EXPOSITION COLONIALE INTERNATIONALE PARIS 1933 sas INDOCHINE FRANÇAISE GOUVERNEMENT GÉNÉRAL DE L'INDOCHINE DIRECTION GENERALE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE LA C0CH1NCHINE SCOLAIRE - 'À A- 0 A?//"ACCCO''' A- A A L'ENSEIGNEMENT DANS LE PAYS LE PLUS EVOLUE DE L'UNION INDOCHINOISE A AAAA HANOI IMPRIMERIE D EXTRÊME-ORIENT 1931 S P? 1 AAA'PSIi 1 .y > > liUliiWi ' :î\ . ipp I : SlîfSâgiS JtStfSl liili CENTRE DE DOCUMENTATION ET DE RECHERCHES SUR L'ASIE DU SUD-EST ET LE MONDE INDONESIEN BIBLIOTHEQUE a s & i c y EXPOSITION COLONIALE INTERNATIONALE " PARIS 1931 INDOCHINE FRANÇAISE GOUVERNEMENT GÉNÉRAL DE L'INDOCHINE DIRECTION GENERALE DE L'INSTRUCTION PUBLIQUE LA COCHINCHINE SCOLAIRE L'ENSEIGNEMENT DANS LE PAYS LE PLUS ÉVOLUE DE L'UNION INDOCHINOISE HANOI IMPRIMERIE D EXTREME-ORIENT 1931 AVANT-PROPOS Dans l'Annam scolaire nous avons essayé de montrer comment en une di¬ zaine d'années s'était opérée la substitution de l'enseignement moderne franco-indigène à l'enseignement traditionnel annamrte. Dans la Cochinchine scolaire nous nous proposons de donner une idée du développement actuel des institutions scolaires dans le pays le plus évolué de l'Union indochinoise. Le pourcentage de la fréquentation scolaire en Cochinchine est en effet plus que le double de celur qui est obtenu au Tonkin, c'est-à-dire dans le pays le mieux partagé après elle à ce pornt de vue : les écoles pubhques franco-indigènes de la Cochinchine comptent 141.639 élèves alors que celles du Tonkin, pour une population presque deux fois plus nombreuse, ne sont fréquentées que par 119.467 unités; la même observation peut être faite au sujet des écoles privées franco-indigènes dont les effectifs s'élèvent à 27.821 unités en Cochinchine contre 18.513 au Tonkin. D'au¬ tre part l'enseignement populaire public est, en Cochinchine, à peu près entièrement dispensé par les écoles élémentaires officielles : tandis que les formations communales ou intercommunales de pénétration scolaire comp¬ tent au Tonkin 27 %, en Annam 61 % et au Cambodge 86 % des effectifs globaux de l'enseignement populaire, elles ne groupent en Cochinchine que les 4/100 des élèves qui suivent cet enseignement. De même la Cochin¬ chine se trouve fortement en avance sur les autres pays en ce qui touche l'enseignement féminin : ses écoles pubhques franco-indigènes groupent 26.707 filles sur un total de 40.752 unités pour toute l'Indochine, soit près des 7/10. Enfin, l'arrêté du 27 juin 1927 a proclamé en Cochinchine le principe de l'obligation de l'instruction élémentaire et précisé les étapes de sa réalisation. A la rentrée de septembre 1930, le régime d'obligation s'étendait pour les enfants des deux sexes à 333 communes et pour les gar¬ çons à 770 communes. Comme la plupart des villages non soumis au ré¬ gime de l'obligation possèdent soit une école de garçons, soit une école de filles, soit une école mixte, sur les 1.419 communes que compte la Co¬ chinchine 115 seulement, parmi les moins peuplées d'ailleurs, sont encore dépourvues de toute école. — 6 — Ces indications sommaires montrent combien les institutions scolaires se trouvent avancées en Coehinchine. On ne peut nier que cette situation pri- viligiée ne soit due en partie aux ressources plus grandes de cette colonie. Mais elle s'explique surtout par l'ancienneté relative de l'occupation fran¬ çaise et par 1 exercice direct de l'administration française qui, ne se trou¬ vant pas devant un enseignement traditionnel fortement enraciné comme au Cambodge et surtout au Laos, a pu développer sans entraves et plus rapide¬ ment qu ailleurs les diverses formes de l'instruction. C'est également grâce à ce fait que le principe de l'obligation qui, malgré plusieurs tentatives fai¬ tes par l'empereur d'Annam en 1906 et le roi du Cambodge en 1911 dans leurs pays respectifs avait toujours échoué, a pu être proclamé à la fran¬ çaise en Coehinchine et s'y réalise d'une manière telle qu'on est en droit de compter qu'il deviendra effectif pour les garçons d'ici peu d'années et qu il s'étendra de plus en plus à la population scolaire féminine au moins urbaine. Chapitre premier L'ENSEIGNEMENT PRIMAIRE PUBLIC EN COCHINCHINE En Coc'hinchine comme dans le reste de l'Indochine, l'enseignement pri¬ maire comprend deux types différents, dont l'importance numérique est na¬ turellement fort inégale : l'enseignement primaire français à l'usage des en¬ fants de nationalité française et l'enseignement primaire franco-indigène a l'usage des enfants du pays, Annamites, Cambodgiens, Moï etc. I. — L'enseignement franco-indigène du pr degré En Cochinchine comme en France l'enseignement primaire franco-indi¬ gènes est laïque, entièrement gratuit et, dans une certaine mesure qui sera précisée plus loin, obligatoire. Quelques chiffres donneront une idée du développement très important atteint déjà par les institutions scolaires lo¬ cales. Pour 1.419 communes il y a 1.798 écoles publiques (avec 3.687 classes, depuis les classes maternelles jusqu'aux cours de certifiés, qui correspondent aux cours complémentaires de la métropole). Pour quatre millions d'habi¬ tants on ne compte pas moins de 138.191 élèves. Le personnel enseignant est constitué par 3.953 maîtres indigènes encadrés par 66 maîtres français, professeurs du premier degré, chargés des fonctions d'inspection et de direc¬ tion (30 hommes et 36 dames). La répartition géographique des écoles est assez inégale ; elle dépend de la densité et du mode de groupement des habitations, de l'ancienneté du peuplement et aussi de la race dominante. Depuis Saigon et Cholon jusqu'au siège des délégations administratives, toutes les agglomérations annamites de quelque importance sont des centres scolaires en même temps que des centres économiques. Chaque chef-lieu de province, chaque petite ville possède une école complète, dite de plein exercice, autour de laquelle essaiment de nombr uses écoles élémentaires. Entre les systèmes complets constitués par le groupement d'un certain nombre d'écoles élémentaires autour d'une école de plein exercice, il existe parfois des vides, qui correspondent toujours à une zone peu fertile, peu peuplée et peu accessible. Dans les provinces du delta proprement dit, où le peuplement est ancien et dense, les écoles sont très nombreuses. Dans les provinces de la péri¬ phérie, vastes contrées récemment ouvertes à la colonisation, elles sont plus espacées. Cela ne veut pas dire que les populations des régions excentriques soient dans l'impossibilité de faire instruire leurs enfants- Dès qu'il existe un noyau stable de population, une école est fondée dans le hameau prin¬ cipal de la commune. La pénétration scolaire suit de si près la colonisation que souvent, dans l'ouest cochinchinois, des écoles doivent être déplacées ou supprimées parce que le village a changé d'emplacement ou parce que les habitants se sont dispersés. Il arrive aussi que les villages neufs des pro¬ vinces de colonisation récente ont une belle école, une école définitive en matériaux durables : certains de ces villages dont les habitants possèdent ou exploitent des rizières très fertiles, disposent en effet de larges ressources. En réalité, les seuls villages de Cochmchine qui, aujourd'hui, n'ont pas leur école sont ceux dont la population, égaillée dans la forêt ou répartie le long des routes et des canaux de pénétration, est tellement disséminée que l'école ne pourrait desservir utilement qu'un nombre infime d'habita¬ tions. La ville de Saigon compte dans ses écoles publiques franco-indigènes du premier degré 3.470 élèves; celle de Cholon 3.651 élèves. Dans l'en¬ semble de la Cochmchine, trois provinces dépassent l'effectif de 10.000 élèves pour les seules écoles publiques; My-Tho, Cholon et Bên-Tre; les provinces de Gia-Dinh, Can-Tho, Chau-Doc et Sadec comptent de 7 à 10.000 élèves; les provinces de Tra-Vinh, Bac-Liêu, Vinh-Long, Tân- An et Long-Xuyên de 5 à 7.000 élèves; les provinces de Soc-Trang, Go- Cong, Thu-Dau-Mot et Rach-Gia de 4 à 5.000 élèves; les provinces de Biên-Hoa, de Tay-Ninh de 3. à 4.000 élèves; les provinces les moins peuplées, Ba-Ria et Ha-Tiên, ont respectivement 2.300 et 800 élèves. a) l'enseignement populaire indigène L'enseignement populaire indigène destiné à la masse des enfants indi¬ gènes et dispensé dans leur langue maternelle comporte trois formes d'écoles publiques. D'abord les écoles élémentaires officielles qui fonctionnent aux frais du budget local ou des budgets provinciaux et qui sont de beaucoup 4" INTÉRIEUR DE CLASSE A THU-THUA (TAN-AN). PROVINCE DE CHAU-DOC : VACCINATION GÉNÉRALE. NOTER LA PRÉSENCE D'UN PETIT FRANÇAIS VENU LUI AUSSI, SE FAIRE VACCINER. les plus nombreuses- Ensuite les cours auxiliaires préparatoires, formations de pénétration scolaire entretenues par les villages dépourvus d'école élé¬ mentaire officielle. Enfin des organisations scolaires spéciales mettent l'ins¬ truction élémentaire à la portée des enfants qui appartiennent aux minorités ethniques (Cambodgiens, Mois, Malais). a) L'enseignement élémentaire indigène. L'enseignement élémentaire indigène est donné dans les classes élémen¬ taires des écoles de plein exercice et dans les écoles élémentaires proprement dites. Les élèves qui reçoivent cet enseignement sont au nombre de 1 1 5.612 dont 20 % environ de filles (écoles élémentaires: 89.858 élèves; classes élémentaires des écoles de plein exercice: 25.754 élèves). L'enseignement élémentaire présente en Cochinohine une caractéristique qu'il convient de souligner : il est obligatoire. Un arrêté du Gouverneur de la Cochinchine en date du 27 juin 1927 a imposé à tous les enfants l'obligation de fréquenter, entre leur huitième et leur treizième année, l'école élémentaire pendant trois ans. Des exceptions sont prévues pour les enfants faibles d'esprit et de constitution maladive, ainsi que pour les enfants dont la demeure est à plus de quatre kilomètres de toute école publique. Chaque commune est tenue de construire une école élémentaire. Les parents dont les enfants demeurent réfractaires à l'obligation ont leur nom affiché pen¬ dant un mois à la porte de la maison commune. Il ne pouvait être question de rendre immédiatement l'obligation effec¬ tive dans toutes les communes de Cochinchine. 11 fallait laisser aux autorités locales le temps de réunir les fonds et de prendre les dispositions nécessaires- Le législateur a donc prévu une réalisation progressive, par étapes, de l'obli¬ gation scolaire élémentaire. A chaque rentrée des classes, un arrêté du Gouverneur de la Cochinchine énumère les communes nouvelles dans lesquelles le régime d'obligation sera désormais en vigueur. Dans les 1.419 communes que compte la Cochinchine, la situation est actuellement la suivante ; sont soumises au régime d'obligation pour les enfants des deux sexes 335 communes, au régime d'obligation pour les gar¬ çons seulement 770 communes. Parmi les communes non soumises encore au régime d'obligation, 199 possèdent néanmoins une école. Il n'existe donc que 1 15 communes qui ne peuvent assurer l'instruction élémentaire de leurs enfants; ce sont des communes ouvertes depuis peu à la colonisation et où, comme il a été indiqué plus haut, les habitations sont très dissémi- — IO — nées. La population globale dans ces 115 communes n'atteint pas 100.000 habitants. On voit combien la pénétration scolaire est d'ores et déjà avancée en Cochmchine. Malgré les difficultés de tout ordre, difficultés techniques et surtout financières, auxquelles elle s'est heurtée, la politique d'obliga¬ tion a donné à renseignement franco-indigène un vigoureux essor. Le jour n est plus très éloigné où tous les enfants de Cochinchine seront à même de bénéficier des avantages de l'instruction élémentaire. Les études élémentaires ont pour sanction naturelle le certificat d'études élémentaires indigènes qui se passe à dix ans et qui comprend des épreuves obligatoires en annamite et deux épreuves facultatives en français et en caractères chinois. Dans l'ensemble de la Cochinchine, 10.407 jeunes écoliers ont obtenu en 1929 leur C. E. E. 1. (dont 8.71 1 avec la mention français). Si l'on excepte quelques écoles de quartier dans les grands centres, les écoles élémentaires sont presque toutes des écoles rurales. Elles ont une, deux et jusqu'à quatre ou cinq classes, selon l'importance de la localité desservie. Dans les villages anciennement fixés, la maison d'école s'élève d'ordi¬ naire au centre de l'agglomération, à l'ombre des arbres géants qui abritent également le marché, la maison commune et le dinh, ou pagode du génie tutélaire du village. L'école est quelquefois établie dans la maison com¬ mune elle-même ou dans la pagode ; les enfants, dans ce cas, travaillent sous la protection du génie local, dans le parfum que dégagent les baguettes d'encens qui brûlent jour et nuit. Dans les villages qui comprennent de nombreux hameaux et écarts, la maison d école se dresse fréquemment isolée au milieu des rizières, au cen¬ tre géométrique des principaux groupements, en un point d'accès commode, sur le bord du chemin de terre ou d'un raeh (bras de rivière où pénètre la marée). Dans l'ouest, l'école est presque toujours construite sur un terre-plein que les pluies ou les inondations transforment souvent en îlot ; il n'est pas rare de voir, en saison des pluies, les enfants se rendre à l'école sur de lé¬ gères embarcations en bambou tressé (cai xuong) qu'ils manœuvrent avec habileté. La majorité des écoles sont construites en maçonnerie. De grandes ou¬ vertures apportent aux enfants l'air et la lumière; des vérandas et des avan¬ cées les protègent contre la réverbération et contre les rafales de pluies. Certains villages forestiers restent fidèles pourtant à l'école en bois, cons¬ truite à la mode annamite, sur un remblai de latérite damé, parfaitement sec. Des colonnes en bois dur et lourd, que les termites ne peuvent entamer, supportent une charpente légère et le toit à décrochements latéraux. Les murs entourent trois côtés; le devant, dont l'exposition est choisie, est fermé par une claire-voie de barres verticales et par un lattis à mi-hauteur. Des cloisons séparent les classes. Il y a aussi des écoles provisoires, simples chaumières au toit de tranh (herbe très dure se développant par rhizomes avec une rapidité extraordi¬ naire), avec des murs en torchas ou en paillote. Quelques écoles enfin sont de simples hangars ouverts à tous les vents ; ces écoles sont bien ventilées et agréables en saison sèche ; mais la saison des pluies les rend fort incom¬ modes ; les pluies y entrent par rafales violentes et froides qui inondent choses et gens. A première vue, il peut sembler paradoxal, dans un pays où le thermo¬ mètre ne descend autant dire jamais au-dessous de 25°, d'enfermer les enfants entre quatre murs. La violence des orages est une des raisons qui obligent à construire des écoles fermées. Une raison d'hygiène est à consi¬ dérer aussi ; les maisons maçonnées peuvent être facilement blanchies et désinfectées, alors que la paillote, le bois, le sol de terre battue conservent les germes des maladies et peuvent devenir des foyers de contamination. Il est indispensable, enfin, d'enfermer chaque soir et pendant les vacances, les cahiers, les livres, les tableaux, le mobilier et le matériel scolaire qui ne peuvent rester à la merci des rôdeurs. Vieilles ou neuves, humides ou cossues, toutes ces écoles sont riches d'une nombreuse population scolaire. Dès 6 heures du matin, les écoliers se dirigent vers la classe. On les. rencontre sur les chemins, en petits groupes, uniformément vêtus de noir ou de blanc, pieds nus et tête nue. On les reconnaît facilement à leurs cahiers, à leurs livres, à l'encrier qu'ils tiennent au bout des doigts, pendu à une ficelle. Les enfants se rassemblent devant l'école où ils s'amusent en attendant l'heure. L'entrée en classe est toujours précédée de l'inspect on de propreté réglementaire. Les enfants qui ont fait une toilette trop sommaire la com¬ plètent sur le champ. Les écoles qui n'ont pas un point d'eau à leur dis¬ position sont pourvues de grandes jarres qui tiennent lieu de citernes. Entre la classe du matin et la classe du soir les enfants rentrent dans leur famille. Ceux qui habitent loin restent |à l'école. Quand il n'y a pas de cantine, ils mangent les provisions qu'ils ont apportées le matin dans une feuille de bananier, du riz froid assaisonné de poivre et de sel, du poisson sec, quelques crevettes. Les enfants font ensuite la sieste à l'ombre de la galerie ou dans la classe même, en attendant que le retour des camarades permette la reprise des jeux. Les écoliers annamites préfèrent les jeux — 12 — d'adresse aux jeux de force; ils jouent au palet qu'ils remplacent vite par des sous quand ils ne sont pas surveillés, ils opposent des grillons en com¬ bat singulier. Ils raffolent de la baignade et de la pêche, chose naturelle dans ce pays de fleuves immenses et de rachs innombrables. En fin d'après-midi les écoliers sont libres après une séance d'une demi- heure d'éducation physique. Les petites écoles franco-indigènes apportent dans les campagnes autre chose que l'instruction élémentaire indispensable à la vie moderne. Par les leçons d'hygiène, qui sont données dans les cours enfantins, par la vac¬ cination systématique contre le choléra et la variole, par les distributions gratuites de quinine, l'école rurale est un puissant agent d'assainissement. L'école élève non seulement le niveau général de l'existence par les con¬ naissances utiles qu'elle répand dans la masse mais elle contribue à sauver de nombreuses vies humaines. b) Les cours auxiliaires préparatoires. La Cochinchine étant couverte d'un réseau assez serré d'écoles élémen¬ taires officielles, le besoin ne s'y faisait pas sentir comme au Tonkin et en Annam de créer des formations de pénétration scolaire à caractère com¬ munal ou intercommunal. Toutefois, afin de permettre à certaines provinces de rattraper leur retard scolaire, l'Administration a tenu à réglementer la création et l'organisation d'écoles de ce type qui ont été dénommées cours auxiliaires préparatoires. Il existe actuellement 51 de ces cours; ils réunis¬ saient 1.584 élèves en mai 1930. Institutions provisoires, les cours auxiliaires préparatoires sont des écoles d'avant-garde; ils sont ouverts dans les communes pauvres, en attendant la création d'une école élémentaire de type normal. Les cours auxiliaires pré¬ paratoires sont en effet d'un prix de revient peu élevé ; ils sont installés gé¬ néralement dans un local de fortune ; la classe est faite par quelque fonc¬ tionnaire indigène qui se contente d'une petite rétribution pour son office. Les cours auxiliaires préparatoires ne dépassent pas le niveau du premier cours de l'enseignement élémentaire; les enfants y apprennent à lire, à écrire, à affectuer les quatre opérations ; la morale et un peu d'hygiène complètent ces notions pratiques. Mais, si modestes qu'ils soient, les cours auxiliaires préparatoires rendent des services et préparent les voies à l'école de type normal. — 13 — c) Les formations scolaires pour les populations allogènes. En dehors des Annamites, la Cochinchine renferme une assez forte pro¬ portion de populations allogènes, Moï au nord et au nord-est, Cambodgiens surtout, au centre et dans l'ouest. 1 0 Les écoles cambodgiennes. Jusqu'au XVIIe siècle les Cambodgiens furent les maîtres de la Cochin¬ chine, partie intégrante du grand royaume Khmer. Isolés de la mère-patrie par la conquête annamite, les Cambodgiens de Cochinchine ont commencé au XVIIIe siècle à reculer devant les envahisseurs venus du nord qui, avant les Français, colonisèrent le pays d'une manière méthodique. Il reste au¬ jourd'hui 400.000 Cambodgiens environ en Cochinchine, soit le dixième de la population totale. Les Cambodgiens constituent des groupements d'importance variable dans les provinces de Tay-Ninh, Chau-Doc, Ha-Tiên, limitrophes du Cam¬ bodge, et à l'intérieur du pays dans les provinces de Long-Xuyên, Rach- Gia, Can-Tho et surtout de Tra-Vinh, Soc-Trang et Bac-Liêu. Les Cambodgiens de Cochinchine sont essentiellement des ruraux, agri¬ culteurs, éleveurs, pêcheurs et bûcherons. Indolents et fatalistes, ils ont généralement un niveau de vie inférieur à celui des Annamites. Leurs vil¬ lages se groupent autour des pagodes bouddhiques, petits monastères où les bonzes maintiennent, en même temps que la loi religieuse, les traditions de la race. Les jeunes garçons passent presque tous par la pagode. Ser¬ viteurs des bonzes qu'ils aident à recueillir leur provende quotidienne d'au¬ mônes, ils apprenaient pendant leur séjour, à temps perdu, le plus possible de morale et de prières bouddhiques et aussi de lecture et d écriture en langue khmère. La pagode est donc en principe une école sans rigueur où le travail scolaire est fort irrégulier et incomplet. Il existe en Cochin¬ chine 230 écoles de pagode, fréquentées par quelque 4.000 élèves. Les essais tentés pour amener dans les écoles officielles les enfants cam¬ bodgiens n'avaient obtenu jusqu'à ces derniers temps que de bien faibles résultats. Très attachés à la coutume, les bonzes et les notables se dé- fiaient de toutes les innovations susceptibles de porter atteinte à leur autorité et à l'ordre de choses traditionnel. Aucune école cambodgienne n'avait pu être établie; quelques rares enfants cambodgiens fréquentaient seuls les — 14 — écoles franco-annamites, où ils apprenaient l'annamite, dont les Cambod¬ giens de Cochmchine ont besoin pour les relations courantes avec leurs voi¬ sins et avec l'Administration. Le mouvement de rénovation scolaire qui s'est produit ces dernières an¬ nées au Cambodge n'a pas été sans frapper les populations cambodgien¬ nes de Cochmchine. Les nouvelles tentatives d'organisation d'un enseigne¬ ment en langue khmère ont été accueillies favorablement par les bonzes et les autorités locales. La grande difficulté était l'absence de maîtres capables d'enseigner la langue khmère. En faisant appel aux instituteurs d'origine cambodgienne en service dans les écoles franco-annamites, l'Administra¬ tion locale a pu organiser dans les écoles franco-annamites une soixantaine de classes réservées aux élèves d'origine cambodgienne et ouvrir une trentaine d'écoles publiques. Ces classes et ces écoles franco-cambodgiennes sont fréquentées par plus de 2.200 élèves (mai 1930). a r exemple de ce qui se fait au Cambodge, l'Administration s'est em¬ ployée, d'autre part, à rénover les écoles de pagode. Les budgets provin¬ ciaux subventionnent les meilleures de ces écoles, leur fournissent du mo¬ bilier et du matériel scolaires. Un certain nombre de bonzes enfin ont été envoyés à Phnom-Penh, aux frais des provinces, pour y suivre pendant un an ou deux des cours de perfectionnement à l'Ecole supérieure de Pâli. Les bonzes issus de ce stage deviendront de bons instituteurs, inspirant toute confiance aux populations à qui ils pourront inculquer maintes connaissan¬ ces utiles. Les examens primaires qui jadis ne pouvaient être subis en Cochinchine qu en langue annamite, peuvent désormais être passés également en lan¬ gue khmère. La session du certificat d'études élémentaires indigènes de 1930 a comporté deux séries parallèles d'épreuves, une série annamite et une série cambodgienne. Cette mesure, qui met à même les Cambodgiens de Cochmchine de conquérir dans leur propre langue les diplômes élémen¬ taires, se manquera pas d attirer à l'école les jeunes Cambodgiens; elle favorisera du même coup le recrutement des maîtres cambodgiens. Il n est pas interdit d'espérer que d'ici quelques années les écoles fran¬ co-cambodgiennes connaîtront en Cochmchine un succès et une prospéri¬ té comparables à ceux des écoles franco-annamites et apporteront aux Cam¬ bodgiens du pays, naguère résignés à leur décadence, un renouveau de vita¬ lité et d'éclat. 2" Les écoles moï. L'Est de la Cochinchine, pays de grandes forêts où viennent mourir les derniers contreforts de la Chaîne Annamitique, est habité, le long de la frontière de l'Annam, par des tribus tout à fait primitives, que les Anna¬ mites désignent sous le nom collectif de Moï (ou Sauvages). Les Moï sont environ 30.000 dans la province de Thudaumot, 100.000 dans la province de Biên-Hoa et 4.000 dans la province de Ba-Ria. Craintif et méfiant, le Moï est farouchement attaché à son indépendan¬ ce. A mesure que les routes et les plantations pénétraient les forêts qui leur servaient de terrain de chasse, les tribus moï ont reculé vers la chaîne anna¬ mitique. Elles laissaient derrière elles quelques groupes qui, trouvant un habitat favorable, se sont fixés et partiellement annamitisés. C'est parmi ces groupes que les premiers essais de pénétration scolaire ont pu être tentés. La difficulté fondamentale est évidemment le recrutement des maîtres. Homme des plaines inondées, du pays clair et sans mystère, l'Annamite redoute la montagne et la grande sylve, régions dangereuses où sévissent la fièvre, les fauves, où l'eau est mauvaise. Les instituteurs annamites n'ac¬ ceptent que de très mauvais gré un exil en pays moï. Or, ici plus encore qu'ailleurs, le choix du maître est d'une importance décisive. Que l'insti¬ tuteur déplaise aux enfants ou aux parents et les élèves s'enfuient, introu¬ vables dans la forêt. On a entrepris de former des maîtres moï. Un certain nombre de jeunes Moï achèvent actuellement leurs études dans une classe spéciale de l'école du chef-lieu de la province de Biên-Hoa : ces écoliers seront autant de pré¬ cieuses recrues pour les futures écoles Moï. Un autre problème, aussi ardu, consiste à toucher et à garder les élèves. Ce n'est pas sans inquiétudes que les parents, et la tribu elle-même, con¬ sentent à se séparer de leurs jeunes gens. Les Moï n'ambitionnent rien autre que de vivre comme ont vécu leurs pères; l'intérêt de l'instruction leur échappe complètement. Aussi lorsque le chef de province demande ou con¬ seille à un chef de tribu moï d'envoyer des enfants à l'école, ce sont sou¬ vent les enfants des familles les plus pauvres et les moins considérées qui sont désignés pour la « corvée d'école ». Un grand pas serait franchi si on pouvait arriver à faire considérer l'entrée à l'école comme un avantage, un honneur, car alors les notables se disputeraient pour leurs enfants les pla¬ ces disponibles. Rien n'est négligé pour atteindre ce but. C'est ainsi que les écoliers moï ont été réunis dans des internats, qui, en comparaison des cases moï, sont des manières de palais. Les écoliers y — i6 trouvent une nourriture abondante, des vêtements, des soins médicaux, le tout gratuitement. L'Administration pousse la bienveillance jusqu'à distri¬ buer de temps à autre aux familles des écoliers du paddy, des étoffes, des ustensiles divers. Le régime des internats moï est nécessairement très libre. L'école touche à la forêt où les enfants peuvent jouer dans les heures de loisir. La ren¬ trée des classes est toujours des plus laborieuses ; beaucoup d'enfants ne reviennent pas au jour dit — le calendrier moï est tout à fait sommaire — et il n'est guère facile d'atteindre les enfants qui parfois demeurent à plu¬ sieurs jours de marche de l'école. Il faut presque toujours un ordre de l'Ad¬ ministration pour que les jeunes fugitifs abandonnent l'arc et les pièges qu'ils ont tendus pour reprendre à l'école leur place de futurs lettrés. Pour dimi¬ nuer la difficulté, toutes les petites vacances sont supprimées et remplacées par un congé unique de trois mois. Actuellement le nombre des élèves moï en Cochinchine est de 126. Ce chiffre modeste représente bien des efforts; il est encourageant, car parmi ces élèves, une trentaine dans quelques années deviendront des maîtres, ce qui facilitera grandement la conquête scolaire des confins moï. Il existe à l'heure présente trois internats moï et trois autres écoles. A la rentrée de 1930, deux nouveaux internats seront ouverts ainsi que deux ou trois autres écoles. L'enseignement a été donné jusqu'ici dans les écoles moï en annamite ou en français. Deux vocabulaires, l'un franco-chauma, l'autre franco-stieng (dialectes de deux tribus moï des plus importantes) viennent d'être édités dans la province de Biên-Hoa ; des livres de classe en dialecte chauma sont également à l'impression et seront distribués en septembre 1931. Bientôt les écoliers pourront être instruits dans leur langue maternelle. Il en résultera de nouveaux progrès. 3" Les écoles malaises. Il convient aussi de signaler l'existence de quelques écoles malaises, notamment dans la province de Chau-Dôc. b. — l'enseignement primaire franco-indigène Chacun des vingt chefs-lieux de province de la Cochinchine et, en de¬ hors des chefs-lieux, chaque centre important possède une ou deux écoles de plein exercice (garçons et filles). Les enfants qui veulent poursuivre leurs études au delà des trois premiers cours (enfantin, préparatoire et élémen- UNE ÉCOLE DE PAGODE (RACH-GIA). PWP INTERIEUR DE CLASSE A TRAVINH ENSEIGNEMENT MÉNAGER : LA LESSIVE (CHAUDOC). ÉCOLE DE PLEIN EXERCICE DES FILLES DE PHULAM (PROVINCE DE CHOLON) .COURS SPÉCIAL DE COUTURE, MACHINES A COUDRE, BRODERIE (SUR LES MÉTIERS DU PREMIER PLAN DES SANDALES). LES BONZILLONS (PAGODE DE TRASACH — TRAVINH). l'école municipale des garçons de cholon. taire) qui constituent renseignement populaire indigène viennent dans ces écoles achever leurs études ppmaiires. Le véhicule d'enseignement dans le cycle primaire, véritable premier échelon de l'enseignement classique indo- chinois destiné à l'élite, est la langue française. Il y a en Cochinchine 1 1 7 écoles de plein exercice (écoles mixtes, écoles de garçons et écoles de filles). Ces écoles sont fréquentées par 42.842 élèves. Elles comprennent, en sus des classes maternelles et des classes élé¬ mentaires (25.754 élèves), les classes primaires proprement dites, c'est-à-dire les cours moyens 1r'°, année, les cours moyens 2° année et les cours supé¬ rieurs. Ces trois classes, qu'on dénomme primaires par opposition avec les classes élémentaires, réunissent 17.088 élèves. Les écoles de plein exercice préparent au certificat d études primaires franco-indigènes, examen qui se passe tout entier en français; 2.351 élèves cochinchinois ont obtenu le C. E. P. F. I. en 1929. Le C. E. P. F. I. se passe vers treize ou quatorze ans; il permet d'entrer dans les collèges et ouvre à dix-huit ou vingt ans l'accès de maintes petites fonctions publiques, de ces modestes emplois de bureaux, de secrétariat dont la plupart des chefs de famille indigènes rêvent pour leurs enfants. L'Admi¬ nistration s'efforce de réagir contre cet engouement excessif pour les carrières libérales et pseudo-libérales. Rien n'est négligé pour attirer les enfants pourvus de quelque instruction vers le commerce et les métiers manuels, qui, trop souvent, sont l'apanage des Chinois immigrés. Des ateliers d'apprentissage dont il sera parlé plus loin, ont été annexés à quelques grandes écoles de plein exercice de garçons. Toutes les écoles de filles font une place importante à l'enseignement ménager, apprennent à leurs élèves l'art de tenir une maison, le lavage, le repassage. Plusieurs écoles de filles ont, en outre, une section spéciale de travaux féminins, coupe, couture, broderie. Comprenant l'ensemble des classes qui constituent le cycle primaire, les écoles de plein exercice ont toujours au moins six classes. Les plus impor¬ tantes ont jusqu'à quinze et vingt classes et dépassent le millier d'élèves. Dans les chefs-lieux de province, les écoles de plein exercice de garçons sont dirigées par un professeur fiançais et les écoles de plein exercice de Biles par une institutrice française. Le directeur français remplit souvent en même temps les fonctions d'inspecteur des écoles dans la province; il est parfois assisté d'un adjont. Les autres écoles de plein exercice sont dirigées par des professeurs indigènes de renseignement primaire supérieur, anciens élèves de l'école de pédagogie de Hanoi, ou par des instituteurs indigènes chevronnés. — 18 — Les écoles de plein exercice sont des établissements modèles, surtout celles des chefs-lieux; elles sont bâties, non pas sur le même plan, mais sur des données semblables, dictées par une expérience vieille déjà d'un demi- siècle. Les constructions sont disposées de manière à laisser entre elles un vaste espace libre. De longs bâtiments, à rez-de-chaussée ou à étage, con¬ tiennent les salles de classe qui sont éclairées par de larges baies et desservies par des vérandas servant à la fois de galeries de circulation et de préau. Malgré leur étendue les bâtiments sont toujours coquettement tenus. Les cours sont plantées d arbres au feuillage épais ; souvent elles sont ornées de pelouses, de massifs fleuris, de haies vives. La note locale a été conservée chaque fois qu il a été possible. 11 n est pas rare de trouver dans un coin, à 1 ombre d un frangipamer, quelque vieux tombeau ou, au milieu des racines pendantes d un banyan, un pagodon rustique sur lequel une main pieuse a déposé des bâtonnets d encens et une offrande de bananes jaunes. Quatre écoles de plçin exercice, celles de Gia-Dinh, Phu-Lam, Vinh- Long et Bên-Tré, possèdent un internat où sont reçus les enfants originaires des villages pourvus seulement d'une école élémentaire. Le prix de la pension est fort modique (de 9 à 12 piastres par mois). Une partie des internats primaires de Gia-Dmh et de Phu-Lam est occupée pour le moment par deux cours normaux (préparation pendant une année complète de soixante-dix jeunes gens et jeunes filles, titulaires du certificat d'études primaires franco- indigènes, aux fonctions d'instituteurs et d'institutrices auxiliaires). La plupart des écoles de plein exercice ont leur cantine où, grâce aux libé¬ ralités de la caisse provinciale des écoles, les enfants, qui ne peuvent rentrer chez eux à midi, prennent gratuitement ou pour une somme infime (de 0 S 04 à 0 $ 10, soit de 0 fr. 40 à 1 fr.) un repas copieux, composé d'une soupe, de deux plats et d'un dessert, avec riz à volonté. Comparé avec le repas que certains enfants apportent eux-mêmes de la maison, ce menu donne une idée des améliorations apportées par l'Administration et par l'Ecole française dans la vie indigène. Les cantines scolaires sont très florissantes et très appréciées en Cochinchine. Elles apportent une aide discrète aux familles peu fortunées ; elles soustraient au déplorable vagabondage des int r-classes les écoliers des hameaux excentriques ; elles ont une influence des plus heureuses sur la fréquentation scolaire et le rendement des écoliers. La générosité de la caisse des écoles permet également d'agencer au mieux les terrains de jeux et de sports dans ou à proximité de l'école (agrès divers, courts de tennis etc...). Les accessoires, les vêtements de sports sont sou¬ vent m's gratuitement à la disposition des élèves. — 19 — Les séances d'éducation physique ont lieu chaque jour, aux heures les moins chaudes, au petit matin ou en fin d'après-midi. Elles se déroulent suivant les règles particulières à la pédagogie la plus moderne de la spé¬ cialité. L'éducation physique est enseignée méthodiquement dans les deux écoles normales de la colonie ; les instituteurs auxiliaires y sont initiés pen¬ dant les cours annuels de perfectionnement de vacances. Les sports sont en très grande faveur chez les garçons; il n'est guère de village de Cochinchme où, le soir, on ne voit un groupe de jeunes gens se renvoyer le ballon rond sur un terrain de fortune, rizière sèche ou tertre sablonneux. Les jeunes filles, au contraire, ont longtemps répugné aux exercices phy¬ siques incompatibles avec la réserve imposée au sexe faible par l'éducation traditionnelle. Ces préventions perdent chaque jour un peu de leur force ; dans toutes les grandes écoles les jeunes filles participent aux séances de gymnastique. Chez les garçons comme chez les filles, les moniteurs sont les maîtres eux-mêmes ou les maîtresses et à défaut, des militaires français ou indigènes. Les écoles de plein exercice sont dotées d'un important matériel d'ensei¬ gnement. Elles possèdent des collections de cartes et de tableaux muraux (collections en usage dans la Métropole et collections spéciales à l'Indochine), des compendiums métriques, des musées scolaires, un matériel pour les petites expériences scientifiques, des bibliothèques. Des séances de projec¬ tions cinématographiques sont assez fréquemment organisées. La clientèle des écoles de plein exercice est faite pour une part d'en¬ fants qui habitent la localité même où se trouve l'école, pour l'autre part d'enfants venant des villages voisins. Dans les écoles qui n'ont pas d'inter¬ nat, ces derniers enfants prennent pension en ville, chez des parents, dans une famille amie ou chcz un instituteur. Les moins fortunés de ces enfants reçoivent une bourse d'entretien dite bourse familiale. Les mouvements de l'école s'annoncent par une batterie de tam-tam. La rentrée et la sortie constituent un spectacle plein d'animation et de pitto¬ resque. La présence de plusieurs centaines d'enfants attire tout un monde de marchands ambulants, annamites ou chinois, vendeurs de soupe, de fruits, de friandises, de crème glacée. Souvent un petit marché s'organise aux abords de l'école. Les marchands font de fructueuses affaires; la misère est, en effet, pour ainsi dire inconnue en Cochinchme, où la plupart des enfants ont quelques sous en poche pour satisfaire leurs menues fantaisies. Les écoliers des deux sexes sont vêtus de l'ample pantalon à fond bas et de la blouse à manches étroites (cal ao). Blancs ou noirs, ces vête- ments sont en cotonnade légère, quelquefois en soie. Les petits écoliers marchent toujours pieds nus ; les grands chaussent des socques en bois qui laissent découvert le dessus du pied, et sont retenus par une courroie de cuir. Les garçons portent le casque européen ou un chapeau de feutre qui, enfoncé jusqu'aux oreilles, prend peu à peu la forme d un simple cône. Les toutes petites filles ont les cheveux Coupés courts ; les fillettes portent les cheveux longs, rejetés en arrière par un large peiigne qui enserre tout le haut de da tête. Les grandes élèves tordent leurs cheveux en chignon sur la nuque, elles se protègent du soleil par un mouchoir brodé, blanc ou rose, noué sous le menton. En toute saison elles tiennent à la main l'ombrelle, de couleur vive, signe distinictif de la condition bourgeoise. Les petits élèves annamites sont doux et gentils, plaisants à voir avec leur visage au teint frais, leurs traits fins, leurs yeux noirs et malicieux. Cette grâce enfantine disparaît d'ailleurs assez vite. Vers douze ou treize ans les traits se durcissent, le teint devient plus terne. Très travailleur, l'adolescent est en général moins intelligent et moins perfectible que 1 en¬ fant. Il n'a pas beaucoup le sens du réel ; il manque d'esprit critique. Il remplace ces qualités par une remarquable obstination dans l'étude, qui lui permet d'emmagasiner dans sa mémoire beaucoup de notions répétées a force. Homme fait, l'Annamite retrouve ensuite les qualités de vivacité, de subtilité, de gaieté spirituelle qui sont les caractéristiques de la race. II. — L'enseignement primaire français Faites pour les jeunes enfants français donc beaucoup sont appelés à continuer en France leurs études et leur existence, les écoles primaires de la colonie ne peuvent qu'emprunter aux écoles similaires de la métropole leurs programmes et leurs méthodes. Aussi, au contraire, de l'enseignement franco-indigène du premier degré, l'enseignement français ne présente-t-il à peu près aucune originalité. En dehors des classes primaires annexé s au Lycée Chasseloup-Laubat et aux deux écoles primaires supérieures de Saigon, l'enseignement primaire français est donné en Gochmchme dans sept écoles indépendantes : en pro¬ vince à My-Tho, à Can-Tho, à Vinh-Long, au cap Saint-Jacques et à Cho- lon ; à Saigon, à l'école Indienne et à l'école maternelle. L'organisation d'un enseignement réservé aux enfants français s'est faite sans peine à Saigon où résident en permanence plusieurs milliers de Français, — 21 — fonctionnaires, commerçants, militaires, employés. Elle est, au contraire, très difficile, quelquefois même pratiquement impossible, dans l'intérieur du. pays où la population française est très peu nombreuse et, à l'exception cle quelques colons fixés sur la terre, composée d'éléments particulièrement mobiles et instables (les changements de poste sont fréquents dans la vie administrative coloniale, coupée de congés, périodiques dans la métropole1). Dans les petits centres, où se trouvent seulement quelques Français, les parents qui ne veulent pas recourir aux internats de Saigon ou au lycée de Dalat, doivent diriger eux-mêmes les études de leurs enfants, il arrive qu'ils les envoient à l'école franco-indigène du lieu. Cette solution n'est qu'un pis-aller exceptionnel et provisoire. Les écoles françaises de My-d ho et de Can- Dio réunissent chacune une trentaine d'enfants, celle de Vinh-Long une dizaine. Elles sont tenues par des institutrices françaises qui appartiennent aux cadres réguliers. Ces écoles sont installées dans un local indépendant du groupe scolaire franco-indi¬ gène. Elles sont naturellement à classe unique. Le rendement n'est pas toujours très élevé en raison des grandes dvffér nces d'âge et de formation des élèves (garçons et filles de 7 à 13 ans, dont quelques enfants d'Anna¬ mites naturalisés mal familiarisés avec la langue française). 4 Destinée aux enfants de militaires de la garnison, la petite école française du cap Saint-Jacques (20 à 30 élèves suivant les années) offre vraiment l'aspect d'une école métropolitaine. Bien pourvue de matériel scolaire, l'éco¬ le du cap est très appréciée des familles, la fréquentation y est régulière, la 9 discipline exacte, les études profitables. L'école française de Cholon (105 élèves) comporte deux sections distinc¬ tes. L'une est réservée aux enfants des Français de Cholon à qui sont ainsi épargnées de multiples allées et venues sur les routes encombrées qui relient Cholon à Saigon. L'autre section, installée dans les locaux de la Société de Protection de l'Enfance, est réservée aux pupilles de cette œuvre, en¬ fants abandonnés (74 élèves des deux sexes). Cette école représente un louable effort de francisation, elle permet d'orienter vers des destinées meil¬ leures des enfants qui seraient, sans elle, exposés à de multiples et dange¬ reux hasards. L'école indienne de Saigon compte une cinquantaine d'élèves, fils et filles des Français de nos établissements de l'Inde. Elle est moins une école française qu'une éocle préparatoire aux écoles françaises. Quelques leçons sont faites en tamoul ; les enfants se perfectionnent surtout en français pour pouvoir entrer de plain pied dans les établissements du 2' degré de Saigon. — 22 — L'école maternelle de Saigon (235 élèves) mérite une mention spéciale. Ses bâtiments coquets s'élèvent dans un quartier agréable et sain, au centre de la ville. De grands halls servent de salle de récréation et de salle d'évo¬ lution. Spacieuses, les classes sont meublées de tables et de sièges individuels (lauteuils en bois de teck ou en rotin) exactement proportionnés à la taille des enfants. Les enfants ont à leur disposition tout le matériel classique des exercices sensoriels et des exercices éducatifs. Une installation hygiénique de premier ordre permet de leur donner les soins et les habitudes désirables de propreté. Les enfants dont la famille demeure loin, prennent leur repas de midi à l'école dans un réfectoire où tout a été prévu pour leur commodité ; ils font ensuite la sieste dans un dortoir qui semble fait pour Lilliput. L'éco¬ le maternelle de Saigon répond à toutes les exigences de la spécialité qu'elle représente ; elle est une véritable école modèle. Chapitre II LES ETABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT DU T DEGRE A) ENSEIGNEMENT FRANCO-INDIGENE En Cochinchiine, l'enseignement franco-indigène du T degré est distri¬ bué dans cinq établissements. Trois de ces établissements se trouvent dans la capitale: le lycée Pétrus Truong-vinh-Ky, l'école normale d'instituteurs et le collège de filles indigènes; les deux autres établiss:ments sont en pro¬ vince, à My-Tho et à Can-Tho. 10 Le lycée pétrus Truong-vinh-Ky A la lisière de Saigon et de Cholon (quartier de Cho-Quan), dans la célè¬ bre plaine des tombeaux, le lycée franco-indigène de Coohinchine dévelop¬ pe l'immensité de ses espaces bâtis et non bâtis. La vue aérienne donnée ici représente à peine le quart de la superficie du lycée. La clôture que l'on aperçoit n'est qu'une délimitation provisoire. Le lycée et ses dépendances disposent, en réalité d'un terrain de treize hectares en forme de trapèze borné par quatre rues ou routes. La rue qui longe l'ensemble des bâtiments déjà construits, coupant en diagonale la photographie, est la limite des deux villes de Saigon (en bas et à droite) et de Cholon (en haut et à gauche). Pendant de longues années, l'enseignement primaire supérieur franco-indi¬ gène a été donné à Saigon au collège Chasseloup-Laubat, établissement mixte qui comprenait à la fois un quartier indigène et un quartier européen. Le développement incessant de la clientèle, aussi bien indigène que fran¬ çaise, ne devait pas tarder à rendre tout à fait insuffisants les locaux du collège Chasseloup-Laubat, dont l'extension au coeur de la ville était im¬ possible. En 1922 on décida donc de créer un établissement neuf, exclusive¬ ment consacré à l'enseignement franco-indigène. On s'arrêta à Remplace- - 24 — ment qui vient d etre décrit, emplacement très favorable en raison de sa si¬ tuation un peu écartée mais non pas isolée, dans une plaine improductive, constamment balayée par le souffle des moussons. Les premières briques fu¬ rent posées en 1925; en octobre 1927, les bâtim.nts achevés accueillirent quatre divisions d'internes; en 1928 le quartier indigène du collège Chas- seloup-Laubat émigra tout entier dans le nouvel établissement appelé à vivre désormais une existence indépendante. Erigé en lycée le 1 1 août 1928, l'établissement de Cho-Quan a été placé sous l'invocation du lettré cochinchinois Pétrus Truong-vinh-Ky {1837-1898) dont la statue se dresse à Saigon derrière la cathédrale. Parve¬ nu à l'âge d'homme à l'époque de la conquête, Pétrus Truong-vinh-Ky accompagna en France en qualité de premier interprète l'ambassade envoyée en 1867 par Tu-Duc à NAPOLÉON III; plus tard il fut le collaborateur du Résident général paul BeRT. Membre de nombreuses sociétés savantes d'Occident, il a écrit plus de soixante-quinze ouvrages en français, en annamite ou en chinois sur les sujets les plus divers, littérature, philologie, grammaire, histoire, sciences naturelles et même médecine. Dans une lettre adressée par lui à Stanislas Meunier, Pétrus Ky a précisé dans les termes suivants le but qu'il proposa à son activité : « Je ne pouvais « que servir d'intermédiaire entre les deux peuples qui venaient de se ren- (( contrer en Coehinchine. Je ne pouvais que permettre à ces deux peuples « de se comprendre et de s'aimer, aussi ai-je continuellement traduit de « l'annamite en français et du français en annamite, persuadé que derrière d la langue, derrière les mots, passeraient un jour les idées et bientôt, pour « nous, l'initiation à votre belle civilisation». Le biographe de Pétrus Ky,- M. Jean Bouchot, résume ainsi dans sa conclusion la vie de l'érudut local : << En ce qui nous concerne, nous autres Français installés dans ce (ï pays qui nous est cher à plus d'un titre, la vue de Pétrus Ky doit nous i! être un enseignement et un exemple. Un enseignement, car nous avons « pu voir ce Cochinchinois égaler dans les sciences les plus absconses et les « plus variées ceux de nos savants européens que nous tenons généralement v pour les plus qualifiés. Nous avons vu Pétrus Ky faire preuve d'une <( érudition et d'un talent, d'une sagacité dans le jugement, d'une logique « dans le raisonnement qui ne sont pas à l'ordinaire vertus de spéculateurs « asiatiques... Homme politique et diplomate, nous l'avions suivi dans « le détour de ses missions et ce fut pour admirer avec quel feu il prenait rio- « tre parti... Effet de son éducation qui fut presque exclusivement fran- « çaise,' conséquence de son passage à l'école des missionnaires, Pétrus <■ Ky lisait et parlait quinze langues vivantes ou mortes de l'Occident; LA CANTINE DE GODEN (CHOLON). Ifi : WKm wmÊSm ,%x} * im S I 1 |g§l IpP I m WÊm i H i Ml ÉDUCATION PHYSIQUE (GROUPE SCOLAIRE DE RACHGIA) « il en écrivait onze, presque toutes de l'Extrême-Asie... Homme de fa- « mille, Pétrus Ky fut un père attentif constamment penché sur ses en- « fants, tout occupé de leur éducation et dans l'appréhension constante des h embûches que leur réserve l'existence... Il eût pu, dans la retraite, se « livrer à des travaux qui constituaient la meilleure partie de sa vue mais normale d'institutrices. 262 fillettes de sept à treize ans fréquentent les huit classes primaires ; 107 jeunes filles de treize à dix-huit-ans, les quatre classes primaires supérieures. — 30 — La section normale réunit, pour son compte, 1 1 7 élèves-maîtresses, répar¬ ties elles aussi en quatre divisions ; les promotions annuelles sont de 25 institutrices, qui suffisent aux besoins des grandes écoles de filles de la colonie. Les élèves du collège de filles indigènes appartiennent pour la plupart à des familles aisées, fonctionnaires, commerçants, propriétaires; des bour¬ ses ouvrent d'ailleurs aux jeunes filles méritantes de condition modeste l'ac¬ cès de l'établissement. A l'exception de quelques Tonkinoises et Cam¬ bodgiennes, les élèves sont toutes originaires de Cochinchine. Elles sont plutôt petites, menues et frêles. Elles nouent leurs longs cheveux noirs et lisses en chignon à la mode cochinchinoise. Timides et travailleuses, ces enfants sont en pleine confiance avec leurs maîtresses auxquelles elles té¬ moignent une déférence affectueuse. Sur les 504 élèves, on compte 330 pensionnaires, 95 demi-pensionnai¬ res et seulement 79 extern s. On aperçoit ici une petite partie du très vaste réfectoire. Les persiennes remplacent les vitres, inconnues en Cochinchine ; de coquets abat-jour en soie orange, des plantes vertes embellissent la salle. Le couvert et la nourriture sont, comme il est naturel, annamites; débités à l'avance en menus morceaux, les mets sont servis tous en même temps dans des bols et des soucoupes ; des théières en faïence vernissée de couleur verte renferment le thé; l'eau se rafraîchit dans des gargoulettes. Maniées avec une dextérité étonnante, les baguettes traditionnelles tien¬ nent lieu de fourchettes et de couteaux. Les dortoirs offrent, comme ceux des autres établissements franco-indigènes, un curieux mélange des usages occidentaux et des usages locaux ; les pensionnaires ont de petits lits en métal garnis de moustiquaires mais elle? dorment sur la dure : le sommier est remplacé par des planches recouvertes d'une simple natte. Les collégiennes n'ont pas autant de goût que leurs frères pour les exer¬ cices corporels; elles préfèrent les longues conversations aux jeux actifs, tennis, baskett bail et volley-ball dont le collège possède des installations ; les récréations sont plus remplies de cris et de rires que de courses, de poursuites et de sauts. Les exercices physiques font cependant l'objet d'un enseignement suivi, contrôlé par les fiches sanitaires individuelles. L'image montre que, si elles ne prisent guère les exercices de force, les élèves du collège de filles indigènes accomplissent avec beaucoup de grâce les évo¬ lutions rythmées. Les jeunes filles annamites ont au collège des conditions d'existence qui ne diffèrent pas essentiellement de celles de leur milieu familial. Elles gar¬ dent leur costume, leurs usages; elles s'instruisent et se développent sans rompre avec les traditions de leur race. Le collège a pour but avant tout de faire de bonnes mères de famille. En dehors des cours de langue française et de sciences, les collégiennes suivent des cours d'économie domestique, d'hygiène et de puériculture ; elles apprennent à couper et à coudre les vêtements indigènes, à broder, à décorer de perles les pantoufles de ve¬ lours qu'afEctionnent les Annamites. Elles apprennent 3ussi à entretenir la maison, à faire la cuisine. Le repassage, comme le montre l'image, n'est pas négligé. Maîtresses de maison accomplies, les anciennes élèves du collège trouvent, en général, un établissement avantageux. Le fonctionnement du collège est assuré par une directrice, une surveil¬ lante générale et une dame-économe, par dix-sept dames-professeurs et mstitutrices françarses, par une dame-professeur et par quatre institutrices indigènes, enfin par six surveillantes françaises et douze surveillantes indi¬ gènes. Ouvert en 1915 avec une quarantaine d'élèves, le collège de filles in¬ digènes a plus que décuplé son effectif depuis sa fondation. Son succès témoigne de l'évolution remarquable qui s'est produite dans les milieux in¬ digènes au cours des vingt dernières années en ce qui touche l'éducation des filles. Il est un hommage éclatant rendu aux méthodes françaises d'en¬ seignement et au personnel chargé d'appliquer ces méthodes. 5° L'école normale d'instituteurs Grande comme dix départements français, la Cochmchme ne possède qu'une Ecole normale d'instituteurs. Cette école a de tout autres propor¬ tions, il est vrai, que les écoles départementales de la métropole. Elle abrite non pas quelques dizaines mais bien plusieurs centaines d'élèves- maîtres. Un coup d'œil sur le grand amphithéâtre un jour de rassemble¬ ment général, donnera une idée de l'importance de son contingent des élè¬ ves en cours d'études (effectif en mai 1930 : 420 élèves-maîtres et en sep¬ tembre 1930 : 441). L'Ecole normale est située en bordure du très vaste et très beau jardin botanique et zoologique aménagé sur les deux rives de l'arroyo de l'Ava¬ lanche, à 750 mètres de son confluent avec la Rivière de Saigon (empla¬ cement occupé ]adis par le collège d'Adran). L'Ecole couvre une super¬ ficie d'un hectare et demi. La façade est ombragée par de grands arbres, plus élevés et plus touffus que les plus hauts chênes de France. Les trois grands corps de bâtiments sont disposés en fer à cheval. A l'opposé de la façade un bâtiment renferme les locaux administratifs, les bibliothèques et les laboratoires très richement pourvus, l'amphithéâtre et la salle de dessin; — 32 — deux ailes, perpendiculaires au corps principal, comprennent au rez-de- chaussée les diverses salles de classe, les réfectoires et les cuisines. Les deux étages des trois bâtiments sont affectés aux dortoirs, aux salles de douche, à l'infirmerie et aux chambres de surveillants. Recrutés au concours parmi les certifiés primaires de toutes les provinces de Cochinchine (de 7 à 800 candidats chaque année pour 100 places dis¬ ponibles), les normaliens de Saigon ont entre quinze et vingt ans. Ils sont soumis au régime de l'internat. Leur existence est fort laborieuse (30 heu¬ res de classe par semaine) mais agréable. Levés à 5 h. 1/2, les élèves font la sieste de midi à 1 3 h. 1 5 ; ils se couchent à 21 h. 1/2. Leur table est abondamment servie. L'Ecole a un appareil cinématographique, plu¬ sieurs appareils à projection fixe, deux courts de tennis. Les normaliens sont autorisés à se servir, à certaines heures, de leurs instruments de mu¬ sique ; ils organisent de temps à autre de petites représentations théâtrales. Défrayés de tout, ils n'ont aucune dépense à supporter ; ils reçoivent, à leur entrée à l'école et au début de leur troisième année d'études, un trousseau complet (trois costumes d'intérieur, sortes de pyjamas en calicot blanc, et deux costumes européens, en toile blanche avec écussons). L'Ad¬ ministration fournit, d'autre part, tous les livres de classe et toutes les four¬ nitures scolaires. Les normaliens ont même leur voyage dans leur ifarmlle payé deux fois l'an, au Têt (jour de l'an annamite) et aux grandes va¬ cances. Les élèves-maîtres passent quatre années à l'Ecole normale. L'enseigne¬ ment général qu'ils reçoivent est complété par une préparation profession¬ nelle très poussée au double point de vue théorique et pratique. Les élè¬ ves-maîtres font, en effet, des stages réguliers à une école primaire d'ap¬ plication incorporée à l'établissement (école à six classes fréquentée par 204 élèves externes) ; dès la deuxième année ils suivent les classes de cette école, entendent et font des leçons-modèles, prennent la direction effective d'une classe, bref apprennent expérimentalement leur métier d'éducateur. En dehors de son rôle intellectuel et moral, l'Ecole normale de Cochin¬ chine a une grande importance sociale en raison des enseignements spé¬ ciaux qu'elle dispense : éducation physique, agriculture appliquée, travaux manuels. Ces enseignements sont organisés avec un soin tout particulier. Les élèves-maîtres sont initiés aux méthodes les plus modernes de l'éduca¬ tion physique dont ils feront plus tard pénétrer les bienfaits dans les coins les plus reculés des campagnes cochinchmoises ; des conférences spéciales d'éducation physique leur sont données par un colonel en retraite, ancien professeur à l'Ecole de Joinville ; les séances d'exercice sont dirigées par deux professeurs français diplômés et par deux sous-officiers formés à Join- ÉCOLE MATERNELLE DE SAIGON. — UNE SALLE DE CLASSE (ENFANTS DE 4 A 5 ANS). ECOLE MATERNELLE DE SAIGON. — LA SALLE DE SIESTE : ÉCLAIRAGE ACCRU POUR LES NÉCESSITÉS DE LA PHOTOGRAPHIE. LE SOMMEIL EST UN PEU THÉORIQUE ; LES ENFANTS SE REPOSENT DU MOINS PENDANT LES HEURES LES PLUS CHAUDES DE LA JOURNÉE. COLLÈGE DE FILLES INDIGÈNES. — ÉDUCATION PHYSIQUE. LE COLLÈGE DE CANTHO : UNE DES DEUX GRANDES COURS GAZONNÉES COLLÈGE DE FILLES INDIGÈNES — LA GRANDE COUR. LES ÉLÈVES EN TUNIQUE DE SOIE VIOLETTE SE RANGENT POUR LA PROMENADE. LYCÉE PÉTRUS KY. — ALLEES COUVERTES DESSERVANT LES BATIMENTS DE L'iNTERNAT (AVEC LES RAMIFICATIONS, PLUS DE 300 MÈTRES DE LONGUEUR). ÉCOLE NORMALE D'INSTITUTEURS DE SAIGON. — UNE SÉANCE D'ÉDUCATION PHYSIQUE SUR LE TERRAIN DE JEUX. IwlRfr mm i'j/4 />.« .O ♦vMA* ✓ ♦ #* # ^ J% % /# % * % ^ avAVa*ÀV*VJ ♦VAVAV i ♦ ■ 7^^ « -ï* " - * )' D O'V-O '■• /' ;. V; .:/• i |(S:^' MMlMilil * ~">vn_ ■ >a „ >^si TROIS GÉNÉRATIONS DE MAITRES (ÉCOLE DE SOC-TRANG). ÉCOLE NORMALE D'INSTITUTEURS DE SAIGON. — ATELIER DU BOIS. LES ÉLÈVES DE 2e ANNÉE AU TRAVAIL — 33 - ville. Toutes les semaines, un médecin fait, en outre, une conférence d'hy¬ giène aux élèves de quatrième année. L'Ecole normale possède son jardin d'expérience; les élèves-maîtres s'y rendent régulièrement pour les leçons d'agriculture pratique qui sont pro¬ fessées par le directeur des Services agricoles de Cochinchine. Enfin le tra¬ vail du bois et du fer est enseigné à l'Ecole même, où un bel atelier a été récemment aménagé ; les travaux manuels sont enseignés par un professeur français assisté de deux maîtres-ouvriers indigènes ; ils sont pour les jeunes normaliens un délassement et surtout une très utile leçon de choses dans ce pays où jadis le lettré qui faisait œuvre de ses doigts se regardait comme déshonoré. Le personnel de l'Ecole normale est en proportion avec l'importance de l'établissement. L'état-major administratif comprend un directeur, un sur¬ veillant général et un économe. Le personnel enseignant attaché à l'éta¬ blissement se compose de 14 professeurs français (6 de lettres et de péda¬ gogie, 2 d'histoire et de géographie, 4 de sciences, 1 de dessin, 1 de travaux manuels) et de 6 professeurs indigènes (4 de lettres, 1 de sciences, 1 d'annamite et de caractères chinois). La surveillance de l'internat est assurée par un maître-répétiteur français et 15 instituteurs indigènes, pres¬ que tous anciens élèves de l'école. L'Ecole d'application a son directeur particulier et 6 instituteurs indigènes, choisis parmi les meilleurs. Le budget de l'Ecole normale atteint le chiffre considérable de 3!" piastres (3.170.000 francs). Cette dépense est au premier chef une dé¬ pense productrice. Pépinière de maîtres instruits, l'Ecole normale assure l'avenir de l'enseignement primaire en Cochinchine. B) ENSEIGNEMENT FRANÇAIS Les enfants français de Cochinchine peuvent recevoir au gré de leur fa¬ mille l'instruction secondaire nationale au lycée Chasseloup-Laubat ou 1 ins¬ truction primaire supérieure dans les deux écoles primaires supérieures de Saigon (filles et garçons). 10 Lycée Chasseloup-Laubat Cet établissement du degré secondaire métropolitain est, comme tel, sous l'autorité immédiate, administrative et technique, de la Direction générale de l'Instruction publique. o — 34 — Le lycée Chasseloup-Laubat continue le plus ancien établissement sco¬ laire de la Colonie, le collège Chasseloup-Laubat, dont l'origine remonte aux premières années de l'occupation française en Cochrnchine. Ce collège, fondé en 1874 et qui porta d'abord le nom de collège indigène, était effectivement un établissement indigène, préparant assez rapidement aux fonctions de secrétaires, lettrés et interprètes de l'Adminis¬ tration de jeunes Annamites, parmi lesquels une petite élite pouvait être envoyée en France pour continuer ses études. C'est en 1891 seulement que furent ouvertes au collège Chasseloup- Laubat des classes séparées pour les jeunes élèves français, qui formèrent ce qu'on appela le quartier européen. Dès lors, sous les noms de quartier indigène et de quartier européen, le collège comprit deux sections, qui en se développant finirent par constituer deux établissements complets et dis¬ tincts, l'un d'enseignement primaire supérieur et secondaire franco-indigène, l'autre d'enseignement secondaire français, réunis dans le même local et sous la même direction jusqu'à la fin de l'année scolaire 1927-1928. Le lycée Pétrus Truong-vmh-Ky, ouvert à la rentrée de septembre 1928, reçut le premier des deux établissements, le quartier indigène. Le lycée Chasse¬ loup-Laubat, qui prit le nom et s'installa dans les locaux de l'ancien Col¬ lège, est seulement la suite de la section ouverte en 1891, du quartier euro¬ péen. De 40 élèves en 1917 l'effectif des classes secondaires passe à 93 dès l'année suivante avec l'ouverture de la quatrième et de la troisième; il est de 189 en 1924-25, au moment où viennent de s'ouvrir les dernières classes du second cycle. Pour l'ensemble, il passe aux mêmes dates de 143 à 272 et à 365. Trois ans plus tard, quand le collè¬ ge Chasseloup-Laubat, enfin réservé uniquement à l'enseignement français, est érigé en lycée par l'arrêté du 17 août 1928, c'est un établissement de 555 élèves, égal en importance aux lycées des grandes villes de France. Régime financier à part, son organisation est celle des lycées de la métro¬ pole. Le plan d'études est celui de la métropole. Les classes élémentaires ont devancé d'un an les lycées de France pour l'application des programmes de l'enseignement primaire; elles constituent une école primaire annexée au lycée sous la direction pédagogique de l'un des maîtres. L'enseigne¬ ment secondaire suit les programmes et les horaires de 1923-25; les ins¬ tructions relatives à l'application de ces programmes tracent, comme en France, la voie aux professeurs et déterminent les méthodes de cet enseigne¬ ment. L'adaptation au milieu ne se traduit que par de légères différences. L'annamite est enseigné comme langue vivante dans la section B, concurem- — 35 — ment avec l'espagnol et, pour quelques élèves, surtout pour ceux qui ont commencé cette langue en France, l'allemand. En sixième et en cinquième tout le monde étudie l'anglais, langue passe-partout en Extrême-Orient. Dans le cycle primaire une section spéciale, qui comprend un cours élé¬ mentaire et un cours moyen, reçoit les jeunes indilgènes insuffisamment fa¬ miliarisés avec le français, et les entraîne à la pratique de notre langue en s'inspirant des méthodes d'enseignement des langues vivantes. En effet, lors de l'érection en lycée du collèjge Chasseloup-Laubat, les élèves indigènes qui y avaient commencé leurs études dans l'enseignement français furent admis <à les y poursuivre. Pour l'avenir le recrutement de cette catégorie d'élèves fut soumis aux conditions générales de l'arrêté du ! I février 1930 promulguant le statut organique des lycées français d'In¬ dochine d'après lequel, dans ces lycées destinés essentiellement aux enfants français, de jeunes indigènes peuvent être admis dans la limite des places lestées disponibles, sous réserve de conditions d'âge et d'un examen préa¬ lable démontrant qu'ils peuvent suivre avec fruit les classes. Cette faculté tentera d'ailleurs sans nul doute de moins en moins de familles cochinchi- noises depuis que le décret du 12 octobre 1930 a donné au baccalauréat de l'enseignement franco-indigène l'équivalence du baccalauréat français et qu'un magnifique établissement, le lycée Pétrus Ky, permet à leurs en¬ fants de recevoir dans les meilleures conditions un enseignement secondaire adapté et d'évoluer normalement dans le plan de leur civilisation. Le régime scolaire (organisation et contrôle du travail, classes, études, récompenses et punitions) ne présente aucune particularité vraiment carac¬ téristique. Le personnel enseignant est composé de professeurs agrégés et licenciés, détachés pour la plupart des cadres métropolitains, spécialisés comme en France. I! comprend actuellement cinq professeurs agrégés dont un docteur ès-sciences, deux professeurs certifiés, onze licenciés, dont deux admissibles à l'agrégation, et un professeur-adjoint d'Ecole primaire supérieure. La population scolaire du lycée Chasseloup-Laubat est actuellement de 633 élèves, dont 355 dans les classes secondaires. Elle comprend 235 Français d'origine, 124 Eurasiens naturalisés ou Français de l'Inde, et 274 Indochinois. En même temps que la coéducation des races le Lycée pratique la coé- ducation des sexes. Les jeunes filles françaises sont admises comme externes dans les classes secondaires au même titre que les garçons. Les classes pri¬ maires mêmes sont ouvertes de droit aux fillettes des fonctionnaires de l'établissement, à celles qui ont un frère au lycée et peuvent aussi recevoir, — 36 - dans la limite des places disponibles, des fillettes n'appartenant pas à ces deux catégories et qui se destinent à l'enseignement secondaire. On compte en 1930, 88 jeunes filles au lycée Chasseloup-Laubat. Le lycée Chasseloup-Laubat est moins favorisé au point de vue de l'ins¬ tallation matérielle que la plupart des grands établissements scolaires de la colonie. C'est la rançon de son ancienneté. Néanmoins pour l'internat les installations principales offrent aux élèves avec une hygiène irréprochable un aspect assez agréable et un confort suffi¬ sant. Le lycée Chasseloup-Laubat sera de plus en plus, il est vrai, pour les Français, un lycée d'externes, à mesure que s'ouvriront les classes secon¬ daires du lycée de Dalat, qui sera le véritable Lycée d'internes pour Euro¬ péens dans l'Indochine du Sud. A la différence des bâtiments, l'outillage scolaire ne pêche pas par la vétusté. Il est d'acquisition toute récente, fournit aux élèves et aux pro¬ fesseurs des instruments de travail indispensables et permet de donner aux différents enseignements qui l'exigent ou le permettent le caractère concret et expérimental qui en fait avant tout la valeur éducative. Pour l'éducation physique, qui revêt une importance toute spéciale dans un lycée français des tropiques, l'outillage indispensable consiste en un terrain de sports bien aménagé. Celui du lycée a l'avantage de se trouver dans le voisinage immédiat de l'établissement et en même temps au milieu même du quartier Saigonnais où se groupent la plupart des maisons d'habi¬ tation pour Européens, ce qui le rend facilement accessible aux externes en même temps qu'aux internes, et permet aux uns et aux autres de profiter plus facilement des courtes heures du matin ou du soir les plus propices au sport. Ajoutons que la décision vient d'être prise, à la demande de la Direc¬ tion générale de l'Instruction publique, de construire dans la partie Ouest de la ville, sur une surface d'environ quatorze hectares, un lycée Chasseloup- Laubat neuf, qui sera à tous égards le digne pendant du lycée franco-indigène Pétrus Ky. 2° Ecole primaire supérieure des filles françaises L'Ecole primaire supérieure des filles françaises est située dans le quar¬ tier le plus élevé, le plus sain et le plus tranquille de Saigon, au centre de la ville de résidence, dans laquelle s'espacent les villas entourées d'om¬ brages, sur le plateau qui domine de cinq à six mètres la partie basse de la ville, le quartier du port et des affaires. - 37 — Très plaisants d'aspect, les bâtiments, construits il y a une dizaine d'an¬ nées, sont parfaitement adaptés au climat. L'Ecole dessine un rectangle ; les différents corps sont séparés des murs d'enceinte par des jardins; ils enserrent deux grandes cours intérieures ; chaque salle a ses deux faces opposées bien dégagées, ce qui assure l'aération des murs extérieurs. L'ar¬ deur du soleil est tempérée par de longues galeries qui servent à la fois de vérandas et de couloirs de circulation. Deux halls abritent les élèves pendant les heures de pluie. L'Ecole tout entière respire le confort, l'élégance et la gaîté. Les halls et les galeries sont recouverts de peintures claires, de carrelages coloriés. Des massifs de fleurs, des plantes en caisse, des pelouses bien arrosées jettent toute l'année une tache de verdure même en fin de saison sèche, alors que toute la végétation herbacée de la Cochinchine est calcinée par le soleil. Entourée de cannas, la cour d'honneur s'orne d'un palmier ma¬ jestueux à l'ombre duquel défile quatre fois par jour le cortège des élèves. Les installations de l'externat comme celles de l'internat répondent à toutes les exigences de la pédagogie moderne et de l'hygiène tropicale. Protégées par des stores mobiles, les salles de classes sont rafraîchies par des ventilateurs électriques. A l'étage, dans et à côté des dortoirs, des lits métalliques avec moustiquaire en tulle, des lavabos individuels en cé¬ ramique, des chambres de douches et de bains. Les demi-pensionnaires font la sieste méridienne — nécessaire en ce pays — dans l'un des préaux garni de chaises longues en rotin. L'état sanitaire est excellent; le nombre des maladies graves et des courtes absences n est pas sensiblement plus élevé que dans la métropole. L'école est administrée par une directrice, une surveillante générale et une dame-économe. Cinq dames-professeurs et douze institutrices consti¬ tuent le personnel enseignant. Huit surveillantes veillent à la bonne marche de l'internat. En mai 1930 l'effectif était de 429 élèves, se décomposant en 234 ex¬ ternes, 120 pensionnaires et 75 demi-pensionnaires; en septembre 1930 il était de 454. Les enfants françaises forment le fond de la population scolaire. Celle- ci est du reste mélangée. L'école est ouverte, en effet, aux filles originaires de l'Inde française, aux filles des Annamites naturalisés, aux métisses eu¬ rasiennes et indo-annamites. Elle compte aussi quelques Cambodgiennes et Laotiennes et même quelques japonaises et Chinoises avides de recevoir une instruction et une éducation françaises. Cette diversité ethnique excite l'émulation sans nuire à la discipline; elle donne à l'Ecole un cachet d originalité. — 38 — L'Ecole primaire supérieure groupe, en réalité, trois établissements dis¬ tincts : une école primaire (1 1 classes avec 348 élèves), une école pri¬ maire supérieure proprement dite (3 années avec 66 élèves) et une petite école normale (1 section avec 15 élèves). Elle prépare à tous les certificats et brevets de l'enseignement primaire français. Les études sont organisées dans chaque cycle suivant les programmes des écoles correspondantes de la métropole ; on y suit et on y applique les mêmes méthodes et les mêmes procédés d'enseignement. La note coloniale se retrouve toutefois dans maints détails, dans la composition des musées scolaires, dans le choix des textes de dictée et de composition française, inspirées par les scènes et les habitudes locales, dans la part importante faite à la géographie de l'Indochine etc... Quelques heures de cours, distraites de la section générale, sont consa¬ crées depuis 1928 à l'enseignement ménager. Cet enseignement jouit d'une grande faveur auprès des élèves. Les écolières font un apprentissage mé¬ thodique de leurs fonctions domestiques : composition et préparation des repas, lavage et repassage, travaux de couture, ouvrages d'utilité et d'agré¬ ment. La photographie ci-dessus représente une séance d'enseignement ménager; le lavoir a été placé à l'intérieur à cause du soleil; la cuisine est installée dans une salle voisine avec un outillage perfectionné. Dotée pour ce qui est des bâtiments, du mobilier et des collections comme le sont peu d'écoles de la métropole, l'Ecole primaire supérieure des filles françaises de Saigon connaît un succès qui va sans cesse croissant. Bientôt ses locaux seront trop petits pour les besoins d'une clientèle qui s'élargit d'année en année. 3° Ecole primaire supérieure française des garçons L'enseignement primaire supérieur masculin n'a été créé que tout ré¬ cemment en Cochmchme, les familles disposant d'un grand établissement, le lycée Chasseloup-Laubat pour l'éducation de leurs garçons. L'Ecole primaire supérieure française des garçons a été ouverte le 1er octobre 1928, dans les bâtiments affectés précédemment au Trésor public, à l'extrémité supérieure de la rue Catmat, l'artère maîtresse de Saigon. Le manque de place n'a pas permis l'aménagement d'un internat; le régime de l'école est exclusivement l'externat, simple ou surveillé. L'Ecole primaire supérieure des garçons se constitue peu à peu par étapes annuelles. En mai 1930, elle comprenait deux classes primaires supérieures (la première et la deuxième années), un cours préparatoire et quatre classes — 39 — primaires élémentaires. A la rentrée de septembre 1930, la troisième année a été ouverte. Le fonctionnement de l'établissement est assuré par un directeur, sept professeurs et instituteurs, six chargés de cours et un sur¬ veillant d'études. L'effectif qui était de 167 élèves en mai 1930 atteint en septembre 1930 le nombre de 215, (61 pour le cycle primaire supé¬ rieur, 154 pour le cycle élémentaire). Au début de la deuxième année primaire supérieure, les élèves ont la faculté d'opter entre une section d'enseignement général et une section com¬ merciale. Celle-ci comporte divers enseign'ments spéciaux comme l'anglais pratique, la géographie commerciale et la comptabilité. Un atelier renferme l'outillage nécessaire aux premiers travaux manuels. Dans un pays comme la Cochmchme où le commerce et l'industrie sont en plein essor, les plus belles perspectives s offrent à l'Ecole primaire su¬ périeure des garçons qui poursuit des fins essentiellement utilitaires. Le développement de l'école est à l'heure actuelle limité par l'insuffisance des bâtiments. Aussi la construction d'une école neuve a-t-elle été décidée par l'Administration locale. Les premiers travaux de l'école définitive commenceront sous peu sur un vaste terrain bien placé sur le plateau. Dans quelques années l'Ecole primaire supérieure des garçons n'aura rien à envier pour ce qui est de l'installation à son aînée, l'Ecole primaire supérieure des filles françaises. LYCÉE CHASSELOUP-LAUBAT. — LA COUR D'HONNEUR ÉCOLE DES MÉCANICIENS ASIATIQUES. — COURS THÉORIQUES, — ÉLÈVES DE LA 2e ET DE LA 3e DIVISION A L'AMPHITHÉÂTRE ÉCOLE DES MÉCANICIENS ASIATIQUES. — ATELIER DE FORGE ET DE CHAUDRONNERIE (A GAUCHE, LE MARTEAU-PILON). ÉCOLE DES MÉCANICIENS ASIATIQUES . — ATELIER D'AJUSTAGE ET DE TOURNAGE. l'atelier d'apprentissage de bentre (installé provisoirement dans une maison commune désaffectée). l'atelier des moteurs a explosion. école des mécaniciens asiatiques. — Chapitre III LES ETABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT PROFESSIONNEL En dehors d'une Ecole des aveugles et d'une ferme-école qui ne relè¬ vent pas du Service de l'Instruction publique, l'enseignement professionnel est donné en Cochinchine par sept établissements : deux écoles industrielles, deux ateliers d'apprentissage et trois écoles d'art appliqué. Malgré le peu de goût des populations indigènes pour le travail manuel scolaire, ces établissements sont, en général, très prospères. Les écoles in¬ dustrielles contribuent activement à l'équipement économique de la colonie. Les écoles d'art obtiennent, de leur côté, des réalisations d'une tenue re¬ marquable. A) Les écoles industrielles Les deux écoles industrielles de la colonie se trouvent à Saigon ; elles sont respectivement dénommées l'Ecole des mécaniciens asiatiques et l'Ecole pratique d'industrie. 1 " Ecole des mécaniciens asiatiques. L'Ecole des mécaniciens asiatiques a été fondée en 1906 dans la ville basse, sur l'emplacement de la première gare de Saiigon, pour remédier à la pénurie de mécaniciens sur les bâtiments de la colonie. En un quart de siècle le cadre et l'importance de l'Ecole se sont singulièrement élargis. L'établissement comprend trois écoles juxtaposées : une école technique proprement dite, la plus importante de beaucoup, une section d'apprentis¬ sage et une section pour la conduite des voitures automobiles. — 42 — L'école technique forme des spécialistes pour la conduite des appareils à vapeur, des moteurs à explosion et à combustion et des appareils élec¬ triques. Professés dans un bel amphithéâtre parfaitement aménagé, les cours sont d'un niveau relativement élevé. Les démonstrations se font dans la salle des modèles, les applications pratiques dans la galerie des machines pour¬ vue d'appareils pouvant tourner à vide, en rivière à bord des chaloupes du Gouvernement de la Cochinchine, pour l'électricité à l'atelier spécial de l'Ecole puis à l'Usine électrique de la ville. La section d'apprentissage comporte l'apprentissage sans spécialisation des principaux métiers du fer : ajustage, tournage, forge, chaudronnerie. Les ateliers afférents à ces diverses spécialités sont conçus d'une façon très moderne pourvus/comme le montrent les photographies, de l'outillage le plus perfectionné. La section des apprentis-chauffeurs initie un certain nombre de jeunes gens à la conduite des voitures automobiles. Les apprentis-chauffeurs passent d'abord par l'atelier à métaux puis par le garage du Gouvernement situé dans l'écoie même : ils sont menés en six ou huit mois au certificat de capa¬ cité réglementaire. Quand ils sortent de l'école, ils ont non seulement la pratique du volant mais une bonne connaisance du fonctionnement et de l'entretien du moteur. La section des apprentis-chauffeurs est très acha¬ landée, la locomotion automobile ayant pris ces dernières années un déve¬ loppement considérable à la colonie (transports en commun, voitures de tourisme, voitures de charge). Le recrutement de l'Ecole des mécaniciens se fait au concours parmi les candidats de seize ans au moins, ayant le certificat d'études franco-indi¬ gènes ou.une instruction correspondante. Les apprentis et les élèves-chauf¬ feurs seuls ont une instruction générale inférieure. Le régime normal de l'Ecole est l'internat gratuit. Des élèves payants sont admis au tarif de vingt piastres par mois pour les internes et de sept piastres pour les exter¬ nes. L'école est fréquentée par un certain nombre d'élèves européens. Les élèves qui ont satisfait au concours de fin d'études se voient décerner un brevet d'études techniques du deuxième degré. Ils font obligatoirement une période d'application de trois années dans la Marine de l'Etat. Ils terminent généralement cette période avec les galons de quartier-maître et se présentent aux examens pour l'obtention du brevet de chef-mécani¬ cien ou d'électricien, qui leur ouvre des carrières bien rémunérées dans les entreprises de navigation ou dans l'industrie. L'Ecole des mécaniciens est dirigée par un ingénieur mécanicien en re¬ traite de la marine militaire, qui a également la haute main sur l'Ecole pratique d'industrie et qui est en outre chef du Service de la flottille et du — 43 — matériel mécanique de la Cochinchine. L'Ecole compte 6 professeurs tech¬ niques ou chefs d'atelier, détachés pour la plupart de la Marine, plusieurs chargés de cours, 15 contremaîtres ou moniteurs indigènes. En mai 1930 l'effectif de l'école était de 175 élèves, ainsi répartis: école technique 85 élèves, apprentis 44, élèves-chauffeurs 46. L'Ecole des mécaniciens asiatiques recrute un personnel enseignant de choix dans l'état-major maritime et industriel de la capitale. Chargée de l'entretien du matériel roulant, flottant et mécanique du Gouvernement lo¬ cal, elle a toutes facilités pour faire procéder, à bord et dans ses ateliers, à tous les exercices pratiques (visites, démontages et remontages d'orga¬ nes, réglages, nettoyages, graissages etc...). L'Ecole des mécaniciens de Saigon est donc tout particulièrement bien placée pour donner un ensei¬ gnement concret et efficace. Elle a joué et joue un rôle appréciable dans la mise en valeur de la Colonie. Ses élèves font prime sur la place où ils conquièrent, en général, de belles situations. 2° Ecole pratique d'industrie. Créée en 1891, sous la forme d'une simple annexe au collège d'Adran puis au collège Chasseloup-Laubat, l'Ecole pratique d'industrie s'est ins¬ tallée en 1900 sur l'emplacement qu'elle occupe actuellement, rue Chas¬ seloup-Laubat, entre la Chambre d'Agriculture et l'Etat-Major de la Place. L'Ecole pratique d'industrie forme pour tous les métiers du fer et du bois de bons ouvriers susceptibles de devenir par la suite des contremaîtres dans les petits ateliers locaux. Les élèves proprement dits se recrutent au concours : internes, ils re¬ çoivent pendant trois ans (l'année scolaire est de onze mois comme à l'Ecole des mécaniciens), en outre de la formation professionnelle, le matin et le soir, avant et après la journée d'atelier, des notions d'enseignement géné¬ ral (français, arithmétique et géométrie élémentaires, éléments de sciences, croquis coté et dessin industriel). A côté des élèves il y a des apprentis, à qui l'insuffisance de leur instruction première ne permet de donner qu'un enseignement théorique rudimentaire (français et croquis coté) ; les apprentis sont externes ; ils perçoivent une prime journalière variant suivant leur habi¬ leté .manuelle et leur application au travail (0 $> 20 à 0 $ 40). L'Ecole pratique d'industrie est aujourd'hui pourvue d'un outillage très complet. Elle possède en plus des salles de classe, un grand hall pour les — 44 — travaux d'ajustage, de tournage et de menuiserie avec de nombreuses ma¬ chines-outils, un atelier de forge qui va être incessamment doté d'un mar¬ teau-pilon, un atelier de chaudronnerie, un atelier de fonderie avec deux cu¬ bilots, un pont roulant, un four pour sécher les moules, une installation de soudure autogène etc... A la fin de la troisième année, les élèves qui ont satisfait à 1 examen de sortie, obtiennent un certificat d'études pratiques industrielles. Les ap¬ prentis reçoivent de leur! côté un certificat d'apprentissage, indiquant leur spécialité. Les élèves accomplissent à leur sortie un stage de trois ans comme ouvriers-militaires à la direction de l'artillerie de la Cochinchine. Après quoi ils se placent dans les ateliers de la ville; l'école favorise et contrôle leur placement. En 1930, l'Ecole pratique d'industrie comptait 75 élèves, dont 46 élè¬ ves proprement dits et 29 apprentis. Les diverses spécialités étaient ainsi représentées; ajusteurs 29 élèves ou apprentis, tourneurs 4, chaudronniers 11, forgerons 9, fondeurs et modeleurs 9, menuisiers 13. L'Ecole pratique d'industrie a longtemps souffert de la répugnance des indigènes pour les métiers manuels. Patiemment elle a amélioré et étendu son recrutement. L'Ecole est aujourd'hui au niveau d'une bonne école pro¬ fessionnelle. 3° Les ateliers provinciaux d'apprentissage. On doit signaler une tentative intéressante qui a été faite récemment en Cochinchine pour décentraliser l'enseignement professionnel et pour fa¬ voriser l'orientation des enfants vers les métiers manuels. En septembre 1928, un atelier a été annexé au groupe scolaire du chef- lieu de la province de Ben-Tré. Y sont admis les enfants des écoles pu¬ bliques ayant plus de 14 ans et titulaires du certificat d études élémentaires indigènes. Les écoliers ayant revêtu la cotte bleue font, pendant deux ans, dans cet atelier l'apprentissage des métiers de chaudronnier, tourneur, ajusteur, électricien. Un atelier similaire a été ouvert à Can-Tho, en février 1930. Les deux ateliers d'apprentissage de Cochinchine comptent une quaran¬ taine d'élèves. Tout sera mis en oeuvre pour assurer la multiplication et le développement de ces ateliers qui doivent constituer un excellent débouché pour les jeunes gens que leur âge ou leur défaut d'aptitude écarte des éco¬ les. Les ateliers d'apprentissage sont destinés à fournir des recrues bien préparées aux écoles professionnelles de Saigon et surtout des ouvriers qua- — 45 - hfiés aux entreprises industrielles qui vont se multipliant en Cochinchine, (transports mécaniques, rizeries, décortiqueries, usines électriques etc ) Ils serviront peut-être d'amorce à la formation méthodique de l'artisanat qualifié, indispensable à la mise en valeur rationnelle du pays. B) Les écoles d'art appliqué Les écoles d'art sont situées dans l'est de la Cochinchine, au chef-lieu des trois provinces de Gia-Dmh (aux portes mêmes de Saigon), de Biên- Lloa (30 kilomètres au N. E. de Saigon) et de Thu-Dau-Mot (30 kilo¬ mètres au N. de Saigon). L'Ecole de Gia-Dinh est en quelque sorte la maison-mère des deux autres écoles. Elle accueille tous les jeunes gens qui se destnrnt aux écoles d'art. Pendant une piemière année ces jeunes gens reçoivent en commun un complément d'instruction et une initiation professionnelle (dessin, techno¬ logie, exercices manuels). A l'expiration de cette année de préparation générale, les aptitudes se manifestent, les vocations apparaissent. Les élèves se spécialisent alors suivant leur goût et leurs dons : les uns restent à Gia- Dinh, les autres se rendent à Biên-Hoa et à Thu-Dau-Mot pour apprendre la technique complète de l'art pour lequel ils ont opté. Dans les trois écoles la durée normale des études est de six ans. L'ap¬ prentissage proprement dit dure trois ans. Après quoi la plupart des élèves font encore trois ans dans les ateliers de perfectionnement annexés à cha¬ cune des écoles. Au cours de ces trois dernières années, durant lesquelles ils perçoivent un salaire, ils parachèvent leur formation technique. Le stage à l'atelier de perfectionnement est couronné par la production d'un chef- d'œuvre valant un diplôme de maître-ouvrier. Sortis de l'Ecole, les élèves s'embauchent dans les maisons de la place ou s installent à leur compte. Les trois écoles sont placées sous le contrôle artistique d'un inspecteur des écoles d'art appliqué qui maintient entre elles l'unité de vues et la communauté de doctrines. Les écoles sont ainsi en liaison constante les unes avec les autres. Elles travaillent fréquemment en collaboration. Gia- Dinh fournit les plans d'ensemble dont Biên-Hoa et Thu-Dau-Mot se par¬ tagent ensuite l'exécution; Biên-Hoa fabrique les ferrures des meubles de Thu-Dau-Mot, Thu-Dau-Mot des supports pour les vases de Biên-Hoa etc... Les écoles d'art ne cherchent pas à transplanter en Indochine les formu¬ les d'art en honneur dans la métropole. Leur idéal est, au contraire, de renouer les traditions locales interrompues. Ressusciter ou susciter un art _ 46 - vivant, un art qui emprunte à l'Occident son outillage et certains de ses procédés techniques mais qui plonge ses racines dans le pays même, qui puise ses inspirations, ses thèmes, ses formes dans les oeuvres des vieux maîtres chinois et dans les œuvres du terroir, tel est le but que se proposent les trois écoles de Cochinchine. Leur action s'est déjà fait très heureuse¬ ment sentir; les écoles de Gia-Dinh, de Biên-Hoa et de Thu-Dau-Mot ont amené une rénovation des arts industriels locaux dont tout le monde avait pu remarquer ces derniers temps l'abâtardissement et le dépérissement. 1 ° Ecole de Gia-Dinh. L'Ecole de Gia-Dinh enseigne le dessin et la gravure. Elle obtient d'excellents résultats en raison de la grande faculté d'assimilation des An¬ namites et de leurs aptitudes très marquées pour toutes les graphies artisti¬ ques. Les élèves suivent des cours d'enseignement général et d'éducation physique ; ils pratiquent surtout le dessin sous toutes ses formes : dessin d'après nature en tous sujets, composition décorative, croquis en plein air, portraits etc L'école comprend 73 élèves; 29 pour la première année (commune aux trois écoles), 25 pour la section des décorateurs, 8 pour la section des gra¬ veurs, 1 1 pour la section des lithographes. Elle est dirigée par l'Inspecteur des Ecoles d'art appliqué de Cochinchine, assisté d'un professeur indi gène de dessin, formé dans la métropole, et de quatre contremaîtres indi¬ gènes, issus de l'Ecole même. Les professeurs et les élèves de l'Ecole de Gia-Dinh ont envoyé à l'Ex¬ position coloniale des maquettes de dioramas représentant les aspects prin¬ cipaux de la vie cochinchinoise, des panneaux décoratifs à animaux sym¬ boliques, des recueils d'estampes reproduisant des fleurs et des animaux vus par les artistes chinois, des études diverses. Chacun de ces envois té¬ moigne du degré de maîtrise auquel est arrivée la technique de l'école. 2° Ecole de Biên-Hoa. L'école de Biên-Hoa peut se réclamer d'une ancienne tradition en ce qui concerne la céramique, en grande faveur dans la province, et même en ce qui concerne la fonderie d'art, qui comptait autrefois de nombreux artisans en Cochinchine (fabrication de gongs et de cloches). Des procédés grossiers et une fabrication intensive, uniquement orientée vers la vente cou- - 47 rante, ne donnaient plus toutefois, il y a quelques années, que des pro¬ duits sans valeur artistique. L'école de Biên-Hoa a remonté le courant; elle a insufflé aux arts locaux une vigueur nouvelle. Placée sous la direction de deux spécialistes français dont un a été formé à la manufacture de Sèvres et qu'assistent plusieurs contremaîtres et moni¬ teurs indigènes, 1 école compte 74 élèves répartis en deux sections : une section du bronze (39 élèves), une section de la céramique (35 élèves). Les élèves sont presque tous de jeunes paysans. Très adroits de leurs doigts, ils commencent par reproduire dans la glaise de petits animaux puis, tout en complétant leur instruction générale, ils apprennent à dessiner, à modeler, à composer des motifs décoratifs ; ils se lancent enfin dans la repro¬ duction des œuvres classiques les plus compliquées et les plus délicates. La section de poterie utilise des terres recueillies dans la région et qu> sont nettoyées, lavées et dosées dans les ateliers de 1 école. Les émaux et les colorants sont de provenance chinoise. L'école possède deux fours pour la cuisson. Elle fabrique toutes sortes de vases, des grès flammés, gravés et craquelés, des revêtements émaillés ; elle copie les pièces du Musée et des collections particulières de Saigon ; elle utilise les documents publiés dans les grands recueils consacrés à l'art chinois. On peut se rendre compte d'après les échantillons figurant à l'Exposition que les vases de Buên-Hoa sont aussi beaux de lignes que de matière. La section du bronze emploie à peu près exclusivement le procédé de la fonte à cire perdue. De modèles variés et souvent renouvelés, les objets en bronze fabriqués à l'école (statuettes de divinités extrême-orientales, brule- parfums, animaux naturels et légendaires, cachets, presse-papier, appliques etc ) ne laissent rien à désirer, eux non plus, pour le style et 1 exécution. L'école ne produit pas assez pour satisfaire une clientèle toujours plus éten¬ due. Outre une quantité d'ouvrages ornant les pavillons de la Cochmchme et de l'Instruction publique, l'école de Biên-Hoa a envoyé à l'Exposition une grande fonlanne en bronze, pièce monumentale d'une très belle venue. 3° Ecole de Thu-Dau-Mot. Sur la rivière de Saigon la province de Thu-Dau-Mot est une région forestière particulièrement riche en essences précieuses. De tout temps la contrée a fourni des ébénistes et des charpentiers. Aussi la ville de Thu- Dau-Mot était-elle toute désignée pour devenir le siège d une école d ébenis- - 48 - terie. Fondée en 1901, l'école de Thu-Dau-Mot est la plus ancienne des trois écoles d'art de Cochinchine. L'école de Thu-Dau-Mot dispose d'un important outillage mécanique; elle compte 68 élèves originaires de la contrée, à l'exception de quelques boursiers des autres provinces. Dirigée par un professeur français qu'as¬ sistent deux maîtres de dessin et cinq contremaîtres) indigènes, 1 Ecole de Thu-Dau-Mot fait la synthèse de tous les arts du meuble. Elle com¬ prend quatre sections correspondant chacune à une branche spéciale : ébénis- terie proprement dite, sculpture sur bois, incrustation et marqueterie, la¬ quage. En dehors de petits objets usuels ou décoratifs (plateaux, tablettes voti¬ ves etc...), l'école de Thu-Dau-Mot fabrique des meubles inspirés des pièces exposées au Palais et au Musée de Hué ainsi que des belles pièces chinoises, des lits de camp, des bahuts, des coffres, des fauteuils et des tabourets, des tables d'offrandes, des autels etc... Les ensembles mobiliers fabriqués par l'école ne peuvent manquer d'emporter le sufFrage des con¬ naisseurs : ils frappent par l'appropriation des formes, la sobriété des lignes, la perfection des assemblages, le fini scrupuleux de l'exécution. Lin grand nombre d'anciens élèves de l'école? de Thu-Dau-Mot sont aujourd'hui placés dans la région, où ils ont beaucoup relevé le niveau de la production indigène. Les envois faits par l'école de Thu-Dau-Mot dans de nombreux salons et expositions ont toujours rencontré une très grande faveur auprès du public, aussi bien métropolitain qu'indochinois. Les pièces envoyées à Vincennes affermiront encore la réputation de la très originale école d'ébénisterie de Cochinchine, Il faut en terminant noter que déjà un artisanat indigène, composé sur¬ tout de petits patrons, a essaimé autour de l'école avec laquelle tous restent en relations tant pour le recrutement de leurs ouvriers que pour les conseils ou travaux techniques. Chapitre IV L'ENSEIGNEMENT PRIVE Les institutions privées occupent en Cochinchine une place qui est loin d'être négligeable. Elles reçoivent 28.636 élèves qui, ajoutés aux 141.639 élèves de l'enseignement public, portent la population scolaire globale de la Cochinchine au chiffre impressionnant de 170.375 enfants. Les institutions privées présentent des caractères variés qui dépendent à la fois du but qu'elles poursuivent et des différences d'origine de leur clien¬ tèle. Les unes, la minorité, sont des entreprises surtout commerciales; les autres font partie d'un ensemble de moyens utilisés par certains groupe¬ ments ethniques ou religieux pour maintenir les croyances et les traditions qui font l'originalité du groupe. Elles sont toutes soumises à une même régle¬ mentation générale dont les principes ont été posés par le décret du 14 mai 1924 et dont la mise en application complète vient d'être achevée. Les institutions privées de Cochinchine peuvent ainsi être rangées sous quatre grandes rubriques : les écoles françaises, les écoles franco-indigènes laïques, les écoles franco-indigènes confessionnelles, les écoles chinoises. A) Les écoles françaises Il existe à Saigon deux petites écoles laïques qui donnent l'enseignement français élémentaire et une école de sténo-dactylographie (en tout 150 élèves). L'enseignement français est donné également par trois écoles congréga- mstes qui groupent un peu plus de 650 élèves, fils de fonctionnaires, de colons et de Français de l'Inde, Annamites naturalisés, enfants métis, jeunes Annamites de bonne famille. Les plus importantes de ces écoles sont à Saigon : l'Institution Taberd, qui possède à côté de ses classes franco- indigènes dont il sera parlé plus bas, une section française bien achalandée (400 élèves dont 60 internes) et, pour les fillettes, le pensionnat de la Sainte- Enfance, tenu par les Soeurs de Saint-Paul de Chartres. sert d'intermédiaire auprès des pouvoirs publics et qui est responsable de l'application des règlements sur l'immigration). Les écoles de congrégations sont le plus souvent aménagées de manière confortable; les enfants sont reçus gratuitement. L'enseignement se rappro¬ che de celui de nos écoles élémentaires ; une large place est faite à 1 éduca¬ tion physique. Les écoles chinoises se bornent d'ordinaire à enseigner à leurs élèves les caractères les plus courants et quelques notions de calcul, de sciences, de géographie. Poursuivant des fins essentiellement pratiques, elles prépa¬ rent surtout leurs élèves aux occupations commerciales chères aux Chinois. Aucune des écoles chinoises ne prépare aux examens français ni aux examens franco-indigènes. La discipline et la marche des études sont un peu décon¬ certantes pour un esprit formé à l'européenne. Les élèves sont plus laissés à eux-mêmes que dans nos écoles ; les classes ne sont pas faites avec une grande régularité et ont lieu parfois à des heures inattendues, le soir après le dîner, par exemple. Une place à part, parmi les écoles chinoises, doit être faite au lycée franco-chinois de Cho-Lon, établissement mixte, comme son nom l'indi¬ que, et non pas purement chinois. En 1908 quelques riches commerçants chinois de Cho-Lon eurent l'idée de fonder à l'usage des jeunes Chinois de la Colonie un établissement orga¬ nisé à la française. Cette initiative fut chaleureusement accueillie par le Gouverneur général Paul Beau qui en comprit tout de suite l'intérêt pour la France et pour les Chinois eux-mêmes. Avec les fonds provenant d'une souscription publique et d'une subvention du Gouvernement général, un bel établissement fut édifié à Cho-Quan (tout à côté de l'actuel lycée Pétrus-Ky) sur un terrain offert par un grand négociant Chinois, naturalisé français, M. Tjia-Mah- Yan, un des plus actifs protagonistes de l'entreprise. Le lycée ouvrit ses portes le 101 mars 191 3. Il a connu depuis cette date, et spécialement depuis la fin de la guerre, un succès sans cesse croissant. Le lycée franco-chinois de Cho-Quan fournit aux jeunes Chinois les moyens de s'instruire dans le pays même où leurs parents sont fixés. Il comprend un cours élémentaire, quatre années d'études et une année facul¬ tative de perfectionnement. Les cours sont faits pour une part par des professeurs chinois diplômés des écoles chinoises (les poètes et les philoso¬ phes chinois, l'histoire et la géographie de la Chine) et pour l'autre part par des professeurs français attachés à l'établissement ou appartenant aux Collèges officiels. Les élèves apprennent également l'anglais, la comptabilité et la correspondance commerciale. A la fin de la quatrième année ils subis- ENTRÉE PRINCIPALE CORPS DE BATIMENT PRINCIPAL mSn LE SECOND CORPS DE BATIMENT LE LYCEE FRANCO-CHINOIS DE CHOLON — 53 sent un examen de fin d'éudes en chinois et en français. Les élèves reçus à cet examen reçoivent un diplôme qui est très apprécié par les maisons de commerce de Saigon et de Cholon. Soumis au contrôle commun à toutes les écoles privées, le lycée franco- chinois est dirigé par un directeur français et par un Conseil d'administration composé, sous la présidence de l'Administrateur français maire de Cho-Lon, de personnalités françaises et chinoises. Le budget est alimenté par les droits d'écolage, par une subvention annuelle du Gouvernement général et par une contribution volontaire des commerçants chinois de Cochmchine, qui est de l'ordre de 40.000 piastres par an. L'établissement compte 220 élèves, presque tous internes. Institution originale, vivante et féconde, le lycée franco-chinois permet aux jeunes Chinois de Cochmchine de poursuivre dans un milieu français les études qu'ils allaient autrefois entreprendre à Hong-Kong ou à Shanghai. Les résultats acquis sont des plus satisfaisants. Les anciens élèves sont déjà nombreux en Cochmchine ; quelques-uns, passés par l'Université de Hanoi, sont professeurs au Lycée même ou dans d'autres écoles chinoises; d'autres ont pris la direction des affaires de leur père ou se sont établis à leur compte ; plus de cent anciens élèves enfin sont placés comme compradores, interprètes et caissiers dans les banques et les maisons du commerce local. TABLE DES MATIÈRES Pages Avant-propos _ 5 chapitre i. — L'enseignement primaire public en Cochinchine : I. — L'enseignement franco-indigène du 1er degré 7 A) L'enseignement populaire indigène 8 a) L'enseignement élémentaire indigène 9 h) Les cours auxiliaires préparatoires 12 c) Les formations scolaires pour les populations allogènes 13 10 Ecoles cambodgiennes 13 2° Ecoles moi 15 3° Ecoles malaises 16 B) L'enseignement primaire franco-indigène 16 II. — L'enseignement primaire français 20 chapitre II. — Les établissements d'enseignement du 2e degré : A) L'enseignement franco-indigène 23 1 0 Le Lycée Pétrus-Ky 23 2° Le Collège de Mytho 28 3° Le Collège de Cantho 28 4° Le Collège de Jeunes filles de Saigon 29 5° L'Ecole Normale d'instituteurs de Saigon 31 B) L'enseignement français 33 1 0 Le Lycée Chasseloup-Lawbat 33 2° L'école primaire supérieure de filles de Saigon 36 3° L'école primaire supérieure de garçons de Saigon 38 - 56 - Pages Chapitre iii. — Les établissements d'enseignement professionnel : A) Les écoles industrielles 41 10 L'école des mécaniciens 41 2° L'école pratique d'industrie 43 3° Les ateliers d'apprentissage 44 B) Les Ecoles d'Art Appliqué 45 10 L'école de Gsiadinh 46 2° L'école de Bienhoa 46 3° L'école de Thudaumot 47 chapitre iv. — L'enseignement privé : r'- ' A) Les écoles françaises 49 B) Les écoles franco-indigènes laïques 50 ■ C) LèS écoles franco-indigènes confessionnelles 50 EJ) Les écoles chinoises 51 * • \ m • • v " • • * «O - * . . * • i x . \ X f • - + -V. ' \ x X *■ •t> . •• < •; *~*i -< r+ • • • • •*A.* «■+ •© • ,*x t A J * * - ^ v \ •• -, •# • ® • • • Ei+ L • à i o • ' ui*V Ly 4 ' /o*%. L L L*l>* _ + * * y * ^ \ . L J» 1 _ >lt V» ' • * »+ • •. fck :y %/ * • • •-• • v. * /* • - #* \ w — ■* m * w « rfD • • ^ * • • • --- ' • • • • / / LEGENDE ® Ecole de plein exercice • Ecole élémentaire . Ecole préparatoire + Zco/eprivée (Confessionnelle ou non) l Eco/e chinoise m Eco Je moi' _ Limite de la zone alluviale et de la zone montagneuse Fcheiie I: i.25o. ooo Haliogravé par le Service. Géographique de L'Indochine 3r. ^ : 4r> 08- *-' ' ■§ . m i - ' \r. ' 'w, -*" fjr)' ' - \ - ; ^ ^1 v ■'• ■ fM^î' ' JM ">-i- r •. ■.■ " ( *>»-*5£. zsmm s ASE 3368