,.v. • V-. «■ S^--, UNIVERSITÉ DE NICE Institut d'Etudes et de Recherches Interethniques et Interculturelles RECHERCHES, ENSEIGNEMENTS ET FORMATION UNIVERSITAIRES RELATIFS AUX RELATIONS INTERCULTURELLES Bl»ll01hE«UE »E t UNIVEHSIte SECTION LETTRES 100, H»rrk>t 002 00 • NICE Michel ORIOL Juillet 1986 caArV 099 0000188 C.TMOé IDERIC 33, bd de la Madeleine - 06000 Nice - Téléphone : (93) 44.82.44 I— ,*3 INTRODUCTION : Une situation paradoxale : l'Université en face de demandes légitimes, mais inopportunes. Les conclusions de l'enquête sommaire que nous avons conduite à la de¬ mande de Paul VIEILLE peuvent se résinier en trois propositions -que nous dé¬ velopperons ensuite successivement- que l'on peut organiser en un "syllogisme de l'irrationnel", où la conclusion contredit les prémisses. - a) Les demandes d'enquête, d'intervention, de formation relatives aux relations interculturel les se multiplient, surtout au niveau des collectivités et des organisations locales, d'une part, à celui des organismes internatio¬ naux -dans le cadre du système des Nations Unies ou de la Communauté Européen¬ ne-, d'autre part. - b) Ce processus correspond pleinement, pour les spécialistes engagés dans ce champ comme pour leurs interlocuteurs à la redéfinition en cours des activités universitaires, destinées, selon un très large consensus, à corres¬ pondre plus adéquatement à des besoins sociaux actuels et bien définis. - c) Le nombre de lieux officiellement et fonctionnellement institués pour traiter de ces questions est extrêmement réduit. Les instances compétentes -les commissions de spécialité notamment- opposent des obstacles sans doute croissants depuis quelques années à la création de diplômes (D.E.A., D.E.S.S.) correspondants, de même qu'elles sont peu portées à valoriser les compétences acquises par les enseignants chercheurs et/ou formateurs dans ce domaine. Une irrationnaiité aussi patente constitue un thème très positivement provocateur pour s'interroger sur les ambiguités, les incertitudes et les ratés de la "modernisation". Mais si nous ne voulons pas trop déborder des limites de notre sujet, nous ne soulèverons que les questions les plus propi¬ ces aux débats et décisions institutionnels. lOO. Bal H®rriot /* W>| / 00200 - Nies t/ 1 HnUO - 2 - - a) L'une des raisons de cette incohérence ne vient-elle pas de la dif¬ ficulté de faire entrer dans la notion du service public qu'assure, corroie le Ministère vient de le rappeler très opportunément, l'Université,un rôle de remise en question du rapport entre d'un côté la définition officielle des appartenances et des espaces publics et de l'autre leurs transformations con¬ crètes ? (1) - b) Les corporatismes disciplinaires, qui n'ont guère été affaiblis par Tes tentatives d'organisation "transversale" de la recherche et de l'enseigne¬ ment, ne sont-ils pas pour beaucoup dans l'interdiction de légitimer académi- quement un champ, qui ne peut être adéquatement exploré que par la mise en oeuvre de coopérations entre Tes diverses sciences humaines et sociales ? - c) Si l'Université est incapable de surmonter ces obstacles pour ins¬ tituer un dispositif adéquat, "1'interculturel" pourra-t-il éviter la banali¬ sation marchande, qui en fera un produit "gadget", un catalogue sélectif de recettes de coiroiunication et de gestion, qui exploite les préjugés dont il est plus facile et plus rentable de proposer l'illustration aliénante que 1'analyse critique ? I- Reconnaître que la demande sociale dans le domaine intercul¬ turel relève du service public universitaire. a) Les réponses à notre enquête manifestent tant de convergence sur la nature et le développement de la demande qu'elle n'ont guère besoin d'être confortées par des études plus représentatives ou plus minutieuses. Une bonne partie des demandes relativement nouvel les.portant sur des études concernant des problèmes de cohabitation, ou l'adéquation d'équipements éventuels par rapport à des populations diverses qu'ils mettraient en contact plus étroit, découle de la politique de décentralisation. (1) V. Rapport P. VIEILLE, § 9. - 3 - Qu'il s'agisse d'aménagement urbain -pas seulement dans les grandes aires métropolitaines-, de centres sociaux, de lieux de formation et d'éducation (1), on est frappé par la positivité de ces demandes venant de responsables poli¬ tiques de tous bords (si ce n'est, bien entendu, l'extrême-droite). Tout se passe comme: si notamment l'analyse par les élus de ces dossiers dont le trai¬ tement engage très concrètement le sort de la vie quotidienne à court et moyen terme de leurs mandants dissipait très vite les représentations caricaturales et les excès rhétoriques des périodes électorales. On peut juger, de ce point de vue, réconfortant le fait que beaucoup de ces responsables locaux politi¬ ques et administratifs, se tournent alors vers tel ou tel département univer¬ sitaire,. dont, sans doute, ils attendent non seulement une compétence bien formée, mais encore un recours sérieux au sens de l'objectivité scientifique. Mais ces demandes sont-elles pour autant traitables par l'Université ? n faut pour cela qu'elle puisse y reconnaître, sinon un objet, du moins un domaine défini, et qu'elle ait constitué, à son propos, un ensemble de compé¬ tences relativement assurées. b) Il est remarquable que des questions aussi diverses, voire disparates, que celles que nous venons d'évoquer sont à peu près unaniment classées par nos interlocuteurs sous la même rubrique. Ils écartent le mot "minorité", précisément parce qu'il élimine à priori du champ d'étude les attitudes des groupes dominants, le terme "ethnie", parce qu'il est à la fois trop réduc¬ teur (on peut traiter de rapports de classe sous l'angle interculturel ) (C. CLANET), et trop globalisant (une même appartenance ethnique peut être compatible avec des affiliations culturelles distinctes). Enfin la notion de "groupes d'origine étrangère" semble perdre de sa per¬ tinence pour beaucoup de populations concernées, à mesure que l'on s'éloigne de la crête de la dernière grande vague migratoire. Selon la formulation de Maryse TRIPIER, "ces appellations correspondent à un déplacement de l'objet (1) Le rapport BERQUE met bien en évidence l'incapacité des organismes compétents au niveau du 1er et du 2nd degré de traiter de telles demandes, ne serait-ce qu'en raison des difficultés qu'ils ont à accomplir leurs missions premières. 'immigration' vers un nouvel objet 'société pluri-culturelle'". La reconstruction, en termes positifs, de la notion de "relations inter¬ culturelles" par delà ce processus d'élimination de thématiques inadéquates rejoint, du point de vue épistémologique, l'esprit même du rapport de Paul VIEILLE. Rappelons simplement, en termes somnaires, et, donc, un peu réducteurs, les propositions qui fondent les relations interculturelles conme champ spécifique d'investigation : b a) Il ne s'agit pas de mettre en relation les savoirs que l'on a constitués sur différentes cultures, mais de poser les systèmes d'interaction comme constitutifs des appartenances culturelles et de leur évolution (1) ; b b) Il ne s'agit pas de fonder sur une démarche à prétention scien¬ tifique les normes au nom desquelles on attribuerait ou refuserait une affi¬ liation , mais de construire les théories rendant compte des conditions de production des appartenances sociales et culturelles; » b c) Ces théories ne peuvent a priori ni privilégier l'influence qu'exercent les définitions officielles des identités (en premier lieu, sous cet angle, des identités nationales), ni partir d'un postulat selon lequel toute institutionnalisation des appartenances serait a priori aliénante. La théorie des relations interculturelles introduit le recul du doute métho¬ dique là où règne, même trop souvent chez les politologues, la propension à justifier l'opinion passionnelle. c) Même une fois reconnue la légitimité (ou la légitimation possible) de ce champ d'études scientifiques, les questions auxquelles il donne à ré¬ pondre sont loin d'être pour autant résolues. i En effet les lieux où la mise en relation de la recherche fondamentale et des études appliquées, de l'enseignement et de la formation permette les approfondissements théoriques, la multiplication des experts, la production (1) Le dernier colloque de l'Association Française d'Anthropologie (AFA, Paris, janvier 1986) consacré à "La France, société pluriculturelle" a rendu manifeste un très fort consensus sur le rejet de ce que, de façon convergente Françoise LHERITIER en introduction (d'un point de vue plus ethnologique), et Jean-Pierre VERNANT en conclusion (dans une perspective historique) ont appel "1 "essentialisme". - 5 - et la circulation des travaux pertinents sont, dans l'Université, beaucoup trop rares et faiblement institués. Ainsi, même lorsqu'un petit noyau de spécialistes se constitue, il est commun qu'il soit trop isolé ou trop peu nombreux pour être à la mesure des demandes locale et régionale (contribu¬ tion de Dolores de BORTOLI, Université de Pau). Il est d'ailleurs à craindre que tous n'aient pas les mêmes scrupules, et qu'une bonne partie de ces de¬ mandes soit traitée selon des modèles et des méthodes transposés à partir de compétences constituées dans d'autres champs, en ignorant dangereusement la spécificité des situations et des populations (1). La récente constitution sur le plan international, de l'Association pour la Recherche Interculturelle (Prof. Robert DASEN, Fribourg) témoigne d'une volonté de sortir de cette situation difficile en organisant un réseau d'échanges interdisciplinaires (surtout, dans l'état actuel de l'A.R.I.C., entre psychologues, anthropologues, sociologues, spécialistes des sciences de l'éducation). Dans le même sens, plusieurs colloques récents ont essayé de "secouer la poussière" (G. VERBUNT, ex Paris XII) : Paris XII, 1983; Toulouse 1985. On peut aussi mentionner que nombre de spécialistes demeurent en liaison sur ces thèmes du fait de leur comnune appartenance au GRECO XIII (Migrations Internationales). Mais l'ensemble de ces formules ne représente, à la mesure des besoins de conmunication, d'intervention, de publication, que des palliatifs. Les initiatives des organisations européennes (notamment les débats initiés dans le domaine de l'éducation par le Conseil de l'Europe) n'assurent à ces tra¬ vaux ni la continuité, ni la densité voulues. (l)~Çette-remarque vaut pour un certain nombre de directions de thèses. Beaucoup d'étudiants originaires des pays d'émigration ou issus des commu¬ nautés immigrées font accepter, dans beaucoup de disciplines et dans des uni¬ versités très diverses, des sujets relatifs aux relations interculturelles. La minceur de la production scientifique actuelle laisse à penser qu'ils ne trouvent pas pour autant le cadre épistémologique d'une formation adéquate. - 6 - Force est de constater que si carence il y a, c'est du fait d'une ab¬ sence de reconnaissance de priorité, voire de légitimité au niveau de la dé¬ finition nationale de la politique universitaire. II - Résistance à l'innovation et corporatisme disciplinaire Les remarques précédentes suffisent à montrer que toute tentative pour construire un répertoire des centres spécialisés et un inventaire tant soit peut exhaustif des travaux et activités en cours dans l'Université serait à la fois très onéreuse et assez vaine. On présentera simplement, à ce propos, une typologie définie à grands traits. a) On ne compte pratiquement pas d'institutions universitaires qui au¬ raient été fondamentalement et initialement constituées pour enseigner ou développer la recherche en matière interculturelle. Du point de vue de l'en¬ seignement, on peut citer le D.E.S.S. "Psychologie interculturelle et prati¬ ques éducatives", qui fonctionne sous la direction de Claude CLANET et d'Odile REVEYRAND à l'Université de Toulouse le Mirai! ; du point de vue de la recherche, l'Institut d'Etudes et de Recherches Interethniques et Inter¬ culturelles continue,depuis 1966 à rassembler des enseignants chercheurs et des chercheurs du C.N.R.S. dans une perspective fortement marquée par l'inter¬ disciplinarité (R. NICOLAI, Linguiste , Directeur) (Université de Nice). b) Beaucoup de formations universitaires comportent, dans leurs ensei¬ gnements (en particulier au niveau du D.E.A. ou de la Maîtrise) des cours trai¬ tant de questions interculturelles (c'est le cas pour Michel ORIOL dans le cadre du D.E.A. d'Anthropologie de l'Université de NICE, pour Maryse TRIPIER (Sociologue) et Benjamin STORA (Historien) à Paris VII, pour le Prof. Pitt RIVERS à Paris X. On relèvera dans deux universités un effort particulier pour assurer une certaine cumulativité dans les enseignements des deux premiers cycles. - 7 - C'est le cas de l'Université de Rennes où les enseignements animés par le Professeur Pierre SIMON préparent dès le premier cycle à l'étude des minorités; et de Paris VIII, où, sous l'impulsion de Geneviève VERMES, une formation en psychologie anthropologique s'articule, jusqu'au niveau de la licence, avec un souci de pré-professionnalisation. c) Enfin, dans un certain nombre de cas, ce sont les programmes de for¬ mation qui sont plutôt à la base du regroupement des spécialistes et des ac¬ tivités. On mentionnera à ce titre (sans pour autant négliger l'importance des recherches qui s'y déroulent) le C.E.M.R.I.C. (Centre d'Etudes des Migra¬ tions et des Relations Interculturelles) qui associe l'Institut de Démogra¬ phie (Prof. REGNIER) et le Département de Formation Continue (M. MICHEL) de l'Université de Strasbourg II et 1'A.R.I.E.S.E. ( Université de Lyon II, Bron) qui bénéficie de l'apport heuristique de la sociologie développée par Isaac JOSEPH dans la ligne de l'interactionnisme (Université de Lyon Bron). Dans l'état actuel des choses-, ces lieux sont mal connectés et ces spé¬ cialistes mal reliés -nombre d'entre eux n'ont appris mutuellement leur exis¬ tence qu'à l'occasion de leur participation à cette enquête. Un exemple par¬ ticulièrement frappant est fourni par Vethnopsychiâtrie, où les enseignements, les expériences, les pratiques les plus diverses -mais toutes plus ou moins centrées désormais sur l'ensemble des questions que pose à notre système de santé mentale la diversité croissante des appartenances culturelles de ses patients- se développent sans lieu de coordination ni d'échange. Il y a ain¬ si des enseignements dans ce domaine à l'E.P.H.E. (Tobie NATHAN),à la Faculté de Médecine de Lyon (Prof. LAPLANTINE), dans le cadre de divers D.E.A., D.E.S.S ou Maîtrises (Toulouse, Paris VIII), dans des C.E.F.I.S.E.M. (Prof. BERTHELIER à Lyon), des recherches (C.R.E.D.A., Paris I, Prof. RAVEAU, Institut d'Etudes Nord-Africaines, Prof. REVAULT d'ALLONNES), des lieux d'interrogation clinique - 8 - (Service de l'Abbaye, Hôpital Pasteur, Docteur TANNENBAUM, Nice)... Plus préoccupant encore est le fait que des lieux d'enseignement n'ont pu bénéficier de la reconduction d'une habilitation (Prof. CAMILLERI, Paris V), que des lieux de formation n'ont pu l'obtenir (Paris XIII, notamment, avec plusieurs projets successifs et différents). Ces carences et ces échecs sont trop répétés, trop patents -répétons-!e- en regard de la "demande sociale", pour n'être imputables qu'à la qualité in¬ suffisante des dossiers présentés. Sans doute leur faut-il surmonter deux obs¬ tacles contradictoires : ne pas accorder un privilège excessif à la "formation pratique" dans un domaine où la réflexion critique est essentielle pour échap¬ per à ce que Moscovici appelle "1'ëpistémologie du sens commun"; veiller à ce que les enseignements et les formations comportent des débouchés ou un usage professionnels. Mais ce double écueil, ces périls symétriques du défaut et de l'excès de pragmatisme ne sont pas, nous semble-t-il, plus accentués en ce domaine que dans tous ceux qui ont donné lieu à des formations supérieures de Tordre du D.E.A. ou du D.E.S.S. en Sciences Sociales. S'il est vrai que Ton ne peut guère se vouloir un "professionnel de l'interculturel" (1), il n' est guère de champ, de la gestion économique, juridique ou sociale, qui n'ait à faire l'objet d'une reprise critique à partir d'une réflexion bien conduite sur l'évolution des relations interculturelles. C'est là, nous y reviendrons, un rôle privilégié que peut jouer l'Université en contribuant à la formation initiale de tous ces spécialistes dont Paul VIEILLE a proposé une ënumération sans doute incomplète, mais très démonstrative (p. 3,4). Elle peut aussi con¬ tribuer à l'excellence de lieux de formation, publics ou privés, en les liant aux activités de recherche et de questionnement. (1) Des" domaines qui disposent aujourd'hui d'une légitimité évidente dans l'opinion académique ne sont pas autrement situés. Les U.F.R. de "Scien¬ ces de la Communication" ne forment pas des "conmunicationnistes". - 9 - Aussi croyons-nous pouvoir avancer que l'obstacle principal est ailleurs et réside dans la dimension fondamentalement interdisciplinaire de l'étude des relations intercultureTTes. Lorsqu'on s'attache, en effet, à travailler à la théorie des conditions de production des identités culturelles, on est amené à décrire et analyser la mobilisation par les groupes de ressources qui, considérées séparément, font référence à des champs disciplinaires tout à fait hétérogènes : linguis¬ tique, sémiologie, ethnologie, psychologie sociale, économie, sciences poli¬ tiques et juridiques, histoire, ... Ces pratiques identitaires ne donnent Timpression d'un éclectisme irréductiblement confus que si l'on se refuse à proposer et à mettre à l'épreuve des modèles interdisciplinaires, dont cer¬ tains ont déjà plus ou moins largement circulé (surtout F. BARTH, 1967, mais aussi V. SAIFULLAH-KHAN, 1980 ; M. ORIOL, 1982). Mais cette tâche difficile, en dépit des renouvellements paradigmatiques qu'elle peut préparer, cornue c'est souvent le cas aux carrefours d'interro¬ gations disciplinaires, n'est guère reconnue par les commissions de spécia¬ listes, que ce soit celles du C.N.R.S. ou celles de l'Université. La rationa¬ lité sociale qui les anime tend à privilégier,au point de vue des critères , les progrès internes à chaque discipline, et, au point de vue des moyens, la défense des ressources dont chacune peut disposer en propre. Le sort des formations de Troisième cycle destinées à traiter des rela¬ tions interculturelles reste de ce fait souvent précaire : l'Université de NICE a été amenée, dans le cours des négociations conduites entre 1975 et 1982 à substituer à une habilitation de D.E.A. centré sur "les recherches interculturel les" (association de l'U.E.R. Lettres et Sciences Humaines et de 1'I.D.E.R.I.C.) une autre, consacrée plus classiquement, à "l'anthropolo¬ gie générale et appliquée". De même le D.E.S.S. de l'Université de Toulouse a connu des problèmes d'articulation avec des institutions (1) ou des orga- (1) Peut-être faudrait-il encourager les études portant sur la produc¬ tion des identités disciplinaires, et les systèmes d'interaction qui en ré¬ sultent. - 10 - nisations regroupant des psychologues, en ce qui concerne la collation des titres ou la définition des domaines de recherche. Comme de telles logiques sont trop fortement instituées pour être aisé¬ ment modifiables, on ne peut compter que sur un volontarisme clair et persé¬ vérant pour promouvoir le rôle de l'Université dans le cadre des recherches et des enseignements portant sur les relations interculturelles. Mais chaque Université, prise isolément, n'a guère les moyens de faire face durablement aux obstacles : la demande est dispersée et irrëgulière, d'une rentabilité incertaine (comme tout ce qui concerne le travail ou l'éco¬ nomie social), chaque centre ne dispose que d'une partie,souvent très ré¬ duite, des ressources interdisciplinaires qui se trouvent ici requises (1). Un volontarisme s'exprimant par une politique ministérielle ou intermi¬ nistérielle d'appel d'offres (comme celui de la M.I.R.E. consacré à la France, "Société Pluriculturelle") ne saurait, à cet égard, apparaître comme suffi¬ sant. Même s'il contribue utilement à légitimer un domaine négligé ou décrié, il tend à mettre les équipes en compétition plutôt qu'à instaurer des conjonc¬ tions, il ne présente ni les garanties suffisantes de continuité, ni l'indis¬ pensable ouverture aux contributions étrangères. * II - Pour un réseau national de recherche et d'enseignement universitaires sur les relations interculturel1 es . Mais on découvre ici une singulière ironie de notre histoire institu¬ tionnelle. L'indispensable initiative ministérielle sur quoi débouchaient nos analyses n'a manqué ni de pertinence ni de force. Elle est seulement venue trop tôt. C'est en 1966, en effet, que, à l'instigation de Henri LAUGIER, ancien Secrétaire Général de l'O.N.U., a été constituée une Commission Nationale (1) Un pays coirnie l'Espagne où toutes les recherches sur les migrations sont contractuelles, à partir de financements privés ou semi-publics (Caisses d'Epargne) n'a pu se doter, depuis la renaissance des sciences sociales cor- rëlëe au retour de la démocratie, du moindre lieu de recherche et de formation tant soit peu permanent par rapport à ce thème. - 11 - pour la Recherche Interethnique, dont la présidence a, depuis cette date, été assurée par le Professeur Charles MORAZE. Une partie de sa mission, qui consistait à contribuer à réduire le re¬ tard de l'Université française dans ce domaine d'études, peut être considérée comme remplie. Mais, en revanche, le rôle d'articulation entre la demande so¬ ciale (à l'époque essentiellement publique et administrative) et les activi¬ tés de recherche, d'enseignement et de formation conserve aujourd'hui toute sa pertinence. Le défaut de vues prospectives sur les effets des grandes vagues migra¬ toires des années 60-70, aussi bien dans la classe politique que dans l'opi¬ nion publique, la relative pauvreté des ressources universitaires alors dis¬ ponibles n'ont pas permis d'organiser, à cette époque, un ensemble adéquat de moyens universitaires.L'audience très large du Prof. MORAZE, l'orientation de ses travaux vers l'analyse des conditions culturelles de la connaissance scientifique ont acquis au C.N.R.I. un rayonnement international qui lui a permis de développer des coopérations scientifiques importantes avec des pays étrangers. Mais il n'était alors pas possible de mener à bien de telles mis¬ sions de front avec la mise au point d'un dispositif institutionnel adapté à la promotion de l'intérêt public pour les recherches interculturelles et de l'efficacité de l'Université dans ce domaine. Aujourd'hui, à condition de réactualiser sa mission et de redéfinir sa composition, le C.N.R.I. peut contribuer à structurer et stabiliser le réseau des universitaires engagés dans ce champ de recherche, de formation et d'en¬ seignement. Une organisation de ce type peut contribuer, en effet, sans instaurer une bureaucratie lourde et coûteuse : - à mieux assurer la diffusion rapide des connaissances scientifiques, dans le milieu des spécialistes et en direction d'un public plus large (no¬ tamment chez les "décideurs"); - 12 - - à mieux mettre en communication et en situation d'échange les diffé¬ rents centres de recherche, d'enseignement et de formation; - à assurer une relation suivie, et aussi transparente que possible, entre la demande publique (nationale ou locale) d'étude et de formation et le milieu de recherche et d'expérimentation; - à assurer en commun la production et la diffusion de matériaux adé¬ quats pour différents niveaux de formation (en particulier supérieur). La plupart de nos interlocuteurs souhaite que se tienne dans un délai assez rapproché une réunion (dont, à nos yeux ,1e C.N.R.I. serait l'instiga¬ teur normal) pour contribuer, dans un premier temps qui ne préjuge pas de la priorité nécessaire à accorder aux débats scientifiques, à améliorer les dis¬ positifs institutionnels locaux, leur liaison mutuelle, leur coordination cen¬ trale. Les expériences conduites en matière d'organisation scientifique montrent en effet qu'une institutionnalisation "légère", comme celle d'un réseau, ne dispense pas de bien centrer la responsabilité de certaines tâches essentiel¬ les : documentation, publication , diffusion de l'information (1). Peut-être pourrait-on, sur ce point précis, s'inspirer d'une formule britannique : le Social Sciences Research Council lance périodiquement un appel d'offres pluri- annuel, destiné à des institutions universitaires (et non à des équipes ou, a fortiori, des chercheurs à titre personnel). Celles-ci présentent alors un programme qui doit articuler les coopérations en matière de recherche fonda¬ mentale, les programmes conduits en relation étroite avec les collectivités locales ou les associations, les actions de formation (proprement universi¬ taires, ou destinées à des publics spécialisés). La "Research Unit on Race Relations" est ainsi amenée à jouer un rôle plus global que celui d'un GRECO (1) Rappelons que telle était la mission assignée originellement à 1'I.D.E.R.I.C. (constitué comme Institut d'Université sous le sigle C.E.R.I.N., en même temps que le C.N.R.I.). Un "effet pervers" de la loi d'orientation fut de rendre extrêmement difficile, après 1968, la dévolution d'une mission na¬ tionale à un centre relevant d'une université désormais autonome. - 13 - au sein du C.N.R.S., à moins dépendre, aussi bien, d'un nombre élevé de com¬ missions disciplinaires, sans que soit, pour autant, pérénnisëes et sclérosées des missions dont il convient d'assurer la flexibilité. Il est à craindre qu'en l'absence d'initiatives de ce type, "l'initia¬ tion aux relations interculturelles" devienne rapidement un produit marchand destiné à la formation plus ou moins hâtive de managers ou de responsables locaux travaillant en interaction avec des groupes marqués par l'hétérogénéité de leurs appartenances. L'emploi a-critique des moyens audio-visuels, la pro¬ pension à "réifier" les différences complexes qui se jouent dans la dialec¬ tique des interactions correspondent à des programmes déjà disponibles sur le marché de la formation (on devrait ici plutôt dire de la "déformation"). N'oublions pas que l'A.R.I.C. est née du refus d'un certain nombre de cher¬ cheurs et d'enseignants de se soumettre à de telles options , devenues do¬ minantes dans le cadre de la principale association internationale constituée dans ce domaine, sous l'égide de grandes firmes et d'universités américaines. - 14 - Un réseau (trop étroit, mais fiable) de correspondants En raison de Ta rapidité avec laquelle ce texte a été préparé, les coo¬ pérations obtenues ont été sujettes à beaucoup de contingences. Je n'en ai que plus d'obligation à leurs auteurs, et plus de regret à l'égard de ceux que je n'ai pu parvenir à joindre. Il allait aussi de soi que les contacts déjà assurés par-Paul VIEILLE couvraient déjà largement beaucoup des questions à étudier. . Ont répondu (oralement ou par écrit) au questionnaire : D. de BORTOLI (Université de Pau) M. BEN MABROUK. (Centre d'Etudes des Migrations et des Relations Interculturel¬ les, Université des Sciences Humaines de Strasbourg) C. CAMILLERI (Université René Descartes Paris V) C. CLANET (Equipe de Recherches et d'Etudes des Situations Interculturelles, Université de Toulouse le Mirail) B. LORREYTE (A.D.R.I., Association pour le Développement des Relations Inter¬ culturelles) M. MAUVIEL C.A.F.O.C., Rectorat de Paris M.C. MUNOZ Conmission Nationale pour la Recherche Interethnique M. TRIPIER (Paris VII) G. VERBUNT (Association Recherches et Formation, Paris) G. VERMES (Paris VIII) . Ont fait l'objet de consultations personnelles : Professeur Charles MORAZE, Président de la Conmission Nationale pour la Recherche Interethnique Docteur R. BERTHELIER (C.E.F.I.S.E.M.,Lyon) B. FICHET (Université de Strasbourg) A. MOREAU (Faculté des Sciences de Luminy, Université d'Aix-Marseille III) P. SIMON (Université de Rennes) Les membres du Groupe de Recherche sur l'Immigration et les Minorités (G.R.I.M. I.D.E.R.I.C.) : S. ANDEZIAN, V. B0RG0GN0, M. HILY, J. STREIFF-FENART, L. VOLLENWEIDER, J.P. ZIROTTI. - 15 - Documents reçus : Présentation du Centre Interdisciplinaire de Recherches et d'Etudes Juives (C.I.R.E.J.) (Chantai BENAYOUN, Université de Toulouse le Mirai!) Dossier d'habilitation pour un D.E.S.S. "Migrations, Transformations sociales et relations interculturelles" (J. BIARNES, R. FOSSET) (Université de Villetaneuse, Paris XIII). UNIVERSITÉ DE NICE Institut d'Etudes et de Recherches Interethniques et Interculturelles Nice, le 27 Mai 1986 Recherches, enseignements et formation relatifs aux relations interculturelles. Ces questions ne constituent qu'un guide, ni impératif, ni restrictif. Les contributions qu'il inspirera doivent parvenir à l'IDERIC avant le 20.06.1986 I )- Le terme "relations interculturelles" vous semble-t-il pleinement per¬ tinent pour désigner et situer les activités de recherche, d'enseignement et de formation que vous développez dans le champ balisé par les rapports BERQUE et VIEILLE ? D'autres formulations (étude des minorités, des groupes d'origine étran¬ gère, relations interethniques...) vous semblent-elles plus adéquates ? II) - Existe-t-il un cadre institutionnel au sein duquel vous délivrez des enseignements et, évnetuellement, des diplômes correspondant à ces thèmes ? Si oui, dans quelles conditions ce statut a-rt-il été défini ? A-t-il évolué ? Quelles sont, dans leurs grandes lignes, les caractéristiques des programmes ? Comment s'effectue et évolue le recrutement des étudiants ? Est-il possible d'apprécier la "valorisation" des diplômes obtenus ? Si une telle expérience a été interrompue, quelles ont été les princi¬ pales raisons de cet arrêt ? Si elle est en projet, sur quels appuis compte-t-on pour le mener à bien ? Quelle audience est-elle recherchée et attendue ? Quels sont les problêmes plus spécifiques soulevés par l'interdiscipli¬ narité nécessaire de vos entreprises ? Est elle plus facilement reclassée dans le cadre de la formation continue ? III) - Ces enseignements et ces formations ont-ils donné lieu à des coopé¬ rations réginale, nationale ou internationale ? Quels problèmes ces coopé¬ rations (réelles ou potentielles) soulèvent-elles ? .../ IDERIC 33, bd de la Madeleine - OôOOO Nice - Téléphone : (93) 44.82.44 IV) - Les recherches. - sont-elles liées organiquement aux activités d'enseignement et de formation ? - sont-elles d'orientation plutôt fondamentale, plutôt appliquée ? Peut-on identifier en ce domaine une "demande sociale". Dans quel cadre institutionnel sont-elles mises en oeuvre ? Quels sont les problèmes soulevés par le recrutement ët la formation des cher¬ cheurs, par la diffusion et la publication des résultats des travaux ? V) - En matière institutionnelle, quelles sont les propositions et les voeux qui vous semblent prioritaires ? VI) - Comment concevez-bous l'avenir de ce domaine de recherche, d'ensei¬ gnement et de formation aux niveaux national et international ? Michel ORIOL Directeur du GRIM