Le logement des Maghrébins. Racisme et habitat
Classe
Texte
Type de document
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Tiré à part
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article
Titre
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Le logement des Maghrébins. Racisme et habitat
Créateur(s)
Editeur(s)
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Les Temps Modernes
Date
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1984
Langue
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Format
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Fichier PDF
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1,37 Mo
Importance matérielle
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10 p.
Est une partie de
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Les Temps Modernes, n° spécial 452-454, L'immigration maghrébine en France
pages
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1956-1974
Source
Université Côte d'Azur. BU Saint-Jean d'Angély. Fonds Véronique De Rudder
Droits
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Droits réservés
Droits d’accès
public
Identifiant pérenne
Description
Cet article est publié en 1984 dans un numéro spécial de la revue Les Temps Modernes consacré à l’immigration maghrébine en France. Il s’inscrit dans une réflexion que Véronique de Rudder ancre dans ses analyses des situations résidentielles des immigrés en France et la place particulière qu’elle commence d’analyser des immigrés venus de pays pris dans une histoire coloniale avec La France versus les immigrés venus des autres pays dont les pays d’Europe. Partie d’une analyse des discriminations systémique dans l’habitat des immigrés en France, les différences des trajectoires qu’elle observe entre les immigrés Européens et ceux venus plutôt des pays colonisés par la France la mène à considérer que la situation des seconds ne peut s’expliquer autrement que par le racisme qui s’exerce à leur endroit. Elle reprendra dans cet article des éléments de sa communication de janvier 1983 et publié en 1985 sous le titre « Les conditions de logement des Algériens en France : un problème racial ? ».
Ici elle confronte les trajectoires des trois principaux groupes originaires du Maghreb (Marocains, Algériens, Tunisiens). Elle discute de leurs similitudes et de leur différences pour à la fois en dégager ce qu’ils partagent comme immigrés dans la société française et ce qui les distingue les uns des autres. Si globalement les originaires d’Afrique du Nord vivent des situations plus défavorables que les immigrés d’Europe, les Algériens ont une trajectoire qui interroge. Vague d’immigration ancienne, des durées de résidence en immigration qui devrait les mettre dans une situation plus favorable que les Tunisiens que l’observation ne démontre pas. « La situation des ressortissants algériens est particulière.
Deux des facteurs généralement considérés comme favorables à une meilleure insertion résidentielle : l'ancienneté de 'la vague migratoire, d'une part, l'allongement de la durée du séjour individuel, d'autre part, devraient avoir un effet positif sur leurs conditions de vie. Or, à l'évidence, l'immigration algérienne, ancienne en France, reste défavorisée par rapport à l'immigration portugaise et même l'immigration tunisienne, toutes deux plus récentes. Quant à l'ancienneté de résidence en France, elle joue inégalement selon les nationalités, plus bénéfique pour les Portugais, les Turcs et les Tunisiens que pour les Algériens ou les Marocains. (…)La position intermédiaire des Algériens au sein de l'immigration maghrébine ne doit pas dissimuler la spécificité de leur situation, qui apparaît comme singulière et a-typique. Les facteurs jugés favorables à une meilleure insertion résidentielle ne compensent pas l'origine non-européenne, ni, surtout, la nationalité algérienne. (pp. 1959-63). Véronique reprend une interprétation donnée par le sociologue Jean-Claude Toubon qui pose « l'existence (...) d'une gestion collective différentielle de l'immigration; collective car c'est l'ensemble de la société française qui est concernée et que les attitudes de la population française vis-à-vis des diverses nationalités et des phénomènes comme le racisme et la discrimination constituent la trame même de cette gestion » . Pris dans une relation sociale inégalitaire, « les Maghrébins sont considérés comme constituant, en soi, un problème social. Par postulat, en quelque sorte, on leur attribue des problèmes et on décide qu’ils en posent. (…) dans le cas de la cohabitation entre Français et Maghrébins, le rapport des forces est très largement en faveur des premiers, lesquels, refusent d'admettre la situation de cohabitation en elle-même, dénient aux immigrés la position légitime d'adversaires. C'est pourquoi ils s'adressent plutôt à des institutions ou des élus considérés, eux, comme responsables pouvant agir sur une situation qu'ils dénoncent tout en la récusant. (…) Les petits Maghrébins cristallisent le refus de la cohabitation. » (p. 1967) Cet article est un des premiers où elle travaille sur les catégories de façon connectée aux relations interethniques et où ses observations l’amènent effectivement à situer le racisme au cœur de son analyse . « Les diverses formes qu'il [le racisme] affecte, en particulier selon les couches sociales, sont autant d'adaptations aux situations concrètes (relations d'exploitation, relations de concurrence... ). Cette faculté d'adaptation contribue à le masquer sous l'influence d'autres déterminants sociaux : le fonctionnement du marché libéral, la confrontation culturelle, par exemple ... C'est parce qu’il est multiforme qu'il se révèle souvent insaisissable. Et c'est sans doute pour cela qu'il reste, aujourd'hui, si peu étudié en France. Il sert très souvent d'explication "complémentaire" là où, selon toute vraisemblance, il est central. On ne peut en effet comprendre des conditions de vie des Maghrébins en France sans le prendre en compte. (…) il n’y a pas seulement "application" d'un racisme pré-existant, mais production d'une altérité sociale qui s'inscrit sur un registre "racial". Le racisme s'alimente lui-même parce qu'il s'exerce quotidiennement et concrètement. Il n'est pas seulement une opinion. Il est une pratique qui n'est pas l'apanage de quelques "racistes" plus ou moins violents » (p. 1971).
Ici elle confronte les trajectoires des trois principaux groupes originaires du Maghreb (Marocains, Algériens, Tunisiens). Elle discute de leurs similitudes et de leur différences pour à la fois en dégager ce qu’ils partagent comme immigrés dans la société française et ce qui les distingue les uns des autres. Si globalement les originaires d’Afrique du Nord vivent des situations plus défavorables que les immigrés d’Europe, les Algériens ont une trajectoire qui interroge. Vague d’immigration ancienne, des durées de résidence en immigration qui devrait les mettre dans une situation plus favorable que les Tunisiens que l’observation ne démontre pas. « La situation des ressortissants algériens est particulière.
Deux des facteurs généralement considérés comme favorables à une meilleure insertion résidentielle : l'ancienneté de 'la vague migratoire, d'une part, l'allongement de la durée du séjour individuel, d'autre part, devraient avoir un effet positif sur leurs conditions de vie. Or, à l'évidence, l'immigration algérienne, ancienne en France, reste défavorisée par rapport à l'immigration portugaise et même l'immigration tunisienne, toutes deux plus récentes. Quant à l'ancienneté de résidence en France, elle joue inégalement selon les nationalités, plus bénéfique pour les Portugais, les Turcs et les Tunisiens que pour les Algériens ou les Marocains. (…)La position intermédiaire des Algériens au sein de l'immigration maghrébine ne doit pas dissimuler la spécificité de leur situation, qui apparaît comme singulière et a-typique. Les facteurs jugés favorables à une meilleure insertion résidentielle ne compensent pas l'origine non-européenne, ni, surtout, la nationalité algérienne. (pp. 1959-63). Véronique reprend une interprétation donnée par le sociologue Jean-Claude Toubon qui pose « l'existence (...) d'une gestion collective différentielle de l'immigration; collective car c'est l'ensemble de la société française qui est concernée et que les attitudes de la population française vis-à-vis des diverses nationalités et des phénomènes comme le racisme et la discrimination constituent la trame même de cette gestion » . Pris dans une relation sociale inégalitaire, « les Maghrébins sont considérés comme constituant, en soi, un problème social. Par postulat, en quelque sorte, on leur attribue des problèmes et on décide qu’ils en posent. (…) dans le cas de la cohabitation entre Français et Maghrébins, le rapport des forces est très largement en faveur des premiers, lesquels, refusent d'admettre la situation de cohabitation en elle-même, dénient aux immigrés la position légitime d'adversaires. C'est pourquoi ils s'adressent plutôt à des institutions ou des élus considérés, eux, comme responsables pouvant agir sur une situation qu'ils dénoncent tout en la récusant. (…) Les petits Maghrébins cristallisent le refus de la cohabitation. » (p. 1967) Cet article est un des premiers où elle travaille sur les catégories de façon connectée aux relations interethniques et où ses observations l’amènent effectivement à situer le racisme au cœur de son analyse . « Les diverses formes qu'il [le racisme] affecte, en particulier selon les couches sociales, sont autant d'adaptations aux situations concrètes (relations d'exploitation, relations de concurrence... ). Cette faculté d'adaptation contribue à le masquer sous l'influence d'autres déterminants sociaux : le fonctionnement du marché libéral, la confrontation culturelle, par exemple ... C'est parce qu’il est multiforme qu'il se révèle souvent insaisissable. Et c'est sans doute pour cela qu'il reste, aujourd'hui, si peu étudié en France. Il sert très souvent d'explication "complémentaire" là où, selon toute vraisemblance, il est central. On ne peut en effet comprendre des conditions de vie des Maghrébins en France sans le prendre en compte. (…) il n’y a pas seulement "application" d'un racisme pré-existant, mais production d'une altérité sociale qui s'inscrit sur un registre "racial". Le racisme s'alimente lui-même parce qu'il s'exerce quotidiennement et concrètement. Il n'est pas seulement une opinion. Il est une pratique qui n'est pas l'apanage de quelques "racistes" plus ou moins violents » (p. 1971).
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