologie chirurgicale, maré- chalerie, législation commerciale, microbiologie, maladies contagieuses et parasitaires, police sanitaire. Quatrième année. — Extérieur et zootechnie spéciale, pathologie in¬ terne, pathologie chirurgicale, maladies contagieuses et parasitaires, po¬ lice sanitaire, déontologie, obstétrique, inspection des viandes et den¬ rées ou produits d'origine animale. L'enseignement théorique est heureusement complété dans chaque chaire et pour chaque matière par des travaux pratiques tels que dis¬ section, clinique journalière, exercices de chirurgie, travaux pratiques 90 INDOCftiNË d'histologie, de microbiologie et de parasitologie, prélèvements sur les animaux morts et vivants. La clinique de l'école, ouverte tous les jours pour les consultations, est gratuite. Elle reçoit annuellement 1.200 à 1.500 chiens ou chats et environ 150 chevaux ou bovidés. Les hôpitaux de l'école peuvent loger 40 petits animaux et 30 chevaux ou bovidés. Une station d'éle¬ vage du service local du Tonkin, installée à Bach Mai, à deux kilo¬ mètres de la ville, permet aux élèves de se familiariser avec les méthodes zootechniques et d'amélioration du bétail pour les races bovine, ovine ou chevaline. Enfin, la proximité de l'abattoir de Hanoï où les élèves sont fréquem¬ ment conduits permet de les préparer à leur rôle si important d'inspec¬ teurs d'abattoirs. Les élèves diplômés de l'école vétérinaire accomplissent un stage com¬ plémentaire de trois mois à l'Institut Pasteur de Nhatrang. Les vétérinaires indochinois sont devenus les auxiliaires précieux des vétérinaires français à la Colonie. Chargés de la surveillance sanitaire d'une province, ils doivent dépister les cas de maladies contagieuses, surveiller les foires et les marchés et prendre toutes mesures utiles pour lutter contre les grandes épizooties qui s'abattent périodiquement sur le cheptel indochinois. Dans les centres où ils résident, ils sont en outre chargés d'assurer les fonctions d'inspecteur des abattoirs. La tendance au relèvement du niveau des études et une sérieuse orientation pratique, conforme aux intérêts de la colonisation et aux besoins des services vétérinaires de tous les pays de l'Union, les ren¬ dront aptes à remplacer, en partie du moins, les vétérinaires français, dont le recrutement devient de plus en plus difficile. Les vétérinaires indochinois, par des conférences, des tracts de vulga¬ risation, des brochures, s'efforcent d'instruire leurs compatriotes sur l'utilité de l'application des mesures sanitaires en cas d'épizooties, sur les méthodes de rationnement, sur les meilleures cultures à introduire pour nourrir le bétail et sur l'amélioration des races. Très bien considérés par les colons européens et par les éleveurs indi¬ gènes, ils sont destinés à jouer un rôle important dans le développement économique de l'Indochine. i/administration française 91 III LES FORÊTS ORGANISATION DU SERVICE Les divers gouvernements des pays qui forment l'Indochine française s'étaient peu préoccupés de questions forestières avant l'occupation fran¬ çaise. Les forêts étaient réputées riches, inépuisables, et les besoins du pays en bois étaient bien loin d'atteindre la possibilité des forêts. La législation forestière annamite se bornait donc à quelques prescrip¬ tions relatives à la protection des boisements dans les enceintes sacrées et près des passages gardés des frontières, à l'interdiction d'exploiter certaines essences réservées pour les besoins de la Cour, du culte et des constructions navales, et à l'interdiction d'exporter la cannelle et le bois de fer. Il n'existait aucun service, aucun fonctionnaire chargé des forêts. Dès l'occupation de la Cochinchine, l'Administration française prit les premières mesures nécessaires pour sauvegarder les forêts de la Colonie et tirer parti de leur exploitation. En 1862, un premier arrêté interdisait la coupe de certaines essences; en 1866 un second arrêté fixait les redevances à percevoir sur les bois qui étaient alors coupés librement. Enfin, en 1875, un texte plus impor¬ tant entrait en vigueur qui réglementait l'exploitation des forêts de l'Etat en Cochinchine, et créait 4 classes de gardes-forestiers placés sous les ordres directs des administrateurs des affaires indigènes. Une Com¬ mission permanente des forêts, chargée d'examiner toutes les questions relatives aux forêts, était également instituée. Elle se composait de : Président : 1 inspecteur des affaires indigènes. Membres : 2 administrateurs; 1 sous-chef des constructions navales; 1 chef de bureau de la direction de l'Intérieur; 1 marchand de bois européen. 92 INDOCHINfi » 1 Cette réglementation resta en vigueur jusqu'en 1892 où, par une modi¬ fication heureuse, la Commission permanente fut complétée par un garde-forestier. En 1894, les fonctionnaires des forêts qui étaient placés sous les ordres directs des Administrateurs des affaires indigènes furent placés sous l'autorité d'un garde général « chargé de la surveillance générale du service des forêts sur tout le territoire de la Cochinchine »; en même temps était créé un personnel d'auxiliaires indigènes. Enfin, en 1897, le département mettait à la disposition de la Cochin¬ chine un officier des eaux et forêts du grade d'inspecteur-adjoint, qui était chargé d'organiser le service forestier dans ce pays et d'assurer la gestion forestière. Jusqu'alors, le service forestier ne s'était guère occupé que de perce¬ voir les redevances pour les bois qui passaient devant les postes, tous établis sur les fleuves. A partir de ce moment, sous la conduite de son chef, le personnel va se familiariser avec la forêt, et le service forestier va étendre son action au Cambodge qui fournissait déjà à cette époque une partie des bois d'œuvre utilisés par la Cochinchine. En Annam, il n'existait alors aucune réglementation forestière et, au Tonkin, on se contentait d'appliquer des taxes aux trains de bois et de bambous. Telle était la situation en 1900 et l'on sentait impérieusement la néces¬ sité de protéger les forêts. C'est alors qu'un arrêté du Gouverneur général en 1900, transformé en décret en 1901, créa un Service général des forêts de l'Indochine; un inspecteur adjoint des eaux et forêts en prit la direction et en prépara l'organisation sur des bases qui sont à peu de choses près celles d'au¬ jourd'hui. Direction générale à Hanoï; chaque pays de l'Union forme une circonscription forestière, subdivisée elle-même en cantonnements forestiers qui sont des organes de contrôle groupant plusieurs divisions forestières. La division forestière, véritable unité de gestion, est dirigée par un agent français; et les massifs boisés dont elle a la gestion sont divisés en triages de surveillance confiés aux gardes indigènes des forêts. Le plan d'action du service est également tracé : 1° conservation du domaine boisé minimum nécessaire au point de vue climatique; 2° cons¬ titution d'un domaine classé, délimité, connu, suffisant pour assurer la l'administration^française 93 production de produits forestiers nécessaires aux besoins du pays et pour l'exportation; 3° organisation intérieure du service; 4° gestion du domaine boisé. En même temps sont mis à l'étude des régimes forestiers propres à chacun des pays de l'Union. C'est en somme de cette époque que date l'organisation sérieuse du Service forestier en Indochine. La gestion forestière de l'Indochine a été confiée à ce service général de 1901 à 1913. En 1913, une réaction décentralisatrice a supprimé ce service général, qui a été remplacé par des services spéciaux à chaque gouvernement local, indépendants administrativement et financièrement les uns des autres; l'organisation actuelle des services forestiers est la suivante : Au Gouvernement général : l'Inspection générale de l'agriculture, de l'élevage et des forêts qui a, dans ses attributions, le contrôle technique des services forestiers locaux, contrôle assuré par l'Inspecteur général de l'agriculture, de l'élevage, et des forêts, aidé par un Conservateur des eaux et forêts, inspecteur des services forestiers locaux. Dans chaque pays de l'Union (sauf au Laos, où le service forestier n'est pas encore installé), un service forestier local placé sous l'autorité des chefs d'administration locale (Gouverneurs de la Cochinchine ou Résidents supérieurs dans les autres pays de l'Union). Chaque service local est chargé de la gestion forestière d'un des pays de l'Union; il a conservé l'organisation intérieure de la Circonscription de 1901, à savoir : cantonnements, divisions, triages, avec les attribu¬ tions respectives citées plus haut de chacun de ces échelons. Chaque service local est dirigé en principe par un Conservateur qui prend le titre de chef de service et est désigné par le Gouverneur géné¬ ral, sur la proposition du chef d'administration locale intéressé et avis de l'Inspecteur général de l'agriculture, de l'élevage et des forêts; le chef de service peut être secondé par des inspecteurs pour le contrôle permanent des divisions. Le cantonnement, chargé de la direction d'un groupe de divisions, est dirigé par un inspecteur ou un inspecteur-adjoint. La division forestière, chargée de la conduite des exploitations et des travaux de mise en valeur du secteur du domaine forestier qui lui est dévolu, est dirigée par un garde général ou un garde principal des forêts, 94 INDOCHINE et quelquefois par un agent technique indigène des forêts (voir au cha¬ pitre : personnels). Le triage, secteur de surveillance, est confié aux gardes indigènes des forêts. PERSONNEL La gestion du domaine boisé de l'Indochine est confiée à un personnel européen local comprenant 190 agents, complété par un personnel indi¬ gène comprenant 31 agents techniques du cadre supérieur et 790 gardes ou brigadiers. personnel européen. — Le personnel européen comprend des Con¬ servateurs, des inspecteurs et inspecteurs-adjoints, des gardes généraux et gardes principaux. Il peut être complété par des agents détachés du cadre métropolitain des eaux et forêts. Actuellement, ces agents de complément sont au nom¬ bre de 6 dont 1 consei-vateur, 2 inspecteurs et 3 inspecteurs-adjoints des eaux et forêts. Le personnel du cadre des divisions (gardes généraux et gardes prin¬ cipaux) est recruté pour les 3/4 des vacances parmi les anciens mili¬ taires, en exécution des lois de 1923 (pensionnés de guerre) et de 1905, 1913 et 1923 (militaires classés) ; pour l'autre quart ou à défaut de militaires classés, parmi les candidats ayant effectivement satisfait, sans exemption ni réforme, à la loi sur le recrutement de l'armée, et justi¬ fiant du diplôme du baccalauréat de l'enseignement secondaire ou du brevet supérieur. Ce personnel est soumis, dès sa nomination, à un stage de formation technique comprenant 9 mois d'études à Hanoï et 3 mois d'application pratique dans une division forestière. Le personnel du cadre des cantonnements et inspections comporte : 1° Des élèves boursiers de l'Indochine à l'Ecole forestière de Nancy; 2° Des inspecteurs-adjoints recrutés parmi les candidats justifiant d'une licence ès sciences ou du diplôme des écoles nationales d'agricul¬ ture, de l'Institut agronomique ou de la Section agronomique de Nogent (cette partie du personnel est soumis, dès sa nomination, à un stage de formation technique d'une durée d'un an). 3° Des gardes généraux et principaux du cadre des divisions ayant satisfait à un concours, Indochine II. Pl. VI. Cliché Gouv. Général Indochine. Hanoi, le fleuve Rouge aux basses eaux. Au fond, le pont Doumer. l'administrât ton française 95 Les emplois de conservateur sont attribués aux agents du cadre des cantonnements et des inspecteurs ayant satisfait à un concours fixé par arrêté du Gouverneur général. personnel indigène. — Le personnel indigène du cadre supérieur (agents techniques) est recruté parmi les élèves diplômés de l'école supérieure d'Agriculture et de Sylviculture de Hanoï. Le personnel indigène du cadre secondaire (service actif) est recruté parmi les candidats anciens militaires classés ou parmi les anciens mili¬ taires des corps de troupe ou de la garde indigène justifiant de con¬ naissances suffisantes en français et en quôc ngu et ayant satisfait à un concours fixé par arrêté du Gouverneur général en date du 4 juillet 1921. A défaut de ces candidats, il est recruté parmi les candidats diplômés d'une école pratique d'agriculture de l'Indochine ou pourvus du certi¬ ficat d'études primaires indigènes. MISE EN VALEUR DU DOMAINE BOISÉ DE L'INDOCHINE Les résultats suivants ont été obtenus dans la mise en œuvre du plan d'action du service forestier tracé dès 1901 : 1° Conservation du domaine boisé minimum nécessaire au point de vue climatique. L'inventaire des forêts est mis à l'étude et les résultats donnés à ce jour permettent l'évaluation approximative suivante du domaine boisé de l'Indochine : Superficie boisée : 31.000.000 hectares, dont : 16 % sont en voie de disparition par la déforestation proprement dite, résultant particulièrement de la pratique du ray (culture par incendie de la forêt) ; 17 % sont appauvris par une intense déforestation économique; 33 % sont constitués par des peuplements encore intacts et inexplorés; 34 % sont accessibles et exploités. La culture par le « ray » est cantonnée sur des surfaces convenable¬ ment choisies et délimitées; les défrichements sont interdits sauf le cas de concessions agricoles. 2° Constitution d'un domaine boisé classé, connu, délimité, suffisant pour assurer la production de produits forestiers nécessaires aux be¬ soins du pays et pour l'exportation. INDOCHINE. T. II. 7 96 INDOCHINE 'Le domaine forestier classé (réserves de production, de protection ou en reconstitution, forêts aménagées) atteint à l'heure actuelle, une superficie totale de 2.620.160 hectares dont 432.743 hectares sont pourvus d'un règlement d'exploitation et exploités méthodiquement. 3° Organisation intérieure du service. Tableau de l'organisation actuelle des Services Forestiers par pays ou services. NOMBRE DE Total des PAYS OU SERVICES. postes par pays. Divisions. Cantonne¬ ments. Inspec¬ tions. Chefferies locales. Existant réellement. Existant réellement. Existant réellement. Existant réellement. Postes existant réellement. Inspection générale... Tonkin 5 40 » 30 » 7 T> » » 3 Annam 45 33 9 1 2 Cochinchine 40 30 7 -» 3 Cambodge Laos 38 0 26 0 8 0 1 0 3 0 Totaux 168 119 31 2 11 4° Exploitation forestière. Exploitation des bois par catégories en 1929 : Bois de luxe : 3.000 m3; bois de 1" catégorie : 147.000 m3; bois de 2e catégorie : 430.000 m3; bois de 3e catégorie : 220.000 m3; bois de 4e ca¬ tégorie : 150.000 m3; soit un total de bois d'œuvre de 950.000 m3. Bois de feu et bois à charbon : 1.076.000 m3. Volume total : 2.026.000 m3. 5° Gestion forestière. Bilan financier des 5 dernières années : Années. Recettes. Dépenses. 1925 2.340.986$30 1.362.476$69 1926 2.639.530 99 1.209.661 81 1927 2.720.986 24 1.392.533 87 1928 2.865.394 96 1.543.152 95 1929 3.260.000 00 1.700.000 00 l'administration française 97 6° Marché intérieur et exportation. Commerce des produits forestiers (moyenne quinquennale). Quantités et valeurs commerciales des produits forestiers : • Bois d'œuvre 700 000 me. 18.000.000 $ Bois de feu 1.000.000 — 4.000.000 Sous-produits 6.000.000 28.000.000 $ Quantités et valeur commerciales des produits exportés : Bois d'œuvre 30.000 m.c. 2.500.000 $ Bois de feu 60.000 m.c. 240.000 Sous-produits 1.400.000 4.140.000 S Quantité et valeur commerciale des produits utilisés dans le pays : Bois d'œuvre 770.000 m.c. 15.500.000 $ Bois de feu 950.000 — 3.760.000 Sous-produits 4.600.000 23.860.000 $ CONCESSIONS, DÉFRICHEMENTS En Indochine, le domaine boisé appartient presque en totalité à l'Etat ou aux communes; les forêts particulières sont l'exception. Il n'est pas accordé de concessions de forêt, mais seulement des con¬ cessions agricoles. Toutefois, des parcelles importantes de forêts ont été concédées pour être défrichées et mises en culture. Le tableau ci-après donne la superficie du domaine boisé qui a été accordée en concession pour être mise en valeur par l'agriculture depuis 1925. Superficie boisée accordée Pays de l'Union en concession agricole. Cambodge 81.007 Ha Cochinchine 208.122 Tonkin 1.082 Annam 40.000 Laos 464 Total 330.675 LA CHASSE rlglementation-de la chasse Les premières mesures de réglementation de la chasse en Indochine datent de 1891 et ont trait surtout à la protection des aigrettes, mara¬ bouts et flamants (Cochmchine), à la réglementation de la capture des éléphants et à l'interdiction de leur destruction. En 1911, un acte du ministre des Colonies mit à l'ordre du jour i'éiude des moyens propres à assurer la conservation et la perpétuation des multiples especes qui constituent la faune sauvage des Colonies. C'est à compter de cette date que les pouvoirs locaux des divers pays de l'Indochine édictèrent des mesures générales protégeant le repeuple¬ ment naturel de la faune par des restrictions apportées, pendant des époques bien choisies pour chaque pays, à l'exercice du droit de chasse, qui fut réglementé tant pour les Européens que pour les indigènes. Le Lang-Bian, région des grandes; chasses, lut en outre divisé en zones réservée, protégée ou libre, où le droit de chasse fut, suivant les zones, plus ou moins strictement réglé. D'autres réglementations intervinrent, très différentes les unes des autres suivant les pays et même suivant les régions, dans leurs dispo¬ sitions essentielles. La nécessité apparut d'édicter pour toute l'Indochine un texte unique fixant les dispositions fondamentales de la réglementation de la chasse et de la protection de la faune, laissant aux pouvoirs locaux le soin d'arrêter les mesures particulières d'application. Le décret du 7 avril 1927 réglementant la chasse en Indochine répond à ces préoccupations; il a été établi suivant les directives du départe- l'administration française 99 ment : « En vue d'enrayer la destruction inconsidérée de certaines espèces animales et d'empêcher leur disparition, il convient de régle- « menter la chasse en Indochine. Le projet de réglementation devra « s'inspirer des décrets intervenus en cette matière le 10 janvier 1925 « pour la Cochinchine, le 10 mars 1925 pour l'Afrique Occidentale fran- « çaise, et qui prescrivent la création de parcs nationaux de refuge pour « les espèces à conserver. » Ce décret a été établi avec le souci de donner à la réglementation cynégétique toute la souplesse nécessaire et d'établir une discrimination non seulement entre les pays différents les uns des autres au point de vue politique, ethnographique et climatique, mais aussi entre les pro¬ vinces d'un même pays. A cet effet, les dispositions du titre I du décret permettent l'application à une région donnée de tout ou partie des dispo¬ sitions qui suivent, ou l'y soustraient complètement si les circonstances l'exigent. La réglementation de la chasse proprement dite fait l'objet du titre II; elle met la chasse à la portée de tous. Dans ce but, il est créé d'autre part une patente de chasse et une licence de destruction; en outre, on a prévu un permis gratuit de capture scientifique et le permis gratuit de ravitaillement pour les colons ou agents européens isolés dans l'inté¬ rieur. Enfin, les indigènes chassant le jour avec arbalètes, épieux, lances, arcs, à l'exclusion d'armes à feu, sont dispensés de tout permis. Le titre III contient les dispositions prises pour la protection de la faune; il prévoit, d'une part, l'établissement de parcs nationaux de refuge, mais surtout, pour le début, de réserves temporaires dont le nombre et l'étendue sont, comme leur création et leur suppression, lais¬ sées à la disposition des pouvoirs locaux; d'autre part, diverses mesures de protection, les unes nécessaires à la sauvegarde de certaines espèces animales intéressantes de plus en plus rares, les autres indispensables pour assurer la sécurité des populations et la protection de l'agriculture. Enfin, il est prévu une série de mesures relatives à l'interdiction de certains engins destructeurs du gibier, à l'interdiction de la chasse à la lanterne et à la circulation des animaux morts et de leurs dépouilles. Le décret édicté en outre une série de pénalités progressives suivant la gravité des infractions commises, règle la procédure en matière de contravention cynégétique, et confie la surveillance de la chasse au per¬ sonnel des Forêts. Centre de Documentation sur l'Asie du Sud-Est et le Monde Indonésien EPHE VIe Section BIBLIOTHEQUE 100 INDOCHINE LA FAUNE SAUVAGE DE L'INDOCHINE L'Indochine et surtout le Sud de l'Indochine et le Laos, est un pays de grande chasse au même titre que l'Inde, l'Afrique australe et les régions du Tchad. Elle a de plus sur ces derniers pays l'avantage de voir ses régions de grande chasse abordées par des routes carrossables bien entre¬ tenues, et situées à proximité des centres. Grâce à la diversité de la faune et à l'abondance du gibier dans ces régions se trouvent ainsi à la portée du chasseur, et suivant ses préfé¬ rences, le grand fauve, le pachyderme, les grands ruminants aussi bien que le lièvre, la bécassine ou le perdreau. Les saisons les plus favorables pour la chasse sont, pour le Sud de l'Indochine, de mai à octobre, et pour le nord, d'octobre à avril. Les différentes espèces de la faune sauvage que le chasseur pourra avoir l'occasion de rencontrer et de tirer sont les suivantes, énumérées par rang de taille : éléphant, abondant dans le Sud de l'Indochine, mais qui se rencontre aussi dans le Haut-Laos et le Tonkin; gaur (Bos Gaurus) Nord de la Cochinchine, Sud-Annam, Bas-Laos et région de Vinh (Nord-Annam) ; rhinocéros, dans les forêts marécageuses et les taillis épais du Sud de l'Indochine; buffle, en troupeaux dans les plaines et les vallées marécageuses du Sud de l'Indochinej bœuf, en troupeaux nombreux dans le Sud de l'Indochine; tigre et panthère, abondants dans toute l'Indochine, se rencontrent aussi bien dans la montagne que dans la plaine boisée, dans la brousse que dans la forêt. chiens sauvages, en bandes nombreuses dans l'Indochine méridio¬ nale; ours de plusieurs espèces : les ours à miel, de petite taille, que l'on rencontre dans la moyenne région de toute l'Indochine; les ours noirs, beaucoup plus gros, qui habitent les régions élevées; sangliers, dans toute l'Indochine, rares dans le Nord; cerfs : l'énumération complète des cervidés d'Indochine nécessiterait plusieurs pages : depuis le cerf d'Eld, de grande taille, jusqu'au minus- l'administration française 101 cule Tragul de la taille d'un gros chat. Répandus dans toute l'Indochine. Plus abondants dans le Sud; crocodiles, abondants dans les marécages de la Cochinchine; singes, de toutes espèces (sauf gorilles et orangs) disséminés dans les forêts de la moyenne région, à travers toute l'Indochine. PETITE CHASSE loutres, dans toute l'Indochine; assez abondantes, difficiles à tirer; lièvres, Sud de l'Indochine; faisans, paons, perdrix, poules et coqs sauvage, caille, bécassine, répandus dans toute l'Indochine; La bécasse, encore assez abondante dans le Nord-Annam et au Tonkin; Les oies sauvages, dans le Nord-Indochinois; Les canards, poules d'eau, répandus dans toute l'Indochine; Les oiseaux à plumage précieux : marabouts dans les régions de Camau, Baria, pélicans et aigrettes, dans les deltas de Cochinchine et du Tonkin et la région des Grands Lacs du Cambodge; Oiseaux de proie : de toutes les tailles, depuis le vautour de 2 m. 60 d'envergure jusqu'au petit épervier; se rencontrent dans toute l'Indo¬ chine. LA PÊCHE NOTE SUR LA RÉGLEMENTATION DE LA PÊCHE EN INDOCHINE PÊCHE EN MER ET EN RIVIÈRE PÊCHE RÉSERVÉE L'Administration française en Indochine a été assez avisée pour n'in¬ troduire dans la réglementation de la pêche de notre colonie d'Asie tropicale qu'un minimum d'éléments empruntés à la législation euro¬ péenne. L'examen des textes qu'elle a établis, à ce sujet, ainsi que de toutes les mesures qu'elle a prises, révèlent que la réglementation indo¬ chinoise, consciente de la délicatesse et de la difficulté de sa tâche, a été très discrète dans ses essais de transplantation en Asie des règles cou¬ ramment appliquées en Europe. (Voir ci-dessous l'indication des arrêtés publiés sur la réglementation de la pêche en Indochine.) Elle s'est bornée à maintenir en vigueur et à faire respecter les innom¬ brables coutumes de détail et les usages locaux de l'organisation indi¬ gène. Elle a même été assez sage et assez libérale pour résister aux sug¬ gestions parfois pressantes de législateurs métropolitains auxquels leur ignorance des conditions de la pêche dans les eaux tropicales faisait paraître sans conséquence et sans danger l'application en Indochine de principes acquis par l'expérience métropolitaine. C'est ainsi que l'Indochine s'est trouvée menacée il y a quelques années d'un projet de réglementation venu de France, qui avait pris pour base de son inspiration l'idée, courante en Europe, d'interdire sans dis¬ cernement et sans dérogation les filets dont le maillage est au-dessous de 25 mm. Si pareil régime avait été accepté, appliqué et respecté en Indochine, le tonnage de la pêche dans les eaux maritimes indochinoises l'administration française 103 se fût trouvé diminué de plus d'un quart. Il faut, en effet, savoir qu'il existe dans toute la partie tropicale de l'immense province maritime indo-pacifique, des êtres de très petite taille qui sont utiles à l'homme, et ne peuvent être capturés qu'avec des engins de maillage prohibé et même impossible à concevoir en Europe. Citons, par exemple, le Stolephorus Commersoni (ca com), variété d'anchois minuscule; les M y sis (con ruoi), crustacés de quelques milli¬ mètres de long; les Palolos (Tylorynchus), annélides faisant leur appa¬ rition périodique par essaims dans les eaux saumâtres du Nord de l'Indochine. Tous ces êtres, dont les deux premiers constituent des res¬ sources essentielles pour les populations côtières, étant donné l'exiguïté de leur taille, ne peuvent être capturés qu'avec des filets de maillage approprié (Mysis, un millimètre et demi de diamètre; Stolephorus, six à sept millimètres; Tylorynchus, six millimètres de diamètre). Cet exemple montre à quel point il fallait se garder de copier, d'appli¬ quer aveuglément, en Asie tropicale, des règles qui ont été créées pour l'Europe tempérée. Même lorsque ces règles paraissent simples et saines, on peut être assuré que cette application réservera toujours des sur¬ prises. L'administration de l'Indochine a donc compris avec quelle mesure elle devait agir devant les habitudes de ce pays, et elle s'est contentée de frapper d'interdiction des pratiques brutales comme la pêche aux explo¬ sifs, ou l'usage de stupéfiants ou de poisons végétaux dans les rivières ou les collections d'eaux douces. Elle s'est également préoccupée de prendre des mesures et d'établir des primes pour encourager des essais d'industrie de chalutage. Enfin, après une étude faite par l'Institut Océanographique sur la biologie des forêts inondées qui constituent la ceinture forestière du Grand Lac du Cambodge, étude qui a établi le rôle prépondérant de cette forêt dans le développement des alevins et des jeunes poissons, et qui par là met en évidence son importance économique, l'adminis¬ tration indochinoise a fait prendre par l'intermédiaire de son service forestier un ensemble de mesures réglementant la coupe des bois dans cette forêt, de manière que le régime biologique auquel le Grand Lac doit son exceptionnelle richesse ne se trouve pas troublé. Il n'y a donc que très peu de chose à dire de la part prise par l'admi¬ nistration française dans la réglementation de la pêche en Indochine. 104 INDOCHINE Des pratiques séculaires en usage dans toute l'Asie tropicale et parti¬ culièrement respectées sur les côtes d'Annam et sur celles du Golfe de Siam, soit en mer, soit dans les lagunes, soit dans les fleuves ou les collections d'eau douce si poissonneuses dans ce pays, ont amené les indigènes à constituer et à délimiter des territoires de pêche dont les revenus, soit en nature, soit par fermage, sont attribués, tantôt aux communes et aux villages, tantôt aux provinces, tantôt à des unités administratives d'ordre plus élevé. C'est ce dispositif que l'administration indochinoise a eu la sagesse de respecter dans son ensemble. Malgré les retouches de détail qu'elle lui a fait subir, suivant les circonstances, pour remédier à des abus, améliorer son rendement ou assurer la conservation du poisson en le préservant d'une destruction sans profit, c'est lui qui constitue encore aujourd'hui la base de la réglementation actuelle de la pêche. Pour permettre au lecteur de saisir quelques-uns des détails de cette organisation et surtout d'en comprendre l'importance économique, nous donnerons deux exemples de l'application de ces usages, l'un pris au Tonkin : Grand Lac de Hanoï; l'autre pris au Cambodge : ensemble des fermes de pêcherie du Cambodge. Le Grand Lac situé à proximité de la ville de Hanoï est affermé depuis de longues années par voie d'appel d'offres : la durée du fermage est de 3 ans. Toute l'organisation de détail de cette pêche est laissée à l'initiative des fermiers. Aucune disposition particulière n'est prévue sur le cahier des charges. Toutefois, le droit de pêche que confère cet affermage ne peut être exercé qu'en suivant les règles fixées par l'arrêté du 20 août 1908 ainsi que toutes les autres prescriptions en vigueur réglementant la pêche au Tonkin. C'est ainsi que sont interdites la pêche aux explosifs et la pêche à l'aide de poisons ou de stupéfiants. Pour maintenir la richesse ichtyo- logique du Grand Lac, des alevins des poissons appartenant aux espèces les plus intéressantes y sont introduits chaque année par les soins du fermier. Ce n'est pas seulement le droit de pêche qui est affermé, mais aussi la récolte des nénuphars, qui représente une part très importante des revenus des fermiers. Signalons une charge très lourde qui incombe depuis quelques années l'administration française 105 au fermier d'après les termes de son contrat, c'est l'enlèvement des lue binh (Eichornia crassipes) qui, ainsi que l'on sait, envahissent de plus en plus le Grand Lac de Hanoï et toutes les collections d'eaux douces de l'Indochine. Ce travail de nettoyage aurait occasionné au fermier actuel une dépense estimée environ à 4.000 piastres. Le renouvellement de la ferme du Grand Lac a eu lieu le 1er janvier 1930; il a été attribué pour une durée de 3 années, moyennant une rede¬ vance annuelle de 12.365 piastres. Malgré le montant très élevé de cette redevance et malgré toutes les dépenses qui sont à la charge du fermier, ce dernier réalise un béné¬ fice net annuel qui était évalué pour les deux dernières années à 13.000 piastres environ : soit 7.000 piastres de revenu annuel pour la pêche et 6.000 piastres pour la récolte des nénuphars. Les pêcheries du Cambodge constituent une ressource d'une impor¬ tance telle pour ce pays qu'il est nécessaire d'en dire quelques mots. Sous le régime de l'administration cambodgienne, tous les lieux de pêche reconnus, aussi bien sur la côte que dans les fleuves et dans le Grand Lac, à l'exception d'un très petit nombre d'entre eux réservés par la coutume aux habitants des villages, formaient une seule ferme géné¬ rale. Des abus éclatants ont amené la suppression de cette ferme géné¬ rale (ordonnance royale du 22 mai 1908). Cette mesure avait été motivée par les prix dérisoires que les soumis¬ sionnaires de la ferme générale offraient au Gouvernement après entente mutuelle. Un essai de fermage global fut sans plus de succès confié à un Cambodgien choisi par le Gouvernement. A partir de ce moment, l'administration indochinoise s'est trouvée amenée à fragmenter son domaine de pêche en une série de lots. Elle déterminait en même temps avec précision la surface géographique de chacun de ces lots. En outre, une succession d'ordonnances royales (16 juillet 1908, 28 octobre 1909, 20 septembre 1917) ont étudié et institué des taxes por¬ tant sur l'usage des engins de pêche. L'évolution de cette réglementation qui se précisait en s'améliorant chaque fois que surgissaient de nouvelles difficultés, a conduit l'admi¬ nistration à délimiter avec une rigueur de plus en plus grande les lieux de pêche. Enfin, pour éviter les abus qui résultaient de la pratique des sous-fermages, l'administration cambodgienne a été amené? à réduire 106 INDOCHINE peu à peu l'importance des lots à affermer et à morceler ainsi son immense domaine de pêche. Cette politique qui a donné d'excellents ré¬ sultats a été inaugurée sérieusement à partir de 1920. Par étapes succes¬ sives, mais surtout en 1923 et en 1929, le morcellement s'est étendu à presque toutes les provinces du Cambodge. Voici un tableau qui réunit dans ses colonnes des renseignements sta¬ tistiques relatifs aux revenus des lots de pêche et aux taxes perçues sur l'usage des engins de pêche depuis l'année 1928 : Produits de l'affermage des pêcheries du Cambodge en 1928-29-30 et taxes sur les engins de pêche perçues pendant les années 1928 et 1929 RÉSIDENCES PÊCHERIES ENGINS DE PÊCHE 1928 1929 1930 1928 1929 Battambang « 108.y50 S 120.335,00 S 168.675,00 S 1.886,18 $ 1.248,27 Kampot 42.130 50.356,66 55.690,00 698,40 934,10 Kandal 191.300 220.075,00 333.675,00 2.952,05 2.915,55 Kompong-Cham 65.000 73.585,00 107.925,00 2.635,37 3.025,35 Kg.-Chhnang 97.015 115.075,00 187.340,00 8.327,43 7.947,36 Kompongthom 72.525 84.705,00 137.525,00 2.090,55 1.409,05 Kratié 10.255 12.117,75 19.425,00 855,20 773,91 Prey-Veng 92.425 96.390,20 154.251.00 1.665,64 412,60 Pursat 50.900 51.490,00 53.850,00 10.520,50 9.601,00 Siemréap 2.600 3.701,00 8.105,00 3.281,82 5.833,85 Stung-Treng » » » 333,70 302,15 Takeo 51.625 70.505,00 128.125,00 » > Mairie 1.045 1.055,00 605,00 » » Totaux 785.070 899.390,61 1.355.191,00 35.246,84 34.403,19 On voit l'importance que présente pour le budget du seul Cambodge l'affermage de son beau domaine de pêche. l'administration française 107 ARRÊTÉS CONCERNANT^LA^PÊCHEiEN^INDOGHINE 1° Arrêté du 11 octobre 1899; 2° Arrêté du 20 août 1908 (interdiction de la pêche par les explosifs et par les poisons ou stupéfiants) ; 3° Premier arrêté du 9 novembre 1920; 4° Deuxième arrêté du 9 novembre 1920; 5° Arrêté du 12 novembre 1920 (prime au chalutage) ; 0° Arrêté du 25 avril 1923 (interdiction de la récolte des œufs de tortues de mer); 7° Arrêté du 6 octobre 1923 (prime au chalutage) ; 6" Arrêté du 2 juillet 1925 (réglementation de la chasse à la baleine). NOTE SUR LES CONDITIONS D'OPPORTUNITE DE LA PROMULGATION EN INDOCHINE DE LA LOI DU 1er MARS 1S83 (Limites de la mer territoriale et limites de la zone de pêche réservée.) On ne peut songer à laisser promulguer en Indochine un décret ren¬ dant valable pour ce pays une convention internationale qui vise au maintien de l'ordre et de la sécurité des mers, sans avoir pris, au préa¬ lable, toutes les mesures qu'impose le dangereux voisinage de la Chine. La République chinoise, que son anarchie constitutionnelle voue aux désordres intérieurs de toute nature, expose en même temps les nations civilisées de son entourage aux conséquences de sa désorganisation per¬ sistante. Un tel état de choses crée, pour ceux de ses voisins qui ont la volonté et les moyens de faire respecter l'ordre, l'obligation de parer à i'inca- pacité chronique de la Chine : c'est là l'origine proionde des droits de contrôle général et de surveillance policière et fiscale que l'Indochine a eu la sagesse de s'arroger dans les parages de ses eaux qui sont le plus fréquentées par les navigateurs et les pêcheurs chinois. Cette situation de fait, créée par nous-mêmes, en dehors de tout accord international, pour sauvegarder le maintien de l'ordre et assurer la paix et la possibililté de l'activité maritime dans les secteurs les plus mena- 108 INDOCHINE cés de la Mer de Chine, est d'ailleurs parfaitement acceptée, ainsi que la réglementation qui en dérive, par les Chinois eux-mêmes, qui ont comme l'obscure conscience d'en être les premiers bénéficiâmes. Il n'y a aucune raison pour transformer ce modus Vivendi établi sur l'expérience, tant que le régime d'incessantes difficultés et de désordres qui l'a fait naître ne se modifiera pas lui-même. Pour les eaux du golfe du Tonkin, je conclus donc au maintien des mesures de police maritime prises vis-à-vis de la Chine* avec toutes leurs conséquences douanières et fiscales, que le Gouvernement de l'Indo¬ chine a été amené à édicter. Par contre, aucune des raisons que nous venons de faire valoir pour exclure la Chine d'une participation aux conventions internationales qui régissent la police de la mer ne peut être invoquée pour motiver un refus d'adhésion de l'Indochine à une entente avec les nations mari¬ times civilisées. Il importe même pour l'Union indochinoise d'aller au- devant d'une pareille entente pour bénéficier, en prenant cette initiative, de conditions plus favorables lors de la détermination des modalités d'application de la convention visée par le décret du 9 décembre 1926. Il convient donc d'aborder, dès maintenant, l'exposé de ces conditions et des bases sur lesquelles aurait à s'appuyer l'Indochine pour faire prévaloir son point de vue. Ainsi que la lecture de cette note en donnera la preuve, une réglemen¬ tation qui a pris naissance en Europe et qui a été conçue pour favoriser le régime national de la pêche dans les mers des régions froides, ne saurait s'appliquer, sans préoccupation d'une adaptation éclairée et sans retouche, aux mers tropicales, qui constituent un domaine biolo¬ gique tout à fait différent et impliquant des techniques de pêche incon¬ nues dans la zone tempérée. Les idées qui dominent l'histoire de ce point particulier de la légis¬ lation internationale ont pour point de départ la définition convention¬ nelle de la zone que l'on désigne sous le nom de « mer territoriale » (voir Pandectes Français, édition 1892, tome 27, Douanes, page 293 — Lois du 4 germinal an II — Cassation, 9 messidor an VII). Aux termes de cette définition, les droits territoriaux des Etats s'étendent en mer jus¬ qu'à deux myriamètres de leurs côtes maritimes, c'est-à-dire de la laisse des eaux au moment des plus grandes basses mers. Or, c'est à trois milles seulement, c'est-à-dire à moins du tiers de l'administration française 109 l'étendue légale de la mer territoriale que la France et l'Angleterre, dans une entente commune qui est la première en date, sont convenues de li¬ miter la largeur de la zone de pêche exclusive réservée à leurs nationaux. Cette importante restriction volontaire de l'extension de la surface sur laquelle peuvent s'exercer leurs droits de pêche exclusive a paru, à l'usage, donner satisfaction aux premiers contractants qui en ont fait l'essai, puisque, par la suite, toutes les autres nations maritimes qui ont adhéré à cette réglementation ont adopté son principe sans soulever d'objection. Seule, toutefois, l'Espagne, pour des raisons qui tiennent à la configu¬ ration géographique de ses rivages, et par suite à la nature des phéno¬ mènes biologiques qui règlent l'aflux du poisson sur ses côtes océa¬ niques, est restée fidèle à la définition primitive du domaine territorial maritime et a pris, pour limite de sa zone de pêche réservée, les limites assignées à la mer territoriale, soit deux myriamètres. Au moment où l'Indochine, sur la sollicitation de la France, est appe¬ lée à participer à une entente internationale sur la limitation et la régle¬ mentation de ses eaux territoriales et de ses zones de pêche, une étude s'impose sur le fond même de la question, c'est-à-dire sur les conditions naturelles de la pêche maritime sur les côtes de la Mer de Chine. C'est sur les résultats de cette expérience que doit être fondé l'ensemble des idées directrices qui prépareront le travail du législateur, en lui per¬ mettant de porter un j ugement éclairé sur les conditions dans lesquelles l'Union Indochinoise doit donner son adhésion à la convention inter¬ nationale visée par la loi du 1er mars 1888. Pour apporter plus de concision dans cette partie de notre exposé, nous résumerons ici les idées nouvelles que le Service Océanographique a introduites récemment dans nos connaissances sur le régime de la répartition du poisson dans les eaux indochinoises et sur les techniques de pêche qui en résultent. Les derniers travaux de cette institution, qui confirment les résultats et les conclusions de deux années de recherches antérieures, établissent que ce ne sont point les surfaces propres au chalutage qui font défaut dans la Mer de Chine. Son immense plateau continental est accessible dans toute son étendue aux engins traînants : mais c'est le poisson cha- lutable qui manque. Les conclusions aujourd'hui établies sur les don¬ nées des campagnes de 1925, 1926 et 1927 permettent de fixer entre 50 110 INDOCHINE à 100 kilos de poisson par heure de trait pour une vitesse de drague d'environ trois nœuds, avec un chalutier de quatre cents chevaux de force, les moyennes de captures les plus favorables. Les autres conditions économiques de l'industrie de la pêche en Indo¬ chine, qui sont liées aux circonstances naturelles, et sur lesquelles l'homme ne peut exercer aucune action directe ou immédiate, ne per¬ mettent pas, vu cette aussi faible densité de poisson, de conseiller le chalutage à vapeur dans les eaux indochinoises. Ce jugement est valable pour la presque totalité de l'étendue du plateau continental de la Mer de Chine, relativement très pauvre. Par contre, les conclusions favorables qui ont été portées par le Ser¬ vice Océanographique, dès la première année de ses recherches, sur l'avenir industriel du chalutage pratiqué par les méthodes européennes dans les parages de la côte Sud de la Cochinchine, se sont trouvées for¬ tifiées et précisées par les travaux effectués dans le courant de 1926 et 1927. Le chalutier du Service, le « de Lanessan », a travaillé sur ces bancs pendant les derniers mois de 1926 et les premiers mois de 1927, au mo¬ ment où commence à s'effectuer le rassemblement de poisson. Les infor¬ mations recueillies au cours de cette campagne ont permis de limiter l'extension vers le large de ces importants bancs de pêche. Il s'est confirmé cette année que cette zone ne constitue qu'une étroite lisière, suivant fidèlement à petite distance les côtes de la Cochinchine. On peut considérer comme une règle générale qu'elle n'atteint jamais les fonds de trente mètres. Il résulte de ces constatations une consé¬ quence qui présente un grand intérêt pour l'Indochine. Nous la résu¬ mons ici brièvement. Le fait que la zone de forte densité ichthyologique affecte la forme d'une longue bande très étroite parallèle au rivage, et très proche de la laisse des basses mers, permet d'évoquer ici le problème que va poser l'exploitation de ces bancs par des organisations de pêche étran¬ gères, lorsque, dans quelques années, les faits récemment découverts seront connus. La question qui doit dès maintenant préoccuper les pouvoirs publics est donc de savoir si l'exploitation de ces bancs pourra être réservée à l'Indochine seule, c'est-à-dire si elle pourra être rattachée à la zone de pêche réservée de ses eaux territoriales. . ----- l'administration française 111 Bien que ces bancs soient situés à une très faible distance de la côte, ils s'étendent tous à une distance supérieure à trois milles de la laisse des plus basse mers. Si le Gouvernement général venait à donner, sans réserve, son adhésion à la convention internationale actuellement en vigueur, la plus grande étendue des bancs récemment découverts, qui se trouvent cependant situés dans les eaux territoriales de l'Indochine, seraient en dehors de sa zone de pêche réservée, et leur richesse échap¬ perait au patrimoine de ce pays pour tomber dans le domaine des eaux internationales dont l'exploitation est ouverte à tous. Mais l'Union Indochinoise ne fait pas encore partie du groupement d'Etats qui a restreint, pour la pêche, l'extension de ses eaux territo¬ riales à trois milles. Rien ne s'oppose à ce qu'elle fixe la limite de son domaine à deux myriamètres, comme l'a fait l'Espagne en Europe dans le but de réserver à ses nationaux les abords de sa côte atlantique si poissonneuse. Un ensemble de circonstances et de conditions géogra¬ phiques, géologiques et biologiques, crée une certaine similitude d'inté¬ rêts entre l'Indochine et l'Espagne : en particulier cet afflux de poisson de surface dont la pêche sur les côtes indochinoises de la Mer de Chine s'effectue par des procédés qui ne sont pas sans analogie avec ceux que mettent en œuvre les pêcheurs espagnols sur leurs côtes océaniques. Mais le fait qui suffirait à lui seul pour décider l'Indochine à choisir cette limite de deux myriamètres, comme nous le suggérons, c'est que la zone territoriale qu'elle créerait ainsi autour de la Cochinchine com¬ prendrait la presque totalité des bancs dont nous avons signalé l'inté¬ rêt et déterminé les limites d'extension vers le large. Ndus estimons que le tonnage annuel de poissons susceptible d'être péché avec une organisation appropriée à proximité des côtes de la Cochinchine s'élève à cent mille tonnes. Ces cent mille tonnes de pois¬ sons, qui constituent une acquisition de matière alimentaire entièrement nouvelle pour l'homme, représentent pour l'Indochine, au prix indus¬ triel minimum de vingt piastres la tonne, une dotation annuelle de deux millions de piastres. Pourra-t-il paraître négligeable de laisser tomber pareille ressource dans le domaine international, alors que les recherches modernes établissent l'extrême pauvreté des fonds chalutables dans les mers tropicales du bassin Indo-Pacifique, et que celles du Service Océa¬ nographique, en particulier, ont étendu cette notion à presque toute la surface du plateau continental indochinois? INDOCHINE. T. II. 8 112 INDOCHINE Il nous suffira de rappeler ici l'âpreté des conflits qui s'élèvent chaque année sur les lieux de pêche des mers européennes au sujet des privi¬ lèges de cet ordre, pour faire comprendre que nous agirions à la légère si nous ne nous efforcions pas, par tous les moyens que les conventions internationales mettent à notre disposition, de faire entrer dans la zone réservée de nos eaux territoriales, les bancs de pêche exceptionnels qui se forment devant les deltas du Mékong et du Bassac pendant la brève période au cours de laquelle le Grand Lac écoule ses eaux et ses pois¬ sons vers la mer. Les premières communications du Service Océanographique (voir les rapports de 1925 et 1926) ont en effet eu pour résultat principal de montrer les relations qui existent entre le Grand Lac cambodgien et la richesse ichthyologique des fonds en face des embouchures du Mékong et du Bassac. L'origine lacustre, c'est-à-dire continentale, de la formation des bancs de pêche qui cernent d'un mince liseré la côte cochinchinoise est une raison de plus à faire valoir en faveur de l'extension à deux myriamètres de la limite des eaux territoriales dans ce secteur privilégié de la côte indochinoise. Tels sont les éléments d'appréciation et de jugement, fondés sur l'étude scientifique, qui peuvent être mis à la disposition du législa¬ teur, l'armer dans sa recherche des meilleures formules de réglementa¬ tion, et dans l'établissement des garanties qui entoureront l'adhésion de l'Indochine à la convention internationale visée par la loi du 1er mars 1888 et par le décret du 9 décembre 1926. MINES ET INDUSTRIES I. - ORGANISATION DE L'INSPECTION GÉNÉRALE DES MINES ET DE L'INDUSTRIE L'Inspection générale des Mines et de l'Industrie, organisée par arrêté du Gouverneur général du 26 août 1929, comprend : Des Arrondissements Minéralogiques et Industriels; Un Service d'Administration et du Contentieux; Le Service de la Statistique générale; Le Service Géologique; Les Laboratoires. , ARRONDISSEMENTS MINÉRALOGIQUES ET INDUSTRIELS Ces Services ont les attributions suivantes, dans le territoire qui leur est assigné : 1° Préparation et application des règlements concernant : La propriété, la recherche et l'exploitation des mines et des sources d'eau minérale (charges fiscales spéciales y compris) ; La police de l'exploitation des carrières; La police des industries dangereuses, incommodes et insalubres et, en particulier, de la fabrication et de la mise en dépôt des explosifs, et de l'emploi des appareils à vapeur autres que ceux qui sont placés sur les bateaux; L'hygiène et la sécurité du travail dans les mines, dans les carrières et dans tous ateliers industriels; 2° Rassemblement critique de la statistique intéressant l'industrie. 114 INDOCHINE Préparation de la mobilisation industrielle dans le cadre de l'organi¬ sation générale de la mobilisation économique; 3° Reconnaissance des gisements miniers exploités ou prospectés en Indochine; études de géologie appliquée, en liaison avec le Service Géo¬ logique. Etude de toutes questions techniques intéressant l'industrie, autres que celles qui ressortissent aux disciplines biologiques; 4° Etude de toutes questions économiques relatives aux industries ayant pour objet l'extraction, la préparation, la transformation phy¬ sique ou chimique ou l'élaboration mécanique des substances minérales. En particulier : collaboration à l'étude de l'aménagement des forces hydrauliques en tant qu'il intéresse les dites industries, et examen des répercussions économiques, sur les mêmes industries, des taxes géné¬ rales, telles que les tarifs douaniers, taxes à l'importation, à l'exporta¬ tion et à la production, tarifs de transport, etc. qui en frappent les produits. SERVICE D'ADMINISTRATION ET DE CONTENTIEUX Le Service d'Administration et de Contentieux est chargé de la pré¬ paration et de l'application, au point de vue juridique, de la législation et de la réglementation minières et industrielles, et en particulier, de l'instruction, à ce point de vue, des demandes en concession de mines ainsi que de toutes affaires contentieuses de l'Inspection générale. SERVICE DE LA STATISTIQUE GÉNÉRALE Le Service de la Statistique générale est chargé : 1° D'établir les statistiques générales (recensement y compris) et les inventaires généraux de l'Indochine; 2° De donner des conseils techniques à tous autres Services généraux ou locaux pour la préparation de leurs statistiques et inventaires spé¬ ciaux; 3° D'exécuter les études, de rassembler la documentation, de pré¬ parer les publications se rapportant aux statistiques et inventaires ou fondées sur leur utilisation; 4° D'assurer la rédaction des annuaires statistiques, des annuaires économiques, des renseignements statistiques et économiques à publier par le Bulletin économique. , l'administration Rrançaibe 115 SERVICE GÉOLOGIQUE Le Service Géologique est chargé de l'établissement de la carte géolo¬ gique et des études de géologie et de géophysique intéressant l'Indochine (stratigraphie, tectonique, paléogéographie, lithologie, volcanologie, oro¬ génie, etc.; paléontologie; anthropologie préhistorique, y compris l'étude de l'outillage lithique). LABORATOIRES Le Laboratoire de Chimie minérale est chargé de la détermination minéralogique et de l'analyse chimique des substances minérales, des essais chimiques des produits minéraux (contrôle des matières pré¬ cieuses y compris) ; des études et recherches de physique et de chimie appliquée intéressant les industries qui extraient, fabriquent ou uti¬ lisent les substances ou produits minéraux. Le Laboratoire d'Essais de résistance des matériaux est chargé des essais mécaniques des matériaux de toute nature, et des études et des recherches portant sur la structure de ces matériaux. II. - PRINCIPES DU DROIT MINIER ET TAXES MINIÈRES La base de la réglementation actuelle est le décret du 26 janvier 1912, fondé sur le principe de la « mine à l'inventeur ». Au lieu de faire de l'institution de la propriété minière un acte de pur droit régalien comme dans la métropole, il a paru nécessaire, étant donné la difficulté des explorations, de réserver au prospecteur la pro¬ priété du gisement qu'il a découvert. Aucun permis de recherches, aucune concession de mines ne peuvent être accordés qu'à des personnes ou Sociétés préalablement munies d'autorisations personnelles délivrées par les chefs d'administration locale et valables pour le pays de l'Indochine sur lequel s'exerce leur autorité. Munie de cette autorisation, toute personne ou société peut, par simple déclaration déposée chez le chef du district minier correspondant, obte¬ nir un permis de recherches dans un périmètre limité par un carré de 3 kilomètres de côté et dont le centre est fixé par la déclaration. (La délivrance du permis est simplement subordonnée au paiement d'un certain droit fixe qui est actuellement de 500 francs.) INDOCHINE Etain et tungstène Ton/tin / 1930.000 f) Zinc (I 375.000 tl kCho Dien Hongay Mao Kha Anthracite 19.910.0001) Anthracite 11.540.000 i) Anthracite ! 1.200.000$) VIENTIANE Etaln Laos (956.000 f) 'BaUarrmqng ! Phosphate} PHNOMPENH SAIGOI Kampotv (Phosphate, Principales productions minières en 1929 (en piastres). l'administration française 117 Le permis de recherches est valable trois ans et, passé ce délai, il est annulé s'il n'a pas donné naissance à une demande en concession; si les titres du demandeur sont réguliers et s'il n'y a pas de droit dérivant de permis antérieurs, la concession ne peut pas être refusée et est ins¬ tituée par arrêté du Gouverneur général. La demande en concession est soumise à un droit d'enregistrement de 500 francs et un droit pour frais d'instruction (vérification du plan accompagnant la demande) de 50 piastres. La concession est perpétuelle et donne droit à l'exploitation de toutes substances minérales, sous réserves de paiement d'une redevance annuelle (2 francs par hectare pour l'année qui suit celle de l'institu¬ tion de la concession, 4 francs à partir de la 5e année jusqu'à la 10°, et 6 francs à partir de la 10e année — article 48 du décret du 26 janvier 1912). La révision de cette taxe est actuellement à l'étude, en même temps d'ailleurs que la révision du régime minier. Outre les divers droits d'enregistrement pour les permis de recherches et les demandes en concession, et les redevances superficiaires, les pro¬ duit miniers extraits sont passibles : 1° D'une taxe à la production qui a remplacé pour les mines la taxe de 2 % ad valorem (décret du 22 avril 1927) ; cette taxe a été approuvée par décret du 12 juillet 1928 en ce qui concerne le mode d'assiette et les règles de perception, le montant de la taxe étant fixé par arrêté du Gouverneur général; 2° De droits de sortie frappant uniquement les charbons et qui ont été fixés en 1926 à 10 cents par tonne exportée. Les produits miniers exportés, comme d'ailleurs tous les produits sor¬ tant de la Colonie, paient un droit de statistique de quatre cents par tonne. Le remaniement de ces différentes taxes est actuellement à l'étude. III. — INDUSTRIE MINIÈRE A. — EXPLOITATION L'industrie minière constitue une des principales ressources de l'Indo¬ chine; elle vient, en effet, au point de vue des exportations, au second rang, bien avant le caoutchouc, et après le riz qui reste toujours et de beaucoup la principale production de l'Indochine. 118 INDOCHINE La valeur de la production minière indochinoise n'a pas cessé de croître depuis 1920, époque à laquelle elle n'était que de quatre millions 10.000.000- 0 1 1323 192't 1325 1326 1927 1928 1923 Valeur de la production minière en Indochine (en piastres). et demi de piastres; elle est restée stationnaire ces deux dernières années. 20.000.000-r 15.000 000- 5.000.000- Anthpacites Combustibles divers Divers Etain Laos Etain et tungstèneTonkin l'administration française 119 1923, 9.571.000 piastres indochinoises 1924, 11.375.000 — — 1925, 13.753.000 — — 1926, 14.885.000 — — 1927, 16.513.000 — — 1928, 18.260.000 — — 1929, 18.587.000 — — L'accroissement est dû pour la plus grande partie â un accroissement réel du tonnage produit et, de 1923 à 1925, à l'augmentation du prix des minerais. Cependant, cette dernière cause a plutôt agi en sens inverse depuis 1926, comme on le verra plus loin. Une grande partie de cette production est exportée, l'accroissement de la valeur de l'exportation étant parallèle à celle de la production. 1926, 10.200.000 piastres indochinoises 1927, 11.400.000 — — 1928, 11.400.000 — — 1929, 12.430.000 — — La production minière indochinoise reste presque uniquement con¬ centrée au Tonkin. La production du Laos est exclusivement de l'étain; celle du Cambodge exclusivement des pierres précieuses; celle de l'Annam comprend du charbon et des phosphates. Il n'y a aucune production en Cochinchine. Le fait caractéristique est la rapide progression de la production du Laos qui a plus que triplé en quatre ans. VALEUR DE LA PRODUCTION ANNUELLE 1923-1929 PAR CATÉGORIE DE PRODUITS 1923 1924 1925 1926 1927 1928 1929 Combustibles 7.571 8.705 9.823 9.479 11.410 14.202 14.371 Zinc 1.239 1.668 2.520 3.718 2.924 2.145 1.783 Plomb et argent » » » T> » » 7 Etain et tungstène... 658 894 1.206 1.435 1.804 1.706 1.946 Phosphates » » 417 467 295 440 Graphite » X> » 150 53 ï ~D Pierres précieuses 50 44 53 28 34 40 34 Divers 4 1 2» I» 2) » 6 Totaux 9.522 11.312 13.602 15.227 16.692 18.388 18.587 en milliers de piastres indochinoises. 120 INDOCHINE Les combustibles représentent à eux seuls : En 1926, 71 % de la valeur totale de la production En 1927, 70 % — En 1928, 77 % — En 1929, 77 % — Ensuite viennent les mines de zinc pour 18 % en 1926, 17 % en 1927, 12 % en 1928, 9 % en 1929. £U.UOU.UOO-r 15.000.000 10.000.000- 5.000.000- 0 18.260.000 1MI3.000 18587000 ÎL375.000 13752000 14^885.000 / 3.571.000 - Production totale Combustibles ËtainfTungstène) Zinc (Plomb. Argent) 1923 1924- 1325 /226 1327 1326 1323 Valeur en piastres de la production annuelle des mines Indochinoises. Répartition de cette valeur entre les trois principales productions et les mines d'étain pour 9 % en 1926, 11 % en 1927, 10 % en 1928, 10 % en 1929. 1. - CHARBONNAGES Les charbonnages ont considérablement augmenté leur production depuis 1920. Celle-ci a atteint en 1928 1.970.000 tonnes; ce chiffre con¬ sacrait une très forte augmentation sur l'année précédente. Par rapport à la production, l'Indochine est le plus gros exporta¬ teur de d'Est de l'Asie, ayant exporté en 1928 plus d'un million de tonnes et en 1929 1.320.000 environ, soit près des deux tiers de sa pro- l'administration française 121 duction; produisant à peu près exclusivement de l'anthracite, l'Indo¬ chine n'exporte que cette qualité de charbon, la Chine et le Japon étant ses principaux clients (') ; ses importations sont relativement faibles : elles ne comprennent que du charbon gras venant des Indes Néerlan¬ daises, du Japon et de l'Empire Britannique. principales sociétés. — Le tableau ci-joint donne les principaux résultats de l'exploitation des charbonnages depuis 1926. Trois sociétés ont une production dépassant 100.000 tonnes. La Société Française des Charbonnages du Tonkin (Hongay), dont la production a dépassé le million de tonnes depuis 1927 : c'est de beau¬ coup la société la plus importante et c'est à peu près uniquement à elle qu'est dû l'accroissement rapide de la production des charbonnages indochinois au cours des dernières années. Puis viennent, à peu près à égalité, la Société des Anthracites du Tonkin (Mao-Khé) et la Société des Charbonnages du Dong-Trieu, pro¬ duisant chacune actuellement environ 200.000 tonnes d'anthracite par an. De nombreuses recherches sont exécutées, notamment sur le versant Nord de la chaîne du Dong-Trieu. 2. — ZINC Le zinc et l'étain, venant immédiatement après les charbonnages dans la production minière indochinoise, ont une importance à peu près équivalente. La production du zinc a été en croissant jusqu'en 1926, puis a dimi¬ nué depuis 1927 en raison de la baisse des prix du zinc qui a conduit la plupart des producteurs à restreindre leur production. La totalité du minerai produit en 1929 a deux origines : 1° La Compagnie Minière et Métallurgique de l'Indochine (mine de Cho-Dien) dont le minerai contient 14.150 tonnes de métal (soit plus de 1 % de la production mondiale totale) ; 2° La Société des Mines de Trang-Da : 4.350 tonnes de métal contenu. Les Mines de Yen-Linh et de Lang-Hit qui avaient respectivement pro¬ duit, en métal contenu, en 1926,1.334 tonnes et 796, et en 1927, 796 tonnes 1. Exportation en 1929 : Chine (non compris Hong-Kong) 609.000 tonnes ; Japon 504.000 ; Hong- Kong 172.000 tonnes, et divers 35.000 tonnes. 122 InCochInê et 285 ont cessé leur production en 1928 en raison de la baisse des cours du zinc. Le minerai de zinc produit est exporté pour la plus grande partie; une Tonnes 25.000-t 20.000 - 15.000 10 000 5.000 0-1- 25.24-5 20.792 / ' / ' / / / / / ' / / f / / 22.274- \ \ \ \ \ s \ 21.4-86 V 16.795 > // // fs / ' / / / / /■ / / / / / / ' / / f / / / 2 / \ V \ \ \ > \ \ V \ \ V \ \ ^ Co\\ O •F" \ y y y' y / \ / y ' y __ Production totale 18.760 Exportation Chodicn (C'e Minière et Métallurgique) Trang 0a 1923 1924- /925 /S26 1922 1928 1929 Production et exportation des mines de zinc (en métal contenu dans le minerai). quantité relativement faible qui, cependant, est en progression cons¬ tante, est traitée directement par l'Usine de Quang-Yen, appartenant à la Compagnie Minière et Métallurgique. Le tableau suivant et le graphique ci-dessus exposent les principaux faits. l'administration française 123 PRODUCTION ANNUELLE EXPORTATION PRODUCTION COURS DU Zn en métal en livres par minerai métal contenu contenu Zn métal longton 1923 30.500 13.014 13.751 33.05 1924 42.451 16.795 14.180 1.720 33.73 1925 52.869 20.792 19.657 1.158 30.62 1926 G1.933 25.245 22.700 1.858 34.10 1927 54.929 22.274 24.355 1.167 28.51 1928 51.927 21.486 20.364 2.884 25.23 1Ô29 47.425 18.760 15.990 3.889 24.80 en tonnes métriques. Des recherches importantes sont en cours à Cho-Don (Tonkin). 3. - ÉTAIN L'étain est également une richesse importante de l'Indochine. Actuellement, les exploitations d'étain sont situées dans deux régions tout à fait séparées. L'une, dans la région du Pia-Ouac, à environ 180 kilomètres à vol d'oiseau au Nord de Hanoï : c'était, il y a encore seulement trois ans, le centre le plus important d'exploitation. Sociétés productrices : Société des Etains et Wolfram du Tonkin et Société des Mines d'Etain du Haut- Tonkin. La production des mines actuellement en activité reste station- naire, mais des recherches paraissant intéressantes sont en cours. La seconde, qu'on peut appeler bassin de la Nam-Patène ou encore région de Pak-Hin-Boun, est située dans le Moyen-Laos (province du Cammon; chef-lieu : Thakhek), à environ 380 kilomètres à vol d'oiseau au Sud-Sud-Ouest de Hanoï. La seule société productrice est la Société de Recherches et d'Exploitations Minières, sa production croissant très rapidement. De nouvelles sociétés (Etains du Cammon, Etains de l'Indochine) se sont constituées en 1926-1927 en vue de l'étude et de la mise en valeur de nouvelles régions du bassin, qui est étendu et contient d'abondantes réserves de minerai; ces sociétés nouvelles, actuellement en train de s'équiper, ne tarderont pas à produire. La Société d'Etudes et d'Exploitations Minières exporte toute sa pro¬ duction à Singapore (870 tonnes de minerai en 1929, contre 775 tonnes en 1928). 124 INDOCHINE La Société des Mines d'Etain du Haut-Tonkin exporte toute sa pro¬ duction en France (190 tonnes de minerai en 1929 contre 188 tonnes en 1928). Seule, la Société des Etains et Wolfram du Tonkin traite sur place son minerai; la Société vient de construire une nouvelle usine (2 fours à réverbère) à Cao-Bang, à proximité de sa mine de lignite Henri; la Société a exporté 245 tonnes d'étain métal en 1929, contre 290 en 1928. Tonnes Production des mines d'étain (en métal contenu). Le graphique ci-dessus et le tableau suivant résument les princi¬ paux faits. PRODUCTION ANNUELLE EXPORTATION en métal PRODUCTION COURS DE L'ÉTAIN minerai métal contenu contenu (usine de Tasa) en livres par longton 1924 818 472 146 307 255 1925 985 591 256 327 261 192G 1.011 603 251 332 291 1927 1.216 710 311 312 289 1928 1,290 720 460 262 228 1929 1.400 840 525 304 204 en tonnes métriques. t ADMINISTRATION FRANÇAISE 125 4. - AUTRES PRODUITS En dehors de la houille, du zinc et de l'étain qui sont de beaucoup les principales productions minières de l'Indochine, on peut encore citer : phosphates. — Les gisements de phosphate donnent environ 20.000 tonnes de phosphate brut par an; les usines ont produit : Phosphate moulu à 2ç % de P206 1926 _ 1Ç.700 T. 1927 ' 18.700 » 1928 11.800 » 1929 17.662 » Des gisements existent en de nombreux points des massifs calcaires : au Tonkin (notamment dans la province de Lang-Son) ainsi qu'en An- nam (province de Vinh) où ils sont exploités par la Société Nouvelle des Phosphates du Tonkin. Des gîtes viennent d'être aménagés au Cam¬ bodge par la Société Minière du Cambodge (province de Battambang) et par la Société Nouvelle des Phosphates du Tonkin (province de Kam- pot). Les phosphates naturels moulus sont de plus en plus appréciés des agriculteurs; les ventes augmentent lentement, mais d'une manière con¬ tinue; elles règlent la production des usines. tungstène. — Les mines d'étain de la région du Pia-Ouac donnent des minerais mixtes d'étain et de tungstène. Cette production de tungstène, importante pendant la guerre, a naturellement beaucoup baissé avec la diminution de la valeur du métal. Ces mines ont produit : En 1926, 100 tonnes (en acide tungstique) En 1927, 127 — — En 1928, 110 — — En 1929, 115 — — Les cours qui, en 1928, étaient tombés à 15 d. par unité d'acide tungs- 126 INDOCHINE tique (minerai à 65 % de Wo3) ont doublé pendant le premier semestre 1929; le minerai est coté, début 1930, à Londres, 32 d. l'unité; aussi, la Société des Etains et Wolfram du Tonkin vient-elle d'intensifier ses travaux d'exploitation dans le massif du Pia-Ouac, contenant des filons riches en volfram. graphite. — Les gisements de graphite qui ont retenu l'attention des prospecteurs se trouvent dans la chaîne de gneiss et de micaschistes qui borde la rive gauche du Fleuve Rouge, en amont du delta; l'un de ces gisements, situé près de Lao-Kay, a fait l'objet d'une installation (Société Indochinoise des Graphites) qui a fourni en 1926 plus de 800 tonnes de graphite marchand et dont la production, en 1927, est tombée à 400 en raison de la réorganisation de la mine et de l'usine; celle-ci, qui devait être prête à fonctionner à la fin de 1929, a été fermée en raison de la baisse des cours du graphite. pierres précieuses. — Ces pierres (en très grande majorité des saphirs) sont extraites par une colonie de Birmans installés à Pailin (Cambodge) ; la plupart sont exportées au Siam (via Chantaboun) et sont vendues ensuite en Europe comme pierre du Siam. Ces mines ont connu une grande prospérité il y a une trentaine d'années; l'appauvrissement du gîte et la mévente temporaire causée par la guerre en ont réduit l'activité; la production annuelle reste sta- tionnaire aux environs de 2.500 carats (600 grammes), d'une valeur approximative de 34.000 piastres indochinoises. plomb et argent. — La production de plomb est restée peu impor¬ tante au cours de ces dernières années; elle était jusqu'à maintenant un sous-produit de la production du zinc. Des recherches intéressantes de galène argentifère sont en cours à Tu-Le (province de Yen-Bay) et à Ngan-Son. or. — Plusieurs mines s'équipent actuellement et des prospections importantes ont pour but d'étudier des gisements aurifères reconnus. Deux mines ont été récemment mises en exploitation. La mine d'or de Pac-Lan (Haut-Tonkin), en 1928 et 1929, a traité un gisement filonien de quartz et pyrites aurifères; les résultats n'ayant Indochine II. Pl. IX. Cliché Gouv. Général Indochine. Jeunes danseuses du palais, a Phnom Penh. l'administration française 127 pas été satisfaisants, la Société a cessé dès le commencement de 1929 l'exploitation des filons; elle a entrepris l'étude d'alluvions. La Société des Mines d'Or de Bao-Lac possède un gisement alluvion¬ naire au Haut-Tonkin; au cours des années 1927 et 1928, une centrale hydroélectrique de 1.000 C.V. a été installée sur le Song-Niao; elle fait marcher une drague montée sur le Song-Nong, pouvant traiter 1.500 m3 d'alluvions en 24 heures. Les mines de Bong-Mieu qui furent autrefois exploitées pour le compte de la Cour de Hué viennent d'être reprises par la Société Indochinoise d'Exploitations Minières et Agricoles, filiale de la Société Minière Las Dos Estrellas qui a acquis, au Mexique, une grande expérience tech¬ nique de l'exploitation des gisements de métaux précieux. La Société des Mines d'Or de Tchépone a commencé en 1929 la pros¬ pection systématique de son gisement alluvionnaire, situé à peu de distance de Tchépone (Laos). La Compagnie de Becherches et d'Exploitation Minières a également fait des recherches dans les alluvions aurifères de Kimma, près de Nguyen-Binh (province de Cao-Bang) ; elle prospecte également, pour l'or, des périmètres situés au Nord de Ngan-Son (province de Bac-Kan), à l'Est de Lang-Giai et au Sud-Est de Lang-Son. La Société Civile des Mines d'Or du Kontum, la Société Coloniale des Mines et la Compagnie Minière de Dakto ont commencé la pros¬ pection d'alluvions aurifères au Kontum. chrome. — Un gisement de chrome (et nickel subordonné) a été re¬ connu dans le Nord-Annam, aux environs de Thanh-Hoa; une société (Chrome et Nickel de l'Indochine) s'est constituée pour l'exploitation de ce gisement qui est à la fois filonien et alluvionnaire. Une usine pou¬ vant traiter mille tonnes de concentrés par mois vient d'être mise en marche. eaux minérales. — Les sources d'eaux minérales sont extrêmement nombreuses en Indochine, mais, jusqu'à ces derniers temps, aucune source n'avait été concédée. En 1928, la source de Vinh-Hao (Sud-An- nam), dont l'eau a une composition analogue à celle des eaux de Vichy, a été concédée à un groupe financier qui prépare sa mise en exploi¬ tation. indochine. t. ii. 9 128 INDOCHINE fer. — Des gisements de minerais de fer d'une superficie étendue ont été signalés en Indochine mais ils ne sont pas encore exploités. L'un des gîtes qui paraissent les plus intéressants est celui de la mine Yvonne, dans la région de Thai-Nguyen (Tonkin), prospecté méthodi¬ quement depuis 1927 par la Compagnie Minière et Métallurgique de l'Indochine. La mise en service (juin 1929) du canal latéral du Song-Cau auquel le gisement pourrait être relié par une voie ferrée d'une dizaine de kilo¬ mètres de longueur permet d'envisager la mise en exploitation de cette mine, et l'exportation au Japon de minerais dont les frais de transport jusqu'à Haiphong seront réduits à 2 $ environ. Plus intéressante qu'une telle exportation de minerais de faible va¬ leur, et par suite ne procurant qu'un profit médiocre à la Colonie, serait leur transformation sur place en métal. L'intérêt qu'il y aurait à étudier la création d'une usine sidérurgique, ou tout au moins de hauts fourneaux au Tonkin, a déjà été signalé à divers reprises par le Service des Mines. Les conditions locales se prêtent, en effet, à la réalisation technique d'un tel projet : les gisements de fer sont très voisins du gisement de charbon à coke de Phan-Mé; les rochers calcaires abondent d'autre part, aussi bien dans la région de Thai-Nguyen, que dans celle du Dong-Trieu et de la baie d'Along, au voisinage du grand bassin anthraciteux tonki¬ nois. Une fabrication de fonte utilisant soit du coke, soit de l'anthra¬ cite, et installée dans la région de Thai-Nguyen, ou au voisinage du bas¬ sin anthraciteux, paraît donc rencontrer des conditions techniques et de prix de revient favorables, depuis l'ouverture à la navigation du canal latéral du Song-Cau. Le problème commercial est évidemment plus délicat, et doit être étudié de près, car la Colonie ne peut à l'heure actuelle absorber toute la production d'une usine d'importance normale. En effet, alors qu'un haut-fourneau moyen peut produire 60.000 à 100.000 tonnes de fonte par an, l'importation moyenne de fers, fontes et aciers en Indochine n'est que de 20.000 tonnes environ et comprend de nombreuses sortes qui ne peuvent être toutes produites dans la Colonie. Il est donc nécessaire qu'une usine locale soit assurée de trouver des débouchés à l'extérieur : en Chine et au Japon, par exemple. Or si les usines sidérurgiques se multiplient rapidement au Japon, la consom- l'administration française 129 mation de fonte croît plus vite que la production, et les importations japonaises de fonte sont passées de 325.000 tonnes en 1922 à 438.000 tonnes en 1924, 529.000 tonnes en 1925 et 977.000 tonnes en 1926; la possibilité de vendre au Japon de la fonte paraît être également la ques¬ tion primordiale à étudier pour la création éventuelle de notre future sidérurgie. mercure. — Dans le Nord-Ouest du Tonkin, on connaît quelques gise¬ ments de mercure peu explorés jusqu'ici, mais qui viennent d'attirer à nouveau l'attention de quelques financiers. B. — PROSPECTION Ces dernières années ont vu un développement considérable de la prospection. Est surtout caractéristique la progression des demandes en concession, en raison des redevances à payer; leur nombre était autrefois de 20 en¬ viron par an; il s'est élevé à: 44 en 1926; 84 en 1927; 150 en 1928; et 430 en 1929. Il s'est formé de nombreuses sociétés nouvelles (11 en 1918), dont la plupart ont envoyé dans la Colonie des missions de techniciens qui ont commencé l'exploration méthodique d'une partie de leurs périmètres; c'est le fait le plus caractéristique du développement de la prospection et qui échappe aux statistiques; depuis deux ou trois ans, une trentaine d'ingénieurs nouveaux sont arrivés avec du matériel; l'effort financier consenti en 1928 tant par les Sociétés (augmentation de capital, forma¬ tion de nouvelles sociétés) que par les particuliers s'est élevé à plus de 150 millions de francs. L'attention s'est surtout portée : Sur les recherches d'étain dans le bassin de la Nam-Patène et la région avoisinante; Sur les recherches d'étain dans la région de Cao-Bang; Sur les recherches d'or dans les régions de Tchépone, d'Attopeu et du Kontum et dans le Haut-Mékong; Sur les recherches de charbon dans le Nord du bassin du Dong- Trieu. Tous ces gisements sont connus depuis longtemps; quelques-uns 130 INBOCHINE avaient même fait l'objet de recherches plus ou moins poussées qui ont été abandonnées faute de capitaux ou en raison du prix élevé des trans¬ ports; le développement des moyens de communications a donné un I3Û0-I 1200 • 1100 ■ 1000 ■ 900 800 700 600 500 400 300 200 100 0J 1204 ail V06 ^576 <393 170 - ——"2. ** Total pour l'Indochine Tonkin yAnnam Laos Cambodge Cochinchine 1925 1926 1922 1928 1929 1930 Nombre d'autorisations personnelles minières en vigueur au 1er janvier de chaque année. nouvel intérêt à ces gisements. En résumé, les charbonnages sont de beaucoup la richesse minière de l'Indochine la plus importante. Il faut s'attendre à un développement continu des mines d'étain; les l'administration française 12000 11500 11000 10500 10000 9500 9000 8500 8000 7500 7000 6500 6000 5500 5000 1-500 1000 3500 3000 2500 2000 1500 1000 500 0 Laos (4363) Indochine entière (11.586) Cambodge 12595) Tonkin (2335) Annam (2051) Cochinchine (242) m m /925 m W7 m MM Nombre de permis délivrés chaque année. l'administration française 133 mines du Laos notamment vont accélérer leur production pendant plu¬ sieurs années encore. Les mines de zinc restent dans l'expectative en raison du bas prix du métal; si les cours venaient à monter, il est bien certain que la produc¬ tion augmenterait rapidement. Les autres mines ne pourront jamais fournir qu'un appoint à la pro¬ duction minière indochinoise, l'anthracite, l'étain et le zinc devant rester vraisemblablement pendant longtemps encore les principales richesses minières de l'Indochine. 134 indochine L'INDUSTRIE MINIÈRE EN INDOCHINE EXPLOITATIONS PRODUCTION (tonnes métriques) EXPORTATION 1926 1927 1928 1929 1926 1927 1° Charbons maigres. (3 à 10 % de matières vo¬ latiles). Charbonnages du Tonkin. (Hongay) Charbonnages du Dong- trieu (Uong-Bi) Anthracites du Tonkin (Mao-Khé) Kébao Beaugeraud & O (Co- Kenh) Along et Dong-Dang Société Pannier (Trang- Da) Divers Total 2° Charbons gras. (14 à 25 % de matières volatiles). Phan-Mé Phu-Nho-Quan(Nin Binh). Total 3° Lignites. Tuyen-Quang Dong-Giao (M. Théard)... Divers Total Total général 855.000 142.200 138.700 32.800 8.300 24.100 23.800 21.700 1.029.000 137.000 140.200 47.600 20.000 25.300 27.200 14.300 1.430.400 154.600 172.500 60.300 18.100 19.500 31.400 30.100 1.335.650 211.250 191.000 61.500 22.700 20.400 40.500 18.400 530.400 116.700 21.950 22.300 » 18.800 » 687.950 101.500 12.100 26.700 » 600 23.400 » 1.246.600 1.440.300 1.916.800 1.902.400 710.200 852.300 26.100 11.900 29.900 8.700 20.300 14.100 24.400 14.500 » » » )) 38.000 38.600 34.400 38.900 » 5> 3.200 » 2.400 4.100 1.500 1.500 12.400 2.300 800 26.300 3.500 900 » y> y> y> » » 5.600 7.100 15.500 30.700 » » 1.290.200 1.486.000 1.966.700 1.972.600 710.200 852.300 l'administration française DEPUIS 1926 (Mines de combustibles). 135 (tonnes métriques) MAIN-D'ŒUVRE 1923 1929 1926 1927 1928 1929 OBSERVA¬ TIONS fond. jour. total. 786.200 966.600 17.000 20.400 28.200 17.800 5.400 23.200 86.500 123.200 25.600 78.500 125.200 62.000 2.200 1.500 1.300 2.450 1.900 2.000 3.600 3.100 1.500 2.020 2.450 930 4.000 310 320 6.020 2.760 1.250 Pour 1926 et 1 1927, exportation directe seulement. » 4.750 » 10.400 170 300 60 300 350 500 200 300 100 250 300 550 28.050 » 30.400 1.900 120 2.410 800 390 900 750 910 710 265 280 1.175 990 1.054.300 1.275.000 25.000 28.300 39.000 25.320 10.925 36.235 » » » » 500 650 1.100 550 1.500 750 720 540 230 280 950 820 )) 1.150 1.650 2.250 1.260 510 1.770 » » )> » » » 100 y> 100 200 40 50 400 100 50 230 » 70 340 » 10 570 » 80 » » 200 290 560 300 350 650 1.054.300 1.275.000 26.350 30.240 41.800 26.860 11.785 38.645 L'ENSEIGNEMENT On ne saurait visiter une des grandes cités indochinoises sans être frappé du nombre et de l'importance de ses établissements scolaires. Hanoï par exemple, ville de 100.000 habitants, possède une Université, un Lycée d'enseignement secondaire français, le Lycée Albert Sarraut, qui, au point de vue l'installation matérielle, de l'outillage pédagogique, des terrains de jeux, n'a pas de rival en France; le Lycée indigène du Protectorat, qui distribue l'enseignement secondaire local; une école nor¬ male indigène de garçons, une école normale indigène de filles, deux écoles primaires supérieures françaises (garçons et filles), deux écoles d'enseignement professionnel : l'école des Arts appliqués et le Musée Maurice Long, sans compter de magnifiques groupes scolaires dispersés aux quatre coins de la cité, et dont certains sont installés avec un véri¬ table souci de perfection. On peut s'abandonner en toute confiance à la forte impression que donnent le nombre et le luxe de ces constructions scolaires. Elles ne sont pas une façade théâtrale destinée à frapper l'opinion indigène ou étrangère, mais la traduction monumentale d'un effort scolaire qui a porté sur tous les pays de l'Union et qui aboutit aujourd'hui à une doc¬ trine pédagogique et à des réalisations originales dans tous les ordres et pour tous les types d'enseignement : l'enseignement français, l'ensei¬ gnement franco-indigène à tous les degrés : primaire, secondaire, supé¬ rieur, professionnel, doctrine qui s'impose même à un enseignement libre aussi varié que prospère, qu'elle arrache à sa routine séculaire et qu'elle fait entrer dans le cadre de notre politique générale à l'égard des indigènes et à l'égard des étrangers. l'administration française 137 I. —* ENSEIGNEMENT FRANÇAIS Nous devons en tout premier lieu l'enseignement, au moins primaire et secondaire (nous disons à la colonie : du 1" et du 2e degré), à tous les petits Français qui résident en Indochine. L'enseignement primaire français est donné le plus souvent dans des cours annexés aux écoles indigènes ou, dans les villes, dans des classes primaires annexées aux établissements scolaires français du 2e degré (écoles primaires supérieures ou lycées). L'enseignement du 2e degré comprend l'enseignement primaire supé¬ rieur, donné dans les deux écoles primaires supérieures de Hanoï et les deux écoles primaires supérieures de Saïgon (garçons et filles), et l'ensei¬ gnement secondaire français conduisant au baccalauréat métropolitain, donné dans les Lycées Albert Sarraut de Hanoï, Chasseloup-Laubat de Saïgon et Dalat (Annam). Il faut noter que les indigènes, sous réserve de certaines limites d'âge et à la condition qu'ils aient une connaissance suffisante du français et une instruction primaire sérieuse attestée par un examen d'entrée, sont admis dans l'enseignement secondaire fran¬ çais. Ils constituent plus de la moitié de l'effectif des Lycées Albert Sar¬ raut et Chasseloup-Laubat. On ne saurait donner preuve plus nette de notre libéralisme scolaire et de notre absence de préjugés en ce qui touche la question des races. L'enseignement français comptait 3.826 élèves en juin 1929. Dans les lycées, la coéducation (avec internats spéciaux pour les jeunes filles) est la règle. II. — ENSEIGNEMENT INDIGÈNE Il existe — en laissant provisoirement de côté l'enseignement supé¬ rieur — sous trois formes : l'enseignement du 1er degré — l'enseignement du 2e degré — l'enseignement professionnel. Dans ce pays de 20 millions d'habitants, plus grand que la France et surtout infiniment plus varié, où s'affrontent sans se mêler deux grandes civilisations : la civilisation hindoue adoptée par le Cambodge et le Laos, et la civilisation chinoise qui s'est imposée aux pays annamites, où les groupes ethniques présentent tous les stades de la culture, depuis 138 INDOCHINE la sauvagerie primitive du Moi jusqu'aux raffinements du mandarinat, où chaque région a ses allogènes de race, de langue, de religion, de mœurs, on conçoit que l'organisation scolaire française ne pouvait être transportée intégralement, et qu'il a fallu résoudre une multitude de problèmes d'adaptation aux conditions particulières du milieu. C'est de ces adaptations de plus en plus étroites et des leçons quotidiennes de l'expérience, que sont sorties notre doctrine pédagogique indochinoise et notre organisation scolaire franco-indigène. Nous nous bornerons à indiquer, pour chaque enseignement, les traits originaux déterminés par cette politique d'exacte adaptation. 1°) ENSEIGNEMENT PRIMAIRE. L'organisation de l'enseignement primaire s'est trouvée en présence des problèmes suivants : faire pénétrer l'Ecole dans des pays générale¬ ment pauvres et de population dispersée — choisir la langue destinée à devenir le véhicule de l'enseignement — former un personnel d'insti¬ tuteurs — adapter des programmes — créer un outillage pédagogique — assurer le contrôle de l'école. Ces difficultés sont aujourd'hui réso¬ lues. a) Pénétration scolaire. — Si certaines régions riches ou particuliè¬ rement évoluées ont pu créer l'école communale, si même en Cochin- chine on a pu aller jusqu'à la proclamation de l'obligation scolaire, dans la plupart des pays l'école a beaucoup de peine à atteindre une population très pauvre et très dispersée. Il a fallu trouver des procédés de fortune, dont l'utilisation des écoles de pagode au Cambodge est l'exemple le plus curieux. Traditionnellement, les familles cambod¬ giennes envoient pour un temps tout à fait variable leurs enfants à la pagode comme bonzillons. Ces enfants sont à la fois les élèves et les serviteurs du bonze. De cet enseignement clérical, le petit Cambodgien ne tirait qu'une formation exclusivement morale et religieuse. Nous avons eu l'idée de le saisir à la pagode, où les mœurs lui font une obli¬ gation de venir, et d'utiliser cette organisation scolaire spontanée et ru- dimentaire, la seule possible, en l'adaptant à d'autres fins. A la suite de négociations rendues très délicates par la nécessité de respecter la vie monastique, les bonzes ont été amenés à suivre des cours de perfec¬ tionnement dans des pagodes d'application et à utiliser leurs écoles reli¬ gieuses à des fins scolaires laïques. Ainsi, sans grands frais, sans troubler l'administration française 139 en rien la vie traditionnelle de l'enfance cambodgienne, nous avons pu faire rayonner notre influence scolaire dans tout le pays. La méthode de pénétration et d'impulsion pédagogique a été ainsi fixée pour le Cam¬ bodge. Elle l'a été sous des formes appropriées aux divers milieux pour tous les pays de l'Union Indochinoise : écoles communales tonkinoises, écoles sur fonds de concours des communes en Annam, écoles prépa¬ ratoires en Cochinchine. Les allogènes eux-mêmes, dans chacun des pays, n'ont pas été oubliés et ont reçu leurs formations scolaires spéciales : écoles cambodgiennes et moï de Cochinchine, écoles annamites du Laos, franco-rhadé du Darlac, écoles de la haute région tonkinoise, etc... b) Choix de la langue. — Fallait-il adopter le français ou la langue locale comme véhicule de l'enseignement? Les deux langues ont des droits; toutes deux leur utilité. Aussi est-on arrivé, après une période d'incertitude assez brève, à une formule de conciliation. Aux cours en¬ fantin, préparatoire et élémentaire, le véhicule de l'enseignement est la langue maternelle. Ces études sont couronnées par un certificat d'études élémentaires indigènes. Aux cours moyen et supérieur, où s'impose déjà la nécessité d'une vocabulaire technique que les langues indochinoises ne possèdent pas, cours qui ne réunissent d'ailleurs que l'élite des écoles primaires indigènes, le véhicule est le français, le diplôme terminal le certificat d'études primaires franco-indigènes. Entre ces deux cycles, la première année du cours moyen est une année de transition où l'ap¬ prentissage du français se fait par une révision en langue française du programme élémentaire déjà vu dans la langue maternelle. Mais, même dans ce second cycle d'études primaires en langue française, les élé¬ ments d'une culture proprement locale ne sont pas négligés : c'est ainsi que l'étude des caractères chinois pour les pays de langue annamite, du pâli et du sanscrit pour les pays de langue cambodgienne est obli¬ gatoire à partir du cours moyen, et se continue jusqu'au baccalauréat franco-indigène. Bien plus, pour assurer, dans des conditions meilleures qu'autrefois, la diffusion de l'enseignement des caractères, la direction de l'Instruction publique l'a pourvu, avec le concours des lettrés et de la Cour d'Annam, de l'outil indispensable, le « manuel élémentaire de caractères chinois », de même qu'avec le concours de techniciens fran¬ çais et cambodgiens, notamment de hauts dignitaires de la cour et des bonnes, elle a réformé l'orthographe cambodgienne dégénérée et rétabli la filiation du cambodgien moderne avec les langues mères. On voit 140 INDOCHINE combien sont tendancieuses les critiques qui ont représenté parfois notre enseignement primaire indochinois comme inadapté et comme un des¬ tructeur des éléments fondamentaux de la culture nationale, et combien périmée la vieille plaisanterie sur nos « ancêtres les Gaulois » ou sur l'enseignement des sous-préfectures aux indigènes. c) Formation du personnel. — Cette question a été et reste une des plus difficiles à résoudre. Il a fallu en quelques années fournir des insti¬ tuteurs à plus de 300.000 élèves. Les écoles normales de Saigon et de Hanoï, les cours normaux des collèges Quôc-IIoc à Hué et Sisowath à Phnom-Penh, du collège de Vinh, sont loin de suffire au programme de diffusion de l'enseignement primaire, d'autant plus que beaucoup d'instituteurs s'évadent vers des carrières plus lucratives ou plus hono¬ rées (les questions de rang et de préséance étant capitales en ce pays). A défaut de titulaires diplômés, il a fallu trop souvent accepter des auxi¬ liaires ayant un simple certificat d'études franco-indigènes; mais, pour faciliter la tâche de ces maîtres improvisés et rendre efficace leur ensei¬ gnement, on a institué pour eux des cours de perfectionnement et, sur¬ tout, on a créé des journaux pédagogiques qui les guident pas à pas, le Bulletin franco-kmer à Phnom-Penh, le Hoc Bao pour le Tonkin et le Nord-Annam, le Su Pham Hoc Khoa pour le Sud-Annam et la Cochin- chine. Semaine par semaine, l'instituteur y trouve le cadre dans lequel doit se déployer son activité. Le journal lui fournit, soit en français, soit dans la langue locale, suivant le cours professé, le thème des leçons magistrales, des exercices de vocabulaire et de langue, des textes de lecture et de récitation, des problèmes, des modèles de dessin et jusqu'à des principes d'éducation physique, tout cela sur un plan dont la pro¬ gression a été minutieusement réglée par des pédagogues éprouvés. Comme ce journal touche toutes les écoles, il est facile de saisir l'in¬ fluence qu'il peut avoir sur l'activité de nos instituteurs indigènes, sur leur technique professionnelle, sur la marche générale de l'enseigne¬ ment. C'est une de nos créations les plus efficaces. d) Adaptation des programmes. — Il va sans dire que les programmes de l'enseignement franco-indigène, à tous les degrés, n'ont pas été trans¬ plantés sans adaptation de France en Indochine. Au degré primaire en particulier, ils ont été rédigés de manière à assurer au petit paysan ou au petit citadin de condition ouvrière qui quitte l'école, pourvu de son certificat d'études élémentaires, le minimum indispensable de connais- l'administration française 141 sances dont il aura besoin : lecture, écriture, calcul, langue locale, élé¬ ments de français, histoire de l'Indochine, géographie de son canton, de sa province et de sa région, morale traditionnelle, rudiments d'ensei¬ gnement manuel. e) Création d'un outillage pédagogique. — Le problème du rende¬ ment pour un personnel indigène improvisé et de culture médiocre se compliquait, il y a peu de temps encore, du fait qu'il n'existait pas de livres scolaires annamites et, pour le cambodgien et le laotien, aucun texte d'aucune espèce. Il a donc fallu créer pour nos écoles un outillage d'autant plus simple et pratique que l'ouvrier est plus médiocre. Cet outillage est aujourd'hui constitué dans ses pièces essentielles et com¬ prend : 1° Les manuels pour les cours enfantin, préparatoire et élémentaire, destinés à la fois à nourrir l'enseignement du maître et à fournir des textes aux écoliers. Il existe trois éditions des manuels édités par la Direction de l'Instruction publique à Hanoï : l'édition annamite, l'édi¬ tion cambodgienne et l'édition laotienne, avec une quinzaine de volumes dans chaque série (lecture, morale, calcul, sciences, hygiène, histoire, géographie, éducation physique, caractères, etc...). En opérant par édi¬ tions massives dont certaines ont atteint 200.000 exemplaires, on a pu abaisser le prix moyen de chacun d'eux à 0 $ 05. Le succès de ces ma¬ nuels a été foudroyant; il en a été écoulé plus de 4 millions. Pour la première fois, sous une forme concise et étudiée pour qu'elle leur soit accessible, la part de civilisation occidentale assimilable a été soumise à la réflexion des écoliers perdus dans la forêt tropicale et prisonniers d'une tradition formaliste. L'influence de ce petit opuscule dépasse déjà les limites de l'école. Ce petit fait nous l'assure : sans aucune réclame, il a été vendu 800.000 exemplaires de l'édition annamite du manuel de morale, chiffre qui excède de fort loin celui des écoliers, et l'ouvrage a même été l'objet d'une contrefaçon par un éditeur indigène. On est en droit d'affirmer que le manuel scolaire prépare en Indochine un mouvement comparable à la révolution intellectuelle et morale accom¬ plie par le journal quotidien dans les campagnes françaises. 2° Des cartes géographiques : il existe déjà une carte scolaire de l'In¬ dochine éditée par la direction de l'Instruction publique, une carte du Cambodge dressée par le service local de l'enseignement à Phnom-Penh d'après les mêmes principes de simplification et de représentation, des 142 INDOCHINE cartes de province établies pour le Laos du Sud. Celles du Tonkin, de l'Annam et de la Cochinchine sont en voie d'achèvement. D'ici peu, la plus petite école aura la carte générale de l'Indochine, la carte du pays de l'Union et celle de la province auxquels elle appartient, cartes éta¬ blies d'après des données simples et une représentation graphique ap¬ propriées à la sensibilité indigène. 3° Des tableaux muraux représentant les scènes les plus caractéris¬ tiques de la vie indochinoise et destinés à fournir les thèmes des exer¬ cices d'élocution. Pour obtenir une adaptation plus étroite à la vie locale, ces tableaux ont été établis sous trois formes : l'édition annamite, l'édi¬ tion cambodgienne et l'édition cochinchinoise. On peut dire que l'écolier indochinois dispose aujourd'hui d'un outil¬ lage scolaire aussi complet et quelquefois meilleur que celui de l'écolier français, beaucoup plus caractéristique en tout cas, et à un prix qui n'a pas d'égal : par exemple le tableau mural entoilé, édité en cinq couleurs, est cédé pour 5 fr. 50 ou 6 fr. 90. f) Contrôle des écoles. — Si nous voulons savoir ce qui se passe dans nos écoles indigènes et y maintenir l'impulsion pédagogique dans toute sa vigueur, l'inspection doit en être évidemment confiée à des techni¬ ciens français. Tant que l'aire du développement scolaire était restreinte et les écoles peu denses, cette inspection pouvait être assurée par le directeur français de l'école de plein exercice qui existe au chef-lieu de chaque province, cumulativement avec ses fonctions de direction. Mais il est clair que cette organisation ne correspond plus au stade actuel de l'enseignement primaire, au principe de l'obligation scolaire qui a fait son apparition en Cochinchine, et à notre idéal d'une école par vil¬ lage. Aussi l'arrêté du 28 avril 1928 a prévu le recrutement progressif d'inspecteurs spécialisés, qui seront substitués peu à peu aux directeurs provinciaux dans leurs fonctions de contrôle. En particulier l'obligation pour ces inspecteurs de faire preuve d'une connaissance réelle et pra¬ tique de la langue indigène établira sur une base plus solide notre contrôle et donnera une vigueur nouvelle à notre impulsion pédago¬ gique. 2°) ENSEIGNEMENT DU SECOND DEGRÉ Nous avons vu que l'enseignement secondaire français est libérale¬ ment ouvert aux indigènes. Toutefois, il a été constitué à leur usage Indochine II. Tonkinoise de la province de Hadong. Pl. X. Clichés Gouv. Général Indochine. Laotienne de la province de Luang Prabang. WÊÈÊm l'administration française 143 exclusif un enseignement spécial du 2e degré fondé sur les humanités extrême-orientales, recruté par le système de l'école unique et abou¬ tissant à un brevet de capacité de l'enseignement secondaire franco- indigène dont l'équivalence avec le baccalauréat est imminente. a) Les humanités extrême-orientales. — Par humanités classiques, nous désignons en Occident la somme des connaissances et des méthodes jugées les meilleures pour faire de l'enfant un homme complet et supé¬ rieur. Mais, en Extrême-Orient et dans l'Inde, sous d'autres formes, ont été créées d'autres humanités qui ont joué et jouent encore, pour une bonne moitié de la population du globe, le rôle que les humanités clas¬ siques ont joué pour les Occidentaux. Seulement, à ces humanités orien¬ tales étiolées et desséchées par une longue tradition, il a manqué le fer¬ ment apporté chez nous par la Renaissance. Il semble que la pénétra¬ tion de la science occidentale dans les traditions des grandes civilisa¬ tions asiatiques doive précisément aboutir à ce renouvellement, à une sorte de Renaissance de l'Extrême-Orient. Aussi la conception scolaire qui, par un tour de force dangereux, arrache le jeune Indochinois à son atmosphère idéologique propre, pour le faire vivre, aux années déci¬ sives de sa formation, dans ce milieu intellectuel et moral artificiel que constituent pour lui les humanités occidentales, nous a paru erronée. Profitant des leçons de l'expérience métropolitaine en matière pédago¬ gique secondaire, nous avons choisi un enseignement du second degré, adapté au milieu, et basé non sur l'étude du grec et du latin, mais sur celle de la langue maternelle, du français, des caractères chinois ou pâli et du sanscrit selon la région, et de la philosophie aussi bien orientale qu'occidentale. A cette base s'ajoutent les sciences, qui, elles, sont uni¬ verselles, l'histoire générale réduite à l'étude des civilisations classiques en leur moment le plus brillant et en particulier des grandes périodes de l'art ou des sociétés indochinoises, la géographie dont la dernière année est consacrée à l'étude régionale détaillée de l'Indochine. Nous avons ainsi constitué un enseignement classique, en ce sens qu'il donne une large culture générale et initie les enfants à tous les pro¬ blèmes du passé et du présent, mais aussi un enseignement pratique qui leur permet de vivre dans leur milieu sans nostalgie malsaine et d'y créer un type de civilisation qui doit être autre chose qu'une plate et mauvaise copie de nos sociétés occidentales. Pour une civilisation extrême-orientale, nous avons voulu des humanités extrême-orientales. INDOCHINE. T. II. 10 144 INDOClllNE b) L'école unique. — Le problème de l'école unique s'est trouvé posé en France parce que nous nous obstinons à faire coexister trois ensei¬ gnements concurrents du second degré : primaire supérieur, secondaire moderne et secondaire classique, et aussi parce que nous n'admettons pas la valeur absolue du principe de la sélection par le concours. Les Extrême-Orientaux étant au contraire familiarisés par une longue tradition avec cette idée que le progrès de l'individu dans la hiérarchie sociale ne saurait se faire que par examens, un des articles de l'école unique, la sélection à l'entrée de l'enseignement du 2e degré, s'est réalisé non seulement sans résistance, mais avec l'assentiment spontané des intéressés. D'autre part, on s'est bien gardé de créer cette rivalité des enseigne¬ ments qui fausse tout le problème scolaire dans la métropole. L'Indo¬ chine n'a qu'un enseignement du 2e degré divisé en deux cycles : un enseignement primaire supérieur franco-indigène d'une durée de quatre ans, et un enseignement secondaire franco-indigène d'une durée de trois ans, celui-ci étant la suite naturelle et l'aboutissement de celui-là et non son concurrent. On s'élève de l'un à l'autre, comme d'ailleurs dans tout l'édifice scolaire, par des examens : le certificat d'études élémentaires ouvre l'accès des cours moyen et supérieur de l'école primaire; le certi¬ ficat d'études primaires franco-indigènes l'accès des quatre années de l'enseignement primaire supérieur; le diplôme d'études primaires supé¬ rieures franco-indigènes, l'accès des trois années d'enseignement secon¬ daire local, lequel conduit au brevet de capacité d'enseignement secon¬ daire franco-indigène ou baccalauréat indochinois, qui ouvre la porte de l'Université. L'enseignement secondaire franco-indigène complet est donné à Saigon au Lycée Pétrus Ky, à Hanoï au Lycée du Protectorat. Les collèges de Hué, Vinh, Phnom-Penh, Mytho n'ont encore que les classes initiales dites d'enseignement primaire supérieur franco- indigène. Le nombre des candidats munis des diplômes nécessaires est tel qu'il a fallu parfois mettre au concours les places disponibles dans les établissements. c) Brevet de capacité et baccalauréat. — Ce brevet de capacité qui couronne sept ans d'études secondaires franco-indigènes a été institué par arrêté du 23 novembre 1927; il se passe en deux parties comme le baccalauréat; nous avons des brevetés (première partie) depuis juillet 1928; en juillet 1929 ont été créés les premiers brevetés complets. l'administration française 14& L'équivalence de ce diplôme et du baccalauréat français a été recon¬ nue en principe par le Conseil supérieur de l'Instruction publique qui, dans sa session du 27 j anvier 1930, a donné son assentiment à un proj et de décret comportant pour les titulaires du brevet de capacité franco- indochinois le droit de s'inscrire dans les facultés françaises et de con¬ courir aux grades qu'elles confèrent au même titre que les bacheliers métropolitains. Cette équivalence a été enfin reconnue en fait par le décret du 12 octobre 1930. Cette mesure se justifie aisément : en effet ni par la puissance des programmes, ni par la qualité de la culture, ni par la durée des études (sept années), ni par la valeur du personnel de l'enseignement secon¬ daire local recruté dans les cadres métropolitains, ni par le sérieux et la régularité des examens probatoires, le brevet de capacité n'est infé¬ rieur au baccalauréat. 3°) ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL. Les principaux établissements sont l'école pratique et l'école des mé¬ caniciens asiatiques de Saigon, l'école des Arts cambodgiens de Phnom- Penh, les écoles d'art industriel de Gia-Dinh, Thudaumot et Bien-Hoa (Cochinchine), l'école pratique de Haiphong, l'école des Arts appliqués et le Musée Maurice Long de Hanoï, les écoles pratiques de Vientiane (Laos) et de Hué (Annam). Cependant, l'enseignement professionnel progresse lentement par suite de l'éloignement de l'Annamite instruit pour le travail manuel, des be¬ soins restreints de l'industrie européenne, de création récente, et parce que la formation de beaucoup d'artisans reste dans la sphère des mé¬ tiers traditionnels. Les enseignements de l'art décoratif, des travaux du fer (forge et ajustage), de l'électricité et de la mécanique appliquée aux machines et aux moteurs (et avant tout à la réparation et à la conduite des autos) paraissent seuls se développer spontanément et attirer les élèves. Toutefois cet état de choses se modifiera nécessairement avec les pro¬ grès de l'enseignement primaire et l'évolution économique du pays. Désireuse de ne pas être surprise par cette évolution, la Direction de l'Instruction publique s'est livrée à une vaste enquête auprès de tout ce qui compte à la colonie, tant dans les milieux administratifs que dans les milieux d'affaires, en vue d'une adaptation étroite de l'ensei- 146 INDOCHINE gnement professionnel aux besoins constatés et même d'une organisa¬ tion de l'apprentissage. Cette enquête vient d'être dépouillée et l'ensei¬ gnement professionnel est à la veille d'une réforme générale qui lui donnera à son tour sa doctrine et son statut originaux. Il sera complété par des offices d'apprentissage et d'orientation professionnelle, qui fonc¬ tionnent déjà au Tonkin et en Annam. 4° ENSEIGNEMENT LIBRE. Parallèlement à l'enseignement officiel s'est développé en Indochine un enseignement privé qui compte près de 60.000 élèves. Il se présente sous trois formes : 1° Un enseignement chinois qui prétend suivre les nouveaux pro¬ grammes et les nouvelles directives scolaires de son pays d'origine. L'éta¬ blissement le plus connu est le Lycée Franco-Chinois de Cho-Quan (Co- chinchine) établi sous le contrôle de la Direction de l'Instruction pu¬ blique et qui oriente vers l'enseignement français l'élite de la plus grosse colonie chinoise d'Indochine. A Hanoï, la section étrangère instituée au Lycée Albert Sarraut a le même but; 2° Un enseignement indigène annamite, qui abandonne à regret les vieilles routines pédagogiques de la formation par l'étude exclusive de la morale traditionnelle et des caractères; 3° Un enseignement européen, presque exclusivement aux mains des missionnaires catholiques et dont la maison la plus importante est l'Ins¬ titution Tabert de Saigon. L'enseignement libre européen paraît stationnaire, tandis que l'ensei¬ gnement libre chinois et annamite avait reçu en ces dernières années une extension et une orientation qui méritaient une attention particu¬ lière. C'est pourquoi il a fallu procéder à un statut d'ensemble de l'en¬ seignement privé sous toutes ses formes; le régime nouveau a été établi par le décret du 14 mai 1924 et par les arrêtés de 1925 pour les ensei¬ gnements qui appliquent les plans d'études officiels ou qui sont donnés en langue indochinoise ou française. Une réglementation analogue est en cours d'organisation pour les autres formes d'enseignement libre (malais et chinois). Ces établissements ont été soumis à l'inspection et seront tenus de se conformer aux règles d'hygiène scolaire, d'appliquer les programmes officiels et d'employer un personnel qua¬ lifié pourvu des diplômes requis. La validité des diplômes chinois étant l'administration française 147 difficilement contrôlable, il a été institué un brevet de capacité délivré par les autorités françaises qui en tiendra lieu. La nouvelle organisation de l'enseignement libre, qui est désormais dans notre zone d'action scolaire, fonctionne normalement pour toutes les écoles libres du 1er type, dont 3.285 sont ainsi rentrées dans la règle, et s'applique à tout l'ensei¬ gnement privé depuis la rentrée de septembre 1929. III. — ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR Bien que tout le monde ne s'en aperçoive pas encore, l'Université de Hanoï est déjà une personne d'un certain âge : elle est dans sa onzième année d'existence légale et le plus ancien de ses établissements, l'Ecole de Médecine, a plus d'un quart de siècle. Les écoles qui composent l'Université ont été créées dans l'intention de procurer à l'Indochine les fonctionnaires et les techniciens indigènes nécessaires à la bonne administration du pays. Cette conception d'un groupement d'écoles spéciales, et pour ainsi dire d'application, est au¬ jourd'hui en train d'évoluer sous l'effet de besoins nouveaux, et surtout grâce aux ressources intellectuelles que fournit chaque jour avec plus d'abondance l'enseignement secondaire franco-indigène. Deux de ces écoles possèdent déjà un enseignement égal en droit ou équivalent en fait à celui de nos Facultés. L'Ecole de Médecine et de Pharmacie de plein exercice est une Faculté dont seule la 5e année s'est jusqu'ici accom¬ plie en France. La section de P. C. N., qui constitue l'année prépara¬ toire et la pépinière des diverses sections de cette école, atteint en 1930 le total de 67 élèves. L'Ecole des Hautes Etudes indochinoises dis¬ pense en droit français et en droit indigène un enseignement équivalent à celui de la licence juridique métropolitaine, et il a suffi de l'annonce de sa transformation imminente en Faculté de droit pour faire surgir près de 80 demandes d'inscription, ce qui, en y ajoutant les élèves actuels, donnerait des promotions d'environ 100 élèves et, pour les trois ans de licence seulement, un effectif total de 300 étudiants au moins. Dès maintenant, on n'entre dans ces deux écoles qu'avec le baccalauréat métropolitain ou son égal, le baccalauréat indochinois. A côté de ces deux établissements vivent, grandissent et se renfor¬ cent sans cesse six écoles d'enseignement supérieur technique, qui toutes ont été réorganisées depuis 1924 de manière à leur assurer un recrute- 148 INDOCHINE ment, un plan d'études et un niveau qui non seulement permettent de les comparer aux établissements similaires de la Métropole, mais encore les placent de plus en plus sur un pied d'égalité avec celles-ci. Ce sont l'Ecole Vétérinaire, la doyenne, car elle est fondée depuis vingt ans, l'Ecole supérieure de Pédagogie, l'Ecole supérieure de Commerce et des Postes, l'Ecole des Travaux publics qui forme des agents techniques, des agents-voyers et formera bientôt des ingénieurs adjoints, l'Ecole d'Agri¬ culture et de Sylviculture, enfin la dernière venue — son cycle d'études n'atteindra son développement complet que dans deux ans, — l'Ecole des Beaux-Arts et d'Architecture. Dans toutes ces écoles on entre, soit avec le baccalauréat, soit après un concours sévère : des examens de passage rigoureux, surtout à la fin de la première année, renforcent encore la sélection; la scolarité y est, selon les établissements, de trois à cinq ans, et d'ordinaire de quatre ans. Sans compter les bibliothèques spéciales des diverses écoles, la biblio¬ thèque centrale, qui vient d'être achevée à côté du grand amphithéâtre, et dont l'organisation sera confiée à la Direction des Archives et Biblio¬ thèques, réunira 30.000 volumes. Les 6 laboratoires de l'Université ne suffisent déjà plus aux besoins, et il faut prévoir une extension qui sera faite l'an prochain. Il en est de même pour l'Institut anatomique de l'Ecole de Médecine. Le Comité de recherches scientifiques de l'Indochine, fondé en 1928 et qui sera prochainement installé au cœur même de la Cité Universi¬ taire, a pu déjà envoyer pour le Congrès Pan-Pacifique de Java plu¬ sieurs communications du plus haut intérêt dont deux venaient d'un des travailleurs indigènes de nos laboratoires, M. Nguyen Cong Tieu. Le directeur du Laboratoire de Physique, M. le professeur Bernard, pré¬ pare en ce moment même l'organisation sous le vestibule d'entrée de l'expérience du pendule de Foucault qui n'a été jusqu'ici accomplie qu'à Paris. Car le personnel enseignant de cette Université qui commence seule¬ ment à prendre son plein essor constitue déjà un corps dont on ne sau¬ rait mieux constater la valeur qu'en indiquant sa composition. A l'Ecole de Médecine et de Pharmacie, il compte une belle phalange de docteurs, dont plusieurs sont des praticiens ou des savants dont la renommée dépasse les frontières de l'Indochine. Dans les autres écoles, on trouve l'administration française 149 déjà 7 docteurs en droit, deux docteurs ès sciences, 2 docteurs vétéri¬ naires, 2 docteurs ès lettres, 2 correspondants du Muséum d'Histoire naturelle, 2 membres de l'Ecole française d'Extrême-Orient, 3 ingénieurs du corps des Ponts-et-Chaussées, 3 prix du Salon des Beaux-Arts, 12 agré¬ gés de l'Université et une pléiade de techniciens et de chargés de cours qui ont eu l'occasion, dans ce pays en pleine évolution et où se posent de perpétuels problèmes, de faire largement la preuve de leur expé¬ rience et de leur savoir. Enfin l'un des traits originaux de notre Université, c'est la réalisation, avant que cette idée fût tombée dans le domaine commun, d'une Cité Universitaire sous la forme d'internats largement pourvus de bourses. Cette Cité Universitaire, qui réunit aujourd'hui près de 400 pension¬ naires, sur 512 étudiants suivant les cours, se trouve même être la doyenne des cités universitaires de France et des Colonies, et les exten¬ sions en cours lui donneront dans un an 100 places de plus; rappelons que la maison indochinoise de Paris loge à peine 100 élèves en tout. Cette Cité de Hanoï est pourvue d'un confort bien adapté au milieu; elle est complétée par la colonie scolaire de vacances de la plage de Do-Son, qui a hébergé l'an dernier plus de 150 étudiants. Sous le nom vraiment excessif, quoique traditionnel, d'internat, cette cité est orga¬ nisée d'une manière à la fois libérale et ferme qui lui assure, dans le sens le plus net des mots, un régime de discipline paternelle et con¬ sentie. Ce régime a fait ses preuves d'une manière éclatante puisque, malgré les excitations venues du dehors, l'Université n'a connu ni une seule manifestation ni une défaillance ni le moindre geste de mauvais esprit. Nos étudiants, qu'il ne faut pas confondre avec ceux qui se parent de ce titre ou qu'on pare de ce titre pour les besoins de mauvaises polé¬ miques, n'ont jamais cessé de faire honneur à leurs maîtres et à leur Université, et tous ceux qui ont bien voulu venir les voir à l'œuvre ont été unanimes à leur rendre justice. Nous avons ainsi tracé le schéma de l'organisation scolaire indochi¬ noise : mais nous risquerions d'en fournir une idée imprécise et dimi¬ nuée si nous ne donnions pas en même temps l'échelle de cette repré¬ sentation. On ne réalisera la grandeur du monument qu'en y voyant circuler la foule des élèves et des maîtres. L'armature de ce qu'on ap¬ pelle, sans excès d'honneur, l'Université indochinoise se compose de 150 INDOCHINE 600 Européens : le recteur, directeur général de l'Instruction publique, ses trois inspecteurs en chef (adjoint au directeur, lettres et sciences), 23 agrégés, 162 licenciés ou certifiés, 49 professeurs de l'enseignement technique, 430 instituteurs. Près de 9.000 indigènes forment la masse du corps enseignant, dont 134 professeurs de 2e degré et quelques maîtres d'élite de l'Enseignement supérieur. Ce personnel est réparti entre 40 éta¬ blissements français groupant 3.826 élèves et 4.982 écoles indigènes, dont deux lycées et 22 écoles primaires supérieures réunissant 367.811 élèves, y compris les 43.819 élèves des Ecoles de Pagode. A ces effectifs, dont beaucoup de Français seront impressionnés, il faut joindre par surcroît les 57.400 élèves de l'enseignement libre. A ceux, indigènes ou Euro péens, qui nient bruyamment l'œuvre scolaire de la France en Indo¬ chine, montrons ces 400.000 enfants qui, tous les matins, franchissent le seuil de l'école. C'est la plus éloquente des réponses. Et qu'on n'ou¬ blie pas que ce n'est là qu'un début. C'est maintenant en effet, après les années laborieuses consacrées à l'organisation rationnelle de l'édifice scolaire, à l'élaboration de la doctrine et des méthodes pédagogiques, que les services de l'Instruction publique en Indochine vont prendre leur plein essor. LES SERVICES MÉDICAUX ORGANISATION DU SERVICE Les Services médicaux, civil et militaire, de l'Indochine ont à leur tête un médecin général inspecteur des troupes coloniales, à la fois direc¬ teur du service de santé et inspecteur général des services sanitaires et médicaux de l'Indochine. Par suite de ce cumul de fonctions, cet officier général se trouve placé ainsi sous l'autorité directe du gouver¬ neur général et du général commandant supérieur des troupes. I. SERVICE DE SANTÉ MILITAIRE service de santé militaire. — Le groupe de l'Indochine est au point de vue militaire divisé en deux régions : Annam-Tonkin et Cochinchine- Cambodge. Dans chacune de ces deux régions, le service de santé comprend un service général (direction, détachement d'infirmiers, pharmacie d'appro¬ visionnement, magasin du service de santé) et un service des troupes ainsi constitué : 1° Annam-Tonkin : 7 infirmeries-hôpitaux; 10 infirmeries de garnison; 8 infirmeries régimentaires; 8 salles de visite. 2° Cochinchine-Cambodge : 1 infirmerie-hôpital; 2 infirmeries de garnison; 2 infirmeries régimentaires; 9 salles de visite. 152 INDOCHINE Les grands hôpitaux militaires d'Hanoï, de Saïgon et d'Haiphong, passés en 1928 à la Colonie, continuent à fonctionner comme par le passé avec leur personnel militaire, mis hors cadres. L'hôpital de Lanes- san à Hanoï est entretenu par le budget général de l'Indochine, l'hô¬ pital Grall à Saïgon par le budget local de la Cochinchine, et l'hôpital d'Haiphong par celui du Tonkin. Ces établissements sont donc des hôpitaux mixtes. Personnel. — Le personnel officier comprend les médecins, les phar¬ maciens et les officiers d'administration, qui, suivant leurs affectations, sont du service général, du service des troupes ou détachés hors cadres. a) Le service général des directions, pharmacies d'approvisionnement et formations hospitalières militaires emploie : 7 médecins; 3 pharmaciens; 6 officiers d'administration. b) Le service des troupes emploie 37 médecins, dont 7 appartenant au service de santé métropolitain et servant dans les bataillons de la Légion étrangère. c) Sont détachés hors cadres dans les hôpitaux et ambulances entre¬ tenus par les budgets locaux : 19 médecins, 2 dentistes, 3 pharmaciens, 4 officiers d'administration. De plus, 27 médecins et 5 pharmaciens servent hors cadres aux Ins¬ tituts Pasteur, à l'Assistance médicale indigène et dans les postes consu¬ laires de Chine. Au total, le service de santé des troupes coloniales fournit à l'Indo¬ chine 90 médecins, 11 pharmaciens et 10 officiers d'administration, dont la durée réglementaire de séjour est de 2 ans et G mois. Le personnel infirmier subalterne se compose de : 22 dames-infirmières du cadre colonial; 43 infirmiers européens; 204 infirmiers indochinois, et assure le service des formations hospi¬ talières militaires ainsi que celui des grands hôpitaux passés aux bud¬ gets général et locaux. II. - INSPECTION GÉNÉRALE DES SERVICES SANITAIRES ET MÉDICAUX L'inspection générale des services sanitaires et médicaux est, parmi les services du gouvernement général, celui qui contrôle le fonctionnement des divers services sanitaires et médicaux et en assure l'unité. Chaque l'administration française 153 pays de l'Union indochinoise comprend une direction locale de la Santé, ayant un personnel, des formations et tin budget particuliers. Actuellement, le Tonkin, le Laos, le Cambodge ont des directeurs civils, tandis que l'Annam et la Cochinchine ont encore des directeurs appartenant au corps de santé des troupes coloniales. De même le médecin chef du territoire de Kouang-Tchéou-Wan est un médecin mili¬ taire. L'inspection générale des services sanitaires et médicaux a dans ses attributions le contrôle de l'assistance médicale indigène, la prophylaxie des maladies épidémiques et endémiques, le contrôle des établissements scientifiques autres que les Instituts Pasteur, celui des écoles d'enseigne¬ ment technique autres que l'Ecole de Médecine de Hanoï, l'hygiène et la salubrité publiques, la police sanitaire maritime et la direction des postes médicaux consulaires en Chine et au Siam: A. — ASSISTANCE MÉDICALE. L'assistance médicale a pour but principal de donner aux populations indigènes, et accessoirement aux Européens, les soins nécessaires aux malades et aux blessés, aux femmes en couches, aux enfants, aux alié¬ nés, aux lépreux, et de prévenir par des mesures prophylactiques l'ex¬ tension des maladies épidémiques, si redoutables dans les aggloméra¬ tions asiatiques. Elle fut créée officiellement le 30 juin 1905, date à laquelle M. le Gouverneur général Beau l'organisa sur tout le territoire indochinois. Marchant de pair avec le développement économique de notre grande colonie, l'assistance médicale a vu son rayon d'action s'étendre à des masses toujours croissantes d'indigènes. A l'heure actuelle, sans avoir atteint encore le plein développement qu'on est en droit d'attendre d'elle, elle constitue un important service, aux multiples ramifications, dont les grandes lignes sont esquissées ici : Le personnel est ainsi réparti : Personnel, médecins français. — 138, dont 102 médecins du corps de l'assistance, 10 médecins contractuels, 26 médecins militaires hors ca¬ dres, auxquels il convient d'ajouter 33 médecins militaires ou civils, pourvus de fonctions diverses et prêtant accessoirement leur concours à l'assistance, ce qui porte à 171 le nombre total des docteurs en méde¬ cine attachés à ce service. 154 INDOCHINE La répartition par pays est la suivante : Tonkin 44, Annam 27, Cochinchine 51, Cambodge 20, Laos 12, Kouang- Tchéou-Wan 2, Instituts Pasteur 6, Services généraux 9, au total 171. Ce chiffre ne comprend pas, bien entendu, les médecins civils exer¬ çant à titre privé, ainsi que les médecins militaires affectés au service des troupes et des hôpitaux. Il faut signaler également que six pharmaciens français, dont cinq militaires, concourent au service de l'assistance. Médecins indigènes. — 191 médecins indigènes collaborent au ser¬ vice. Six d'entre eux sont pourvus du diplôme de docteur en médecine (docteurs indochinois). Les autres sont diplômés de l'Ecole de Médecine de Hanoï1 (médecins indochinois) et, parmi eux, dix, sélectionnés par concours, sont pourvus du titre de médecin indochinois du cadre latéral, qui leur procure les avantages de solde attribués aux docteurs indo¬ chinois. Ce chiffre de 191 ne comprend pas les médecins militaires indi¬ gènes et les médecins indigènes exerçant à titre privé. Pharmaciens. — Enfin, 29 pharmaciens indigènes sont affectés aux divers services hospitaliers de l'Assistance. Médecins libres. — En plus des médecins militaires et des médecins fonctionnaires de l'Assistance, d'autres praticiens exercent leur art dans les grandes villes de l'Indochine. Ils sont assujétis au paiement d'une patente et forment deux groupe¬ ments : le syndicat des médecins civils de la Cochinchine, composé de 18 médecins, et l'Association des médecins libres du Tonkin comprenant 14 membres. Tous ces médecins exercent à Saigon, Cholon, Hanoï et Haiphong, où quelques-uns ont monté des cliniques privées : à Hanoï, clinique Saint-Paul, clinique Blot, clinique Patterson; à Saïgon, clinique Angier. Les médecins indochinois qui sont dégagés de toutes obligations envers l'assistance après dix ans de service, ont été autorisés, sous certaines restrictions, à exercer leur profession à titre privé. C'est ainsi que plusieurs d'entre eux se sont installés dans les chefs-lieux provinciaux en Cochinchine et en Annam. Sages-femmes. — Outre 5 sages-femmes eurojiéennes (3 en Cochin- 1. Voir le paragraphe ci-dessus sur l'enseignement supérieur. l'administration française 155 chine, 1 en Annam et 1 au Cambodge), 392 sages-femmes indigènes sont réparties entre les cinq pays de l'Union. Elles sortent des écoles de Hanoï, Cholon, Phuom-Penh et Vientiane. En dehors de ces sages-femmes diplômées, il existe surtout au Tonkin une institution dite des « Ba-Mu ». Il s'agit de matrones indigènes, for¬ mées, par un stage de quelques mois, aux pratiques élémentaires de l'obstétrique, et qui exercent dans les villages dépourvus de sages- femmes. Elles sont actuellement au nombre de 363. Personnel infirmier. — Le personnel infirmier européen comprend 31 infirmiers, 38 infirmières et 42 religieuses, soit au total 109 personnes. Le personnel infirmier indigène comprend : 2.280 infirmiers et auxi¬ liaires, 593 infirmières. Ces personnels subalternes sont d'un recrutement aisé. Il en est de même pour le cadre des médecins indochinois, dont les soldes ont été améliorées; d'autre part, la création du cadre latéral ouvre un espoir d'avancement intéressant aux meilleurs sujets. La situation est moins satisfaisante en ce qui concerne le cadre des médecins de l'Assistance. Alors que l'effectif a été augmenté et fixé à 136, il ne compte actuellement qu'une centaine de médecins. Le recru¬ tement par concours est encore insuffisant. Mais, grâce à l'admission à ce concours des Annamites pourvus du diplôme du docteur en médecine (3 docteurs annamites ont été reçus au concours de 1929), il est pro¬ bable que l'effectif prévu sera complété ces prochaines années. Formations sanitaires. — Ces divers personnels assurent le fonc¬ tionnement d'établissements et formations sanitaires, au nombre de 576 dans l'Union indochinoise, et ainsi répartis : 130 hôpitaux, ambulances, lazarets, dont 23 au Tonkin, 21 en Annam, 55 en Cochinchine, 14 au Cambodge, 14 au Laos, 3 à Kouang-Tchéou- Wan; 4 Instituts ophtalmologiques à Hanoï, Huê, Saïgon et Phnom-Penh; 414 infirmeries, postes médicaux, maternités isolées; 17 asiles d'incu¬ rables, orphelinats, crèches; 10 léproseries, et 1 asile d'aliénés en Cochinchine. 156 Indochine Le nombre des formations sanitaires est en progression continue : 460 en 1925, 502 en 1926, 543 en 1927, 576 en 1928. Un programme de constructions neuves, portant sur cinq années, de 1931 à 1935, est établi pour une somme totale de près de six millions de piastres (soit 60 millions de francs environ). Budget. — Au total, les crédits affectés à l'assistance médicale indi¬ gène atteignent, pour l'année 1928, la somme de six millions de piastres, contre trois millions en 1922, cinq millions en 1925. Parallèlement à cette augmentation des crédits, l'examen des statis¬ tiques montre une augmentation croissante de l'activité présentée par l'œuvre d'assistance. Les 576 formations hospitalières, disposant de 13.859 lits, ont, en chiffres ronds, hospitalisé, en 1928, 221.000 indigènes, avec 3.750.000 journées de traitement. Ce chiffre de 3.750.000 journées de traitement est à confronter aux chiffres des années précédentes : en 1921, 2 millions; en 1924, 3 mil¬ lions; en 1926, 3.200.000; en 1927, 3.400.000. Il en est de même des consultations: il a été donné, en 1928, à 5.120.000 consultations, chiffre remarquable si on le compare à ceux des années précédentes : 2.800.000 en 1919; 3.400.000 en 1922; 4.900.000 en 1925. B. — HYGIÈNE. Services d'hygiène. — Parallèlement aux services d'assistance médi¬ cale curative fonctionnent les services d'hygiène, comprenant : Un Conseil supérieur d'hygiène, siégeant auprès du Gouverneur gé¬ néral; Des conseils locaux d'hygiène, au siège de chaque Administration locale; Des Commissions sanitaires provinciales et municipales; Enfin, dans les grands centres, des bureaux d'hygiène, ayant à leur tête un médecin spécialisé. Ces organismes sont consultés sur toutes les mesures à prendre pour prévenir et combattre les maladies épidémiques, propager les vacci¬ nations, assurer la salubrité des agglomérations, des écoles, etc. Il convient de signaler tout spécialement, car elle présente une impor¬ tance considérable, l'hygiène des groupements et, en particulier, celle des écoles et celle des chantiers de travailleurs. l'Administration française 157 Hygiène des écoles. — L'inspection médicale des écoles fonctionne non seulement dans les grandes villes, où elle est assurée par un person¬ nel spécial de médecins et d'infirmières, mais aussi dans les provinces. Elle s'attache à dépister les maladies contagieuses et transmissibles, à arrêter l'extension des épidémies. Plus spécialement, elle s'attache au dépistage du trachome, de la tuberculose et du paludisme, maladies pour lesquelles des index d'endémicité sont établis régulièrement. Hygiène des travailleurs. — L'inspection médicale des travailleurs est pourvue d'une réglementation spécialement édictée par le Gouverneur général. Dans l'ensemble, un gros effort a été accompli, en accord avec les administrations locales et les employeurs — dont c'est l'intérêt bien compris — pour assurer l'hygiène des cantonnements et fournir aux tra¬ vailleurs les soins médicaux nécessaires. Ainsi, au Tonkin, une exploitation charbonnière qui emploie 40.000 travailleurs dispose de 3 médecins et 20 infirmiers, avec un hôpital de 250 lits, des hôpitaux secondaires, postes de secours, maternités, laza¬ rets. Par ailleurs, l'effort s'est porté vers la prophylaxie du béribéri par l'amélioration des conditions alimentaires, vers celle du paludisme par la lutte contre le moustique et la quininisation. Enfin, le service médical de l'émigration assure le contrôle strict de tous les indigènes qui quittent le Tonkin, à destination des chantiers de Cochinchine, du Sud-Annam, ou des possessions françaises du Paci¬ fique, et à ceux qui en reviennent. Hygiène des indigènes. — Une récente enquête dans les pays de l'Union indochinoise sur la façon de vivre des indigènes, au point de vue alimentation, vêtement et habitation, a montré que les progrès réalisés dans ce domaine, depuis l'occupation de l'Indochine, ont été relativement lents. Alimentation. — Dans les régions de plaines, la sous-alimentation est encore la règle pour les classes les moins fortunées, paysans et coolies, c'est-à-dire la partie la plus nombreuse de la population. Cette sous- alimentation s'accentue à certaines périodes de sécheresse, d'inondation ou de soudure des récoltes. Cette carence alimentaire porte principalement sur les éléments azo¬ tés et les matières grasses. Bien que le paysan des plaines consomme approximativement par jour, dans les périodes d'abondance, de 600 à 158 INDOCHINE 700 grammes de riz, assaisonné de 5 à 10 gr. de nuoc-mam (sorte de saumure de poisson) et de quelques condiments, ce régime hypoazoté est nettement insuffisant pour un travailleur. Le paysan annamite, qui effectue un travail pénible dans ses rizières pendant parfois 10 à 12 heures par jour et qui consomme exclusivement 700 grammes de riz assaisonné de nuoc-mam, donnant 2.488 calories 85, est sous-alimenté; il manque plus de 1.000 calories à sa ration journa¬ lière. D'autres travailleurs, coolies, sampaniers, doivent se contenter d'une ration plus réduite encore par suite du bas prix des salaires. Dans les populations montagneuses, la chasse et la pêche fournissent un appoint notable, et le régime alimentaire, qui se renforce de maïs, de haricots, de manioc, de quelques produits d'élevage, est moins insuf¬ fisant que chez les populations des plaines. Au cours de ces dix dernières années, il n'y a pas eu à proprement parler de véritables famines, analogues à celles qui périodiquement dé¬ peuplent les provinces du Sud et du Centre de l'Inde. Mais, chaque année, des inondations, des typhons ou des sécheresses détruisent les récoltes sur des étendues parfois considérables. En octobre 1924, la pro¬ vince de Quang-Nam, en Annam, dévastée par un violent typhon, souffrit d'une famine qui, malgré la promptitude des secours apportés, fit un certain nombre de victimes. De même en juillet 1929 pour la pro¬ vince de Nam-Dinh, au Tonkin. L'imprévoyance des indigènes s'ajoute aux irrégularités climatiques pour aggraver les disettes : quand la récolte est abondante, ils vendent leur riz sans assurer leurs besoins, bien que des mesures administratives tempèrent cette imprévoyance en limitant ou interdisant l'exportation. Envisagée au point de vue médical, la sous-alimentation habituelle a provoqué une diminution physique de la race, dont un meilleur ré¬ gime est susceptible de transformer l'aspect : témoins les tirailleurs, la plupart des internes des écoles, les rapatriés de France. Il est difficile d'incriminer exclusivement la sous-alimentation pour expliquer la moindre résistance à certaines maladies épidémiques, telles que le choléra, qui a presque exclusivement atteint la population indi¬ gène, mais il faut la compter comme un facteur susceptible de pro¬ voquer une plus grande réceptivité. Par contre, la carence alimentaire est cause du béri-béri et d'une Indochine II. Femme Man, province de Bac-kan (Tonkin). Pl. XI. Clichés Gouv. Général Indochine. Homme Kha, province de Bassac (Laos). i:YYY '■-■■ Si îjgSl -;S"' î lÉ S gi ' . ■ sY.S- l|l|§gS8Sï|i S-s'i S: Y--s■■■■■■ Hs|3 i iSlY - S S s' s Si -W.-^'S;v^:^:;:^s:yMSWsa^ : . tel SflSiSe Xël 1;'"" •'-.- • ' ■■-..■■ ■-:■ -: . - -s. ■■ : »-. - •- - •'-.•'•• -. : -- -s. . \ - l - -: . - - > P - - : ' : . .... 'Y;- Y : • "• Y->. "sy-YS-S Y ■: -v;. • . •• ; ' - --.-■• -•-•;-• S8S iS-gPpYYY. -„- --s lYYsXYSSsiYYYYY:^ t- - * ~-iY- - - s - - ÈÉÉsf m m # si l su ' aa îwssœrtsa*^ i . - . _ ^ ss-- -;,i.-■ --ss ssgssg Ysi Bil i ^ÉÉM^ «s» M IIÉtSSi mm : 8S 8Î SW » Sptlll SftKfJ I -S ' - '" -S'iSS ; SS.;SS ■ ■ -' V.-.SS- ■ S - - - - - - : -- - - - - -- -..--- : :-: S . ■'...' S": ■■■■.. : s . : i" • _' - :■ ",.r -•'•• 1 • — v s ■ -• '• ." ■■ •" "■ - :■;_■■■■ 2 " ';- > v i s_ .-. ....... ~. ■•_. . : ••" ' ".-•>'• Y'V'V-—.;. - Y.; g-V-Xs sXXX XI-XV-XX'"-' >X. s-is sy'-'-S X;."-X-:•' . ' Yi-Ycs-YY ' * —✓ „— ' " - ~ —, C- - . ~ ~ -"S , "2 ~ -- "* " Xi - - - - r; - i. . 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De plus, la sous-alimentation diminue la résistance de l'individu à beaucoup de maladies infectieuses, en particulier à la tuberculose pul¬ monaire, dont les conditions déplorables de l'habitation indigène favo¬ risent la dissémination. Il n'existe pas de statistiques médicales pouvant venir à l'appui de cette affirmation, mais c'est une notion de pathologie générale qui est admise couramment. Vêtement. — Si nous envisageons maintenant la question du vête¬ ment, nous y trouvons la même insuffisance que pour l'alimentation. Presque partout, l'indigène est insuffisamment vêtu. Le paysan et le coolie n'ont pour sous-vêtement que de la cotonnade grossière souvent rapiécée, et contre la pluie, ils ne connaissent que la seule protection d'un manteau de latanier. C'est peu pour supporter l'hiver du Tonkin et du Nord-Annam. Aussi les affections pulmonaires sont-elles fréquentes, principalement chez les enfants, parmi lesquels la broncho-pneumonie cause de nombreux décès. Toutefois, il semble que l'Annamite résiste mieux aux intempéries que l'indigène de race noire (Sénégalais, Soudanais, Congolais, Malga¬ ches) qui est d'une sensibilité toute particulière au pneumocoque. Habitation. — Passant maintenant à la question de l'habitation, nous trouvons des conditions différentes suivant que l'on considère l'habita¬ tion des campagnes et l'habitation des villes. Dans les villes, l'habitation indigène est en grande majorité cons¬ truite en dur (briques, moellons ou torchis) et couverte soit par des tuiles, des tôles ou de la paille. Elle est donc théoriquement un bon abri contre les intempéries, mais l'architecte annamite l'a ordonnée suivant sa conception, dans la crainte de l'air et de la lumière. Donc suivant sa conception, sans recherche de l'air et de la lumière. Les ou¬ vertures sont insuffisantes, la plupart munies de volets pleins, les cham¬ bres obscures, sans communication avec l'extérieur, les réduits et alcôves seulement aérés lorsqu'on ouvre la porte. Cependant un réel progrès a été réalisé au cours de ces dernières années : de nombreuses maisons annamites plus confortables ont été construites dans les grands centres. INDOCHINE. T. II. 11 160 INDOCHINE Dans les campagnes, l'habitation annamite^ est d'un type bien pri¬ mitif, mais elle est plus aérée et plus ensoleillée que dans les villes. Au Laos et au Cambodge, l'habitation est ordinairement un peu plus soignée. C'est aussi une paillotte à charpente de bambous, mais sa cons¬ truction sur pilotis la rend plus salubre en l'éloignant de l'humidité du sol. En résumé, l'alimentation est encore insuffisante; il en est de même de la protection contre les intempéries. Mais il existe cependant une tendance à l'amélioration. On peut, sans se tromper, admettre que la diffusion de l'enseignement, la création de besoins nouveaux, la com¬ préhension progressive des bienfaits de l'hygiène et surtout la contagion de l'exemple fourni par les centres où vivent les Européens et les indigènes cultivés, l'action enfin de l'Administration, sont des moyens de transformation efficaces. Si le progrès ne frappe pas toujours l'étranger qui passe, il n'échappe point à l'observateur averti, quelque lent qu'il puisse être. * Tous ces services d'assistance médicale et de l'hygiène mènent une lutte constante contre les grandes maladies endémiques ou épidé- miques, qui frappent, soit constamment, soit par paroxysmes, la popula¬ tion indochinoise. Ce n'est pas ici le lieu de décrire, par le détail, l'état sanitaire de l'Union. On se contentera d'esquisser le tableau des prin¬ cipales affections endémiques, en se basant sur les chiffres des dernières statistiques mises à jour, celles de 1928. Choléra. — Le choléra, après la grande épidémie de 1927 qui fit dans les pays de l'Union, et au Tonkin en particulier, plus de 25.000 victimes, a peu à peu décliné. Il persiste un foyer d'endémicité en Cochinchine et au Cambodge mais avec une diminution progressive des cas et des décès. Indépendamment des mesures d'hygiène générale, l'arme la plus puissante contre l'épidémie cholérique a été la vaccination. Celle-ci a été pratiquée en masse à l'aide du vaccin préparé par l'Institut Pasteur de Saigon. En 1927-1928, la campagne de vaccination nécessita 36 millions de l'administration française 161 centimètres cubes de vaccin, entraînant une dépense de 200.000 piastres. Actuellement, la campagne de vaccination anticholérique est con¬ tinuée, mais à une allure ralentie, sauf en Cochinchine et au Cambodge, où elle est poussée activement. Variole. — La variole est en régression très nette, au fur et à mesure que s'étend davantage la vaccination jennérienne. En 1928, 1.300 cas de variole, avec 400 décès, ont été observés chez des indigènes, 3 cas chez des Européens, contre 5.000 cas en 1924, 2.500 en 1926. Près de 10 millions de vaccinations et de revaccinations ont été prati¬ quées à l'aide de pulpe vaccinale préparée dans les Instituts vaccino- gènes de Hanoï, Hué, Saïgon, Phnom-Penh et Vientiane. Peste. — La peste est en régression continue depuis 1920. En 1928, 190 cas seulement se sont produits, principalement sur le littoral du Sud-Annam et à Phnom-Penh, formant des foyers vite circonscrits. Les chiffres suivants montrent que cette redoutable endémie décroît rapidement : 1922, 1.300 cas; 1924, 900 cas; 1926, 300 cas; 1928, 190 cas. Au total, 12.000 vaccinations antipesteuses furent pratiquées en 1928, dans les régions atteintes et dans certains groupements exposés à la contagion (travailleurs, prisonniers). Lèpre. — La lèpre frappe en Indochine un assez grand nombre d'in¬ digènes, dont une partie seulement est connue. Au total 3.000 lépreux sont isolés dans 13 léproseries, où leur est appliqué le traitement par les étliers chaulmoogriques. En réalité, il est très difficile d'arriver à un recensement exact des lépreux : les familles et les malades redoutent, en effet, la séparation forcée, conséquence de la déclaration de la maladie. La lutte contre la lèpre ne deviendra vraiment efficace que lorsque les formations spé¬ ciales seront suffisamment nombreuses, suffisamment disséminées dans toutes les régions du pays. Le type idéal de ces formations spéciales, vers lequel tendent actuelle¬ ment les efforts, est le village-léproserie où le malade vit, non point sous le régime de l'internement forcé, mais dans une quasi liberté, avec des occupations normales et une vie en commun se rapprochant le plus possible des conditions habituelles de la vie indigène. Paludisme. — Le paludisme domine la pathologie de l'Indochine : plus du dixième des malades hospitalisés sont des paludéens. Sa pro- 162 INDOCHINE phylaxie comprend d'abord des mesures d'ordre général, dirigées contre le moustique, agent vecteur de la maladie. Les unes sont de grande envergure : assèchements, déboisements, cultures, et vont de pair avec la mise en valeur du pays. D'autres, plus particulières, visent au repé¬ rage des gîtes à moustiques dans une zone déterminée, et à leur des¬ truction. C'est dans ce but qu'a été créé, en attendant qu'il puisse en être établi de semblables dans les autres pays, le service antimala- rien de l'Institut Pasteur de Saigon. Celui-ci procède à une étude sys¬ tématique des diverses régions de la Gochinchine, avec recherche des gîtes, établissement de cartes et de plans, et surveillance des résultats. Malheureusement, en raison de l'étendue du territoire indochinois, l'œuvre à réaliser est immense et nécessiterait des crédits énormes et un personnel considérable. Quininisation. — Pour le moment, la mesure la plus sûre et la plus pratique consiste dans la protection de l'individu et dans la stérilisation des malades par la quinine. La quinine, achetée par l'Administration, est distribuée, soit gratui¬ tement (hôpitaux, consultations, indigents), soit à titre onéreux. Elle est alors vendue, sous le nom de quinine d'Etat, et à perte, par l'entre¬ mise du service des Douanes et Régies. En 1928, il a été distribué gratuitement 2.240 kilos de quinine, et il a été vendu 400 kilos de quinine d'Etat, soit au total 2.640 kilos, chiffre en augmentation sensible sur les années précédentes (1.200 kilos en 1922, 1.300 en 1926). Tuberculose. — La tuberculose est beaucoup plus fréquente en Indo¬ chine qu'on ne serait tenté de le croire. En réalité un petit nombre de cas est déclaré (6.000 en 1920). Il n'en reste pas moins que l'endémie tuberculeuse présente un grave danger dans un pays où les centres sont généralement surpeuplés et les habitants entassés dans des logements insuffisants. Aussi, la vaccination des nouveaux-nés par le vaccin B. C. G. y pré- sente-t-elle un intérêt considérable. Encore que de date relativement récente, elle entre de plus en plus dans la pratique. Depuis le début de l'application de la méthode jusqu'à la fin de 1928, plus de 70.000 vaccinations ont été pratiquées. Béribéri. — Le béribéri a subi, dans ces dernières années, une recru- l'administration française 163 descence marquée en Cochinchine, où 3.400 cas, avec 600 décès, ont été observés en 1928, alors que, dans tout le reste de l'Union, on ne comptait, pendant la même période, que 200 cas. Quelle que soit l'origine du béribéri, — intoxication, infection, carence — il paraît définitivement acquis que cette affection est liée à l'usage d'un riz trop complètement poli — usage qui se répand de plus en plus en Cochinchine où le riz sortant des décortiqueuses mécaniques a presque complètement remplacé le riz décortiqué dans les familles. Une enquête est actuellement en cours sur cette importante question. Trachome. — L'effort des services d'assistance s'est également porté sur le trachome, qui frappe jusqu'à 40 et 60 % de la population en Annam et au Tonkin. Les centres de lutte anti-trachomateuse sont repré¬ sentés par les quatre instituts ophtalmologiques, où viennent s'instruire les étudiants et les médecins indigènes, et qui ont donné, en 1928,103.000 consultations. Maladies vénériennes. — Enfin, il faut dire un mot de la lutte contre les maladies vénériennes, lutte difficile, en raison de l'indifférence des indigènes vis-à-vis de ces maladies, qu'ils négligent, parce que peu dou¬ loureuses et généralement sans gravité immédiate. Un Institut prophylactique fonctionne à Saigon depuis 1927 et à Huê depuis 1928. Un autre Institut est prévu pour Hanoï. Dans les autres villes existent des dispensaires spécialisés. * * * Institut Pasteur. — Le fonctionnement des services d'assistance est grandement facilité par l'existence, à Saigon et Hanoï, d'Instituts Pas¬ teur qui ont procédé, en 1928, à plus de 50.000 examens microbiologi¬ ques et préparé plus de 6 millions de doses de vaccins divers. En outre, les laboratoires de l'Institut Pasteur rendent les plus éminents services dans la lutte contre les maladies endémiques — paludisme, choléra — par l'orientation qu'ils donnent aux recherches et par les enquêtes faites sur place par leur collaborateurs. Ils assurent, en outre, la surveillance régulière des eaux d'alimentation. A signaler également les services antirabiques qui ont traité, en 1928, 2.700 personnes mordues par des animaux suspects. 164 INDOCHINE De ce rapide exposé de la situation actuelle en Indochine, au point de vue de la protection de la santé publique, il faut conclure que, dans notre grande colonie d'Extrême-Orient, l'assistance médicale suit une marche ascendante qui doit, normalement, se poursuivre. L'œuvre accomplie est déjà considérable. Elle peut encore se perfectionner. Au fur et à mesure que les conditions économiques s'améliorent, que notre civilisation se répand, nous devons porter de plus en plus notre effort vers la lutte contre les grandes maladies endémiques et vers l'amélio¬ ration des conditions hygiéniques. Dans ce but, le Gouvernement général a décidé l'organisation d'un Service d'hygiène et de médecine préventive dans chacun des pays de l'Union. Ce service comprendra plusieurs secteurs avec un personnel spécialisé distinct de celui de l'assistance médicale. L'expérience de ces dernières années n'a fait que confirmer, en effet, l'impossibilité pour les médecins-chefs provinciaux — trop pris par la direction de l'hôpital et par les soins à donner aux malades extérieurs — de faire des tournées régulières dans l'intérieur des provinces et de surveiller l'état sanitaire des populations rurales. C. — POLICE SANITAIRE MARITIME L'inspecteur général délègue ses pouvoirs aux directeurs locaux de la Santé dans les pays maritimes de l'Union pour l'exécution de ce ser¬ vice. Les directeurs locaux, assistés des conseils sanitaires des ports, ont sous leurs ordres des agents principaux de la Santé, des agents ordi¬ naires, des sous-agents, des gardes sanitaires, chargés de l'exécution des règlements de police sanitaire. Dans les ports de Saigon et Hàïphong existent de puissants moyens de désinfection et de dératisation des navires, ainsi que des stations sanitaires permettant l'isolement et le traitement des passagers suspects. D. — POSTES CONSULAIRES A Canton, Yunnan-Fou, Mong-Tseu, Pak-Hoï, Hoï-How, Long-Tchéou, en Chine; à Oubone, au Siam, fonctionnent des postes médicaux dirigés par des médecins militaires hors cadres. l'administration française 165 Le Gouvernement de l'Indochine subventionne ces postes qui reçoi¬ vent, d'autre part, des allocations du Ministère des Affaires étrangères. Certains d'entre eux, en particulier Canton et Yunnan-Fou, possèdent de beaux hôpitaux modernes, munis d'installations chirurgicales et radio- logiques complètes. Ces formations médicales ont une influence importante sur la popu¬ lation chinoise des centres où elles fonctionnent, et, bien concurrencées par des hôpitaux entretenus à grands frais par des puissances étran¬ gères, elles conservent au premier rang, grâce au dévouement et au complet désintéressement des médecins français qui les dirigent, notre renom de nation généreuse et civilisatrice. E. — ASSISTANCE SOCIALE Jusqu'au 1er septembre 1928, il n'existait aucune organisation offi¬ cielle des œuvres de bienfaisance et d'assistance sociale, en dehors des établissements hospitaliers relevant de l'assistance médicale propre¬ ment dite. L'assistance sociale était laissée à l'initiative privée : des œuvres éparses avaient été créées çà et là, sans aucune cohésion, aucun lien, aucune solidarité — vivant ou pour mieux dire vivotant au jour le jour, avec des moyens précaires, parfois subventionnés par les gouver¬ nements locaux et sans aucune méthode scientifique. Presque toutes d'ailleurs relevaient de la Mission catholique et méri¬ taient davantage le nom d'oeuvres de pure charité apostolique que celui d'œuvres sociales. Dès septembre 1928, une des premières préoccupations du Gou¬ verneur général fut d'organiser l'assistance sociale; son programme se résume ainsi : « Coopération des Pouvoirs publics avec les initiatives privées. ». La première année 1929 — fut une période d'études, de consulta¬ tions et de tâtonnements : il s'agissait de mettre au point les moyens d'adapter les méthodes et les progrès scientifiques modernes de l'Occi¬ dent à la mentalité, aux traditions et aux besoins spéciaux de l'Orient. Le chef de ce nouveau service reçut donc mission d'organiser l'assis¬ tance sociale, d'étudier le fonctionnement de toutes les œuvres alors existantes et de rechercher les possibillités d'amélioration, notamment en développant l'esprit de solidarité à peu près totalement inconnu en 166 INDOCHINE Indochine. Le particularisme de chacun des pays de l'Union est le prin¬ cipal obstacle à la réalisation d'une organisation cohérente pour l'Indo¬ chine entière. état des œuvres en 1929. — L'état dans lequel fut trouvée l'assistance sociale en 1929 peut se résumer ainsi : Au Tonkin, les œuvres de la Mission : Les « Sainte Enfance », œuvres à but principalement religieux, pouvaient recevoir jusqu'à près de 4.000 enfants moribonds par an, alors que les demandes dépassent 15.000 : insuffisance de locaux, d'aménagement, de ressources, de personnel. Une merveilleuse école de sourds-muets contenait environ 30 élèves. Et enfin, pour les vieillards et incurables, à peu près un millier de lits, y compris l'œuvre de Sœur Antoine à Hanoï. Parmi les œuvres privées, on peut guère en citer que deux : celle des Enfants franco-indochinois, parfaitement organisée, insuffisamment soutenue, qui est de première nécessité et entretient annuellement près de 500 enfants avec un budget approximatif de 600.000 francs. Puis l'orphelinat des Enfants annamites, qui, lui aussi, rend les plus grands services. Ces œuvres-là sont impuissantes à répondre aux demandes. Enfin, comme œuvre officielle, on trouvait en plein développement la colonie pénitentiaire de Tri-Cu, avec 300 enfants abandonnés ou détenus. L'Annam, peut-être avec des besoins moindres, est plus pauvre en œuvres sociales : les orphelinats de la Mission n'arrivent à peine qu'à héberger 400 enfants et leurs asiles de vieillards et d'infirmes font un total d'une centaine de lits; l'infirmerie de Xa-Doai, à elle seule, repré¬ sente plus de la moitié des œuvres sociales d'Annam et son dispensaire fournit les médicaments et les consultations à plus de 10.000 assistés chaque année. En outre s'organise actuellement à Qui-Hoa, près de Qui-Nhon, une vaste léproserie, qui bénéficiera de l'expérience des autres et se présen¬ tera comme le modèle à la fois du village et de l'asile des lépreux. Son installation première revient à 80.000 piastres, soit près d'un million, dû à la générosité privée et au dévouement du R. P. Maheu. Citons en outre, comme œuvre privée, le dispensaire anti-tuberculeux Pasquier qui vient de s'ouvrir à Huê, équipé à la moderne et répondant à un besoin urgent : il est l'œuvre de la Ligue des Amis de l'Annam, sous l'administration française 167 l'impulsion de M. Rigaux, délégué de ce pays, et du médecin général Normet, directeur local de la Santé. A Hué fonctionne également une œuvre d'enfants franco-indochinois, grâce à la coopération du président, M. Dève, et de la Mission. En Cochinchine, l'œuvre sociale qui attire le plus l'attention par son importance, ses résultats, ses méthodes, c'est celle de la Mission à Culao- Rieng, qui groupe dans une vaste île du Mékong une crèche, un orpheli¬ nat, un hospice (hommes et femmes), une maternité, un dispensaire. A côté de ce groupement et comme ses ramifications, les Missions dirigent en outre 9 crèches, 7 orphelinats, 1 refuge, 10 maisons de Sainte Enfance, où passent plus de 6.000 nouveau-nés par an, et 3 hospices d'infirmes ou vieillards. Enfin, l'école de sourds-muets de Laï-Thiêu, dont celle du Tonkin est une filiale. A côté de ces œuvres sociales confessionnelles, quoique conçues dans un esprit très large, il faut placer au premier plan l'œuvre des Enfants franco-indochinois qui rivalise avec celle d'Hanoï, si l'on regarde les bienfaits rendus, et son foyer de jeunes filles, modèle du genre, qui est une providence pour les jeunes filles isolées, si exposées à Saïgon. Enfin, l'œuvre officielle d'Ong-Yêm, colonie pénitentiaire où les jeunes détenus ou abandonnés (environ 150) se livrent à la culture, principa¬ lement de l'hévéa. Au Cambodge, les œuvres sociales se résument presque uniquement à celles de Phnom-Penh et Rattambang. A mentionner l'admirable pou¬ ponnière de Phnom-Penh, due à l'initiative privée encouragée par la municipalité, et le dispensaire municipal pour les filles publiques, très bien organisé à la moderne. Enfin, un orphelinat de la Mission recueille également les enfants que lui confie la Société de protection des Enfants franco-indochinois. Au Laos, on ne peut guère que citer l'orphelinat de la Mission à Nong- Sen (Siam), mais qui reçoit quelques enfants métis français et qui est aidé par Vientiane. Nous ne mentionnons pas ici les léproseries qui ont été créées pour la plupart par l'assistance médicale : elles ne sont trop souvent que des asiles d'isolement. création du service. •— C'est sur ces données que, le 14 octobre 1929, le Gouverneur général prit l'arrêté créant ce service de l'assistance 168 INDOCHINE sociale (publique et privée) de l'Indochine, et délimitant ses attribu¬ tions, qui sont les suivantes : « Assurer la liaison entre les pouvoirs publics et les œuvres publiques ou privées s'occupant en Indochine de questions concernant l'assistance sociale et la bienfaisance et, en par¬ ticulier, la protection de l'enfance en général, des orphelins plus parti¬ culièrement; les colonies pénitentiaires de mineurs, les institutions en faveur de la protection et de l'éducation de la mère indigène, des nourrissons, des jeunes enfants; la lutte contre les fléaux sociaux, l'orga¬ nisation prévoyant des secours en cas de calamité publique; les insti¬ tutions contre la prostitution, l'assistance aux vieillards, aux infirmes, aux incurables; l'assistance aux indigents, les foyers de jeunes filles, du soldat, du marin, la lutte contre la mendicité et la paupérisme. » Ce service devra en outre grouper les documents concernant l'assis¬ tance, les maladies sociales, leur prophylaxie, se charger de la propa¬ gande continue et méthodique pour la lutte contre les fléaux sociaux. Ce service a été rattaché à l'Inspection générale des services sani¬ taires et médicaux en raison des nombreuses questions mixtes où la collaboration des deux assistances médicales et sociales est nécessaire et frutueuse. Sitôt créé, ce service est entré en activité; il est allé au plus pressé : l'Indochine, dans certaines de ses régions, étant périodiquement ravagée par des sinistres : famines, inondations, typhons, etc., l'institution de caisses de secoui's avait été à plusieurs reprises proposée et discutée sans jamais aboutir, le principe de solidarité n'étant pas encore admis en Indochine. Ce premier travail est actuellement en cours : création des Assurances mutuelles en cas de calamités publiques. Puis, étape par étape, le programme détaillé exposé par le Gouver¬ neur général au début de 1930 ira se développant : d'abord le dévelop¬ pement des œuvres sociales proprement dites : Colonies pénitentiaires agricoles, crèches, orphelinats, aide aux sourds-muets et aveugles, incu¬ rables et vieillards, aux mendiants; puis viendront les œuvres d'ordre médico-social en faveur des trachomateux, lépreux, tuberculeux et syphi¬ litiques (prostitution). En un mot, la création de l'assistance sociale marque une étape de plus dans l'œuvre civilisatrice de la France en Indochine; quand un pays commence à s'occuper des malheureux et à atténuer la misère, cela prouve qu'il a conscience de ses progrès et de sa saine prospérité. LA PROTECTION ET LA RÉGLEMENTATION DU TRAVAIL Lors de l'intervention française en Indochine, la population des divers pays qui composent aujourd'hui l'Union indochinoise tirait son exis¬ tence presque exclusivement de l'agriculture. Les industries indigènes exercées sous la forme familiale étaient peu développées. La richesse publique était si modeste et le développement économique si restreint qu'une piastre mexicaine valait 6 ligatures ou 3.600 sapèques. Le standard de la vie indigène et les salaires étaient infimes et l'usure florissait. Un régime de corvées ou prestations et de réquisitions fort lourd pesait sur la population. L'œuvre de rénovation et d'organisation entreprise par la France dans notre grande possession d'Extrême-Orient devait tout naturelle¬ ment comporter une modification du régime de travail, conforme aux principes de justice, de liberté et d'humanité qui nous sont chers. Elle a tout d'abord réglementé les prestations ou corvées afin d'en alléger la charge, d'en diminuer la durée, d'en supprimer les abus, puis, peu à peu, à mesure que le pays prospérait dans l'ordre et dans la paix, elle les a rendues partout facultativement rachetables; enfin, dans toutes les régions où l'accroissement de la fortune indigène l'a permis, elle a ensuite progressivement supprimé cette forme de contribution en nature en incorporant le montant de son prix de rachat à l'impôt personnel. Les prestations ont été ainsi abolies graduellement, d'abord en Cochinchine, puis au Tonkin et en Annam. Elles ne subsistent plus, sous forme rachetable à volonté, qu'au Cambodge et au Laos. Quant aux réquisitions pour travaux ou services d'intérêt public, ordonnées jadis fréquemment par les administrations indigènes, on y a renoncé définitivement, partout où l'aménagement économique a 170 INDOCHINE permis de réunir une main-d'œuvre volontaire suffisante. A l'heure actuelle, ce mode de travail ne subsiste plus guère qu'au Laos où l'insuf¬ fisance des voies de communication, la faible densité de la population obligent encore à y recourir, mais de plus en plus rarement à mesure que s'accentue la pénétration de ce pays. La population a vu s'accroître, par ces réformes, ses facultés de pro¬ duction et son bien-être. Quoique l'agriculture soit restée le but prin¬ cipal de son activité, elle a pu intensifier ses industries indigènes et même s'adonner à des métiers nouveaux. Au contact éducateur de nos colons et de nos industriels, grâce également à l'enseignement profes¬ sionnel que nous avons organisé, une main-d'œuvre habile s'est consti¬ tuée à la longue. Les ouvriers les plus capables sont devenus des sur¬ veillants, puis des auxiliaires de leurs patrons, et enfin des patrons eux- mêmes. Une bourgeoisie nouvelle de chefs d'industrie, d'entrepreneurs, de planteurs, de commerçants indigènes formés à notre école s'est ainsi peu à peu créée. Elle a pu utiliser sans difficultés, en même temps que la colonisation française, des contingents ouvriers nombreux et enclins spontanément à la discipline, tant en raison de l'amélioration d'exis¬ tence que leur procuraient leurs salaires que par l'effet d'une morale traditionnelle qui enseigne le respect et la soumission envers les supé¬ rieurs et les gens instruits. Une législation du travail rudimentaire a, donc suffi tout d'abord à l'Indochine, par suite du caractère d'une colonisation surtout patro¬ nale, conduite par des hommes très expérimentés, et du développe¬ ment relativement lent d'entreprises disposant d'une main-d'œuvre abondante. Cependant, l'évolution rapide des esprits dans le monde asiatique d'une part, de l'autre l'accroissement continu de l'activité économique des pays de l'Union indochinoise et des contingents ouvriers qu'ils employaient soulignaient déjà, depuis quelques années, la nécessité d'une organisation pour le contrôle et la protection du travail. Mais, à partir de 1925, l'essor de la colonisation a pris de telles proportions que de nombreuses questions nouvelles se sont posées avec acuité, notam¬ ment celle de la main-d'œuvre. L'Indochine est occupée par une population d'environ 20 millions d'habitants, très inégalement répartis sur son territoire. Pressée dans les deltas où, comme au Tonkin, elle atteint une densité variant de 200 à l'administration française 171 500 habitants au kilomètre carré, elle est déjà beaucoup moins nom¬ breuse dans le Sud de l'Indochine (Cochinchine et Cambodge) et devient clairsemée dans l'arrière-pays, notamment dans tout le Laos. Cette population est composée d'éléments ethniques de civilisations et d'aptitudes différentes, unis sous la tutelle française. Tout d'abord, ce sont, en Cochinchine, au Tonkin et en Annam, des Annamites, 15 mil¬ lions au total, souvent chétifs en raison des privations supportées dès l'enfance sur des territoires surpeuplés, et aussi d'une hygiène défec¬ tueuse, mais d'esprit souple et fin, capables d'adaptation rapide à tous les travaux nécessitant plus d'habileté manuelle et d'intelligence que de force, lis sont susceptibles, cependant, dans la période de l'adoles¬ cence ou dans les premières années de l'âge adulte, d'une transforma¬ tion physique considérable s'ils sont soumis à un bon régime d'alimen¬ tation et d'hygiène. En Cochinchine, les habitants, disposant des fécondes terres à rizières du delta du Mékong, dont une étendue considérable reste encore en friche dans l'Ouest du pays, s'adonnent surtout à la culture d'une céréale qui fait leur richesse, et qui peut encore être étendue considérablement. Au Cambodge et au Laos, les indigènes, beaucoup plus robustes que les Annamites, possédant de vastes territoires fertiles et giboyeux, y vivent aisément et répugnent à louer leur travail. Dans l'arrière-pays boisé ou montagneux de l'Union vivent de nom¬ breuses tribus peu évoluées (moï, man, muong, kha, stieng, lolo, etc.), d'origines et de langues fort différentes, d'allures indépendantes, et qui ne peuvent fournir aux entreprises de colonisation qu'un appoint de travailleurs instables. La Cochinchine, le Cambodge et le Laos ne peuvent donc offrir à la colonisation et à l'industrie qu'une main-d'œuvre très restreinte. Les véritables réservoirs de main-d'œuvre de l'Indochine pour le défri¬ chement et la mise en valeur des terres vierges sont les régions sur¬ peuplées du Tonkin et de l'Annam. Par une règle générale, la population de ces deux pays, profondément attachée à son sol et à ses coutumes, préfère avant tout rester fixée dans ses foyers, au sein du village ancestral; elle ne recherche du travail en dehors de son groupement social que lorsqu'elle y est poussée par le besoin et, plus spécialement, dans les périodes de disette qui suivent les typhons, les inondations, les sécheresses, etc. Le mouvement de 172 INDOCHINE l'émigration est par conséquent sujet à des fluctuations importantes. Encore, jusqu'à présent, les Annamites ne quittent-ils guère que rare¬ ment sans esprit de retour leur village d'origine, et gardent avec lui d'étroites attaches. Toutefois, il semble qu'une certaine évolution se pro¬ duise à cet égard et, depuis quelques années, on constate la naissance d'un mouvement d'émigration contrôlée qui, temporaire en principe, retient et fixe au loin de nombreux éléments annamites (Cochinchine et Pacifique austral). Le fait que l'Annamite est un agriculteur né, qu'il ne rompt presque jamais avec sa commune d'origine, et qu'il peut toujours y trouver un asile et un lopin de terre, si étroit soit-il, a pour résultat que si, dans certaines régions, la population est pauvre, il n'y a nulle part à propre¬ ment parler de prolétaires. On assiste, cependant, avec le développement de l'industrie et du commerce en Indochine et l'extension rapide et incessante des centres urbains, à la formation d'une classe ouvrière plus ou moins spécialisée dans ses occupations. A mesure que le pays se modernise et s'enrichit, le standard de vie de cette population s'améliore et les salaires s'accrois¬ sent en même temps que s'élève l'indice des prix de l'existence des indi¬ gènes. Une enquête très complète effectuée dans l'Indochine entière en 1928 a permis d'établir que le nombre total des salariés employés dans les différentes entreprises était de 221.052 répartis de la façon suivante : Entreprises agricoles 81.188 Entreprises commerciales et industrielles 86.624 Entreprises minières 53.240 Le salaire journalier moyen des ouvriers qualifiés et des surveillants varie selon les occupations et les pays où ils sont employés : De 1 $ 47 à 1 $ 66 pour les Tonkinois et Annamites; De 1 $ 58 à 1 $ 83 pour les Cochinchinois; De 1 $ 60 à 1 $ 90 pour les Cambodgiens. Et le salaire des ouvriers non qualifiés : De 0 $ 40 à 0 $ 51 pour les Tonkinois et Annamites; de 0 $ 50 à 0 $ 52 pour les Cochinchinois; De 0 $ 47 à 0 $ 65 pour les Cambodgiens. l'administration française 173 Il est également employé des Chinois, surtout dans le commerce (11.906) et dans les entreprises minières (3.779), un très petit nombre de Javanais et quelques travailleurs recrutés parmi les populations autochtones des régions excentriques où sont situées certaines exploita¬ tions. Mais la grande majorité des travailleurs indigènes salariés est repré¬ sentée par les Annamites (du Tonkin, de l'Annam ou de Cochinchine) qui sont, en chiffres ronds, au nombre de 189.000, alors que le nombre total des salariés indigènes est de 221.000. Les problèmes du travail en Indochine intéressent donc surtout les Annamites. Le contrôle et la protection du travail y sont assurés par une orga¬ nisation s'étendant à tous les pays de l'Union. Dès 1918, M. le Gouverneur général Albert Sarraut instituait une Inspection du Travail en Cochinchine, ayant pour but de surveiller l'exécution des contrats de travail agricole dans cette colonie. En 1926, une Inspection du Travail était créée au Tonkin. Mais, l'essor considérable que prenaient dès cette époque les entre¬ prises de colonisation dans toute l'Union indochinoise, par suite de la formation dans la colonie de nombreuses et puissantes sociétés dispo¬ sant de capitaux élevés, démontrait bientôt la nécessité d'une organisa¬ tion permettant d'étudier et de résoudre les problèmes de main-d'œuvre qui se posaient, d'exercer l'action de contrôle indispensable, et de pré¬ parer un Code du Travail local qui faisait encore défaut. Dans toute la colonie en effet, et particulièrement au Tonkin, le long de la Chaîne Annamitique et au Laos, les affaires minières prenaient une nouvelle extension et, tandis que l'activité industrielle elle-même suivait partout sa progression régulière, les terres vierges de l'Est de la Cochinchine, du Cambodge et du Sud-Annam étaient l'objet, princi¬ palement en vue de la culture de l'hévéa, d'un brusque et intense mou¬ vement de colonisation agricole réclamant une main-d'œuvre nom¬ breuse, introuvable sur place. Un courant d'émigration des régions sur¬ peuplées du Tonkin et de l'Annam vers les nouvelles plantations du Sud indochinois se développait largement en utilisant des contrats d'engagement à longue durée. D'autre part, une aide en travailleurs devait être apportée à nos Etablissements du Pacifique austral, affectés d'une grave crise de main-d'œuvre. 174 INDOCHINE C'est dans ces conditions qu'a été créée, par un arrêté de M. le Gou¬ verneur général Varenne, en date du 19 juillet 1927, l'Inspection géné¬ rale du Travail de l'Indochine dont le rôle triple a pour objet : La réglementation de la main-d'œuvre, du travail, de l'épargne et de la prévoyance sociale; Le contrôle du mouvement de la main-d'œuvre et des opérations qui s'y rattachent; L'inspection des divers services qui ont trait à la main-d'œuvre et des exploitations de toute nature où elle est employée. En même temps, des Inspections du Travail étaient instituées dans les pays de l'Union (Annam et Cambodge) où ces ox-ganismes n'existaient pas encore, sauf au Laos, où un contrôleur du travail a été jugé suffisant pour le moment. Les inspecteurs du Travail, placés sous la direction et la responsa¬ bilité des chefs d'administration locale, assurent la surveillance et la protection de la main-d'œuvre, l'étude des problèmes qui s'y rapportent et le règlement de toutes les questions relatives au travail dans leur ressort. Leur action s'exerce de concert avec celle des directeurs locaux des services de Santé, chargés des questions médicales et d'hygiène concernant les travailleurs. En outre, des contrôleurs du Travail, résidant dans les régions de colonisation et dotés d'attributions administratives et juridictionnelles spéciales, répartis dans sept secteurs en Cochinchine, trois au Cambodge, ont été institués dans ces deux pays de l'Union. Us secondent les inspec¬ teurs du Travail en maintenant avec les employeurs et leur main- d'œuvre un contact permanent qui permet de régler immédiatement les questions de détail et les infractions au contrat de travail. La création de l'Inspection générale du Travail marque le début en Cochinchine d'une législation sociale adaptée aux besoins actuels de la colonie et aux conditions économiques et démographiques qui lui sont propres. Dès le 25 octobre 1927, un arrêté organise la protection de la main- d'œuvre indigène et asiatique étrangère employée par contrat sur les exploitations agricoles, industrielles et minières. Cet arrêté a tracé les grandes lignes des dispositions qui devaient être adoptées pour assurer de bonnes méthodes de recrutement, une exécu¬ tion correcte des contrats et un traitement rationnel et humain des tra- l'administration française 175 vailleurs, susceptibles de les attacher à des occupations toutes nouvelles pour eux. Il s'est d'ailleurs inspiré largement des dispositions généreuses du premier texte paru à cet égard sur la question : l'arrêté pris le 11 novembre 1918 par M. le Gouverneur général Albert Sarraut. Après avoir possé les principes applicables au recrutement, à l'enga¬ gement et à l'établissement du contrat des travailleurs louant librement leurs services par l'intermédiaire d'agents privés d'émigration, opérant sous le contrôle de l'Administration, il organise la surveillance relative à la protection des travailleurs et à l'exécution des obligations respec¬ tives qui découlent des contrats d'engagement : cette surveillance est confiée aux inspecteurs et aux contrôleurs du Travail, aux administra¬ teurs chefs de province et à l'inspecteur général du Travail. Ce même texte détermine les conditions du travail agricole pour les ouvriers contractuels et les règles qui doivent présider au paiement des salaires, aux allocations d'avances, à l'attribution et à la composition de la nourriture, à la tenue de la comptabilité. Il place la santé et l'hygiène des travailleurs sous le contrôle permanent du directeur local de la Santé de chaque pays de l'Union et indique les prescriptions géné¬ rales à observer en ce qui concerne le logement, l'habillement, l'alimen¬ tation en eau des travailleurs contractuels, les soins médicaux auxquels ils ont droit, les mesures spéciales qui doivent être prises pour les défendre contre le paludisme, ainsi que celles qui sont destinées à réali¬ ser une protection spéciale des femmes et des enfants. Il fixe enfin les conditions du rapatriement, de la résiliation, du trans¬ fert et renouvellement de contrats, de la réception des réclamations et, en vue d'assurer l'exécution de l'ensemble de cette nouvelle réglemen¬ tation, étend à toute l'Indochine les sanctions et dispositions édictées par les articles 61 à 67 restés en vigueur de l'arrêté du 11 novembre 1918 sur la main-d'œuvre agricole en Cochinchine. Pour compléter ces dispositions, des arrêtés des chefs d'administra¬ tion locale déterminaient les détails d'application en Cochinchine (arrêté du 26 juillet 1928) et au Cambodge (arrêté du 6 novembre 1928) de l'arrêté du 25 octobre 1927, sur la protection de la main-d'œuvre contrac¬ tuelle, tandis que des textes spéciaux au Tokin (25 octobre 1927) et l'Annam (31 mars 1928) précisaient les modalités du recrutement. A la même date du 25 octobre 1927, un arrêté du Gouverneur général de l'Indochine instituait, en faveur des travailleurs contractuels, le INDOCniN'E. T. II. 12 176 INDOCHINE Pécule ouvrier qui a été doté ensuite, par décret du 1er mai 1929, d'une Caisse autonome. Cet ensemble de dispositions a permis d'entourer de la plus efficace protection les travailleurs de l'Annam et du Tonkin, recrutés avec des contrats de trois ans pour les exploitations du Sud indochinois à la cadence de 16.000 à 18.000 pour les années 1926 à 1928. Bien que l'arrêt des extensions sur les plantations de caoutchouc ait réduit les engage¬ ments à 7.000 en 1929, ces travailleurs n'en constituent pas moins encore, sur les exploitations du Sud indochinois, une population immigrée de 34.000 âmes, régie par le statut particulier qui découle de son contrat. La mortalité générale parmi ces travailleurs est tombée de 4,5 % en 1928 à 2,8 % en 1929. Cette amélioration sensible de l'état sanitaire, que l'on peut espérer voir se poursuivre et qui influe favorablement sur le moral et le rendement des ouvriers, est due à l'action des inspecteurs et des contrôleurs du Travail, conjuguée avec celle des directeurs du Service de Santé et de leur personnel, pour l'application stricte de la réglementation exposée ci-dessus, et aussi à l'arrêt des extensions de cultures, qui a supprimé une des principales causes de maladie. De plus, l'Institut Pasteur de Saigon s'occupe activement de propager les méthodes modernes de prophylaxie du paludisme. Son intervention a déjà donné d'heureux résultats sur certaines plantations, et son adhé¬ sion, le 22 janvier 1930, à un contrat avec le Gouvernement général, en vue de l'organisation de deux laboratoires consacrés à la lutte anti- malarienne dans deux secteurs se partageant le Nord et le Sud de l'Indochine et dotés de personnel médical et technique spécial, va per¬ mettre de combattre plus efficacement, sur les grands chantiers des travaux publics comme sur les exploitations privées, une endémie à laquelle sont dues la plupart des pertes en main-d'œuvre. La protection du Gouvernement général de l'Indochine s'étend aux travailleurs annamites émigrant régulièrement depuis 1925, avec un contrat, pour être employés en Nouvelle-Calédonie, Nouvelles-Hébrides, Tahiti et Dépendances, au nombre de 2.000 à 2.500 par an en chiffres ronds, et qui forment, actuellement, une colonie de 13.541 âmes, répar¬ ties dans nos Etablissements du Pacifique austral. Leur recrutement en Indochine est entouré des mêmes garanties que celles dont bénéficient les ouvriers recrutés pour le Sud indochinois, l'administration française 177 et l'exécution de leur contrat dans le Pacifique s'effectue sous la pro¬ tection de la législation locale sur la main-d'œuvre immigrée (décrets du 11 juillet 1893 pour la Nouvelle-Calédonie et les Nouvelles-Hébrides, du 24 février 1920 pour Tahiti et ses dépendances). En outre, tous les trois ans, un haut fonctionnaire des Services civils de l'Indochine est chargé d'une mission dans le Pacifique austral afin de visiter les Annamites qui y sont employés, de se rendre compte de la façon dont ils sont traités et d'entretenir, en ce qui concerne les conditions de leur emploi et de leur établissement dans ces régions, une collaboration entre le Gouvernement local et le Gouvernement géné¬ ral de l'Indochine. Cette œuvre d'entr'aide coloniale a donné un nouvel essor aux entre¬ prises françaises du Pacifique, créé un lien nouveau entre elles et l'Indo¬ chine, tout en fournissant à la population pauvre du Tonkin et du Nord- Annam des débouchés dont elle apprécie les avantages. La réglementation du travail européen et indigène dit libre, pour le distinguer du travail sur contrat, s'élabore à son tour. Un arrêté du Gouverneur général de l'Indochine (6 novembre 1929) a organisé, auprès des Chambres de Commerce de Hanoï et de Saigon, des offices de placement en faveur des militaires libérés dans la colonie et, d'une façon générale, de tous les Français sans emploi. Un projet de décret sur les accidents du travail concernant les Euro¬ péens est actuellement soumis à l'examen des départements des Colo¬ nies et du Travail ainsi qu'à celui du Conseil d'Etat. Ce texte doit être suivi, ultérieurement, d'un autre applicable aux accidents du travail intéressant les indigènes, mais adapté à la mentalité de la main-d'œuvre asiatique. Enfin, la loi du 27 mars 1907 ,relative aux Conseils de Prud'hommes, n'ayant pas paru pouvoir être adaptée à l'Indochine, un décret du 29 avril 1930 a institué, dans cette colonie, des commissions de concilia¬ tion pour le règlement des différends individuels entre patrons et ouvriers à l'occasion du contrat de travail. Ces commissions fonction¬ nent à.l'égard des Européens comme des indigènes avec une composi¬ tion différente selon le cas. Des études et enquêtes sont poursuivies par l'Inspection générale du Travail sur les différents problèmes que pose encore le travail euro- 178 INDOCHINE péen et indigène en Indochine, notamment la protection de la santé et de l'hygiène des travailleurs libres, le travail des femmes et des enfants, la durée et les conditions du travail libre, etc. L'Inspection générale du Travail a publié en brochure l'ensemble de la réglementation du travail en Indochine et fait paraître périodique¬ ment un recueil des textes nouveaux. SERVICE GÉOGRAPHIQUE RÉSUMÉ DE L'HISTOIRE DE LA CARTOGRAPHIE INDOCHINOISE Avant la conquête dè la Cochinchine par les Français, la cartographie indochinoise n'est alimentée que par les renseignements rapportés au cours des xvi6 et xvii9 siècles par les aventuriers portugais, espagnols, hollandais et anglais et par les missionnaires jésuites venus au début du xvi8 siècle. Dès la fin du xvne siècle, les hydrographes français et britanniques ont recueilli d'excellents documents qui permettent l'éta¬ blissement d'une carte générale de l'Indochine donnant très sensible¬ ment le dessin réel du contour côtier. De 1862 à 1886, les ingénieurs hydrographes du corps d'occupation de la Cochinchine utilisant leurs travaux personnels, les croquis exécu¬ tés par les officiers des garnisons de l'intérieur et les renseignements recueillis par Doudart de Lagrée et Jean Dupuis rédigent, sous la direc¬ tion du commandant Dutreuil de Rhins, une carte générale de l'Indo¬ chine au 1.180.000e. Une carte au 125.000e de la Cochinchine est établie par le commandant Birel. De 1896 à 1899, le Bureau Topographique de l'Etat-Major du Corps d'occupation, ajoutant à sa documentation particulière les cartes du Service du Cadastre de la Cochinchine et les nombreux levés exécutés par les officiers détachés à la mission Pavie, établit une carte provisoire au 100.000e des parties basses du Tonkin, de l'Annam et de la Cochin¬ chine, et deux cartes générales de l'Indochine, l'une au 500.000e, l'autre au 1.000.000e (carte Pavie). En 1899, le Bureau Topographique est remplacé par le Service Géo¬ graphique de l'Indochine qui entreprend méthodiquement la cartogra¬ phie régulière de tous les pays de l'Union, suivant les procédés en usage dans les pays occidentaux. 180 INDOCHINE Le Service Géographique de l'Indochine qui, à sa création (le 5 j uillet 1899), dépendit du général commandant supérieur des Troupes, relève directement, depuis le 1er janvier 1926, du Gouverneur général. Ses attributions sont : 1° Travaux d'astronomie et de triangulation géodésique; 2° Levés des cartes régulières; 3° Continuation et amélioration des cartes provisoires; 4° Etudes topographiques spéciales intéressant les services publics; 5° Rédaction et publication des cartes et travaux du Service. Dirigé par un officier supérieur, secondé par trois officiers adjoints, le Service Géographique est divisé en trois sections : 1° Géodésie et astronomie; 2° Topographie, cartographie, reproductions et tirages; 3° Revision et phototopographie. A Hanoï, où se trouve son centre, sont groupés : Une salle de réception des signaux radiotélégraphiques (pour la déter¬ mination des longitudes absolues), une station méridienne; Les salles de cartographie, de dessin, de zincographie, les ateliers de reproduction (photographie, héliogravure) et de tirage (imprimerie lithographique). CARTOGRAPHIE Pour les deltas une carte au 25.000e, à l'altimétrie basée sur le nivellement direct, a été estimée nécessaire. Terminée en 1912 pour les deltas du Tonkin et de l'Annam, elle n'a été commencée qu'en 1914 pour la Cochinchine, où l'on poursuit actuel¬ lement son exécution. Pour les régions montagneuses, une carte au 100.000e est commencée depuis 1899. Le Tonkin est presque terminé. L'Annam est exécuté en ma¬ jeure partie. La Cochinchine et le Cambodge ont leurs régions les plus importantes déjà représentées. Le Laos seul n'a qu'une très faible super¬ ficie actuellement levée. Des cartes générales de l'Indochine au 500.000e, au 1.000.000e, au 2.000.000e ont été dressées. Elles ont été obtenues, pour les régions déjà levées régulièrement, l'administration française 181 par réduction photographique des travaux du 100.000e et sélections de ces réductions. Pour les régions dans lesquelles aucun travail régulier n'a été fait, on s'est servi des cartes marines, des cartes étrangères et des itinéraires rapportés par les missionnaires, explorateurs, fonction¬ naires et officiers. , . TOPOGRAPHIE Les levés sur le terrain sont faits par des officiers ou sous-officiers (et en Cochinchine par des agents techniques), groupés en bridages. Les travaux topographiques s'appuient sur une géodésie de 1er, de 2e et de 3e ordre. Les topographes font leurs levés à la planchette déclinée à l'aide de l'alidade holométiique. Leurs mappes sont accompagnées de calques et de carnets, indiquant les noms, les cotes calculées, les cultures et végétations diverses, et la nature géologique du sol. REPRODUCTION ET TIRAGES DES TRAVAUX Les travaux des topographes sont photographiés, puis redessinés (minutes). Ces minutes sont à leur tour photographiées et les glaces positives, sélectionnées par couleurs, servent à obtenir, par héliogravure sur zinc, les planches imprimantes. PHOTOGRAPHIES AÉRIENNES Ces photographies sont utilisées en Cochinchine pour les levés du delta du Mékong au 25.000e. D'autres photographies à l'échelle du 6.000e ou du 10.000e sont exploitées au 2.000e ou au 4.000e. Restituées à l'aide de l'appareil Roussilhe, elles servent à l'établissement des plans cadastraux parcel¬ laires des deltas. Cette méthode, très rapide pour les régions deltaïques où le morcellement atteint une moyenne de 20 propriétés à l'hectare, a donné de très bons résultats. Elle n'est pas encore généralisée. L'ÉCOLE FRANÇAISE D'EXTRÊME-ORIENT ET LES MUSÉES D'ART INDOCHINOIS Cette institution a été fondée par un arrêté de M. Paul Doumer, Gou¬ verneur général de l'Indochine, en date du 15 décembre 1898, sous le nom de Mission archéologique de l'Indochine. Un an après, afin de mieux préciser l'extension de son champ d 'études, on lui donna son titre actuel d'Ecole française d'Extrême-Orient (arrêté du 20 janvier 1900). La personnalité civile lui a été conférée par un décret rendu le 3 avril 1920, sur le rapport de M. Albert Sarraut, ministre des Colonies. ORGANISATION L'Ecole française d'Extrême-Orient n'est pas un établissement d'ensei¬ gnement, mais un institut de recherches historiques, archéologiques et philologiques sur la Péninsule indochinoise et les autres pays d'Extrême- Orient : Inde, Chine, Japon, Insulinde. Son personnel comprend : un directeur, nommé par décret, et des membres temporaires ou permanents, nommés par arrêtés du Gouver¬ neur général, sur la proposition de l'Académie des Inscriptions et Belles- Lettres. Cette Académie a le contrôle scientifique de l'Ecole, par l'organe d'une commission spéciale; elle reçoit et présente les candidatures, suit la marche générale des travaux, assiste le directeur de ses avis et fait connaître ses vues au Gouverneur général sur les questions qui inté¬ ressent l'institution. Les membres temporaires, autrefois dénommés pensionnaires, sont en général des élèves diplômés de l'Ecole des Hautes-Etudes, de l'Ecole l'administration française 183 des Langues orientales ou de l'Ecole des Beaux-Arts (section d'architec¬ ture), qui se destinent à une carrière scientifique dans l'orientalilsme ou l'archéologie. Ils sont nommés pour un an, mais ce terme peut être prorogé d'année en année sur la proposition du directeur et l'avis de l'Académie. Leur nombre est en principe fixé à trois. Les membres permanents sont nommés dans la même forme que les membres temporaires, mais sans limite de temps. Ils se partagent la direction des études dans les divers domaines qui font l'objet des recherches de l'Ecole : Chine et pays annamites; Inde et pays de culture indienne; Japon; archéologie indochinoise. Cette dernière branche a une organisation spéciale sous le nom de Service archéologique. Elle est dirigée par un membre permanent de grade supérieur, qui porte le titre de chef du Service archéololgique et qui a sous ses ordres d'autres membres exerçant les fonctions de conservateur du groupe d'Angkor ou d'inspecteurs des monuments historiques dans les divers pays de l'Union. Outre les membres permanents et temporaires, l'Ecole a des membres honoraires et des correspondants, tant en France et dans la colonie qu'à l'étranger. Le personnel asiatique de l'institution comprend des secrétaires, lettrés et dessinateurs, la plupart indochinois. L'Ecole française a son siège à Hanoï, où elle occupe un vaste immeuble situé au coin des boulevards Carreau et Henri Rivière. C'est là que se trouvent sa bibliothèque, ses bureaux, ses magasins et ateliers, ainsi que les pavillons réservés au logement du directeur, du secrétaire- bibliothécaire et des membres temporaires. Un chalet à Dalat (Lang- Bian) est mis à la disposition des membres dont l'état de santé nécessite un séjour prolongé dans une station d'altitude. BIBLIOTHÈQUE L'instrument essentiel du travail de l'Ecole est sa bibllotèque. Com¬ mencée dès l'origine de l'institution, elle s'est régulièrement accrue, d'année en année, par achats, dons ou échanges. Elle renferme un fonds européen, un fonds chinois, annamite et japonais, des collections d'estampages, cartes et plans, ainsi qu'un fonds de manuscrits en toutes langues. Son fonds chinois est probablement le plus riche du monde. Il 184 INDOCHINE a été formé principalement à la suite des missions remplies en Chine par des membres de l'Ecole, notamment Paul Pelliot, Edouard Huber, Henri Maspéro, Léonard Aurousseau. PUBLICATIONS L'Ecole française publie depuis 1901 un périodique intitulé Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient, imprimé à Hanoï par l'Impri¬ merie d'Extrême-Orient, et où prennent place les travaux de ses membres et de ses collaborateurs. Ces mémoires, complétés par une bibliographie et une chronique, constituent une excellente source d'infor¬ mation pour l'étude scientifique de l'Asie orientale. Le tome XXIX du Bulletin, le dernier paru, contient les travaux suivants : L'âge du bronze au Tonkin et dans le Nord-Annam, par V. Goloubew; Le voyage de Kanshin en Orient (742-754), par Aomi-no Mabito Genkai (suite et fin), traduit par J. Takakusu; Matériaux pour servir à l'histoire d'Annam, par E. Gaspardone. I, La Géographie de Li Wen-fong; I, Choix de pièces du théâtre lyrique japonais, traduites et annotées par le colonel G. Renondeau. IX, Yashima. X, Funa-Benkei. XI, Tôru. XII, S agi; Quelques stations hoabinhiennes, et Gravures primitives sur pierre et sur os (Sta¬ tions hoabinhiennes et bacsoniennes), par Mlle Madeleine Colani; Etudes cambodgiennes, par George Coedès, XXIII, La date du temple de Banteay Srèi. XXIV, Nouvelles données chronologiques et généalo¬ giques sur la dynastie de Mahidhrapara; Etudes indiennes et indochi¬ noises, par Paul Mus. III, Les batistes du Bayon; Inscription de la ter¬ rasse bouddhique S. d'Angkor Thom, par L. Finot; Note au sujet des abouts de tuiles chinoises, par J.-Y. Claeys; Les tombeaux chez les Moi Jaraï, par le commandant Roux; notices bibliographiques par L. Finot, G. Coedès, P. Mus, E. Gaspardone, J.-Y Claeys, Ch. Robequain, P. Gourou, E. Aubouin, etc. Le volume a 603 pages de texte; il est illustré de cinquante planches en phototypie. Les ouvrages qui, par leur nature ou leur étendue, ne rentrent pas dans le cadre du Bulletin, forment une seconde série in-8° intitulée Publications de l'Ecole française d'Extrême-Orient. En voici la liste, établie par pays. r L'ADMINISTRATION FRANÇAISE 185 INDOCHINE Numismatique annamite, par D. Lacroix, Saigon, 1900, avec un album de planches (Prix Stanislas Julien, 1902). Nouvelles recherches sur les Chams, par A. Cabaton, Paris, E. Leroux, 1901 (Prix Bordin, 1904). Phonétique annamite (dialecte du Haut-Annam), par L. Cadière, Ibid. 1902 (complété par un mémoire du même : Dialecte du Bas-Annam, esquisses et phonétique. Bull. XI, 67). Inventaire archéologique de l'Indochine, I. Monuments du Cambodge, par E. Lunet de Lajonquière, Ibid. 1902-1912, 3 vol. avec cartes (Prix Bordin, 1913). Monuments chams de l'Annam, par H. Parmentier. Ibid. 1902-1918, 2 vol. et 2 albums de planches (Prix d'archéologie coloniale, 1920). Dictionnaire cham-français, par E. Aymonier et A. Cabaton; Ibid. 1906 (Prix Stanislas Julien, 1907). Bibliotheca indosinica. Dictionnaire bibliographique des ouvrages relatifs à l'Indochine, par Henri Cordier, membre de l'Institut. Ibid, 1912-1914, 4 vol. L'Art khmèr primitif, par H. Parmentier, Paris, G. Van Oest, 1927, 2 vol. Le Thanh-Hoa, par Charles Robequain, Ibid, 1929, 2 vol. (Prix Dupleix et Fournier, 1930.) INDE L'art gréco-bouddhique du Gandhâra. Etude sur l'origine des influences classiques dans l'art bouddhique de l'Inde et de l'Extrême- Orient, par A. Foucher, Paris, E. Leroux, T. I, 1905, T. II, 1, 1918; T. II, 2, 1919. Répertoire d'épigraphie jdina, par A. Guérinot, Ibid. 1908. CHINE Mission archéololgique dans la Chine septentrionale, par Ed. Cha- vannes, membre de l'Institut, Ibid., 1913- 1915, 2 vol. et 2 albums de planches. 186 INDOCHINE Dans la même série parut en 1925, sous le titre Etudes Asiatiques, une suite d'articles rédigés par les membres et les collaborateurs de l'Ecole, à l'occasion du 25e anniversaire de cette institution. Une troisième série, intitulée Bibliothèque de l'Ecole française d'Extrême-Orient, est réservée à des manuels, dont deux ont paru, tous deux écrits par M. Victor Henry, professeur à l'Université de Paris : 1. Eléments de sanscrit classique, Paris 1902. 2 Précis de grammaire pâli, Paris 1902. Une nouvelle série a été commencée en 1926, sous le titre Mémoires archéologiques de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Elle comprend des publications in-4° richement illustrées, consacrées aux principaux monuments de l'Indochine. Ont paru jusqu'à présent : Le temple d'Icvarapura (Banteay Srei), par L. Finot, H. Parmentier et V. Goloubew, Paris, G. Van Oest, 1926. Le temple d'Angkor Vat, Ibid., 1929-1930, fasc. 1-4 (l'ouvrage complet comportera 8 fascicules avec environ 600 planches et un volume de texte). L'Ecole a publié, hors série, outre un catalogue de sa bibliothèque (Hanoï, 1916-17) et un guide au Musée (1915), un Atlas archéologique de l'Indochine, par L. Lunet de Lajonquière (Paris, 1901, in-fol.), ainsi que le Compte-rendu du Premier congrès international des Etudes d'Extrême-Orient (Hanoï, 1902). Elle a inauguré, en 1921, une nouvelle série : Textes chinois sur l'Indo¬ chine. En 1929, enfin, a paru le 1er fasc. de l'Inventaire du fonds chinois de la bibliothèque de l'Ecole française d'Extrême-Orient (Hanoï, Impri¬ merie d'Extrême-Orient). Depuis 1920, la collection Ars Asiatica, dirigée par M. V. Goloubew, est publiée sous les auspices de l'Ecole française. Le XVIe volume de cette collection, actuellement sous presse, est consacré au Musée Alberf Sarraut, à Phnom Penh. l'administration française 187 MONUMENTS HISTORIQUES Une des tâches les plus importantes confiées à l'Ecole française est l'étude et la conservation des monuments historiques dont la sauve¬ garde est assurée par plusieurs arrêtés de classement. Une liste, dressée par les soins de l'Ecole et publiée dans le t. XXVI du Bulletin (1926), comporte en tout 1.049 monuments qui se répartissent ainsi sur les divers pays de l'Union : Tonkin 89 Annam et Champa 185 Cochinchine 33 Cambodge 670 Laos 72 De nouvelles listes de classement sont en préparation. L'effort principal de l'Ecole a porté sur le groupe d'Ankgor. La reprise de cet incomparable ensemble monumental, que le traité franco-siamois du 23 mars 1907 avait rendu à la France, impliquait la responsabilité de leur conservation. Le Gouvernement de l'Indochine entreprit sans hésiter cette tâche pour laquelle l'Ecole française fut appelée à fournir une direction générale et un personnel technique. Le plan des travaux fut établi par M. H. Parmentier, chef du Service archéologique, d'accord avec le directeur de l'Ecole. Pour l'exécuter, on créa un poste de « conservateur du groupe d'Angkor », dont le premier titulaire fut Jean Commaille. Pendant neuf ans il mit tout son zèle, tout son goût d'artiste et toute son expérience à rendre au jour les grands édifices d'Angkor, étouffés sous les décombres et la végétation. Ce fut d'abord Angkor Vat, puis le Bayon, enfin le Baphuon. En 1916, une mort tragique l'enlevait à son œuvre, qui fut aussitôt reprise par M. Henri Marchai. Ce dernier dégagea le Phimeanakas, le Prah Palilay, le Prah Pithu, les Terrasses d'honneur. Le travail fut continué, pendant son congé, en 1920-1921, par M. Charles Batteur, qui poursuivit le dégagement des temples de Ta Prohm, de Ta Kéo, de Banteai Kedei, et la reconstitution de la Chaussée des Géants à la Porte de la Victoire. Après le retour de M. Marchai, d'autres importants monuments furent repris à la brousse, notamment le Neak Pean, situé dans l'axe du Prah 188 INDOCHINE Khan, au Nord-Est d'Angkor Thom. En même temps fut dégagé le Phnom Bakheng, dont le sanctuaire principal avait complètement dis¬ paru sous un amas informe de décombres. Tous ces travaux ont été exécutée sur les crédits du budget de l'Ecole française, augmentés d'une subvention du Protectorat du Cam¬ bodge. En 1926 fut créée, par arrêté du Gouverneur général, une zone réservée autour des célèbres ruines, sous la dénomination de « Parc d'Angkor ». Depuis 1927, se poursuit le dégagement intégral du Prah Khan, ensemble complexe de temples, de galeries et d'enceintes, emprisonné dans un fourré inextricable. En 1927, l'Ecole entreprit une campagne de fouilles et de débrouis- saillement à Sambor Prei Kuk (prov. de Kompong Thom), groupe impor¬ tant de temples brahmaniques datant du vue siècle. Les travaux, confiés à la direction de M. V. Goloubew, livrèrent quelques intéressantes sculp¬ tures et inscriptions. Ils furent continués en 1928 par M. L. Fombertaux. L'exploration des monuments chams a marché de pair avec celle des ruines khmères. L'art du Champa était complètement ignoré avant les travaux de l'Ecole française. Sa résurrection est due, pour la plus grande part, à Henri Parmentier. Dès 1902, ses relevés de Pô Nagar à Nhatrang lui valaient une troisième médaille au Salon. Il fouillait ensuite, avec Ch. Carpeaux, les ruines du grand monastère bouddhique à Dong- Duong, dans le Quang-nam (1902), puis, dans la même province, le vaste groupe de temples dont les ruines remplissent le cirque de Mi- Son (1903-1904), enfin les ruines de Chanh-Lô (1904). Deux temples chams ont été l'objet de réparations effectuées par le Service archéolo¬ gique de l'Ecole : Pô Nagar de Nhatrang (1906-1909) et Pô Klong Garai de Phanrang (1908). En 1927-1928, M. J.-Y. Claeys fut chargé d'explorer le site de Trâ-Kiêu, emplacement d'une ancienne capitale chame mentionnée par les textes chinois. Les fouilles dirigées par lui amenèrent la découverte de ves¬ tiges importants et d'un grand nombre de sculptures. Au Tonkin, l'Ecole a prêté son concours à l'administration pour les réparations du Temple de la Littérature (Van Miêu) de Hanoï. Elle poursuit activement l'étude et le classement des anciennes pagodes, et a contribué, dans la mesure de ses moyens, à leur conservation. Des tombeaux chinois, dont plusieurs paraissent remonter à l'époque des l'administration française 189 Han, ont été explorés par l'Ecole dans le Delta du Fleuve Rouge, notam¬ ment à Sept-Pagodes et à Nghi-vê (1917 et 1923-24), ainsi que dans la province de Thanh-Hoa, dont le sol a livré, en outre, une quantité con¬ sidérable de bronzes anciens et de poteries (travaux de M. Pajot, 1925-30). L'Ecole française poursuit également l'étude archéologique du Laos. S'il lui a été impossible d'empêcher la ruine d'un grand nombre de pagodes, du moins s'est-elle efforcée de sauver de la destruction plu¬ sieurs monuments d'un haut intérêt historique et artistique, parmi les¬ quels figure le Vat Sisalcet à Vientiane (travaux de M. Ch. Batteur et M. L. Fombertaux). Elle vient de décider la restauration du That Luong. Un inventaire descriptif des mouvements du Laos, établi par les soins de M. Parmentier, est en préparation et paraîtra dans la série des Publications de l'Ecole. MISSIONS A L'ÉTRANGER Le travail de l'Ecole est en grande partie alimenté par la documen¬ tation recueillie au cours des voyages d'étude accomplis par ses membres, soit en Indochine, soit dans les autres pays d'Extrême-Orient. Nous nous bornerons ici à énumérer ceux qui ont été effectués hors des frontières politiques de la colonie. siam. — L. de Lajonquière (1904-1905 et 1908). G. Coedès (1914-1915 et 1916-1918). Mlle S. Karpelès (1923-24). P. Mus (1928). J.-Y Claeys (1928). Birmanie. — Ed. Huber (1903, 1910 et 1913). L. Finot (1904). Ch. Duroiselle (1905). inde. — De Barrigue de Fontainieu (1902). L. Finot (1905). Jules Bloch (1906-1907 et 1907-1908). ceylan. — L. Finot et V. Coloubew (1930). java. — L. Finot, A. Cabaton, L. de Lajonquière (1899). H. Par¬ mentier (1904). A. Foucher (1907). P. Mus (1928). V. Goloubew (1929). H. Marchai (1930). chine. — P. Pelliot (1900,1901,1902 et 1909). Ed. Huber (1901 et 1907). Ed. Chavannes (1907). H. Maspéro (1908-1909 et 1914). L. Aurousseau (1912 et 1915). P. Demiéville (1920 et 1921). 190 INDOCHINE japon. — Cl. E. Maître (1902, 1903, 1904, 1905, 1909). N. Péri (1908, 1913,1915,1916, 1918,1920). L. Aurousseau (1922). E. Aubouin (1926-27). E. Gaspardone (1930). RAPPORTS AVEC LA MÉTROPOLE L'Ecole est en rapports constants avec l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, dont une commission spéciale est chargée de suivre l'ac¬ tivité de l'institution et d'en faire chaque année un rapport; avec le Collège de France, où le professeur, titulaire de la chaire d'histoire et de philosophie indochinoises est en même temps représentant de l'Ecole française à Paris; avec la Commission archéologique de l'Indochine, instituée, près du Ministère de l'Instruction publique. Elle a pu enrichir de dons importants plusieurs établissements métropolitains, notamment le Musée du Louvre, la Société asiatique, la Bibliothèque nationale et le Musée Guimet. Ayant déjà participé aux Expositions coloniales de 1906 et 1922, l'Ecole française est représentée à celle de 1931„par des collections propres à caractériser les divers aspects de son œuvre scientifique. Ces collections comprennent des sculptures originales et des moulages, des armes et des outils préhistoriques, des bronzes, des terres cuites, des cartes, estam¬ pages et photographies, ainsi que toutes les publications parues depuis 1901 par les soins de l'Ecole ou sous son patronage. LE PERSONNEL SCIENTIFIQUE DE L'ÉCOLE FRANÇAISE Le directeur actuel de l'Ecole, M. George Cœdès, a été nommé par décret, à la date du 2 septembre 1929. Ses prédécesseui's sont, par ordre chronologique : M. Louis Finot, professeur au Collège de France, le premier directeur de l'Ecole et son organisateur (1898-1904 et 1920-26) ; M. Alfred Foucher, membre de l'Institut (1904-1908); Claude-Eugène Maitre (1908-10) et Léonard Aurousseau (1926-1929). Le service archéologique est placé, depuis 1904, sous la direction de M. Henri Parmentier. Les autres membres de l'Ecole, affectés à ce ser¬ vice sont : M. H. Marchai, Conservateur d'Angkor; M. Ch. Batteur (Ton- kin); M. L. Fombertaux (Laos); J. Y. Claeys (Annam-Champa). Membres permanents : M. Paul Mus (secrétaire-bibliothécaire) ; M. Vic¬ tor Goloubew; M. Emile Gaspardone, ? f'T TV" Cliché Gouv. Général Indochine. Khas de la province de Bassac (Laos). Indochine II. Pl. XII. l'administration française 191 MEMBRES DE L'ÉCOLE FRANÇAISE MORTS AU SERVICE DE LA FRANCE Prosper Odend'hal, administrateur des Services civils, attaché à l'Ecole Française, assassiné au cours d'une mission, chez les sauvages, Jaraï, le 7 avril 1904. Charles Carpeaux, chef des travaux pratiques de l'Ecole française, mort à Saigon le 24 juin 1904, d'une maladie contractée pendant une mission à Angkor-Thom. Edouard Huber, professeur à l'Ecole française, mort à Vinh-Long, en cours de mission, le 5 janvier 1914. Georges Demasur, pensionnaire de l'Ecole française, tué à Seddul- Bahr (Dardanelles), le 1er mai 1915. Jean Commaille, conservateur d'Angkor, assassiné à Angkor, le 29 avril 1916. LES MUSÉES D'ART INDOCHINOIS Lors de sa fondation, en 1900, l'Ecole française d'Extrême-Orient, alors installée à Saigon, avait envisagé la création dans cette ville d'un musée unique, qui réunirait les plus belles pièces archéologiques et artistiques recueillies sur le territoire de l'Indochine. Lorsque l'Ecole française d'Extrême-Orient eût été transférée à Hanoï, suivant en cela le mouvement des services généraux, et que le Conseil colonial eût refusé en 1905 les crédits nécessaires au maintien du musée à Saigon, l'idée de la création à Hanoï d'un musée d'art annamite et d'arts étrangers à l'Indochine française, prévalut en même temps que la création de musées locaux était décidée. C'est ainsi que naquirent successivement en 1906; le musée khmer de Phnom-Penh, devenu le musée Albert Sarraut; en 1916, le musée cham de Tourane; en 1925, le musée laotien, à Vientiane; en 1927, la section chame du musée Khai Dinli, à Hué; enfin, en 1929, le musée Blanchard de la Brosse, à Saigon. Tous ces dépôts sont administrés ou contrôlés par l'Ecole française d'Extrême-Orient. musée de l'école française a hanoï. Le Musée de l'Ecole française d'Extrême-Orient fut d'abord installé dans le palais de l'Exposition de Hanoï de 1902. Le typhon de 1903, qui INDOCHINE. T. II. 13 192 INDOCHINE endommagea cette construction, détruisit une partie des collections; ce qui en restait fut transporté à l'Ecole, boulevard Carreau, et, en 1910, dans l'hôtel historique de l'ancienne légation de France, devenu libre par suite de la construction du palais du Gouvernement général. Les travaux de construction d'un nouveau musée ont été commencés sur l'emplacement de l'ancien, au début de l'année 1926. L'édifice, en béton armé, se compose de deux corps, l'un en rotonde et en hauteur, l'autre s'étendant en longueur, une aire de terrain suffisante est réservée aux agrandissements futurs. La construction est en cours d'achève¬ ment. Les collections conservées au musée de Hanoï comprennent : une partie des inscriptions khmères et la plupart des inscriptions chames trouvées en Indochine; des débris de la citadelle de Hanoï et un groupe de sculptures annamites anciennes; une importante collection préhistorique, pierre et bronze; une collection d'objets anciens khmers et chams provenant des fouilles; un fonds siamois, acquis en 1902 pour l'exposition de Hanoï; un fonds birman, réuni par M. Claine; un fonds javanais, dû à M. de Rijk; un fonds annamite comprenant des costumes, armes, émaux, des bleus dits de Hué, faïences de Bat Trang; un fonds chinois et tibétain très remarquable, réuni par M. Pelliot; un fonds coréen; un petit nombre de pièces japonaises de grande valeur réunies par MM. Maitre et Péri; enfin, une collection numismatique due à MM. Knosp et Lacroix. Ces collections sont décrites dans le guide publié par M. H. Parmen- tier, en 1915. MUSÉE ALBERT SARRAUT. La création d'un musée khmer à Phnom Penh fut décidée en 1905, les collections furent rangées dans les galeries du Vat Prah Kev et, en 1909, dans un bâtiment spécial dû à la libéralité de S. M. Sisowat. Le musée Albert Sarraut, héritier du musée khmer, fait face au Men royal, devenu jardin public. C'est un édifice de style khmer moderne qui contient, au centre, des modèles d'objets d'art et d'ethnographie, un office des ventes, et les sculptures, peintures et bibliothèque provenant de l'ancien musée khmer. Le musée d'archéologie khmer renferme des pièces de grande valeur, l'administration française 193 dont le catalogue a paru en 1925 dans la revue Art et Archéologie khmer. Un autre catalogue très complet avait déjà été édité sans nom d'auteur. (Ce dernier est attribué à M. H. Parmentier). Dans ce catalogue, les pièces archéologiques khmères sont divisées en trois périodes, la première dite « primitive » qui correspond à la période pré-angkoréenne (du vie au ixe siècle) ; 2° la période classique; 3° la période de décadence appelée « basse époque et temps moderne ». Ajoutons que le musée comporte une salle de céramique khmère et sino-khmère et une salle d'iconographie bouddhique. Le musée Albert Sarraut étant réuni à l'Ecole des Arts cambodgiens dépend, pour l'Administration, de la Direction de l'Instruction publique, mais l'Ecole française d'Extrême-Orient a conservé le contrôle scien¬ tifique du musée; elle lui envoie les plus belles trouvailles d'Angkor. MUSÉE CHAM A TOURANE. La création du musée cham devait rencontrer de multiples difficultés. Les pourparlers engagés dès 1902 entre l'Ecole française d'Extrême- Orient et la Résidence supérieure de Hué aboutirent seulement en 1916. Le bâtiment, achevé en mai 1916, était destiné à recevoir toutes les pièces de sculpture chame jusque-là réunies dans le jardin de Tourane, et, selon le projet de l'Ecole, également celles qui se trouvaient dissé¬ minées dans les résidences ou laissées sur l'emplacement des fouilles. L'installation du musée fut terminée en 1919. Le bâtiment, décoré de motifs chams, se dresse sur un mamelon qui formait autrefois le jardin de Tourane, où les principales sculptures étaient placées. Le musée comporte 268 pièces, dont 68 provenant du jardin de Tourane, une quinzaine du musée de Saigon, d'où elles furent ramenées en 1918, et les autres recueillies dans les diverses fouilles faites en Annam (Mi-Son, Dong-Duong, Chan-Lo, Da-Nghi, etc. Si l'ori¬ gine de ces diverses sculptures est souvent imprécise, toutefois elles forment un ensemble à peu près complet de toutes les manifestations de l'art cham. Dans le catalogue, dû à M. H. Parmentier, l'origine de chaque pièce est établie aussi exactement que possible, chaque pièce est décrite minu¬ tieusement et sa place dans le musée indiqué. 194 INDOCHINE MUSÉE BLANCHARD DE LA BROSSE. Jusqu'en 1928, la Cochinchine ne possédait pas de musée digne de ce nom. Les sculptures et inscriptions rassemblées à Saigon de 1899 à 1902 par l'Ecole française d'Extrême-Orient, les pièces provenant des fouilles de Cochinchine, les moulages d'Angkor et de Mi-Son, rassemblés par la Société des Etudes indochinoises, étaient abrités sous des hangars. La construction d'un musée placé à l'entrée du Jardin botanique fut décidée en 1927, et le bâtiment inauguré en janvier 1929 par M. Pas- quier. j Une salle khmère est constituée par les pièces archéologiques réunies par l'Ecole française d'Extrême-Orient. Elle s'enrichit d'une partie des trouvailles faites à Angkor. La salle chame possède l'ancien dépôt de la Société des Etudes indochinoises et quelques pièces de Mi-Son. La salle khmère de Cochinchine expose le résultat des fouilles dirigées par le conservateur, M. Bouchot. Un catalogue de ses collections a été publié en 1929 h Les autres salles abritent la collection Holbé, acquise en 1927 par le gouvernement de la Cochinchine, constituée surtout d'objets d'art chi¬ nois : porcelaines, jades, cristal, ivoires, etc., et les collections d'art annamite et d'ethnographie de la Société des Etudes indochinoises, ainsi que la bibliothèque. MUSÉE DE VIENTIANE. En 1925, l'Ecole française d'Extrême-Orient a réuni dans la capitale du Laos une collection de spécimens d'art laotien. MUSÉE KHAI DINH. En 1913 était créée à Hué l'Association des Amis du Vieux-Hué, qui s'était donné pour objet de sauver les vieux souvenirs d'ordre politique, artistique, historique et littéraire de l'Annam. Dès 1914, elle obtint du gouvernement annamite le palais du Tan Tho Vien, pour y tenir ses 1. Bulletin de la Société des Études indochinoises, 1929, n° 3. l'administration française 195 réunions, et y exposer les spécimens d'art annamite qu'elle se proposait de réunir. Les premières pièces qui prirent place dans les collections furent une série de bronzes fondus sous le règne de Minh Mang et d'après des modèles anciens. Au cours des années suivantes, le nombre des pièces s'accrut rapidement. Par ordonnance royale du 24 août 1923, le musée devint autonome sous le nom de musée Kliai Dinh, et reçut une dotation budgétaire spé¬ ciale. En 1927, une section chame, placée sous le contrôle technique de l'Ecole française d'Extrême-Orient, lui a été adjointe. Les collections comprennent de beaux spécimens de l'art annamite : meubles anciens, porcelaines, émaux, laques, bronzes, incrustations, des¬ sins et peintures, broderies, bijoux, cuirs ouvrés, objets de culte et d'usage familier, et un petit nombre de sculptures chames. LES ARCHIVES ET BIBLIOTHÈQUES. LE MOUVEMENT INTELLECTUEL EN INDOCHINE LES BIBLIOTHÈQUES DE L'INDOCHINE Les amiraux gouverneurs de la Cochinchine n'avaient pas négligé, parmi tant de graves et importantes préoccupations, la question des bibliothèques. Dès leur arrivée, ils avaient fait rassembler à Saigon, à côté de leurs services, des collections judicieusement choisies, où le souci d'apporter des documents à l'administration s'alliait à celui de fournir à leurs collaborateurs les ressources indispensables à la vie intellec¬ tuelle. ' ' j Après eux, on prit quelque soin de continuer l'enrichissement des col¬ lections, mais sans grande méthode. Ce n'est guère qu'en 1882 qu'une véritable bibliothèque publique fut créée à Saigon, et son fonds forme encore le noyau de la Bibliothèque centrale de la Cochinchine. Beaucoup d'idées furent agitées au gré des ans et des gouverneurs, mais peu d'efforts continués, faute surtout de personnel stable et com¬ pétent. En dehors de Saigon, rien, ou à peu près : quelques bibliothèques de cercles, organismes de pure distraction, quelques collections administra¬ tives, groupées auprès des résidences supérieures et des grandes admi¬ nistrations. Il fallut arriver à 1917, où l'impulsion que M. Sarraut, Gouverneur général, voulut donner à l'organisation des Archives profita à celle des Bibliothèques. C'est ainsi que la bibliothèque de Saigon fut réorganisée, pourvue de catalogues sur fiches et enrichie avec méthode. Elle compte aujourd'hui 30.000 volumes environ et reçoit 14.000 lecteurs par an, Elle comprend : l'administration française 197 une section de prêt à domicile dotée de 6.000 volumes, qui a distribué au cours de l'année 1930 trente-cinq mille volumes. L'arrêté de 1917 a créé à Hanoï une bibliothèque centrale qui a pu être rapidement constituée, et qui aujourd'hui comprend environ 60.000 vo¬ lumes choisis, et reçoit près de 40.000 lecteurs par an, dont les deux tiers d'Annamites. Elle a été installée dans l'ancien palais du Kinh Luoc, ou vice-roi du Tonkin, au milieu des jardins de l'ancien Camp des Lettrés, en plein cœur de la ville européenne. Cette bibliothèque, qui s'efforce de réunir tous les bons ouvrages dans l'ensemble des disciplines, s'attache particulièrement à rechercher et à conserver les ouvrages sur l'Indochine. Elle y est aidée par l'organisa¬ tion du dépôt légal, qui, depuis 1921, prévoit qu'un des exemplaires déposés sera conservé à la Bibliothèque de Hanoï, ce qui lui permet de constituer des collections infiniment précieuses de tous les ouvrages publiés en Indochine. Une section de prêt, riche de plus de 9.000 volumes, et comprenant surtout des romans, reçoit en moyenne 35.000 lecteurs par an, et distri¬ bue environ 70.000 volumes. En dehors de la Bibliothèque centrale de l'Indochine, Hanoï possède une bibliothèque spécialisée dans les études extrême-orientales : la bi¬ bliothèque de l'Ecole française d'Extrême-Orient. Créée en même temps que cette institution, en 1899, par M. Paul Doumer, elle réunit des collections inestimables et uniques au monde, qui atteignent auj ourd'hui 50.000 volumes environ. En dehors d'un fonds européen considérable d'ouvrages sur l'Asie orientale, elle possède un fonds important d'ouvrages en chinois, en japonais, en pâli, etc... et de nombreux manuscrits. Le Cambodge a été lui aussi pourvu des instruments de travail qui lui manquaient. La bibliothèque centrale du Cambodge, construite en 1922, a été constituée avec le fonds de l'ancienne bibliothèque de la Résidence supérieure au Cambodge. Elle comprend 10.000 volumes envi¬ ron, dont la moitié pour la section de prêt. Elle a reçu l'an dernier plus de 9.500 lecteurs. La Bibliothèque royale du Cambodge, qui dépend du gouvernement cambodgien, réunit une collection d'ouvrages imprimés en français, cambodgien, siamois, birman, ainsi que des manuscrits concernant plus 198 INDOCHINE spécialement les études bouddhiques. Elle a reçu en 1928 plus de 5.000 lecteurs, dont plus des deux tiers religieux bouddhistes. Hué ne possède pas encore de bibliothèque centrale. Il n'y existe qu'une petite bibliothèque administrative annexée à la Résidence supé¬ rieure. Mais l'Association des Amis du Vieux-Hué possède un fonds assez riche d'ouvrages sur l'histoire d'Annam. Il existe également au Palais une collection considérable d'ouvrages en caractères chinois, la plupart historiques. Enfin, au Laos, la Bibliothèque royale de Luang Prabang, réunie par M. Meillier de 1913 à 1917, comprend une collection de 1.173 manus¬ crits en langue laotienne, ouvrages bouddhiques, poèmes, chroniques et codes. ARCHIVES CENTRALES DE L'INDOCHINE En 1920, les fonds les plus anciens des Amiraux et du Gouvernement général, conservés jusqu'alors au palais du Gouvernement général à Saigon, étaient regroupés à Hanoï, tandis que les anciennes archives de la Résidence supérieure du Tonkin, entassés dans les vérandas ou les sous-sols, étaient transférées dans une salle des bureaux de la direc¬ tion des Archives et triées sommairement. Bien vite la place manqua, et il fallut surseoir à la mise en vigueur de l'arrêté du 29 novembre 1917, jusqu'à la mise en service d'un bâti¬ ment nouveau spécialement affecté à la conservation des archives. Ce bâtiment, long de 40 m., large de 14 m., comprend quatre étages. Cha¬ cun contient 32 meubles de 4 m. de long à double face disposés én épi sur deux rangées. L'ensemble donne un développement de plus de 4 ki¬ lomètres de rayon et la capacité des meubles peut être portée à 5.000 mètres de rayon en cas de besoin. Dès le début de 1926, date à laquelle le bâtiment fut mis en service, les versements des diverses administrations affluèrent. Ils remplissent à l'heure actuelle près des trois quarts du dépôt. L'inventaire des fonds les plus précieux (amiraux et gouvernement général, et Résidence supérieure au Tonkin), commencé en 1924, est très avancé. Réalisé sur fiches et divisé en deux sections, l'une métho¬ dique, l'autre alphabétique, il constitue un précieux instrument de re¬ cherche, à la fois pour l'Administration et pour l'historien. Il comporte l'administration française 199 actuellement environ 105.000 fiches. Les documents non encore réper¬ toriés sont classés provisoirement suivant les divisions du cadre métho¬ dique, qui permet une recherche rapide. Le dépôt conserve actuellement : les archives du Gouvernement géné¬ ral (26.000 dossiers et 1.700 registres), les archives de la Résidence supé¬ rieure au Tonkin (39.000 dossiers et 4.300 registres), celles des grands services indochinois : direction des Finances, inspection générale de l'Agriculture, service géographique, trésorerie générale (9.000 dossiers et 3.000 registres), des services locaux du Tonkin (160 dossiers et 260 re¬ gistres), des provinces de Ha-Dong et Nam-Dinh et de la Mairie de Hanoï (9.000 dossiers et 675 registres). Les archives du Gouvernement de la Cochinchine, des Résidences supérieures en Annam et au Cambodge sont rassemblées dans des dépôts situés respectivement à Saïgon, Hué et Phnom-Penh, et classées suivant les méthodes employées à la Direction des Archives et des Bibliothèques, qui en a le contrôle technique. Quant aux archives des gouvernements annamite et cambodgien, elles sont conservées au Palais de Hué et au Palais de Phnom-Penh. SOCIÉTÉ DES AMIS DU VIEUX-HUÉ La constitution de la Société les « Amis du Vieux-Hué » remonte à 1913. Elle est due en partie à l'administrateur Orband, qui, délégué auprès du gouvernement annamite, obtint de ce dernier le palais Than Tho Vien pour y tenir les réunions de la Société. Dès les premiers jours de son existence les « Amis du Vieux-Hué » comptèrent parmi leurs membres le R. P. Cadière, qui fut l'animateur du groupement. La Société publie depuis 1914 un bulletin trimestriel, le Bulletin des Amis du Vieux- Hué, imprimé à Hanoï par l'imprimerie d'Extrême-Orient. En 1922, elle achevait d'organiser le musée Khai Dinh. Le bulletin d'avril-juin 1929 de la Société fut spécialement consacré au Musée. SOCIÉTÉ DES ÉTUDES INDOCHINOISES Créée en 1883 pour continuer l'œuvre entreprise par le Comité agri¬ cole et industriel de la Cochinchine, la Société des Etudes indochinoises élargit le programme que s'était tracé celui-ci. A côté des études agri- Centre de Documentation sur l'Asie du Sud-Est et le ^ Monde Indonésien EPHE VI* Section BIBLIOTHEQUE 200 INDOCHINE coles et industrielles, ses membres se sont intéressés aux études histo¬ riques, linguistiques, artistiques, artistiques et archéologiques. Après de nombreux avatars, elle s'est installée en 1929, avec sa bibliothèque et ses collections, dans le nouveau musée de la Cochinchine. Ses travaux pa¬ raissent limités actuellement à l'ethnographie, à l'histoire et aux beaux- arts. Elle publie le résultat des recherches de ses membres dans le Bulletin de la Société des Etudes indochinoises. CONSEIL DE RECHERCHES SCIENTIFIQUES DE L'INDOCHINE Créé par l'arrêté du 25 mars 1928, le Conseil de recherches scienti¬ fiques de l'Indochine française a pour objet : de recueillir et de coor¬ donner les résultats des recherches de science pure et appliquée entre¬ prises en Indochine, de provoquer au besoin de nouvelles recherches et de préparer la représentation de l'Union indochinoise dans toutes les manifestations françaises ou internationales de science pure ou appliquée. Il est composé de quarante membres, choisis parmi les personnalités les plus qualifiées des administrations et des institutions scientifiques de la colonie. SOCIÉTÉ DE GÉOGRAPHIE DE HANOI La Société de Géographie de Hanoï manifeste son activité par des conférences et des excursions archéologiques. Elle a créé en son sein, en 1926, une section des amis du Vieil Hanoï et entrepris la publication d'un inventaire général de l'Indochine dont cinq fascicules ont déjà paru. JOURNAUX ET REVUES On compte actuellement 40 journaux en langue française, 25 en langue indigène (annamite ou cambodgien), 4 en caractères chinois. On en trou¬ vera la liste complète dans la bibliographie de l'Indochine française par P. Boudet et R. Bourgeois. Les plus importants sont pour la Cochin¬ chine : l'Impartial; l'Opinion, le Courrier Saïgonnais, la Dépêche; pour le Tonkin : l'Avenir du Tonkin, France-Indochine, le Courrier d'Hai- phong. Parmi les revues de langue française, au nombre d'une cinquan- l'administration française 201 taine, on peut distinguer des publications administratives : Journal Of¬ ficiel, Bulletins administratifs des cinq pays de l'Union, des municipa¬ lités, Annales des douanes et régies, etc., et des publications scientifi¬ ques et littéraires. Les principales sont : le Bulletin de l'Ecole française d'Extrême-Orient, le Bulletin du Service géologique, le Bulletin Econo¬ mique de l'Indochine; la Revue indochinoise; continuée sous le nom d'Extrême-Asie, revue indochinoise; le Bulletin des Amis du Vieux- Mahé; le Bulletin de la Société des Etudes indochinoises; le Bulletin du Service Météorologique; le Bulletin de l'Instruction publique; l'Eveil éco¬ nomique; le Moniteur d'Indochine. Il existe 23 revues en langue annamite, dont la principale est le Nam Phong. En langue cambodgienne, deux revues, le Srok Khmer et Campuchea Saurya. Les bulletins de sociétés amicales sont au nombre d'une cinquantaine. S® ?s- :w . ■ ■•-•■ • . H I ■ ■i | I - ^SBKBBSSSm annexés 205 POPULATION ET DENSITÉS DE L'UNION INDOCHINOISE EN 1930 Annam Cambodge Cochinchine.. Laos Tonkin Ensemble. Superficie en milliers de Km2. 147 181 65 231 116 740 Population totale (milliers). 5.581 2.535 4.118 855 7.402 Habitants par Km2. 38 14 64 3,7 64 20.491 28 II. — RÉPARTITION APPROXIMATIVE DE LA POPULATION INDIGÈNE PAR PRINCIPALES RACES ' Annamites 15.000 milliers Cambodgiens 2.400 — Thai (Laotiens, Tho, Nung, etc 1.110 — Indonésiens (Cham, Moi, Ivha, Pnong, etc 800 — Muong 200 — Meo 95 — Man 80 — III. — POPULATION EUROPÉENNE ET ASIATIQUE ÉTRANGÈRE PAR PAYS DE L'UNION (évaluation fin 1928) Européens et assimilés Asiatiques étrangers, y compris les métis. Civils. Militaires. Chinois. Autres. Annam 3.248 399 10.000 230 Cambodge 2.311 129 95.000 6.645 Cochinchine 15.222 2.016 250.000' 3.857 Laos 518 26 2.000 140 Tonkin 10.431 5.920 45.000 377 Indochine sans K.T.W.... 31.730 8.490 402.000 11.250 (1) Dont 75.000 à Saïgon et 95.000 à Cliolon. IV. - POPULATION DES PRINCIPALES VILLES DE L'INDOCHINE (fin 1928) Pays. Villes Population totale. ( Hué 41.000 Annam ( Tonrane 7.000 ( Phnom-Penh 84.000 Cambodge ( Battambang 22.000 ( Saïgon 125.000 Cochinchine 192.000 ( Cantho 20.000 Laos I Vientiane 9.000 ( Hanoï 130.000 Tonkin 45 » 150 Postes 38 4 25 12 117 Justice 6 » 13 » 123 Enseignement 28 23 25 17 149 Police, garde indigène, gendarmerie 102 70 229 Divers 62 17 » » » Total 566 45 418 29 1.808 (Bulletin Économique de l'Indochine, Janvier 1930-A) ANNEXES 207 ENNE DE L'INDOCHINE janvier 1929 (métis compris). CIVILE Enfants de moins de 15 ans Militaires Total çons Totaux Filles Ensemble Etrangers Totaux général Etrangers Françaises Etrangères Totaux 17 496 447 13 460 2.999 121 3.220 399 3.519 20 284 252 22 274 2.165 146 2.311 129 2.440 72 2.127 1.853 71 1.924 14.459 763 15.222 2.016 17.238 11 76 54 16 70 475 43 518 26 544 46 1.767 1.896 38 1.934 9.942 490 10.432 5.920 16.352 166 4.750 4.502 160 4.662 30.040 1.563 31.703 8.490 40.193 POPULATION EUROPÉENNE ACTIVE (CIVILE) tionnaires chine Laos Tonkin Indochine entière Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes Hommes Femmes 10 44 476 18 1.395 28 1 2 56 2 185 3 15 10 231 14 760 30 » 20 121 1 425 1 30 24 99 36 303 82 1 3 » 55 1 200 2 138 12 5 139 133 353 316 2 31 220 4 652 6 » 16 ■ » » 78 17 197 162 5 1.397 209 4.331 4S5 INDOCHINE. T. II. renseignements fournis par les administrations locales. 14 208 INDOCHINE b) Non Fonc RÉPARTITION PAR SEXE ET NATIONA Français Etrangers Totaux Françaises Etrangères Agriculture, pêche, chasse 755 34 789 24 4 Industrie extractive 427 36 463 » » Industrie de transformation 1.024 73 1.097 66 1 Transports 618 1 619 4 2 Banque 291 48 339 34 » Industrie hôtelière 162 16 178 66 » Commerce de gros et détail 2.328 242 2.570 299 7 Culte 290 108 398 143 17 Professions judiciaires 142 .. 142 8 Enseignement privé 55 » 55 27 » Sans travail 69 1 70 10 » Total 6.161 559 6.720 681 31 c) Pro 428 126 554 VIL - MOUVEMENT DE LA POPU a) Nais CATÉGORIE RÉPARTITION D'APRÈS L'ASCENDANCE Père et mère européen Père européen, mère indigène Mère européenne, père indigène Enfants légitimes j Enfants illégitimes j |ne"s 326 338 61 53 40 100 3 6 5 47 78 1 To 772 271 15 b) Dé PAYS SEXE MASCULIN 0 à 1 an 1 à 15 ans 16 à 19 ans 20 à 39 ans 40 à 59 ans -)- de 60 ans Annam Cambodge Cochinchine Laos Tonkin Indochine Entière 4 5 34 1 16 3 5 18 17 1 5 1 10 9 63 89 11 10 46 6 38 1 3 14 11 60 43 7 171 111 29 ANNEXES 209 tionnaires LITÉ RÉPARTITION PAR PAYS Totaux Ensemble Annam Cambodge Coehinehine Laos Tonkin 28 817 173 79 446 2 117 » 463 16 1 » 48 398 67 1.164 62 95 653 2 352 6 625 40 22 347 12 204 34 373 » 8 305 .. 60 66 244 39 22 113 1 69 300 2.876 91 54 2.286 11 434 160 558 163 30 150 8 207 8 150 3 6 118 » 23 27 82 » 10 43 .. 29 10 80 4 14 33 •> 29 712 7.432 591 341 4.494 84 1.922 fessions non dénommées 108 662 | 89 35 248 1 289 LATION EUROPÉENNE EN 1928 sances RÉPARTITION PAR PAYS Totaux Annam Cambodge Coehinehine Laos Tonkin 382 31 22 189 8 132 384 28 27 164 4 161 166 17 12 71 1 65 126 7 14 49 1 55 1.058 83 75 473 14 413 cès SEXE FEMININ Total 30 32 180 7 172 421 0 à 1 an 1 3 26 25 55 1 à 15 ans 16 à 19 ans 4 4 12 10 30 20 à 39 ans 4 2 24 1 39 40 à 59 ans 3 11 10 24 - de 60 ans 10 Total 9 12 80 1 58 160 Bulletin Économique de l'Indochine (Statistiques). 210 INDOCHINE C) Migra FRANÇAIS ARRIVÉES DÉPARTS PAYS HOMMES FEMMES ENFANTS TOTAL HOMMES FEMMES ENFANTS TOTAL Annam 460 224 284 968 344 197 246 787 Cambodge 358 187 150 695 260 126 128 514 Cochinchine 1.297 836 528 2.671 1.283 819 515 2.617 Laos 40 10 10 60 18 7 15 40 Tonkin 863 495 459 1.817 730 403 465 1.598 Indochine entière 3.018 1.752 1.441 6.211 2.635 1.552 1.369 5.556 VIII. - IMMIGRATION ET ÉMIGRATION DES CHINOIS POUR ENTRÉES ANNÉES HOMMES FEMMES ENFANTS TOTAL 1923 20.500 21.500 19.100 26.100 13.000 10.700 8.900 12.500 13.500 12.000 11.700 14.000 47.000 44.2:0 39.700 52.600 1924 1925 1926 1927 28.500 42.000 15.800 17.000 13.900 15.300 58.200 74.300 1928 ANNEXES 211 tions. ÉTRANGERS (1) ARRIVÉES DÉPARTS PAYS HOMMES FEMMES ENFANTS TOTAL HOMMES FEMMES ENFANTS TOTAL Annam 31 8 10 49 12 3 5 20 Cambodge 36 8 7 51 17 6 4 2 Cochinchine 515 192 19 726 570 205 41 816 Laos 50 31 » 81 49 35 „ 84 Tonkin 174 66 14 254 117 56 4 177 Indochine entière 806 305 50 1.161 765 305 54 1.124 (1) Y compris Japonais, Philippins, Siamois, sauf en ce qui concerne l'Annam. Bulletin Économique janvier 1930 A (Statistiques). L'ENSEMBLE DES PAYS DE L'UNION INDOCHINOISE SORTIES ANNÉES HOMMES FEMMES ENFANTS TOTAL 1923 14.200 7.000 6.000 27.200 1924 16.200 8.200 6.000 30.400 1925 13.400 5.700 5.400 24.500 1926 18.000 8.000 7.600 33.600 1927 14.700 6.100 6.300 27.100 189.2 27.700 8.200 8.300 44.200 TABLE DES MATIÈRES Organisation administrative et politique 5 Administration générale de l'Indochine 6 Administration locale de chacun des pays 8 Administration provinciale 9 Administration municipale • 11 L'administration indigène 12 En Cochinchine 12 Dans les pays de protectorat : Annam et Cambodge 13 Dans les pays à administration mixte : Tonkin et Laos 17 A Kouang-Tchéou-Wan 21 Relations entre l'administration indochinoise, le gouvernement métro¬ politain et l'étranger 22 L'Armée 28 Organisation 28 Constitution des troupes 29 Organisation défensive 30 Forces supplétives 32 Mission sociale de l'armée en Indochine 33 La Marine 35 Services à terre 35 Bâtiments 35 Organisation judiciaire 38 Justice française 38 Justfce indigène 41 Organisation financière 46 Les décrets du 20 octobre 1911 46 Étude sommaire de l'organisation financière de l'Indochine 47 Monnaies 52 Domaine 53 Douanes et régies 55 Service des Postes, Télégraphes et Téléphones 60 Service du personnel 60 Services postaux 61 Service des colis postaux 62 Service télégraphique 64 Service des articles d'argent 65 Service technique 67 Service radiotélégraphique 68 214 indochine Service des Affaires économiques. Chambres de Commerce et Chambres mixtes de Commerce et d'Agriculture 70 Activité du Service des affaires économiques 70 Chambres de Commerce et chambres mixtes de commerce et d'agri¬ culture 72 L'Agriculture. L'Élevage et les forêts 75 Cultuiies 75 Riz 75 Maïs 78 Plantes féculentes et légumineuses 79 Epices et condiments 80 Stimulants 81 Stupéfiants et masticatoires 82 Textiles 82 Produits industriels 83 Sériciculture 83 Culture indigène et culture européenne 84 Organisation des services agricoles 84 Climatologie et météréologie agricoles 85 Crédit populaire agricole 86 Office du riz 87 Enseignement agricole 87 Services vétérinaires de l'Indochine 87 Enseignement vétérinaire 89 Les forêts 91 Organisation du service 91 Personnels 94 Mise en valeur du domaine boisé de l'Indochine 95 Concessions, défrichements 97 La chasse 98 Réglementation de la chasse 98 La faune sauvage de l'Indochine 100 Petite chasse 101 La pêche en Indochine 102 Note sur la réglementation de la pêche en Indochine. Pêche en mer et en rivière. Pêche réservée 102 Arrêtés concernant la pêche en Indochine 107 Mines et industries 113 Organisation de l'Inspection générale des mines et de l'industrie 113 Principes du droit minier et taxes minières 115 Industrie minière 117 Charbonnages 120 : " ; :V;.- K % mm ~ *- 'M m ; ɧ7 v'.A •« ■ table des matières 215 Zinc 121 Étain 123 Autres produits 125 Prospection 129 L'enseignement en Indochine 136 Enseignement français 137 Enseignement indigène 137 Enseignement supérieur 147 Les services médicaux en Indochine 151 Organisation du service 151 Service de santé militaire 151 Inspection^générale des services sanitaires et médicaux 152 La Protection et la Réglementation du travail 169 Service géographique 179 Résumé de l'histoire de la cartographie indochinoise 179 Cartographie 180 Topographie 181 Reproduction et tirage des travaux 181 Photographies aériennes 181 L'École française d'Extrême-Orient 182 Organisation 182 Bibliothèque 183 Publications 184 Monuments historiques 187 Missions à l'étranger 189 Rapports avec la métropole 190 Le personnel scientifique de l'école française 190 Membres de l'École morts au service de la France 191 Les Musées d'art indochinois 191 Les Archives et Bibliothèques. Le Mouvement intellectuel en Indochine 196 Les bibliothèques de l'Indochine 196 Archives centrales de l'Indochine 198 Société des Amis du Vieux Hué 1" Société des Études Indochinoises 199 Conseil de recherches scientifiques de l'Indochine 200 Société de Géographie de Hanoï 200 Journaux et revues 200 Annexes 204 Population. Races 204 INDOCHINE. T. II. 15 ,>*aa§|: .-.te, ■ ; - ,.... v ■■ : S®*- SSÏW - : "'V. - i- ■ * m- , - pë§gj§ ACHEVÉ D'IMPRIMER LE a5 JUIN ig3i PAR FIRMIN-DIDOT ET C'°, PARIS. PLANCHES EN COULEURS TIRÉES PAR D. JACOMET. HORS-TEXTE GRAVÉS ET IMPRIMÉS EN HÉLIOGRAVURE PAR GEORGES LANG, A PARIS. PROCÉDÉ HÉLIOS-ARCHEREAU. BwSSliSHBi wKÊtÊKÈÊÊSÊËÊÊSm ; '- && - *%:&- ' -~v >.-.1 g 'Jy,,/.. f. ; g|S • | : -i ':- i- ':• ' > . ■ ■ ; A ' I Û WmÈL â1 M /-■ , K"' .1 ' If r f: -'. ,Mb *mm H œWalll Mil I i vùj% : >é ■ Ilv ^ • ■ ■■■■ 1 -r^ ": : f..':" if ■;• ■ '... îpfâlÉMWï?.' !:f;f ■ ■ - f f # ' vf.,s 'i ;^ -,., >i * ;: * i-m Mm mÊÊËÊM O: «Pli mm ff■ iï® IIS^ ï-- ^ f (■■■Mi : I ' IKtrV\ ■'m* L . * ;1 ' I ^9 h' 1 : if! ' Èè v u , | lifi - & ' mmrnmm HMH ■ "•If; 88® 11 ÇMil f i#' Mi Sfllf ilSl il am 1 . ?1 < : Ali «« |W|î v> ', f(' 'M V' f . 'flf ! f ■' î' i ' v ;:';::;i ^ if 1 f |;s^li#SSSllS|||:|iSI ^ 1 &c iV«èi ® fif #'«hif f;;• f ; Mf ^Iff f ;'V', ■ . "< \>; ' f ; 4, ,, ■) t , , 1 •', ' m mm m iiili*|iili re W iv.'. ■lia fff ■ . ..■ .■■*;;.■.■ ' 11 "i g, ;;• A "■>. ■■•, « "î!*: lilillpll iilii mm ilSIl mm MËlÈÈÈÊiÈêÊËÊÊlÈ. Élll I •' ' ;'- -;. ' ; ^ HiiïiH'HI iîi'î ::'PIji!!;! ('pi'i'Hlljii:;! fis *I i ! - f 1S h fit11H i-î* Î ( i i i r Î p- i î MiPis i1!$lHlîlrîf!ill , ' f , , -. 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