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' I CONDITION DES TERRES EN INDOCHINE a) Condition physique des terres. — Les territoires des cinq pays de l'Union Indochinoise peuvent être classés de bien des façons diverses sui¬ vant les caractéristiques que l'on entend mettre en évidence; en ce qui con¬ cerne la zone d'application de la législation du Livre foncier, on peut dire qu'elle s'étend partout où le propriétaire du sol a de son droit sur sa terre un sentiment comparable à celui que le paysan français éprouve pour son champ. Cette définition, qui a été donnée par un décret en date du 8 octo¬ bre 1925 applicable à l'Afrique Occidentale française, exprime une vérité générale qui vaut aussi pour l'Indochine. Le substratum véritable du Livre foncier, c'est la conscience complète et profonde du droit de propriété. L'énoncé de ce principe interdit de suite de soumettre à la législation du Livre foncier les régions où l'appropriation du sol se manifeste seulement par la pratique de la chasse, du parcours, de la cueillette ou même des cultures et des exploitations temporaires exercées sur des territoires éten¬ dus par des collectivités plus ou moins bien définies. On le verra plus loin, l'avantage fondamental dë l'inscription au Livre foncier est de rendre défi¬ nitifs et inattaquables les droits ou les démembrements de propriété qui y sont mentionnés. Or, rien n'est aiïssi mobile, aussi incertain, plus éloigné de ce que nous considérons comme une appropriation précise et irrévocable de la terre que l'utilisation qu'en font certains peuples, tant en Afrique Occidentale qu'en Indochine. Le montagnard du Tonkin ou de l'Annam qui défriche par le feu un coin de forêt, l'ensemence dans les cendres et l'abandonne au bout d'une ou deux récoltes, n'a à aucun moment l'inten¬ tion de conserver le champ où il a établi le « ray » qu'il reportera bientôt ailleurs, se faisant ainsi de proche en proche le destructeur de la forêt. Le Laotien qui chasse, fait pâturer des troupeaux au hasard d'une trans¬ humance irrégulière, ne saurait, non plus que le Cambodgien pour ses forêts et ses vastes pâturages, prétendre recevoir en toute propriété les terrains qu'il parcourt ou exploite. Et il y aurait un grand danger à transfor¬ mer en propriété des usages aussi instables. La spéculation se glisse par¬ tout. Pour une rémunération dérisoire, les titulaires nominaux de ces pro¬ priétés immenses s'empresseraient de les céder à de plus avisés, quitte à se révolter si les acquéreurs voulaient leur interdire l'usage incontesté, mais imprécis qu'ils en faisaient de temps immémorial. Le domaine spécifique du Livre foncier est, dans toute l'Indochine, la plaine deltaïque où se cultive le riz. Sans vouloir réserver exclusivement à la rizière le bénéfice de la législation nouvelle, il faut cependant recon¬ naître que, par les travaux préalables qu'elle nécessite, par l'assiduité de — 10 — l'effort qu'elle exige, la terre à riz inspire à l'homme qui en vit ce senti¬ ment exclusif et passionné qui fait dire d'une chose qu'elle vous est « pro¬ pre » qu'elle est votre propriété. b) Condition juridique des terres. — Quelle était en Indochine la situation juridique des terres, au moment où s'introduisait, avec la puissance fran¬ çaise, la législation du Code civil? Il ne saurait entrer dans le cadre de cette étude de faire ici un.exposé didactique. L'on ne peut que signaler les carac¬ téristiques les plus significatives nécessaires à l'intelligence du présent exposé. La nouvelle organisation foncière ayant porté uniquement jusqu'ici sur les terres annamites, c'est à cette partie du territoire indochinois que sera principalement consacrée la présente étude. Terres annamites : Cochinchine, Tonkin, Annam Le droit est depuis fort longtemps organisé en terre annamite, tant en ce qui concerne les personnes que les biens. Mais c'est un fait digne de remar¬ que que le droit, surtout en ce qui concerne les biens, n'a jamais été écrit, n'a jamais fait l'objet d'une codification systématique. Le Code de Gia-Long, promulgué en 1812, compilation de lois chinoises ou annamites, est princi¬ palement une énumération de coutumes inspirées de la constitution fami¬ liale et hiérarchique du peuple annamite. De même que les traités confu¬ céens de morale sont, dit-on souvent, un recueil de préceptes de civilité et d'étiquette, les Codes annamites, d'inspiration incontestablement chinoise, rangent sous les attributions des « Six Ministères » un ensemble de règle¬ ments confus où les rites, les peines, les lois militaires, les délits divers, les prérogatives du Souverain, font l'objet d'une énumération désordonnée, de préceptes dispersés où l'on chercherait vainement le souci d'un classement logique et d'un enseignement rationnel. Quelques articles de la codification de Gia-Long consacrés aux règlements concernant la propriété immobilière, n'en traitent guère que par prétérition, en édictant des peines frappant la violation des usages successoraux, les fraudes et infractions, notamment en matière d'impôt foncier. Ce rudiment de législation foncière avait été complété par une série d'ordonnances qui, préparées avec la seule intention « de remédier à des difficultés surgies à « l'improviste, ne règlent la plupart du temps que des situations très spé- « ciales, et ne peuvent fournir par leur réunion les éléments d'un système « foncier complet ». (A. Boudillon, Op. Cit. 1915, p. 10, n" 9.) En réalité, si l'on veut se rendre compte de l'état juridique des biens im¬ mobiliers, il faut se reporter aux auteurs français qui ont étudié la législa¬ tion locale : le Cours d'administration annamite (1) et le pays d'Annam (2) (1) Polygraphié. S.l.n.d. (Saigon, Gouvernement de la Cochinchine), 355/220^510 p.p., reproduit en partie dans l'Eveil Economique de l'Indochine, revue hebdomadaire, Hanoï, mai-septembre 1928. (2) E. Leroux, éditeur, 28, rue Bonaparte, Paris, 1897. —11 — de E. Luro; les Considérations sur l'étude du droit annamite (1), de P.-J. Silvestre, le rapport déjà cité de M. A. Boudillon (Edition de 1915); enfin la jurisprudence des Tribunaux et des Cours d'appel de l'Indochine cons¬ tituent des sources où l'on peut puiser les renseignements nécessaires à l'étude du droit foncier. Cette étude permet de fixer un certain nombre de points. On entend souvent dire que la terre appartenait au Souverain, qui en con¬ servait le Domaine éminent, n'abandonnant aux détenteurs que le domaine utile. Sans nier que cette opinion puisse avoir un fondement historique exact, on doit affirmer que, pratiquement, les Annamites exerçaient sur leurs biens immobiliers les droits les plus étendus et que, caractéristique essentielle du droit de propriété, les particuliers ou les collectivités ne pouvaient être dé¬ pouillés que pour un motif d'utilité publique et moyennant une indemnité égale à la valeur du bien enlevé. Cette règle est inscrite dans une ordon¬ nance de la 8e année de l'Empereur Minh-Mang (1827), qui ne faisait, comme l'article 545 de notre Code civil, qu'exprimer une vérité fort ancienne. L'exis¬ tence, de toute antiquité peut-on dire, d'une propriété privée constituée, in¬ dispensable fondement du droit immobilier, ne saurait être discutée en terre annamite. L'organisation communale d'une part, familiale de l'autre conditionnait l'exercice du droit de propriété comme tous les autres actes de la vie des Annamites. Chez ce peuple, on le sait, l'organisation sociale n'a guère dépassé le cadre de la famille et de la commune. La notion de l'Etat, les devoirs étendus de la collectivité nationale ont pu être énoncés par quelques écri¬ vains, commentateurs le plus souvent des auteurs chinois. Mais ces notions sont restées à peu près étrangères à la masse de la population. Mais en re¬ vanche, la famille et la commune ont constitué des organismes extrêmement puissants, doués d'une grande force de cohésion, au seuil desquels l'autorité souveraine elle-même s'arrêtait volontairement. Les terres étaient réparties entre les communes et les particuliers. Les biens communaux dits « công diên » (rizières publiques) ou « công thô » (terres publiques de cultures diverses), constitués généralement lors de la fondation des villages soit par des attributions faites par le Souverain, soit par des donations ou par des acquisitions, étaient inaliénables, tandis que les « bon-thon dien » (rizières communales acquises) et les « bon-thon-tho » (terres communales de cultures diverses acquises, provenant d'achats faits par les villages avec leurs propres ressources) pouvaient être vendues. Ainsi, possesseur de revenus relativement importants, le village vivait d'une vie propre et subvenait aux besoins de la collectivité qu'enserraient ses fron¬ tières étroites. Les biens appartenant aux individus participaient, autrefois surtout, du caractère familial de la cellule sociale. Le pouvoir du père de famille, aussi puissant dans la cité extrême orientale que dans l'antique cité latine, s'exer¬ çait à peu près sans limitation. Le chef de la famille, maître absolu des per¬ sonnes et des biens, disposait sans contrôle, sa vie durant, de tout ce qui appartenait aux personnes placées sous son autorité, femmes et enfants. Cette maîtrise lui survivait, pourrait-on dire. Les enfants ne pouvaient demander le partage de la succession pendant toute la période de deuil, qui (1) A. Portail, éditeur, Saigon, 2' édition, 1925. — 12 — durait trois années. Bien plus : la communauté conjugale, seul mode d'asso¬ ciation entre époux qui soit admis dans la coutume annamite, et qui avait dessaisi la femme de tous ses biens personnels au profit du mari chef de l'as¬ sociation conjugale, cette communauté se prolongeait après le décès. La mère de famille devenait usufruitière de l'universalité de la communauté et de la succession, dont les enfants ne pouvaient toujours pas demander le pai-tage. Sauf le droit de disposition qui lui était refusé, la veuve survivante exerçait les pouvoirs du chef de famille disparu. Il faut mentionner ici une institution qui, elle aussi, tendait à maintenir l'unité et la perpétuité de la famille : le huong-hoa (mot à mot l'encens et le feu), véritable majorât du droit asiatique, est l'attribution par le chef de fa¬ mille au fils aîné, à perpétuité, d'une part d'héritage dont les revenus per¬ mettront d'assurer le culte des ancêtres et de célébrer des fêtes anniversaires réunissant tous les membres de la famille. Cette forte organisation du patrimoine, ces institutions destinées à en assu¬ rer la perpétuité ont subsisté à peu près dans leur intégralité. Toutefois, il ne faut point se dissimuler que ces anciennes coutumes — qui n'ont jamais eu ni une fixité absolue dans le temps, ni une uniformité rigoureuse d'un bout à l'autre du pays annamite — sont en état d'évolution constante. Qu'on le veuille ou non, la coexistence de deux législations amène fatalement la modification de la moins parfaite, de celle surtout qui est le moins en har¬ monie avec les conditions économiques (Boudillon. Op. cit., p. 8). C'est ainsi que la période de deuil n'impose plus une immobilisation qui ne pourrait maintenant se prolonger pendant trois ans sans léser, gravement parfois, les héritiers placés dans un milieu que l'activité universelle a gagné; que les enfants établis, pourvus d'un métier ou d'une fonction, ne dénendent plus, au point de vue de leur situation matérielle, du père de famille, et ont une existence économiquement indépendante de la sienne et de son autorité; que les partages sont plus fréquents et que la propriété individuelle se dévelonpe, tandis que décroît la propriété collective. Il y a là une transformation dont il est indispensable de tenir compte. Il serait dangereux, certes, de ne pas respecter les coutumes locales; mais il ne serait peut-être pas moins fâcheux de vouloir, par passion de l'archéologie sociale, immobiliser ce qui change constamment et spontanément; la cristallisation d'éléments aussi variables et aussi changeants que les coutumes locales serait une opération particuliè¬ rement néfaste. Sur ce fond de coutumes tenant à l'esprit même de la race et du pays, s'édifiaient des transactions différant fort peu de celles du droit occidental : vente, bail, donation, partage. Toutefois, une mention spéciale doit être faite de ce que l'on a communément appelé « vente à rachat » et qui ne correspond aucunement à la convention définie en l'article 1659 du Code civil. Selon les stipulations propres à chaque acte, la vente dite à rachat est un nantisse¬ ment, une mise en gage, une dation en paiement, où le revenu du bien engagé correspond tantôt à l'intérêt, tantôt même au capital du prêt, une espèce de garantie hypothécaire même dont la caractéristique constante est de laisser la propriété de l'immeuble au prétendu vendeur qui n'est en réalité qu'un engagiste. La reconnaissance et le maintien des droits des collectivités et des par¬ ticuliers sur les terres se faisaient depuis le début du xix" siècle au moyen d'un instrument fort ingénieux. Les Empereurs Gia-Long et Minh-Mang avaient accompli une œuvre fort remarquable, surtout si l'on songe aux j — 13 — moyens restreints dont ils disposaient. Sur leur ordre chaque propriété immobilière avait été mesurée, cataloguée, classée; un cahier dressé en triple expédition donnait, par catégorie de cultures, l'origine de la propriété, la description des limites et le nom du propriétaire. Ce cahier fut appelé « Dia-bo » ou Livre des Terres. Il était prévu que, périodiquement, à inter¬ valles fixés, des rôles de « petite et de grande correction » le tiendraient à jour. Les prescriptions de l'autorité annamite furent exécutées avec beaucoup de soin en Cochinchine, où l'instrument créé par Minh-Mang et assez régu¬ lièrement entretenu depuis a subsisté, avec quelques transformations, jus¬ qu'à nos jours. Dans les autres parties du pays annamite, en Annam et au Tonkin, les vieux Dia-bo, qui n'ont jamais été utilisés comme ils l'ont été en Cochinchine et qui n'ont pas été mis à jour depuis bien longtemps, n'ont guère qu'un intérêt documentaire. Parfois cependant, pour rechercher des droits anciens, on peut recourir aux originaux conservés à Hué, les exem¬ plaires des villages ayant disparu ou ayant été détruits par le temps. Certes, et ainsi qu'il arrive bien souvent, les Souverains annamites n'avaient pas eu une conscience nette des répercussions de leur entreprise. Pour eux, le Dia-bo était un outil fiscal qui devait asseoir et faciliter la per¬ ception de l'impôt foncier. Mais il devint — spontanément, pourrait-on dire, — sous l'empire de ce besoin qui, s'il ne crée pas l'organe, le façonne du moins, — tout autre chose et bien plus que ce qu'avaient entendu faire ses créateurs. Le fait de payer l'impôt foncier constituait évidemment une pré¬ somption de propriété. L'on considéra bientôt que d'être inscrit au Dia-bo valait preuve de propriété, et le Livre des Terres devint en pratique, et à peu près absolument en droit, un mode de publicité et de preuve de la consis¬ tance des droits immobiliers. Les amiraux, premiers représentants de la France en Cochinchine, ne se méprirent pas sur le véritable caractère du Dia-bo, et il n'y a qu'à lire les ouvrages de E. Luro (Op. Cit.), pour s'en convaincre. Mais, avec un remar¬ quable sens d'adaptation, une parfaite intelligence des nécessités du moment, ils en saisirent admirablement l'avantage et la commodité. Officiellement, le Dia-bo'fut adopté comme Livre foncier indigène. A la vérité, le Dia-bo se ressentit toujours de son origine incertaine et tant soit peu équivoque. Sa valeur probante ne fut jamais expressément définie; les rôles de correction furent irrégulièrement servis. Les modes d'inscrip¬ tion et de réfection furent imparfaitement réglementés. Une disposition typo¬ graphique défectueuse rendit rapidement confuses et quasi-illisibles les mentions qu'on y inscrivait. Cependant, tout en reconnaissant que même dans le sud de l'Indochine, le Dia-bo ne répond plus aux besoins actuels, il est juste de rappeler le rôle essentiel qu'il a joué dans la constitution de la pro¬ priété immobilière en Cochinchine. Malgré ses imperfections il a, ainsi qu'on le verra plus loin, rendu possible la création du Livre foncier dont il est devenu l'élément constitutif le plus important — et, là où il n'y a pas encore de Livre foncier, le Dia-bo est encore l'instrument du Crédit rural. II LE CONFLIT DES LÉGISLATIONS Le Dia-bo, devenu l'organe de publicité et le mode de preuve de la propriété immobilière indigène, aurait pu, dans le domaine strictement indi¬ gène et moyennant quelques améliorations et quelques adaptations, garder longtemps encore sa valeur probatoire et son utilité. Mais l'introduction en Indochine de la législation française devait avoir sur le fonctionnement de cet instrument juridique une répercussion qui en compromit l'usage et le ren¬ dement. L'on se trouvait désormais en présence d'une dualité de statut qui nécessitait une refonte radicale du régime immobilier. Cela est vrai pour toute l'Indochine. Partout le conflit entre l'organisation locale des droits ter¬ riens et la loi importée du peuple colonisateur a présenté les mêmes mani¬ festations dangereuses pour la sécurité des transactions. La fréquence du danger est en fonction directe de la multiplicité des points de contact. C'est donc surtout la situation de la Cochinchine, où la pénétration plus ancienne et plus profonde de l'influence française met en rapports constants Français et Annamites, qui sera dépeinte ici; c'est à la Cochinchine que les exemples seront surtout empruntés; mais ce qui sera dit du Sud vaut aussi pour les autres pays de l'Indochine, où la progression de l'action économique occi¬ dentale amènera fatalement, dans un avenir plus ou moins éloigné, les mêmes phénomènes d'ordre juridique et social. , La coexistence dans le même pays de la législation du Code civil et de la loi sur la transcription du 23 mars 1855 — et du Dia-bo annamite créa en Cochinchine une situation extrêmement difficile. On hésita d'abord sur la nature de la formalité que devaient accomplir acquéreurs et prêteurs pour assurer, à l'égard des tiers, la validité de leurs contrats. Où devait être ins¬ crite la mutation ou la garantie? La solution semblait aisée quand il s'agis¬ sait de contractants de même statut. Il allait de soi, semblait-il, que chacun dût user de l'instrument de sa législation personnelle : Registre de trans¬ cription ou d'inscription pour les Français, Dia-bo pour les Annamites. Ce fut la jurisprudence fort sage de la Cour d'appel de Saigon. Mais la question se compliquait de suite si les co-contractants relevaient de statuts différents. Bien plus, fussent-ils de même statut, rien ne garantissait que des actes anté¬ rieurs passés par les anciens propriétaires n'eussent pas assujetti le bien à des charges relevant d'un autre statut. Ainsi un immeuble vendu par un Français à un autre Français qui se mettait en règle en faisant transcrire son acte pouvait rester grevé d'une affectation cultuelle fondée par un pro¬ priétaire annamite précédent et dûment inscrite au Dia-bo. La consultation des registres hypothécaires était impuissante à révéler une indisponibilité — 15 — de cette sorte ; réciproquement, deux propriétaires annamites traitant ensem¬ ble ne pouvaient obtenir par la consultation du Dia-bo la certitude que, du chef d'un propriétaire précédent, l'immeuble objet de leur convention n'avait pas été grevé d'une inscription occulte, légale ou judiciaire, prise au Bureau des Hypothèques. L'on voit à quelles situations inextricables l'on pouvait aboutir et les exemples nombreux que donne M. Boudillon prou¬ vent que ces éventualités étaient fréquentes. Il fallait, pour obtenir une sécu¬ rité à peu près complète, se livrer, tant au Bureau du Dia-bo qu'à celui de la Conservation des Hypothèques, à de longues et coûteuses recherches dont la difficulté et la complication étaient encore aggravées par le fait que les Conservations des Hypothèques avaient été formées par divisions successives des ressorts des premiers bureaux installés. Les conflits qui s'élevaient entre les deux législations étaient inévitables. La loi terrienne annamite et les modes français de publicité et de conserva¬ tion immobilière procédaient de deux conceptions tout à fait différentes. Le Dia-bo réalisait un instrument, imparfait à la vérité et sans doute accidentel, de droit réel. Dans cet embryon de Livre foncier, c'étaient les propriétés qui étaient individualisées et c'était sous leur permanence que s'indiquaient les mutations et les engagements; les mentions des registres hypothécaires français se groupaient sous les noms des propriétaires rangés alphabétique¬ ment. L'on voit combien il pouvait être difficile de concilier les deux docu¬ ments. D'autre part, la législation hypothécaire, telle qu'elle ressort du Code civil, comporte de notables imperfections et même un certain illogisme, dont les causes sont d'ordre historique. Les restrictions apportées au principe de la publicité et à celui de la spé¬ cialité, notamment en ce qui concerne les hypothèques légales et les hypo¬ thèques judiciaires, sont parmi les dispositions les plus critiquées du système français. En France, une pratique multiséculaire a amené une adaptation qui ne fait cependant pas disparaître des inconvénients trop évidents. Mais la transplantation de ces règles dans un pays comme l'Indochine a fait im¬ médiatement apparaître qu'elles ne sauraient être un article d'exportation, et la pratique de l'hypothèque légale et de l'hypothèque judiciaire venant grever des immeubles appartenant à des Annamites rendait encore plus dangereux le conflit de la législation qui s'était institué. Depuis fort longtemps, l'attention de l'Administration française en Indo¬ chine avait été attirée sur les inconvénients que présentait la situation qui vient d'être indiquée. L'on reconnaissait que tout le mal venait du fait que la loi applicable aux propriétés foncières dépendait de la nationalité des pro¬ priétaires de ces terres, et que ce mal 11e pouvait disparaître que par l'insti¬ tution d'une législation unique affectant la terre, d'une « lex rei sitae » indif¬ férente en principe à la personnalité du détenteur de cette terre, d'une légis¬ lation de droit réel remplaçant la législation de droit personnel du Code civil. Ce fut là, du reste, un des premiers soucis du Résident général Paul Bert, dès son arrivée à Hanoï. Il faut noter qu'en mettant le principe de la — 16 — réalité à la base de la réglementation foncière, on avait l'avantage de n'avoir à changer que fort peu de chose à l'instrument juridique dont usaient déjà les Annamites, au Dia-bo. D'autre part, toutes les possessions françaises, à l'exception de l'Indochine et des vieilles colonies assimilées à des départements français, étaient pour¬ vues d'une réglementation de droit réel, inspirée à la vérité de l'Act Torrens appliqué en Australie par Sir Richard Torrens, mais harmonisée avec le droit français et adaptée de telle sorte que ces textes constituaient une œuvre presque entièrement originale. Il sembla au Gouvernement général qu'on ne pouvait faire mieux, pour réaliser la même réforme en Indochine, que de s'adresser à l'éminent spécialiste, M. A. Boudillon, directeur de l'Enregis¬ trement, auteur notamment des textes qui ont introduit la réforme foncière à Madagascar et en Afrique Occidentale française. M. Boudillon, au cours de deux séjours en Indochine, étudia les condi¬ tions particulières du droit civil indigène et de la tenure des terres en ce pays. Il soumit à l'Administration locale les projets qui, après fort peu de modifications, sont devenus les décrets du 21 juillet 1925, fixant les règles relatives au régime de la propriété foncière en Cochinchine, dans les villes françaises du Tonkin et de l'Annam, et' au Laos. — 17 — III LE SYSTÈME DIT « DE DROIT RÉEL» Il importe d'abord de préciser les caractéristiques de la nouvelle régle¬ mentation foncière dont l'organe est le Livre foncier. A. — Le Livre foncier, instrument de droit réel, sert à identifier les pro¬ priétés comprises dans 1^ ressort territorial auquel il est affecté; à chacune de ces propriétés est consacré un feuillet où viennent se grouper les men¬ tions de tous les droits qui s'exercent sur l'immeuble : propriété, garanties hypothécaires, servitudes, baux, causes d'indisponibilité, saisies, etc... La parcelle foncière ne sera plus uniquement répertoriée par rapport à son propriétaire du moment, mais douée désormais d'un état civil propre et juridiquement indestructible; elle constituera une entité à laquelle viendront se rattacher tous les droits dont elle est l'objet, considérés comme des « accidents ». Il faut ajouter d'ailleurs qu'un répertoire des titulaires de ces droits permettra de compléter par un état des personnes la situation des terres établie par le Livre et par les plans accompagnant le Livre. B. — Cette entité qu'est devenue la parcelle foncière ne dépend plus désor¬ mais au point de vue juridique du statut du propriétaire qui l'a acquise. Les décrets du 21 juillet 1925 ont créé une charte foncière unique s'appli- quant à toutes les terres, quelle que soit la nationalité de leur propriétaire, et s'imposant à ce propriétaire. On saisit aisément combien une pareille disposition était nécessaire pour faire disparaître les difficultés nées de la dualité de législation, et qui parfois aboutissaient à des situations inextricables. Ce texte n'est d'ailleurs qu'un code foncier, et non un code civil. Il s'abstient scrupuleusement de légiférer en tout ce qui touche le droit civil personnel et familial des propriétaires, et une disposition fondamentale spécifie que « la matière des successions même à l'égard de la masse immobilière est régie par la loi personnelle des individus en ce qui concerne soit la forme et l'objet des testaments, soit la vocation des héritiers et des légataires, et la dévolution des biens immobiliers légués ou transmis, soit enfin le mode de règlement des partages de ces mêmes biens » (art. 169). C. — Le Livre foncier est un organe de publicité absolue. Sous le régime du Code civil, un immeuble peut être grevé d'une façon occulte d'hypothèques légales ou judiciaires, que rien ne révèle au premier examen, qui ne sont connues qu'après des recherches ou même une procédure parfois longues et coûteuses. Le mot du procureur général Dupin... « En France, en achetant, on n'est jamais sûr d'être propriétaire; en payant, on n'est jamais sûr d'être libéré; en prêtant, on n'est jamais sûr d'être payé... » exprime, sous une forme plaisante, une vérité qu'illustre une abondante jurisprudence, fruit de l'imperfection du régime hypothécaire français. La législation de droit réel, au contraire, établit une situation d'où est bannie toute équivoque. Qu'il s'agisse de l'hypothèque des incapables ou de l'hypothèque conventionnelle sanctionnant une obligation synallagmatique, aucun privilège ne peut être établi à l'encontre des tiers sans que ces tiers en soient avertis par une inscription au Livre foncier. De plus, cette inscrip¬ tion devra être spécialisée quant aux immeubles qu'elle frappe; une inscrip¬ tion générale ne saurait être prise contre un individu sur tous ses biens présents ou futurs. Pour bénéficier d'une garantie, il faut l'obtenir de celui qui en est le maître, la préciser et la publier, sous réserve, pour les incapables, du droit de s'adresser à la justice afin d'acquérir, à défaut de consentement, une hypothèque forcée qui, elle aussi, doit être spécialisée et publiée. Dans ce système, on ne conçoit pas qu'un créancier qui ne s'est pas prémuni préala¬ blement et conventionnellement d'une garantie puisse se faire attribuer une préférence sur les autres créanciers par un acte unilatéral d'exécution lors de l'échéance du terme de la créance. Avec la législation du Livre foncier, les biens du débiteur restent, il est à peine utile de le dire, le gage général de ses créanciers; il faut même noter que la procédure tendant à immobiliser ce gage pour empêcher un débiteur de mauvaise foi de le dénaturer ou de le faire évader est notablement simplifiée et accélérée. Et l'on ne saurait regretter la disparition de l'hypothèque judiciaire, qui n'a guère été en Indochine que l'instrument de la cupidité des usuriers professionnels. Ainsi le Livre foncier opère intégralement la publicité, la spécialisation et la conventionnalité des droits et des gages immobiliers qui, désirées et annoncées par les rédacteurs du Code civil n'avaient que bien imparfai¬ tement été réalisées jusqu'ici. Les caractéristiques juridiques du Livre foncier étant définies, l'on doit indiquer de quelle façon se fait le passage d'une législation à l'autre; comment les immeubles, autrefois assujettis tant à la coutume locale et aux lois indigènes qu'au Code civil sont intégrés dans le Livre foncier. Le livre foncier est établi en utilisant tous les documents qui existaient antérieurement à sa création et qui sont relatifs aux biens immobiliers : le Dia-bo annamite ou Livre des Terres; la Matrice cadastrale et au besoin celle des contributions directes; les procès-verbaux de bornage; les titres de propriété, actes et pièces de toute nature, les registres hypothécaires, etc... Après avoir dépouillé ces documents, le Conservateur de la Propriété fon¬ cière dresse une liste de toutes les propriétés comprises dans la circonscrip¬ tion correspondant au futur Livre foncier. Il range sous l'indice de chaque propriété les résultats de ses recherches; ce travail constitue une espèce de Livre foncier provisoire. Pendant le délai d'un an, tous les modes de publicité sont mis en œuvre pour aviser tous les intéressés de la révision entreprise : publication dans les journaux, avis individuels à tous ayant-droit, notifica¬ tions aux autorités administratives, aux chefs de quartier dans les villes — 19 — ou aux notables dans les villages; les protestations, les oppositions, les obser¬ vations, les interventions de toute nature de tous intéressés sont accueillies, consignées par écrit, mentionnées au Livre foncier provisoire, et notifiées à leur tour. Les litiges qui se révèlent sont du ressort des tribunaux. Il faut d'ailleurs noter que dans la pratique les litiges qui mettent en question le droit même de propriété sont fort rares. A l'expiration de l'année consacrée à l'enquête, le Conservateur procède à la revision de son Livre foncier provisoire sur lequel ont été au fur et à mesure consignés, en ce qui concerne chaque propriété, tous les renseigne¬ ments recueillis au cours de cette période préliminaire. II établit au vu de tous ces renseignements le Livre foncier définitif (1). Une feuille ouverte divisée en tableaux est consacrée à chaque propriété. A un premier tableau, auquel est inséparablement joint un plan sont indi¬ quées la nature et la consistance de la parcelle, sa dimension, sa contenance, ses limites, tout ce qui en un mot a un caractère immuable, non susceptible de changer ou de varier. Un tableau placé au dessous de celui qui reçoit ces indications comporte la mention des augmentations et des diminutions que subit la propriété primitivement inscrite au Livre foncier, suivant qu'il s'agit de l'adjonction d'une parcelle contiguë ou, au contraire, de la cession à un tiers par le pro¬ priétaire d'une partie de la propriété immatriculée. Dans les deux cas une référence précise d'où vient la parcelle qui a accru, c'est-à-dire à quel numéro du Livre foncier a été originalement inscrite ou bien ce qu'est devenue la parcelle cédée, c'est-à-dire sous quel nouveau numéro du Livre foncier elle figure désormais en formant un Titre distinct. Un troisième tableau est destiné à manifester les charges, les servitudes, les incapacités ou les immobilisations qui peuvent affecter la parcelle faisant l'objet du Titre. Parmi les mentions qui s'inscrivent à ce tableau, il faut noter les baux de plus de trois ans, les affectations cultuelles, très fréquentes en droit annamite, les saisies immobilières. Le quatrième tableau du Livre foncier donne la liste des propriétaires successifs de l'immeuble. Une ligne est consacrée à chacun d'eux; le dernier inscrit est le propriétaire actuel. Enfin un cinquième tableau publie les affectations hypothécaires et les nantissements en réservant en face de chaque inscription la place nécessaire pour mentionner le cas échéant les mainlevées. L'examen du Livre foncier suffit à indiquer le progrès considérable que marque, sur tout autre mode de publicité immobilière, un instrument juri¬ dique de cette sorte. Cependant, comme on pourrait trouver trop sommaires des indications qui se réduisent à une seule ligne d'écriture dans des tableaux étroits, le Titre foncier comporte, outre le tableau, une seconde partie; une série de pages dites « bordereaux analytiques », correspondant par leur numéro aux diverses mentions portées à chaque tableau; les bordereaux analytiques, dont la terminologie est empruntée au Code civil, contiennent l'analyse détaillée des actes déposés au Bureau de la Conservation Foncière et qui ont fait l'objet d'une inscription au tableau d'ensemble qui vient d'être décrit. (1) La reproduction d'un Titre Foncier et d'un Certificat d'inscription est donnée à la fin de la présente étude. — 20 — Désormais l'immeuble est identifié d'une façon parfaite, tant par la des¬ cription portée au tableau que par le plan qui en fait partie intégrante et inséparable. Tous les accidents qui peuvent affecter cet immeuble étant obli¬ gatoirement mentionnés au Livre foncier, tout titulaire d'une inscription établissant sa qualité de propriétaire, d'usufruitier, de créancier hypothé¬ caire, et muni au reste d'un Titre ou d'un Certificat délivré par le Conserva¬ teur et reproduisant le Feuillet Foncier et les bordereaux analytiques con¬ servés au Bureau de la Conservation, peut faire immédiatement, sans discus¬ sion, sans recherches, la preuve de ses droits, de leur étendue, sans d'ailleurs pouvoir dissimuler les restrictions qui peuvent les affecter. On peut admettre dès lors, combien est justifiée la disposition essentielle de la réglementation du Livre foncier aux termes de laquelle les Titres fonciers sont proclamés juridiquement inattaquables, comportent exécution parée, et constituent en conséquence, devant toutes juridictions, le point de départ uniciue de tous les droits réels existant sur les immeubles au moment de leur délivrance. Les immeubles immatriculés sont réputés purgés de toutes les charges et de toutes les causes de précarité qui pouvaient les affecter antérieurement à la procédure d'immatriculation et qui n'ont pas fait l'objet d'un report au Feuillet et au Titre foncier. D'autre part, l'application rigoureuse du principe de la conventionnalité, l'hypothèque légale ou forcée étant réservée stricte¬ ment aux garanties données à la femme mariée, an minèur. à l'interdit, et au vendeur pour le paiement du prix; l'obligation absolue de publier toutes les charges qui grèvent un immeuble, même les hypothèques forcées, poul¬ ies rendre opposables aux tiers, et de spécialiser les inscriptions par rapport aux gages qu'elles affectent, ce qui supprime les hypothèques générales indéterminées, causes de tant d'abus et de tant d'erreurs, tout concourt à faire du Livre foncier un mode de preuve et un organe de publicité parfaits. Une des premières conséquences de l'établissement des Livres fonciers est de rendre inutiles les recherches hypothécaires, autrefois si longues, si coû¬ teuses et si incertaines; elles sont remplacées par la simple comparaison dn Titre détenu par le propriétaire et du Livre conservé au Bureau de la Conser¬ vation. Cette comparaison fait disparaître la seule cause d'erreur ou de fraude qu'eût pu rendre possible la falsification du Titre. Elle se fait auto¬ matiquement, pourrait-on dire, et instantanément; la recherche est réduite à celle d'un numéro de feuillet qui est le même pour le Livre et pour le Titre. Pour les mêmes raisons, l'étude et le dépouillement des origines de propriété, si laborieux parfois et dont la sécurité ne saurait être absolue, sont remplacés par une simple référence au numéro du Livre et du Titre foncier dont la teneur définitive et inattaquable ne comporte ni risques, ni incerti¬ tude. Il faut ajouter que la détention par le co-contractant du Titre foncier pendant la période de pourparlers, et après l'attestation de concordance, rend impossible la fraude qui consiste à vendre en même temps à plusieurs, ou à consentir plusieurs hypothèques sur le même gage en laissant le soin à l'acheteur ou au prêteur le plus diligent de faire transcrire ou inscrire son acte le premier. En effet le Conservateur de la Propriété foncière refusera de procéder à toute inscription qui ne sera pas appuyée par la production du Titre foncier. Seul pourra agir l'acheteur ou le prêteur qui s'est fait remettre le Titre. On rappelle enfin que non seulement, grâce au caractère de réalité du Livre foncier, l'Etat Civil complet de chaque propriété est établi, mais encore — 21 — que chaque mention portée au Livre foncier étant immédiatement répertoriée sous le nom du titulaire du droit, un organe de publicité personnelle s'établit en même temps que le Livre foncier et parallèlement à lui. Il importe ici de faire une distinction : dans les régions où toutes les terres sont appropriées et occupées — en fait dans les plaines de rizières — l'on procédera à l'immatriculation en masse de toutes les propriétés obligatoi¬ rement inscrites au Livre foncier. Les intéressés ne pourront s'y opposer ou refuser en ce qui les concerne d'adopter la législation de droit réel. On ne saurait au contraire envisager l'immatriculation générale de l'en¬ semble d'un territoire où les propriétés sont peu nombreuses, dispersées, sans grande valeur souvent; il peut se trouver pourtant dans ce territoire des biens dont les détenteurs désirent s'assurer le bénéfice de l'inscription au Livre foncier et tous les avantages qui en découlent. La réglementation adoptée en Indochine possède la souplesse nécessaire. La règle générale est l'immatriculation obligatoire. Mais un certain nombre de dispositions prévoient la possibilité d'immatriculer des biens isolés se trouvant en dehors des circonscriptions où fonctionne un Bureau foncier. Ces procédures seront conduites sur l'initiative des propriétaires, d'après des modalités particulières qui permettront de ne refuser à aucun de ceux qui le réclameraient le mode de preuve et l'instrument de crédit que représente le Titre foncier. * * * On comprend, sans qu'il soit besoin d'insister, quels avantages considé¬ rables découlent de la sécurité mise désormais à la base de toutes les trans¬ actions immobilières. L'insécurité de la détention immobilière avait en Indochine une répercus¬ sion économique tout à fait fâcheuse. L'intérêt d'un prêt d'argent comporte en effet deux éléments : l'un constitue la rémunération normale du capital suivant sa rareté ou son abondance; l'autre élément est la prime d'assurance que réclame le prêteur contre une défaillance de l'emprunteur. Encore que la propriété soit bien assise en Indochine, la difficulté de préciser la qualité des ayant-droit avait enlevé au gage immobilier le caractère essentiel, fon¬ damental, de sûreté réelle qu'il doit posséder. Le prêt sur hypothèque était devenu une opération où la personnalité du débiteur, les moyens d'action que l'on peut avoir sur lui et sur les siens, jouaient le rôle principal; il était devenu le monopole, surtout dans les campagnes, d'usuriers professionnels, les banquiers indiens, dits « chettys » et les Chinois. Malgré les facilités que leur donne une organisation toute spéciale, ces trafiquants, que ne gênait la concurrence d'aucune entreprise usant de procédés normaux, avaient réussi à élever la prime d'assurance à un point si haut qu'à brève échéance l'em¬ prunteur se voyait menacé de la ruine. Certes le Crédit Agricole indigène, organisé par l'Administration locale en Cochinchine depuis de nombreuses années et tout récemment créé au Tonkin et en Annam, a apporté un remède précieux à cette situation. Ce n'est point ici le lieu d'exposer les incontestables bienfaits résultant de ces institutions. Mais le Crédit Agricole, lui aussi, qu'il soit l'œuvre de la mutualité, qu'il soit offert par des Banques régulièrement organisées — mais dont le but est de procurer un profit à leurs actionnaires — ne peut fonctionner dans des conditions d'entière sécurité et de pleine efficacité que s'il a comme substra- tum une situation foncière nette, telle que peut l'établir le Livre foncier. — 22 — IV RÉALISATION DE LA RÉFORME FONCIÈRE EN COCHINCHINE ET DANS LES VILLES FRANÇAISES DU TONKIN Le décret du 21 juillet 1925, fixant les règles relatives au régime de la Propriété foncière dans la Colonie de Cochinchine, réalisa la réforme dont on vient de résumer l'économie. Ce texte publié au Journal Officiel de la République Française du 28 juillet 1925 constitue une véritable charte fonda¬ mentale, destinée à être étendue avec les aménagements voulus à tous les pays de l'Union indochinoise. Il fut, par deux autres décrets de même date, rendu applicable aux villes françaises du Tonkin et de l'Annam et au Laos. La Cochinchine, en raison de son état d'avancement économique et aussi des difficultés qu'y soulevait chaque jour l'état de la législation foncière, était appelée à bénéficier la première des avantages de la réforme. Toutefois, le chef de cette colonie estima nécessaire de faire étudier par une Commission désignée spécialement à cet effet les conditions dans lesquelles le nouveau régime foncier serait appelé à fonctionner. Les travaux de cette Commission, puis ceux du Conseil colonial de la Cochinchine, conduits avec un souci constant d'aboutir à un résultat pratique, déterminèrent l'Administration locale à demander au Département d'apporter quelques retouches au texte originaire. Ce n'est pas ici le lieu d'entrer dans le détail des modifications proposées et intégralement réalisées par les décrets des 23 novembre 1926 et 6 septembre 1927. Il suffit de rappeler les points principaux qui ont fait l'objet d'amendements et qui fournissent une indication assez saisissante des préoccupations auxquelles a obéi l'Administration locale. Le décret du 21 juillet 1925 prévoyait que tous les actes destinés à être mentionnés aux Livres fonciers et conclus entre justiciables français devaient être passés devant notaire. Sans discuter les raisons juridiques qui avaient conduit à imposer cette formalité (l'on conçoit aisément qu'un Livre foncier doué de l'authenticité et de la force probante ne saurait comporter l'inscrip¬ tion d'actes autres que les actes authentiques), il a paru cependant que la nécessité de recourir aux notaires, même pour les très petites ventes, pou¬ vait être une gêne, et constituait, dans une certaine mesure, une obligation excessive imposée aux contractants. L'Administration a jugé que l'on pou¬ vait concilier à la fois le souci de la sécurité des conventions et celui des habitudes des 'intéressés en restreignant, pour les personnes soumises aux statuts français, aux conventions pour lesquelles le Code civil exige cette — 23 — formalité, l'obligation de passer des actes authentiques. Les autres actes peuvent, comme par le passé, être rédigés sous la forme d'actes sous signa¬ tures privées, mais doivent, pour pouvoir être inscrits aux Livres fonciers, être revêtus d'une formule inscrite par le maire ou par le représentant de l'Autorité française et certifiant l'identité des parties et l'authenticité des signatures. D'autre part, en ce qui concerne les actes indigènes, le texte originaire du décret avait prévu que les notables certificateurs seraient obligatoirement ceux du domicile des contractants. Le décret modificatif, donnant plus de latitude aux intéressés et respectant les usages actuels, a admis que les actes indigènes pourront être certifiés soit par les notables du lieu du domicile de l'acheteur et du vendeur, soit par ceux de la situation des biens. Enfin, il a paru nécessaire de supprimer la disposition finale du décret qui prévoyait la désignation, dans les villes de Saigon et de Cholon, de nota¬ bles certificateurs qui n'existent plus dans ces importants centres urbains. L'on a jugé qu'il serait inopportun de ressusciter une institution qui a disparu parce que son fonctionnement ne correspondait plus aux besoins des propriétaires d'immeubles situés dans ces villes. Par contre, la dispa¬ rition correspondante, insérée dans le texte, applicable aux villes françaises du Tonkin et de l'Annam a été conservée, sur la demande expresse des magistrats de la Cour d'appel de Hanoï, qui ont estimé que les chefs de rue et de quartier n'ont pas cessé de jouer, dans ces villes, le rôle de notables instrumentâmes. Les décrets du 21 juillet 1925 furent promulgués, avec les modifications dont on vient d'indiquer l'essentiel, par arrêté du Gouverneur général du 7 janvier 1927 en ce qui concerne la Cochinchine, et par arrêté du 9 novem¬ bre 1927 en ce qui concerne les villes françaises du Tonkin et de l'Annam. Fidèle à la méthode prudente qui permet de n'avancer que sur un terrain minutieusement étudié.à l'avance, l'Administration a procédé par étapes : la réforme foncière a été d'abord expérimentée en Cochinchine, dans les grandes villes de Saïgon et de Cholon et dans la province rurale de Gocong. Les trois bureaux de la Conservation foncière affectés à ces trois ressorts ont commencé à fonctionner au cours du second semestre de 1927; les bureaux de la Conservation foncière de Hanoï et de Haïphong ont été ensuite ouverts au début de l'année 1929. L'expérience instituée par la création de ces bureaux a été suivie par l'Administration avec une extrême attention. L'autorité supérieure a tenu à se rendre compte d'une façon précise des répercussions diverses que pou¬ vait provoquer la réforme. Il était important de connaître de quelle façon les propriétaires indigènes allaient l'accueillir, quelle serait leur attitude en présence des enquêtes conduites sur les droits de propriété, l'appréciation qu'ils feraient des Titres délivrés. L'on pouvait craindre enfin que la procé¬ dure d'immatriculation fit renaître les litiges oubliés et en apparence réglés, dont la persistance latente est si longue chez les ruraux, et non pas seule¬ ment en Extrême-Orient. Toutes les discussions antérieures évoquent cette préoccupation. L'apparence d'une inquiétude, manifestée par les proprié¬ taires d'immeubles ruraux ou urbains, aurait, surtout dans les circonstances actuelles, risqué de discréditer et de condamner les mesures dont le Livre foncier est l'aboutissant. L'on comprend que l'autorité responsable de la tranquillité publique se soit entourée de précautions et ait procédé avec une extrême réserve. — 24 — Mais les résultats obtenus et constatés ont permis d'abandonner toute inquiétude. Les procédures de revision ont été, dans les villes comme dans les campagnes, conduites sans provoquer la moindre inquiétude de la part des propriétaires français et indigènes. Il est remarquable d'ailleurs que partout où on installe le système de l'immatriculation, que ce soit au Maroc, en Afrique Occidentale, à Madagascar ou en Indochine, on est appelé à constater l'empressement des populations indigènes à se soumettre à la nouvelle réglementation qui fournit un titre définitif dont les propriétaires comprennent immédiatement la valeur. Au début de l'année 1931, toute la province de Gocong, comprenant environ 12.000 propriétés, se trouve entièrement immatriculée; les Titres ont été retirés par les propriétaires. Or, la liste aujourd'hui close des oppositions sou¬ levées à l'encontre des droits inscrits n'a jamais comporté plus d'une vingtaine d'articles, dont les trois quarts ont fait l'objet d'arrangements amiables. Dans les villes, le travail d'enquête a été ralenti par l'enchevêtre¬ ment matériel des immeubles et aussi par la complexité des droits et charges qui les affectent. A Cholon, à Hanoï, à Haiphong, il a été particulièrement délicat de déterminer, au milieu d'un dédale de constructions, de passages et d'impasses, les droits de chaque propriétaire sur des emplacements qui sem¬ blaient communs. L'appel fréquent fait au crédit immobilier a réclamé, à Cholon et à Haiphong notamment, une attention extrême dans le dépouille¬ ment de la situation hypothécaire et l'établissement des bordereaux d'ins¬ cription nouveaux. Dans ces mêmes localités, on s'est aperçu que les droits immobiliers appartenant à des Chinois étaient souvent inscrits non pas au nom du propriétaire, mais à celui de l'enseigne commerciale. Les Conserva¬ teurs ont dû faire préciser régulièrement la personnalité des véritables ayant-droit dont l'identité se dissimulait sous les appellations parfois poétiques qu'affectionnent les entreprises célestes. Mais là aussi, la procédure d'immatriculation a provoqué une clarification quj n'a, pour ainsi dire, laissé subsister aucune contestation. La création des Titres exige enfin un travail extrêmement minutieux, plusieurs reports entre différents registres, l'établissement de références précises grâce auxquelles le Livre foncier acquiert toute sa valeur. Dans chacune des villes de Saïgon, de Cholon, de Hanoï et de Haiphong, plus d'un millier de Titres fonciers a été délivré et se trouve en circulation. Nulle part on n'a eu à signaler d'autres difficul¬ tés que celles qui sont normalement inséparables d'une entreprise de pareille envergure. * ** L'Administration de la Cochinchine, entièrement informée désormais, a pris la résolution d'intensifier l'application de la réforme. Un programme approuvé par le Gouverneur de cette Colonie a établi le plan d'après lequel seront successivement ouverts des bureaux dans les Provinces, suivant le degré d'urgence que présente dans chacune la réalisation de cette mesure et suivant aussi l'état d'avancement des travaux du cadastre. Les crédits correspondants à l'extension prévue en 1931 ont été inscrits au Budget de cet exercice. Il sera peut-être intéressant de trouver ici le schéma du plan adopté. — 25 — Au 31 décembre 1930, des bureaux fonciers fonctionnent dans les pro¬ vinces de Gocong et de Rach Gia, dans les villes de Saïgon et de Cholon. Provinces où seront ouverts des bureaux en 1931 : Mytho et Tanan (rattachées au bureau de Gocong dont le siège sera trans¬ porté à Mytho); Bentré ; Long-Xuyên ; Gia-Dinh; Baclieu-Sud; Provinces où seront ouverts des bureaux en 1932 : Vinh-Long et Sadec, avec siège à Vinh-Long; Soctrang et Baclieu-Nord avec siège à Baclieu; Chaudoc ; Provinces où seront ouverts des bureaux en 1933 : Cantho ; Travinh; Provinces où seront ouverts des bureaux en 193b : Cholon (province), avec siège au bureau de la Conservation foncière de la ville de Cholon. Les provinces de Tay-Ninh, Thudaumot, Bien-Hoa, Baria et Cap Saint Jacques pourront, vers la même époque, être rattachées au Bureau de la Conservation foncière de Saïgon pour l'immatriculation facultative. Ainsi l'on peut, sans présomption excessive, prévoir l'époque où toutes les pro¬ vinces de la Cochinchine bénéficieront de l'application du nouveau régime foncier, qui sera le seul en vigueur pour toutes les régions deltaïques de cette Colonie. — 26 - y CRITIQUES SOULEVÉES PAR L'APPLICATION DE LA LÉGISLATION DE « DROIT RÉEL » On a noté l'adhésion générale et volontaire des propriétaires à la réforme foncière. Le présent exposé serait incomplet s'il négligeait de rappeler les critiques et les oppositions qu'a soulevées la nouvelle législation. On peut, dans une étude objective de l'installation en Indochine du système nouveau de publicité immobilière, négliger toute une catégorie de reproches : ceux qui ne sont inspirés que par la défense d'un intérêt personnel, direct et étroit. L'on rangera au premier chef dans cette catégorie les revendications de tel ou tel service dont les membres se jugeaient indispensables au succès de la réforme, qu'ils condamnaient s'ils n'étaient pas appelés à la réaliser. Le fait qu'il y avait plusieurs prétendants, qui tous excipaient d'une espèce de prédestination, suffit à condamner des opinions aussi contradictoires qu'excessives. D'autre part certains hommes d'affaires se sont inquiétés de voir mettre en vigueur une organisation qui, par la révélation intégrale et la mise en évidence de tous les droits quelconques affectant une propriété, par le carac¬ tère irrévocable des inscriptions effectuées, rend matériellement et juridi¬ quement impossible le réveil des litiges éteints et diminue sans con¬ teste le nombre des procès. Il est inutile de s'attarder à discuter un tel grief, ou plutôt, s'il en était besoin, le système issu des décrets du 21 juillet 1925 y trouverait sa plus éclatante justification, le plus bel éloge des bienfaits qu'il apporte. D'autres ont, selon leurs situations opposées, amèrement blâmé la nécessité de l'authentification des actes destinés à être inscrits aux Livres fonciers, ou au contraire se sont indignés que cette authenticité ne restât pas un mono¬ pole enfermé dans la limite stricte de leurs intérêts. Ceci également est négligeable, le rédacteur du décret et les auteurs des amendements ayant eu le seul souci des intérêts des usagers qui, eux, ne se sont jamais plaints. Il faut toutefois noter que, contrairement aux alarmes causées par l'aveu¬ glement des intérêts, la facilité et la sécurité des transactions ne peuvent que favoriser par un retentissement d'ordre général tous ceux dont l'enri¬ chissement est lié à la prospérité collective. Plus dignes d'attention ont été les réserves formulées sous l'empire de préoccupations désintéressées. Les fonctionnaires d'autorité ont assez souvent manifesté une certaine appréhension en présence des mesures qui successivement spécialisent les . — 27 — diverses attributions qui leur étaient primitivement dévolues. Au début de l'organisation d'une Colonie, l'Administrateur, le Chef de province, centra¬ lise en ses mains tous les modes de l'activité administrative: représentant du pouvoir central, responsable du bon ordre, chargé de la direction politique de sa circonscription, il y perçoit l'impôt, y rend la justice, y dirige les tra¬ vaux publics et y tient les livres d'enregistrement des actes et les registres où s'inscrivent les acquisitions et les garanties, et le tout d'ailleurs souvent fort bien. Cependant, au fur et à mesure que l'administration devient plus com¬ plexe, ces divers organismes prennent peu à peu une vie propre et indépen¬ dante. II est naturel que parfois l'Administrateur considère ces démembre¬ ments successifs comme des diminutions d'autorité et regrette l'époque où, moteur unique donnant à tous les, rouages une impulsion harmonieuse, il trouvait dans la centralisation intégrale une plus grande facilité pour l'accomplissement de son rôle politique. L'attribution à un service spécia¬ lisé du soin d'établir et de conserver les Livres fonciers peut avoir au premier moment éveillé quelques regrets; mais il est juste de dire qu'il a toujours été loyalement reconnu, à l'épreuve de l'expérience, que le fonction¬ nement du service foncier faisait régner dans l'usage des droits immobiliers une sécurité influant sur l'ordre public de la façon la plus salutaire. La nouvelle législation est moins facilement acceptée par les magistrats, et c'est dans le milieu judiciaire que les résistances se sont manifestées et per¬ sistent avec le plus de vivacité. Les raisons de cette attitude sont principa¬ lement, pourrait-on dire, d'ordre psychologique : les magistrats, élevés à l'école du Code civil dont l'étude a nourri leur vie intellectuelle, ne peuvent admettre sans une véritable douleur que ce monument si parfait, plus ou moins adopté ou copié par toutes les législations modernes, soit dans une colonie française, l'objet de remaniements qu'ils jugent sacrilèges. Des cri¬ tiques passionnés ont vu dans l'irrévocabilité de l'immatriculation la consé¬ cration de l'injustice et de l'erreur; dans la suppression de l'hypothèque judiciaire un encouragement aux débiteurs de mauvaise foi; dans l'obli¬ gation imposée aux incapables de faire incrire leur hypothèque légale un refus de la protection due par la loi aux justiciables les plus intéressants. Est-il utile de rappeler que l'irrévocabilité de l'inscription au Livre foncier du droit de propriété révélé par la procédure d'immatriculation est la base même du système qui, sans cela, n'offre plus la sécurité qui en est la raison essentielle? Si à la vérité, certaines erreurs, certaines fausses attributions, bien rares d'ailleurs, peuvent être stabilisées par leur irrévocable inscription au Livre foncier, ne voit-on pas là la rançon de cette stabilité, de cette sécurité générale dont bénéficie désormais la propriété immobilière? L'on ne doit pas oublier au reste que toutes les erreurs ne provenant pas du fait des intéressés peuvent entraîner l'indemnisation de la partie lésée par la mise en cause soit du Conservateur, soit du gérant du compte d'assurance. Rappellera-t-on que la suppression de l'hypothèque judiciaire qui laisse subsister intégralement le principe de sens et de droit commun que « les biens du débiteur sont le gage général de ses créanciers » n'affecte en aucune façon la possibilité pour le créancier d'immobiliser et de saisir suivant une procédure simplifiée et d'une rapidité accrue les biens de son débiteur? Que seul disparaît la faculté pour le créancier le plus diligent de se créer de sa propre initiative et à rencontre des autres créanciers chirographaires, un privilège, une préférence qui ne peuvent plus être acquis que convention- nellement? Il faut se souvenir qu'en Indochine l'hypothèque judiciaire était l'outil de prédilection des usuriers professionnels, des fameux chettys indiens. Est-il enfin nécessaire de rappeler que l'hypothèque générale, occulte et indéterminée des incapables leur a plus coûté qu'elle ne leur a servi, et que le système qui prescrit de mettre à jour tous les droits et toutes les obliga¬ tions, d'en préciser l'étendue et l'objet est le seul logique, le seul qui tienne compte de l'intérêt bien entendu de toutes les parties? Si la résistance des magistrats était demeurée dans le domaine de la dis¬ cussion théorique et des regrets sentimentaux, nul n'aurait pu s'en forma¬ liser. Mais on peut regretter que certaines décisions judiciaires aient, tant dans leurs considérants que dans leur dispositif, manifesté la volonté for¬ melle de méconnaître la législation nouvelle dans ses principes les plus indiscutables et les plus essentiels. Il y a lieu d'espérer que cette tendance qui, en se généralisant, constitue¬ rait pour l'avenir de la réforme foncière une menace des plus inquiétantes, fera place à une jurisprudence mieux éclairée et plus consciente du droit véritable. VI DÉVELOPPEMENT DE LA RÉFORME FONCIÈRE DANS LES PAYS AUTRES QUE LA COCHÏNCHÏNE Encore que l'application du régime foncier de droit réel n'ait été effec¬ tuée jusqu'ici que dans la Colonie française de Cochinchine et dans les villes françaises de Hanoï et de Haïphong, il n'est pas inutile de décrire la situation au point de vue foncier des autres pays de l'Union indochinoise et d'indiquer les raisons qui ont jusqu'ici arrêté l'essor de la réforme en ces pays. Tout ce qui a été dit de la situation juridique privée des immeubles en Cochinchine s'applique au Tonkin et à l'Annam, où l'on doit cependant signaler l'existence d'un code civil annamite qui a fait l'objet d'une ordon¬ nance royale en date du 4 octobre 1921, promulguée par arrêté du Gouver¬ neur général du 9 novembre 1921, et comportant un chapitre relatif « aux biens et à leur immatriculation ». Toutefois, la persistance dans ces deux pays des droits du Souverain protégé exigerait le cas échéant une adapta¬ tion en ce qui concerne la disposition de l'article 15 du décret du 21 juil¬ let 1925, aux termes duquel les biens vacants et sans maître appartiennent à l'Etat. En Annam, tout au moins — la situation assez indécise du Tonkin ne permettant pas une affirmation aussi formelle — en Annam, l'Etat est représenté par la Cour de Huê, et c'est à ce Souverain que devraient revenir les biens vacants et sans maître. Cette disposition n'est pas sans présenter des difficultés d'application quand il s'agira des biens des Européens. Il y aurait là un point à régler. Il n'est pas inutile de signaler que M. Boudillon a été conduit ici à émet¬ tre une théorie qu'il importe de connaître, même si on n'en accepte pas les conclusions. Dans son rapport de 1924, le savant juriste, s'appuyant d'une part sur un certain arrêt de la Cour d'Appel de Saïgon (1) resté d'ailleurs, semble-t-il, isolé, et de l'autre sur les ordonnances royales du 1er octobre 1888 et du 27 septembre 1897 et sur les arrêtés du Gouverneur général du 4 octobre 1888 et du 8 septembre 1897, arrive aux conclusions suivantes : 1° Toutes les propriétés des Européens en Annam et au Tonkin sont frappées de précarité si les actes qui les constituent n'ont pas été soumis à la formalité de l'Enregistrement en Chancellerie; 2° Le Gouvernement annamite, qui a conservé la plupart des attributions afférentes à la souveraineté, reste maître de la législation applicable à ses sujets, notamment en matière foncière, et juge suprême de leurs contes¬ tations. (!) Arrêt du 29 décembre 1922, Cour de Saigon, — 30 — La conséquence logique de ces principes conduit M. Boudillon à con¬ seiller en matière foncière au Tonkin (Protectorat) et en Annam, la coexis¬ tence de deux statuts, l'un applicable aux propriétés détenues par des indi¬ gènes sujets du Roi d'Annam; l'autre aux propriétés détenues par les Européens. Bien plus, même en ce qui concerne ces dernières, le régime qui leur sera appliqué n'aura d'existence que par le fait de l'appropriation des biens par des Européens, ces immeubles devant, s'ils sont rétrocédés à des Annamites, être à nouveau soumis à la législation édictée par leur souverain. A cet effet, ce ne seront pas les parcelles elles-mêmes, en d'autres termes, « la propriété immeuble » qui sera inscrite au Livre foncier, mais « la pro¬ priété droit », et cette inscription et le feuillet oii elle est constatée n'auront plus le caractère de permanence qui est la base du système des droits réels, un feuillet pouvant être annulé si le droit qui y est inscrit passe aux mains d'un Annamite. Quelque admiration que l'on ait pour l'impeccable conscience juridique du savant auteur, on ne peut s'empêcher de trouver cette procédure bien compliquée. M. Boudillon mieux que personne a su indiquer combien l'unification en matière foncière présente d'avantages. Or, avec ce système, l'on aurait au Tonkin : 1° Le régime des villes de Hanoï et Haïphong (droit réel avec toutes ses conséquences); 2° Le régime des propriétés européennes immatriculées en dehors de ces villes: droit réel mitigé (« propriété droit », avec extinction possible du droit et suppression du feuillet réel) ; 3° Droit indigène (code civil annamite, ordonnance du 4 octobre 1921 et son complément éventuel) ; 4° Sans préjudice de la situation des biens immobiliers détenus par les Français et « enregistrés par le Service compétent », mais non obligatoire¬ ment soumis à l'immatriculation. Il semble difficile d'adopter cette façon de voir. On peut objecter que, tout au moins en ce qui concerne le Tonkin, les textes applicables sont l'ordonnance du 27 septembre 1897, par laquelle le Roi d'Annam a délégué au Gouverneur général les pouvoirs les plus étendus et l'arrêté du Gouverneur général du 30 décembre 1899 rendant cette ordonnance applicable au Tonkin, et prescrivant que l'Enregistrement par le Service compétent de l'acte d'ac¬ quisition suffira à attribuer aux biens acquis par les citoyens et protégés français le bénéfice des dispositions de l'ordonnance. Il est extrêmement important d'examiner les raisons pour lesquelles M. Boudillon, champion déterminé de l'unification en matière de législa¬ tion foncière, ne croit pas pouvoir réaliser cette réforme en pays de Protec¬ torat. Or, il semble que sa répugnance provient uniquement d'un scrupule à la vérité excessif, et relatif à la légitimité constitutionnelle, pourrait-on •dire, d'une telle tentative. Dans le rapport établi à la suite de sa mission de 1913, il s'exprime ainsi : « Sans doute, présentés sous cette forme, ces textes semblent maintenir la dualité de régimes fonciers précédemment critiqués, mais il est à consi¬ dérer avant toute chose, qu'il ne doit être porté aucune atteinte aux textes de 1888 et de 1897 dont il y a lieu au contraire d'affirmer autant que pos¬ sible la constante observation pour bien convaincre la Cour de Huê de la — 31 — ferme intention du Gouvernement français de ne pas demander de conces¬ sions nouvelles à l'occasion de la réforme poursuivie... » (Le. régime de la propriété foncière, page 316.) Il est permis de ne pas partager l'opinion de M. Boudillon sur ce point. L'ordonnance de 1897, qui a d'ailleurs remplacé et abrogé celle de 1888, n'est pas un instrument diplomatique, un traité auquel il faudrait recon¬ naître un caractère quasi intangible. Elle n'a point empêché, en matière forestière notamment, l'institution d'une réglementation très complète qui permet à l'autorité française la conservation et l'exploitation des forêts. C'est un acte d'administration; rien n'empêche de constater, d'accord avec le Souverain protégé, que cette réglementation, vieille maintenant de 34 ans, ne correspond plus en matière foncière aux nécessités d'une organisation plus évoluée. Bien plus, le Souverain lui-même l'a déjà reconnu en promul¬ guant le Code civil annamite. Le remède à la situation actuelle est tout indiqué: c'est que les deux pouvoirs intéressés, le Souverain protégé et le Gouverneur général représentant la puissance protectrice, édictent d'accord les règles uniques qui s'imposeront à l'ensemble de la propriété immobilière. Quoi qu'il en soit de cette discussion théorique, il faut reconnaître qu'elle ne porte que sur des interprétations de textes où les questions de forme occupent la place principale. Il semble qu'un accord entre les deux pouvoirs qui régissent l'Annam et le Tonkin suffirait à faire disparaître toutes les difficultés de cet ordre. Les considérations qui ont réellement mis obstacle à l'introduction en Annam et au Tonkin d'une réglementation issue des décrets du 21 juil¬ let 1925 sont d'un autre ordre. L'Administration des Pays de Protectorat a redouté de voir introduire, parmi des populations jugées différentes de celles de la Cochinchine, une législation qu'elle estime peu adaptée à leurs coutumes et une réglementa¬ tion qu'elle juge trop compliquée pour leurs besoins actuels. Et tant en Annam qu'au Tonkin, on a élaboré une réglementation strictement locale s'appliquant uniquement aux immeubles indigènes, que l'on a appelée « Conservation Cadastrale » et qui, pour les procédés employés, la manu¬ tention, la tenue des registres et l'établissement des documents divers, est manifestement calquée sur la procédure de l'immatriculation. On a eu soin d'autre part de spécifier qu'il ne s'agit que d'une mesure provisoire, d'un essai devant préparer la base d'une organisation définitive. On peut justement reprocher à un tel expédient d'être aussi compliqué que le Livre foncier régulier, dont il constitue une espèce de contrefaçon, d'avoir les mêmes inconvénients — si inconvénients il y a — et d'entraîner les mêmes frais — mais par contre de ne pas comporter les avantages du Livre foncier, et notamment l'unité du statut, de ne pas en avoir la valeur juridique et de ne pas offrir la sécurité qui en est la justification et l'essence même. Il faut regretter de voir présenter comme un mérite cette tare qui enlève aux Titres la possibilité d'être reconnus par un tribunal, et par conséquent une utilité quelconque. Dira-t-on que l'on ne doit pas passer sans transition d'un état informe à un régime précis et stable? qu'il faut ménager un stade d'apprivoisement pour les propriétaires? Une pareille théorie est purement spécieuse. Il est inutile et dangereux, quand on se trouve en présence d'une situation entière, d'une table rase, de commencer par imposer, toujours à grands frais, un — 32 — outillage provisoire et rudimentaire, quand il est possible de créer une organisation définitive et parfaite. Il faut, en effet, considérer que les frais de la seconde ne sont pas supérieurs à ceux du premier, mais qu'ils ont l'avantage d'être acquittés une fois pour toutes, tandis que les dépenses du provisoire sont perdues; que d'autre part les usagers ne font, en ce qui les concerne, aucune espèce de différence entre une organisation provisoire et une organisation définitive : s'ils doivent être dérangés ou inquiétés, ils le sont autant par l'une que par l'autre; ici encore la seule différence est que, dans le premier cas, tout est à recommencer sur nouveaux frais au bout de quelque temps, l'expérience étant par définition dépourvue de valeur juridique, tandis que, dans le second, l'affaire est réglée une fois pour toutes et a comme contre-partie des avantages juridiques. Enfin, il est essentiel de considérer que le Livre foncier régulier n'est éta¬ bli qu'à la suite d'une enquête constituant la véritable période de transition et dont l'organe est un véritable Livre foncier provisoire, mais le tout en liaison intime, cohérente, réglementée avec le Livre foncier définitif et juri- ridique dont la création est le but des efforts poursuivis. Encore qu'il faille regretter la décision à laquelle l'Administration s'est arrêtée pour les pays de protectorat, il faut cependant mentionner ici une difficulté considérable que représenterait l'immatriculation des terres dans certaines des plaines deltaïques du Tonkin et de l'Annam. Dans nombre de provinces, la surpopulation, les conditions sociales et économiques, la répu¬ gnance que même les paysans les plus pauvres éprouvent à s'expatrier, ont provoqué un excessif morcellement des terres. Certaines régions du Tonkin comptent à la fois parmi les plus peuplées du globe, et parmi celles où la propriété foncière est le plus divisée. L'affectation d'un feuillet à chaque parcelle conduirait à une impossibilité matérielle. Dans la province de Ha- uông par exemple, limitrophe de la ville de Hanoï, on estime le nombre des parcelles à 1.500.000, ce qui demanderait pour le Livre foncier une bibliothè¬ que de 7.500 registres de 200 pages chacun, à un feuillet par parcelle! On a la mesure de cette extraordinaire disproportion si l'on songe qu'en Cochinchine la province la plus importante compte environ 50.000 propriétés, que l'imma¬ triculation y nécessite 250 volumes, qu'enfin il y a en certaines provinces du Tonkin plus de propriétés que dans la Cochinchine tout entière. C'est là qu'il faut situer la difficulté véritable de l'application au Tonkin et en Annam d'un mode quelconque d'enregistrement des propriétés. Cette difficulté d'ordre matériel, et non d'ordre juridique, n'est pas insoluble. Le groupement des parcelles par propriétaire, une disposition topographique spéciale la résoudraient. L'institution de la « Conservation Cadastrale » n'a d'ailleurs pas non plus sur ce point apporté une méthode nouvelle. * * ❖ Les mêmes répugnances ont provoqué au Cambodge la même procédure, sous la forme de l'institution d'une « Conservation Cadastrale ». En ce pays, d'ailleurs, l'immatriculation obligatoire et générale ne peut être envisagée que dans les plaines où domine la culture du riz, le reste demeurant sous le régime de l'immatriculation volontaire et spécialisée. L'existence d'une codi¬ fication complète des lois civiles (ordonnance royale du 25 février 1920) ren¬ drait aisée l'application des principes issns du Décret du 21 juillet 1925. Et cependant, un particularisme excessif, une méfiance certainement injustifiée — 33 — ont amené l'adoption an Cambodge, comme en Annam, comme au Tonkin, d'une troisième version qui n'est certes pas originale, qui s'inspire de la législation du Livre foncier tout en se défendant d'en accepter les principes, et qui là aussi, en a la complexité et aucun des avantages. Quoiqu'il en soit, le Cambodge s'est absolument refusé jusqu'à présent à permettre un essai de la réforme foncière sur la base de l'unité de statut, conformément aux principes des décrets de 1925. * * * Enfin, au Laos, la création d'un bureau foncier, prévu au décret du 21 juil¬ let 1925 spécial à ce pays, déjà publié, mais non encore promulgué, ne sau¬ rait tarder davantage. Le degré d'avancement économique n'est pas encore égal à celui des autres parties de l'Indochine, et le Livre foncier réalisé par procédures isolées, sur réquisitions expresses des propriétaires, y sera un instrument dont bénéficiera surtout la colonisation. Il ne faut point, malgré tant de difficultés rencontrées pour l'extension de la réforme foncière, désespérer de la voir assez prochainement appliquée dans les pays de l'Indochine qui paraissent jusqu'à présent les pins réfrac- taiï-es à son adoption. Tout ce qui semble nouveauté subit un stage de méfiance et de discussion qui, croit-on d'abord, en condamne le principe même. Mais que, de quelque côté, la réussite s'affirme, toutes les résistances cèdent. L'indéniable succès obtenu en Cochinchine, les résultats acquis, le développement pris vont constituer la meilleure des démonstrations, la plus efficace propagande. Et l'on peut presque déterminer le moment où chacun s'étonnera et se plaindra de ne pas voir fonctionner, dans le ressort de son activité, le Livre foncier unique, définitif et inattaquable, organe de pros¬ périté, de sécurité et de paix publiques. — 34 — VII ORGANISATION DU SERVICE DE LA PROPRIÉTÉ FONCIÈRE Le décret organique réglementant la réforme foncière prévoyait, d'une part, que les détails d'application de la nouvelle législation seraient réglés par arrêtés du Gouverneur général de l'Indochine, d'autre part, que les fonc¬ tions de conservateur de la propriété foncière seraient remplies par des fonc¬ tionnaires désignés par le Gouverneur général. En exécution de ces prescriptions, un arrêté du Gouverneur général en date du 12 février 1927 a réglementé le service de la propriété foncière, fixant les attributions des divers agents : chef de service, conservateurs, géomètres, secrétaires-interprètes, la manutention en général, la tenue des registres, la comptabilité. Un autre arrêté de même date a fixé le taux et la perception des salaires qui constituent la rétribution des conservateurs comme contre-partie des services rendus au public, et de la responsabilité encourue de ce chef. Par contre, les taxes d'inscription et d'immatriculation qui reviennent aux bud¬ gets locaux ont été établies respectivement par une délibération du Conseil colonial de la Cochinchine et par un arrêté du Résident supérieur au Ton- kin. Il faut noter que la contribution demandée aux particuliers est très faible. L'immatriculation d'un immeuble coûte en tout, y compris la déli¬ vrance du titre, les frais de plan, etc., 0,16 % de la valeur de cet immeuble en Cochinchine; 0,26 % au Tonkin. L'inscription au Livre foncier d'un acte de mutation ou d'engagement coûte uniformément 0,20 % du prix ou de la somme indiquée; la consultation des Livres fonciers comporte des frais infimes dépassant bien rarement 1 $ 00 par état. L'Administration a voulu que la réforme ne se présentât pas sous un aspect fiscal, mais que, bien au contraire, elle marquât une diminution des frais réclamés aux propriétaires d'immeubles. Enfin, se conformant aux termes du décret, le Gouverneur général a, par arrêté du 16 février 1927, réglementé le personnel des conservateurs de la propriété foncière, dont le recrutement se fera, en principe, par voie de con¬ cours; à titre de mesure transitoire, pendant la période d'organisation du Service, il est prévu qu'il sera fait appel, pour remplir les fonctions de con¬ servateurs, à des fonctionnaires des autres services, comptant une certaine ancienneté et remplissant certaines conditions d'aptitudes; les candidats titu¬ laires des diplômes de licenciés et de docteurs en droit bénéficient d'une pré¬ férence dans le choix auquel il est procédé. Le chef de service est chargé, sous l'autorité du directeur des Finances, de surveiller l'établissement et l'application de la réforme foncière en Indo¬ chine; les conservateurs conduisent les enquêtes à fin d'immatriculation, délivrent les titres fonciers, assurent le service des Livres fonciers, sous leur responsabilité personnelle et pécuniaire, garantie par un assez fort caution¬ nement (50.000 francs en général). Pendant la période où les propriétés ne sont pas encore immatriculées, ils sont tenus de se conformer strictement aux instructions qui leur sont données pour l'ouverture des Livres fonciers, de manière à organiser le service dans les meilleures conditions possibles, avec le minimum de gêne et de dérangement pour le public. Après l'établis¬ sement des Livres fonciers, les conservateurs jouissent, dans l'accomplisse¬ ment des formalités auxquelles ils sont tenus de procéder, d'une indépen¬ dance complète. Au début de l'année 1931, le personnel du Service de la propriété foncière comprend : Un inspecteur de l'Enregistrement chargé des fonctions de chef de ser¬ vice; Deux conservateurs titulaires; Trois conservateurs stagiaires provenant du service des douanes, du corps des ingénieurs-géomètres et de celui des receveurs de l'Enregistrement. Dans les villes de Hanoï et de Haïphong, les fonctions de conservateurs de la propriété foncière sont exercées par les conservateurs des hypothè¬ ques de ces deux villes, cumulativement avec leurs fonctions hypothécaires. Chaque conservateur est assisté d'un ingénieur-géomètre, aidé lui-même d'agents techniques indigènes et de dessinateurs. Uu assez nombreux per¬ sonnel de secrétaires et de traducteurs est également adjoint à chaque con¬ servateur pour l'exécution des détails du service. Dans l'ensemble, les résultats obtenus par ce personnel sont satisfaisants. Les conservateurs ont su intéresser le public à la réforme. On n'a à signaler nulle part de conflit entre les usagers et les fonctionnaires chargés d'appli¬ quer la nouvelle réglementation foncière. Toutefois, on ne saurait se dis¬ simuler que le mode de recrutement qui a été seul utilisé jusqu'ici et qui consiste à faire appel, pour l'emploi de conservateur de la propriété fon¬ cière, à des agents empruntés à d'autres services, ne saurait être prolongé davantage. Il a, certes, permis de faire d'excellentes recrues; mais il ne paraît plus correspondre au programme qui prévoit l'extension rapide de la ré¬ forme foncière à la Cochinchine tout entière. Pour former un corps de spé¬ cialistes, de formation juridique, exclusivement affectés à la tâche de mener à bien dans le moindre délai l'œuvre considérable que représente l'établis¬ sement du Livre foncier, il semble que la meilleure méthode serait de faire appel, par voie de concours, à des jeunes gens pourvus déjà du diplôme de la Licence en droit. Ces agents, qui sauraient que leur avenir dépend uni¬ quement de la carrière qu'ils ont choisie, permettront d'assurer un fonc¬ tionnement normal de l'institution du Livre foncier. Ils ne seront appelés à gérer un bureau qu'après avoir servi en surnombre, sous les ordres d'un ♦ — 36 — conservateur expérimenté, et après avoir fait preuve des aptitudes et de l'acquit indispensable. L'on pourrait, d'autre part, recruter exclusivement pour ce service des agents de IgEnregistrement, que leurs fonctions habi¬ tuelles semblent particulièrement préparer à l'exécution de la réforme fon¬ cière. Ces suggestions n'ont point été accueillies jusqu'ici. L'Administration supérieure a constamment manifesté le désir de ne pas voir introduire en Indochine, par appel extérieur, de nouveaux fonctionnaires. Elle a estimé en outre que des agents connaissant le pays étaient plus qualifiés que des fonctionnaires nouvellement recrutés, pour assurer une tâche aussi déli¬ cate que celle de conservateur de la propriété foncière; enfin, la possibilité de reverser immédiatement dans leurs corps d'origine ceux qui ne se mon¬ treraient pas aptes , a semblé offrir une garantie particulièrement appré¬ ciable. Sans méconnaître la valeur de ces arguments, on doit constater que, psychologiquement, le recrutement de fonctionnaires en service comporte en lui-même une tare fondamentale. On fait appel, par définition, à des gens qui ne sont pas satisfaits de leur situation actuelle, mais qui, en quit¬ tant cette situation, lui reconnaissent parfois, tout à coup, des avantages qu'ils n'avaient jamais aperçus jusque-là. Ceux qu'on leur offre leur parais¬ sent une compensation à peine suffisante à ceux qu'ils croient alors avoir perdus. S'il est, comme on l'a dit plus haut, d'excellentes recrues, il en est de médiocres; et, même parmi les bonnes, il en est qui souhaitent réintégrer leurs anciennes fonctions, ce qui crée pour le service de la propriété fon¬ cière une instabilité des plus dommageables. Il semble que désormais le temps des mesures transitoires et de fortune est passé; il serait anormal de continuer à essayer de recruter par le milieu, en négligeant totalement la base, un corps dont la spécialisation a été reconnue indispensable. Là aussi, il importe de pouvoir compter, pour l'exécution d'un programme défi¬ nitif, sur un recrutement régulier du personnel d'exécution. ■aïjUMfcii — 37 — VIII ACHÈVEMENT DU CADASTRE EN INDOCHINE LEVÉS PAR AVION On ne saurait terminer la présente étude sans signaler le rôle particuliè¬ rement important dévolu au Service du Cadastre dans l'exécution du Livre foncier. L'extension des procédures d'immatriculation est conditionnée par l'établissement d'un cadastre exact et à jour. Là où il n'y a pas de cadas¬ tre, là où le cadastre est mal établi, il est bien dangereux de créer un Livre foncier définitif et inattaquable, et on a vu qu'en Cochinchine la création des Conservations Foncières dans les provinces est subordonnée à l'achè¬ vement, ou à la correction des plans. Pour diverses causes, dont la prin¬ cipale est la dispersion des programmes et le défaut d'une action direc¬ trice. l'effort accompli jusqu'à présent pour les levés de plans en Indochine a été fragmentaire; d'autre part, le travail effectué autrefois a presque tou¬ jours besoin d'être revu avant d'être utilisé pour des fins aussi précises que celles que réclame le Livre foncier. Or, le procédé de la photographie aérienne, qui s'est développé depuis la guerre pour la confection des plans cadastraux, est maintenant remarquablement mis au point. Il disposé à Hanoï d'un laboratoire admirablement outillé. Il n'est pas utile de rappeler ici les avantages de la photographie aérienne, qui substitue au travail-lent, pénible et coûteux des opérateurs peinant à terre un levé instantané, fruit de quelques heures de vol, et une restitution effectuée à loisir dans un labo¬ ratoire avec toute la précision désirable. Ce fait brutal et incontestable de¬ vrait dispenser de toute hésitation en ce qui concerne l'opportunité d'avoir recours à la méthode aérienne. Vainement on dira que cette méthode ne dispense pas de travailler sur le terrain pour compléter ce que la photogra¬ phie n'a pas reproduit. Vainement on épiloguera sur la proportion variable des terrains cachés par les inondations, les arbres, les constructions et dont le levé doit être fait par les anciens procédés. Ces discussions paraissent tout à fait superflues. Quiconque a seulement jeté les yeux sur une photo¬ graphie prise d'un avion ne doutera pas que, dans l'immense majorité des cas, une portion considérable du plan est faite automatiquement. Il faut, certes, compléter le travail de l'appareil. Mais il tombe sous le sens que, si une grande partie de la besogne est faite d'avance, l'achèvement de l'œuvre entreprise sera singulièrement avancé. On hésite à énoncer une telle propo¬ sition, qui a les caractères de l'évidence. La photographie aérienne présente un autre avantage dont la démons¬ tration semble également inutile. Sa sincérité ne peut être mise en défaut; ses résultats, on l'a souvent répété, mais on ne saurait trop y insister, sont « autocontrôlables » ; toute possibilité d'omettre une parcelle, de supprimer — 38 — une propriété, est rigoureusement bannie. Dans un pays où l'interprétation des plans donne lieu à tant de discussions, d'expertises, de contestations et de conflits, une pareille qualité est inestimable. II semble que, dans ces conditions, tout levé de plan en Indochine de¬ vrait comporter la collaboration du Service Géographique pour l'utilisation de la triangulation, du Service de l'Aviation pour le levé général et la fixation des détails du terrain perceptibles à l'objectif photographique, du laboratoire de restitution pour le redressement et la mise à l'échelle, et enfin du Service, du Cadastre pour le compléter. Il ne manque peut-être, pour réaliser cette harmonie, que l'organe directeur et régulateur assignant à chacun sa tâche et veillant à la bonne entente de tous les collaborateurs attachés à la même œuvre. Cette indispensable entente n'est pas impossible. Elle permettrait de hâter, beaucoup plus qu'on ne le croit communément, l'achèvement du cadastre indochinois auquel est si étroitement lié le développement du système de droit réel. TABLE DES MATIÈRES Introduction ^ I. — Condition des terres en Indochine •' A. Conditions physiques ^ B. Conditions juridiques. Terres annamites : Cochinchine, Tonkin, Annam 10 II. — Le conflit de législation ^ III. — Le système dit de « droit réel » IV. — La réalisation de la réforme foncière en Cochinchine et dans les villes françaises du Tonkin 22 V. — Critiques soulevées par l'application de la législation de droit réel » 20 VI. — Développement de la réforme foncière dans les pays autres que la Cochinchine 29 VII. — Organisation du service de la propriété foncière 34 VIII. — Achèvement du Cadastre en Indochine Levés par avion FINISTÈRE DES COLONIES £ OnOociline RÉPUBLIQUE FRANÇAISE LIBERTÉ — ÉGALITÉ — FRATERNITÉ VILLE DE HANOI (Î0n0eri3att0n be la propriété foncier?. ical ? inetcttotiop, (Te* chirng nhân cîà vô s6) y O cri O a. ^H-6LrUT2. ■ I Ce/iU^te &JÊm & Sltte ^O tXCl&t Tê _ y, / j, U/ / c&é4* VCC jwtCtéfc <3^ ^£2 c-o-^7a ncr ^yi-ot^-n-ce. c/a Ç ./,/ / <~^-^> ■£- / , ab f-tm SECTION I. — DÉSIGNATION ET DESCRIPTION DE L IMMEUBLE (CM va îà rô bât dôag sin) Nature et consistance de l'immeuble (3) : (Bât dông «an làm bing Itifr gi hay Ihu^c vé hçag aêo) ~^h&LCa.T3.L LjL-nc. c-(Tïia£nG^cM-an---a. eJ~kyi e.i n rirt 1&>! n CL_ y'çrlmë tsvte^LiAj^i c Ê-î« Contenance (4) : Q u.a.&r m n /rfoZerf éstgyïte'. arfnyiyl aeriez-Â/yle' Formalité requise le cinq 19 dû BORDEREAU ANALYTIQUE (Tô- giii càc cliéu biên à bàng trên) Registre des dégâts j? mentionné à 7n -y>fir.//ym y Vo/e , n"ASJ 1NSCRIPTION RADIATIONS l3^eu lit aurf. a-o/~e. y] -Ainsi m'. cg'g TL-, 710/n.iAL gl~ érfano/. Z MODIFICATIONS Û." ~S- HrfLÛ—OC. °t?ei crfuH. nmi es /izet r ckLt CZLC. srfuA l'éjL- --rfoSOCsyl. _Q.t3Z.JZtOOO est/g(T „ ' l on. er. se r. t.nCeAe'C.. erfc. zut-SZ^'-o-Zi. --fi est/ a. ts/cs. ne/zz. f s szuei eZL. _=£ tfe. e.1.. Qjayin.ri/'t.t nie ia-u.2en ,ZL>- sz.œnmcs/.-^jtt ^h.otASU- si azÀziei . ç cèic. -joc-Lsesi £Zzi- -izené. erft.lt.-. -O.Lrf. u est du>ic crfe . este ahié.. e/ dea. txc.c.eGQas.'i&S .eztizz-o. ta.tz-c-an c . escoeJelz-oK. znl Tly ttySAX. r'tnn v> £ enlssi de- d^n<^c-z^f2dtù?n< & à. ^cWè<^ de dïuu^~. . 0/ ; jJif* ?? 0 L 1 d Q-tL-TL-C^- ~zy2-&y mudrzeutsd r.erz^ dl é? 77. /■& / i^e doixù&cjaXeux de Col propriété jrmeiète, MODIFICATIONS INSCRIPTION MINISTERE DES COLONIES GOUVERNEMENT -GÉNÉRAL DE L'INDOCHINE RÉPUBLIQUE FRANÇAISE LIBERTÉ - ÉGALITÉ - FRATERNITÉ amot/ Conservation de la Propriété foncière (Sù bâo-lliù rîiën-thÔ) Bureau de HANOI D TITRE FONCIER (Bâng-khoân rîiën - IhÔ) N£ um INSÉRÉ AU LIVRE FONCIER HANOI n (PETIT LAC) VOL" r Feuillet 108 Coût : BORDEREAUX ANALYTIQUES DES ACTES ET ÉCRITS DÉPOSÉS AU BUREAU DE LA CONSERVATION DE LA PROPRIÉTÉ FONCIÈRE DE HANOI _ . ET MENTIONNÉS AU TITRE FONCIER, N° 4 08 INSÉRÉ AU LIVRE FONCIER D H AN O 1 ( PETIT-LAC ) VOL'—I F° 1 08 DONT COPIE PRÉCÈDE (Tù giài câc diéu biên {y bàng trên) fcodele N» ip C F - Indochine. Art. 361 — Q. T 18 kg-Rp. 366 - I.D.Ï 0. - Htnoi, 1918. GOUVERNEMENT GÉNÉRAL. GBKH^^^îBSgSEM SEBglBE DE L'INDOCHINE ~ CONSERVATION BUREAU ^ H*nn, DE LA PROPRIÉTÉ FONCIÈRE LIVRE FONCIER de Mr?noi d Pehf Lac FORMALITÉ REQUISE lu _ Ci n^> Tnt71 193jGL REGISTRE DÉS DÉPÔTS Vol' / n «-15M modifications inscriptions radiations "Z^ccoan/ irio&i/tori *./Yec-/u.ee cuu. eB u /*fc /c >z <3. cx?7r)intsçclu. To n J/Ti aCu a/ex Fia./ 7770710 yncFyieu^'cen l cnry/ney: num£/lo oex , ~Fl o 7m> m. o et lcotl aie Fa. Fnoynce/c Fonce zeie. a. A/cxtio/, a ehcàml ~la. -^frio ce.àlu7ic ait ictsuoeoTl cFm -^lo^rii â/eyo im-mo £ ê/ltjG ex/c la. l/e F/t de. l/a ■ 7iy\£g 771 une. c cm o F a*. J a. e/aye. en Tna^o.h'r mz l aotc c cruel j d u ne C. ' m du ZxF- e m - 7n ex /\ l eu /*. -o a ur Fj m' "Fen l m c eu ?Fj au. o uF y cm ~Fe m tt eu F/J. t- 771771 e/Jxe cu/l ■oauui FI n T e3u a J\c iri7 a A «Foule. , a s : 7 * F e 77177 eu oemo (mma.- J[c euu Ftsi a 'P c^u-aJe tn. JICLX(_ r a?LU âne LTi nj? J aeuaccnyc C.J FJcril 0^/^ a. 7170 c yuu c FI /ouJ. en/ m cll a>1 ■tean / inscriptions iJcenL è/c ace. ocêusi. 72^uye>} r? co mrr?eA.j.a.71 £j de m tu. ~ ar //cl nen -teuc. deso ru? euAK> te J .0 0 > deux Cmm^cx :metJ «ta/7 c cri ef Jndso z> te te. tx n/i te nen te.ee c. 71? ~Xj en ^ ce 77^ j c c Je. Jcx /ctenc. J m e. cUs- 171 lJJeX^_ «L de. £7^o "teg JTef CX.Z. Çjhio' oifrcc de. //ado n0 } -te^c ern ■% <- Y eux f . ■de-é me / ifiué <*7,1 cp exacte. zsJrTp J ^soceA. a. es o est ex. nCpAxeso C te *o cce ù cm ^ ex c. /c. Oazx/o ncx-ïiip -jdlcv&o m do./x dix oee^c doecà 77ie J ncexd c.e.m é hensb é e ri 1 ex Jn c. €■/ JayisJcsixJ tec. oclzc. S ç^o é e m Z7 te* me- ex de. n ce.m est o ~~lden eï edex -tfoUÏ da. ~d o c e. eduA t. /Oyhtee. exd. teey -te an ~JJ ydan axxx. dente ^^c ?c Ji bri ~£> n c emisy & jxst enct. j ~~d e m m tes. te ce - a!aveu*? a/t-tic/" o. c/e ' t-rrima-hc - c*Â. a**. J.eu\i- fonct-éA. c/c //«tkt* C Pc/'i/ J.&C) acte* me. 27n Pc**- /A *> £ dieux/" <7CrtAP> ~?e m ex m «A ifern e/ 7c /ihc ydte cl est c cristisylon cda t7 è CL c/c ' (Jt-Jt-IAL. CXCX te/lO^rlL 't. /clcàc souso . m a mm c. df Hdno/; Je c/njr 771 Ld 7ieced ccri ê te 71 Jt. /.a C»n**rr*Jeyr d* J* Pfo^rtc/e foncjO're a* f r.Z ; ijj. T "a \' ■ i: '■r radiations GOUVERNEMENT GÉNÉRAL G DE L'INDOCHINE TFHTI BUREAU h g Hanoi CONSERVATION DE LA PROPRIÉTÉ FONCIÈRE LIVRE FONCIER d g a n / mentionné à ~£a >>ec.brm 17 BORDEREAU ANALYTIQUE MODIFICATIONS INSCRIPTIONS KSU.L cjcltî/ ftc/t 1 e^u. noécLdl*. a." tfancri Z*€ irz me s neuf canl iriny A ~^a. San-1 e de Adndo c7u.7ic xtocteze artmy. t ' cZcAc. etn. 'A trr 77j/^ deux. A ert't ?y- 2^ me caybc/cLt? aéc Soiàccm/k. céou^ mt-f/lcr/Wj ccy ci-né ^oecià.7? CL ^CidliH? J O C<. &L> &A cl CLCC&O 7DCL7L- 71 S S6^ cl c.(syirt erià' CUA. ^tlodtA ~êrfa-T^peciSLO 7l' 10 une ouvef. £usie de cd e de'A -^otest. o omvytc- --jfy^ù^CAyh CcTg. e. va. éu*3\ ï* -fioun. -me m)oui e , et. e/ -ftout AL teeeem»«M C '- /< L Zdl va Zuoo a' meifSH ^tiàrtAitn^ct. Sa/af TnCyynoiA*, ■.Se/A 770 C A/e -/ /iào)h.&v^ ce chï/ï C*ÙCL>€/l£tA/tC âA C/lC&aJ" VCL&€& ^ oust oiôc ynotsà af ce.— f>u 7dx& en ch^eA^ c/c. ne**/' -0*3 OUA. c en/ . -ficusatâ. C/> t . 7 m e 77?O CAL- -fcoo, o o /ooofee r«o fliWC Ta £>£4îe£^ ' e/ y£M.tar>^4« dt /ou/en AL oemment cp*u. '^ounAatèn?' ■eVic obtint sn ve/tiu. a/e 7a. cb/ë ouuenjiv).'. de ceeésii/ e.? dtm a.ecena. ■oouitat •oet-m au.cu.ne eceee 7711 nj"+/ en vayi 'ToAe nÀ yiomrnt. RADIATIONS c6a. ciyip meu me £ neujf ce né Siesr/e fta.ahe o trempe. yr?i-£ y\&es.jT cené txrnyé r\ccta msu\ 7¥>e f c*7ïé isiCjnOZ. • Zs Oomstiu«Ato>i <«/«. 3. fonci *Àc. • COÛT: % T. S. V.p. MODIFICATIONS INSCRIPTIONS a conoenÀL cLTic iJ7l Au h-3' caont a levantJ no Ja 777yneyïL ccn- L m nn CLA. &Zc -oc '/a. e cl Fa my auuA^mcA riAu/7 ceyiC u-z ri^ A neu/^C fîeyuAe cAu, ^ a/e. c Aasi a. A <3714 e/ -cr?t^ 00 c '/c cm? voifum l I nu.muio 2. 2. 0 ) ~A> crU/L- ^ciencAic. tari# de. ~Aa CAlÂ. CACLAÏ. ~A cuf'-y'zcAa.HAm yfu -fioAfc CL CL Cl C cJer//y n ' ex^y F ex eue. 77-j z ni h am m ce. cl' Ta o c c£. cm Vy éanA au. ~AkuL —^an- " t/L ri' So g rAtL J. Lznt.'fànc.LL 'cAl /~/aric7 C F9 £, '/ jL cl c. J Lcdfc*. m c c Cp^CA. (- d a/* cA<- S azocari Al cdozyy 7m Adcr7mt *cen oiÉat a. Pauion y ~^ou.Ac.. z>and aumo 7n a ri n ' dé. a ait/me 77zacnAci/ie -pulé e.A -tirryh/e. oi<- —A~tfyd>oArf'eyu.t cartnAzAcutA A -oe7T- cjdlay^A ~^7 O AI ij OUIa77.il € .—Q / 7 C 771 — "ÉocAvo ern e'nz cAe*. -yiciA c.e7zAenAz au*. -nueu/L 77qiuuen van "Ta^cnij C.&77-1 _ Tmeiync cAcmeusianA a //&nui , lue cAts? ~7a~A7a.yi 0 ea-1/7 77 ' / Û S, aiuioanl ac.it a-nay/^c au. Olaie/l t auu ana _ -/yAi^ae yeuu. yAi (■ ct'a/cy^Aa. dcAt— liAe^tce yltuariA "2^ l m m etcOfA. -a an a." Ai an 01 uiu.c oien> Ta 7^a ry ezwm 77-' A A 3 . i 77! 777 a Ali CH. ci UDOZUa ~zi— 71 um-èlo A^eni TA'OU.A du. JLIU~I<- fo 71a eut de Panen , C PeiuA A ac ) U O-Au.771 1 A. Aan cerna ego. e 71 cl. oAa aic^oA ex ' eu 77 c. ex.y> c àii AAti où* dcA acAe. , e jA^c c. Aie € ~AL cnryA Tïo ac 777 Zn £_ IWLA neuf cenA toi ry A nea-AA mu altymAît y cAca cAc c Aauiaiu àTiuo ^e A Jyyoocià~nn> ixrti'iu7mc / n ' S S O , ~yocxa -yrH77oAit. uia7y a." ~Aa. &a-/Z alaAe. ~Aa. 777 ac >1 /aAcj £ é cA'"^/yo- 1 COÛT: % T. S. V. P MODIFICATIONS INSCRIPTIONS àA.ea cjml o a^cdr, a. c/e ' rnen. men/c cmmce en aJc ifcricjc. . ^icax-t m u. nitsio %y n)u/o- menJccm ncZa-J-cc c^~ «/t ' -lacJc è. é. ~Za -o cclJc cm. 1/^ Jan J aaa -Mrrxcù&L 71 : yCuu.^- c£u -Icwt. ■ Fonce ère à/c Mariai c '/Mac 0 V crMu. 771C / 71 U.77ÏCS1 J7 / 0 S ^CC «- CÙZC M'Ac ■ c. <7i-l ûo/4 cm Ma 7i t Me. 771 cuti C- CLûta 77) CLÙ 717D Mol. iceua ?^o orii/e' fàeajre. RADIATIONS GOUVERNEMENT GÉFsÉRAL DR ( N°J)U BORDEREAU l'indochine ~ CONSERVATION la propriété foncière, BUREAU àe.jMJ2ûi DE LA PROPRIÉTÉ FONCIÈRE LIVRE FONCIER d •? ..M*naj d •> TITRE FONCIER N° Tt"£71^ ~fuu.2 . FORMALITE REQUISE t1 a,.ng m-At.. 19 Sû- BORDEREAU ANALYTIQUE REGISTRE DÈS DÉPÔTS , . , (Ter giai cac dieu biên 6- bâng trên) Vol' z n° _Z.£3 .... , . a . mentionne o ~7n ^ec-tcon /V g i MODIFICATIONS INSCRIPTIONS RADIATIONS C_TUUUCL7Z f CLÇ-lc. uJouO -O e LTU7/J en dcc/c olu~. innyl /ovcLm- ~/n c me/ m euy/ ce.nl in yyl neu./*; y^esum. en ux. -/crime, en ch-Ç ene— e.2 ce//cn.mc deucimf ~/L //(// dc- /, 7c -vL.eusL 71 a u*u en. lsciïl. s? _J? J? / T? né. n n. j c.ajnmenfcmC , accm cunari cl' / an az. j ^iccc deo />/cl ry? &uriro n /0 S'y CL. vendu- cuu aceu/t C?fcio -/cuj- tw^w5^^ , /9 m Seul CL /CL /cm C c£l ocm oao e. /cl dame 72a dy en 7/il /lie/ de. m ecuia.nl c /fancri u1_ Cl c. de ~/cl %S o e e 72 ' £ £ ^ /cl. ~y/ei7i € /A-o f>t c ele. (Sil an. -j>l 'h. l cz.' Zcliiol -nuuc dea ZZ7. cl nj? ea.i 72" ri l cyp 77 c ch. 0 a. / cx-chu c-h cm c/f^cccu. e. 7c zrzny l ceny 77ove.m/ic. ■-ri c / neuf* ce me irz. nyl neuf ccu. m cy uo /. c ' clde. c. /oui a h cr/Ts? C l &y~> - ~y 0 0 l h 7 ■ l £ S~ ^ yhocui -^m endie A. ^7^ ch./. / COIIT: S T. S. V. P. -MODIFICATIONS INSCRIPTIONS cSaHi. , -mu. à a. Su. cm. S a ta. St. a/<— CSvti/ c J* i ctyiS' . a. t/c •m e n S. àrn n c. c a. Sa. . -7 e c Si cm /V Sa 71/ auu. -fé-cu-c tàt y^ CU- &/Z -yiucmislo rfsnS ~~SiScJ cHa. J-Lint. Foncte*. <=*i_ m cinot c peii'é' jla.c. _) zjcrzfcumc f ^uu. e gau. él al. ci cfl^ tryh 7 asm srn eJO / / H Hé no J , Je c/ncf ma./ mcf necyJ cent /rente Je Conservateur c/e Sd fyr-o/*r,eee /^oncjtre TITRE FONCIER N° 108 PLAN ( Bân-(t^ * Ech!l'!;_J^r Qn tenance:.. .IA9~ Char',geurs i Modèle No 39 C. F. — Indochine. Ari. 361 — Q.-T. 53 :ig-Rp. 539 - Etl.E O. - i;*noi, 1918- Le présent Titre foncier n2—Tgg/7/ ~7uu.£ établi au livre foncier d-> 3 g« Z C 3 n Q date de l'inscription indication de la charge ou cfu droit constitué PRIX des droits cédés, des baux, etc., etc. —5~ s ° * S cfi h .? ■u o ^ sa:?-» o rz (0 ^ £ e d & ' c DATE DE LA RADIATION analytique. | date de l'inscription Indication des clauses conventionnelles, réserves, affectations cultuelles, voies d'exécution, etc., ois s si SE § ~r* •z. • c P as a DATE DÉ L'INSCRIPTION. année quantième année quantième année quantième année QUANTIÈME — -- / -h "J r SECTION IV. — MUTATIONS (Cm)c dhi-chû ) SECTION V. — NANTISSEMENTS ET HYPOTHÈQUES (Thé acr hoâc càm c6 côcaàc vào sô) ALIENATIONS TOTALES (Bân tron) CONSTITUTION fl LIBÉRATION, ành diéu bô buôc(î(f tiiu trir) D 3 &SZ ' 5- c >» Ês 2 ; a date de L'INSCRIPTION MODE NOMS, PRÉNOMS. PROFESSION ET DOMICILE dbs propriétaires successifs PRIX • iH jJ a S - si ^ ls! P «5 a date de l'inscription DÉSIGNATION du droit constitué. d MONTANT 8 LA cb4roe Ai 5 !•- - date de la radiation année .quantième d acquisition d'acquisitk )n année quantième s Sjt 3 2 n £ c Z> « Q année quantième J£__ fiVi' a a. n 'êTu. r.lf ut eh* . T^Âarqeuto ni /a S Mm* ^ - sf SO ÔODjr /-*?.<(7C7aj.L a o - j-. 6L-ZZ1CZC -a _T_. -C mœu. ' js J? 9 — • ê i I . ' ♦ - _j i ! j — — , . — * ' L - ' n— i • i 1 .. _ ^ ' : v ; . ■ ' -, , - ■ m ! ■ . - . > :. : • ■' —:Ï r-v,: ;:: v:;;..' y.yyyf ' •% ' lb y C V.•- - ' ' , £;; , VJ m^:;y "y-, •' ; ■ 'y#-?*** , S' ■■■': :■■/■■ - : : ' . : --y:--; -y ■ , . '; --V,, \ ,.<■•; ■ • ,£, • /. ■,■/£ '/■'< \y- ' ■ ; i?11 ■ • i1 " >' *s * : y y:'y--? ; '-V I ;K'V ;-y:'' -.y; / 'y;^y'. ^■•y-'yy-ryy myyyyy : . . ' ■ y\ y; • 'y y- ' ii'isK 3-.y77; , _ £ ' ' • : — S2S mmyy^ P a S HS1II | ï|Éi« m ■ ■ is? Mmmsmm .•■»■ * iftsMi VvS sas SI mC" ' -V.. V. UKv I ■ H si M— ^ , . ,- ISK'i'gdSSii iT-: -V-A yV'""^^"''' S • * f £» ,: - '>■ 4 ' * - WWmlHÊmÊÈlÊim '»:Ava^;ateâ;iga^gs^ l* ' ,' î ' sgsafs;ss"asa::s?:sfcii K S 1 H| H : |gg i , j s 181? CS ïy¥Mk>M ■.'.-■■tj ' ,'i>r-" H $$$§§© • - "-' ! -.i- J f '« . . Éi asi sas SvS.'SSS MIIB® £;i S "§•* ' • s&#;. • :S': ': IIS HBB ^bS^É^$^f100îi0i^i0Ê S