Les conditions de logement des Algériens en France. Un problème racial ?
Classe
Texte
Type de document
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Tiré à part
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Rapport et littérature grise
Titre
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Les conditions de logement des Algériens en France. Un problème racial ?
Créateur(s)
Contributeur(s)
Costa-Lascoux, Jeanine
Temime, Emile
Editeur(s)
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Publisud
Organisateur(s)
GRECO 13
Date
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1985
Lieu de création
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Paris
Langue
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Format
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Fichier PDF
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3,31 Mo
Importance matérielle
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11 p.
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22 cm
Est une partie de
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Les Algériens en France (Genèse et devenir d'une migration)
pages
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320-335
Source
Université Côte d'Azur. BU Saint-Jean d'Angély. Fonds Véronique De Rudder
Identique à
Droits
fre
Droits réservés
Droits d’accès
Réservé aux chercheurs de l'UNS et de l'Urmis
Identifiant pérenne
dateCreated
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1983-01-27/1983-01-26
Description
Actes du colloque du GRECO 13, de janvier 1983
Véronique de Rudder y fait une analyse des conditions d'habitat des Algériens en France en tant qu'élément d'un statut social et révélateur d'un traitement social (dont la spécificité est étudiée) réservé à la population algérienne par la société française. Intégration du racisme, comme notion de différence et d'altérité, à l'analyse des faits sociaux.
Dans cette communication comme dans l’article qui sera publié, le passage d’une lecture en termes de discrimination à celui d’une analyse sous l’angle du racisme est confirmé. Elle amorce sa réflexion sur ses constats empiriques qui avèrent qu’au sein de la population immigrée, les non-européens vivent des situations plus difficiles que les originaires des pays d’Europe que ces migrations soient anciennes ou récentes. Et parmi les plus mal lotis, les Algériens tiennent une place des plus défavorables bien qu’il s’agisse d’une migration déjà ancienne et que les compétences culturelles et linguistiques acquises leurs confèrent normalement un avantage. Et le projet de cet article est alors bien celui de prendre leur condition d’habitat en France « comme révélateur d’un traitement social dont il faut situer la spécificité » (De Rudder, 1985 : 322) Or, nous dit l’auteure, toutes les données attestent que « le logement des Algériens est assez nettement polarisé entre le parc ancien inconfortable, voire insalubre - dans lequel les chambres meublées représentent une part importante - et le parc récent de logement social, périphérique et isolé (foyer et HLM). (…) Les Algériens constituent une population qu'il convient de surveiller et de punir. Livrés à eux-mêmes, c'est-à-dire à l'exploitation des marchands de sommeil, à l'inconfort et à l'insalubrité, dans les espaces qui leur sont abandonnés, mais contrôlés alors par les forces de l'ordre, ils doivent, pour accéder au logement social s'«adapter», c'est-à-dire veiller à la conformité de leurs comportements par rapport aux normes dominantes » . Ce traitement spécifique de l’immigration algérienne relève pour Véronique de Rudder d’un racisme qu’elle explique par l’histoire spécifique qui lie Français et Algériens : « L'immigration, comme le colonialisme, n'est pas seulement un ordre politique et social, c'est une relation de peuple à peuple dans un cadre précis. Les Algériens sont d'abord venus en France comme colonisés, puis comme Français «à part» (statut spécial). C'est avec l'aide de ses émigrés que l'Algérie s'est libérée. La condition des Algériens en France, aujourd'hui ressemble, par certains traits à celle faite aux populations coloniales: domination, infériorisation, surveillance, répression. (…) Les Algériens ont fait la preuve de leur capacité à s'émanciper de la tutelle et de l'oppression. De là, la crainte de leur rébellion, encore plus forte pour ce qui les concerne que pour ce qui intéresse les autres dominés, et, dans un cercle vicieux, l’accroissement de la défiance à leur endroit et de la répression » . En dépit, ou plus justement en raison, de leur proximité avec les Français (culture, langue, fréquentations) les Algériens font l’objet d’un procès permanent d’altérité et d’exhortation de différences montrées comme rédhibitoires. Or « il n'y a pas de mesure autre que subjective (dans les représentations et les stéréotypes) de la distance ou de la proximité culturelle, raciale ... Il n'y a qu'un statut fait aux différences et aux ressemblances. »
C’est dans la conclusion de ce premier article à traiter frontalement du racisme, que Véronique de Rudder précise le cadre de son analyse, cadre qu’elle explicitera plus avant dans son article de 1991 : « le racisme n'est pas seulement une opinion ou une idéologie. Il ne surajoute pas à la réalité sociale mais la modèle au même titre que d’autres éléments sociaux, économiques, politiques et culturels. (..) On objectera peut-être que le terme « racisme », ici, est mal choisi. C'est que le mot inquiète. Son usage n'indique pas que tout un chacun soit raciste, à son insu même, ou malgré ses convictions intellectuelles... Il signifie simplement le refus que le racisme soit abstrait de toute réalité sociale pour ne plus référer qu'à une théorie (qu'elle soit d'«ancienne» ou de «nouvelle» droite), dont les porteurs explicites ou implicites restent minoritaires. (…) il ne sert à rien, sauf à occulter la réalité, de rejeter le racisme dans le camp des racistes. Seule une intégration du racisme dans l'analyse des faits sociaux relatifs à l'immigration en France, permettra d'en rendre compte. Il ne s'agit ici que d'une première tentative, d'une première ébauche. Elle s'inscrit dans un esprit de recherche qui cherche à dépasser l'extrême euphémisation des discours les plus fréquents sur l'immigration ».
Véronique de Rudder y fait une analyse des conditions d'habitat des Algériens en France en tant qu'élément d'un statut social et révélateur d'un traitement social (dont la spécificité est étudiée) réservé à la population algérienne par la société française. Intégration du racisme, comme notion de différence et d'altérité, à l'analyse des faits sociaux.
Dans cette communication comme dans l’article qui sera publié, le passage d’une lecture en termes de discrimination à celui d’une analyse sous l’angle du racisme est confirmé. Elle amorce sa réflexion sur ses constats empiriques qui avèrent qu’au sein de la population immigrée, les non-européens vivent des situations plus difficiles que les originaires des pays d’Europe que ces migrations soient anciennes ou récentes. Et parmi les plus mal lotis, les Algériens tiennent une place des plus défavorables bien qu’il s’agisse d’une migration déjà ancienne et que les compétences culturelles et linguistiques acquises leurs confèrent normalement un avantage. Et le projet de cet article est alors bien celui de prendre leur condition d’habitat en France « comme révélateur d’un traitement social dont il faut situer la spécificité » (De Rudder, 1985 : 322) Or, nous dit l’auteure, toutes les données attestent que « le logement des Algériens est assez nettement polarisé entre le parc ancien inconfortable, voire insalubre - dans lequel les chambres meublées représentent une part importante - et le parc récent de logement social, périphérique et isolé (foyer et HLM). (…) Les Algériens constituent une population qu'il convient de surveiller et de punir. Livrés à eux-mêmes, c'est-à-dire à l'exploitation des marchands de sommeil, à l'inconfort et à l'insalubrité, dans les espaces qui leur sont abandonnés, mais contrôlés alors par les forces de l'ordre, ils doivent, pour accéder au logement social s'«adapter», c'est-à-dire veiller à la conformité de leurs comportements par rapport aux normes dominantes » . Ce traitement spécifique de l’immigration algérienne relève pour Véronique de Rudder d’un racisme qu’elle explique par l’histoire spécifique qui lie Français et Algériens : « L'immigration, comme le colonialisme, n'est pas seulement un ordre politique et social, c'est une relation de peuple à peuple dans un cadre précis. Les Algériens sont d'abord venus en France comme colonisés, puis comme Français «à part» (statut spécial). C'est avec l'aide de ses émigrés que l'Algérie s'est libérée. La condition des Algériens en France, aujourd'hui ressemble, par certains traits à celle faite aux populations coloniales: domination, infériorisation, surveillance, répression. (…) Les Algériens ont fait la preuve de leur capacité à s'émanciper de la tutelle et de l'oppression. De là, la crainte de leur rébellion, encore plus forte pour ce qui les concerne que pour ce qui intéresse les autres dominés, et, dans un cercle vicieux, l’accroissement de la défiance à leur endroit et de la répression » . En dépit, ou plus justement en raison, de leur proximité avec les Français (culture, langue, fréquentations) les Algériens font l’objet d’un procès permanent d’altérité et d’exhortation de différences montrées comme rédhibitoires. Or « il n'y a pas de mesure autre que subjective (dans les représentations et les stéréotypes) de la distance ou de la proximité culturelle, raciale ... Il n'y a qu'un statut fait aux différences et aux ressemblances. »
C’est dans la conclusion de ce premier article à traiter frontalement du racisme, que Véronique de Rudder précise le cadre de son analyse, cadre qu’elle explicitera plus avant dans son article de 1991 : « le racisme n'est pas seulement une opinion ou une idéologie. Il ne surajoute pas à la réalité sociale mais la modèle au même titre que d’autres éléments sociaux, économiques, politiques et culturels. (..) On objectera peut-être que le terme « racisme », ici, est mal choisi. C'est que le mot inquiète. Son usage n'indique pas que tout un chacun soit raciste, à son insu même, ou malgré ses convictions intellectuelles... Il signifie simplement le refus que le racisme soit abstrait de toute réalité sociale pour ne plus référer qu'à une théorie (qu'elle soit d'«ancienne» ou de «nouvelle» droite), dont les porteurs explicites ou implicites restent minoritaires. (…) il ne sert à rien, sauf à occulter la réalité, de rejeter le racisme dans le camp des racistes. Seule une intégration du racisme dans l'analyse des faits sociaux relatifs à l'immigration en France, permettra d'en rendre compte. Il ne s'agit ici que d'une première tentative, d'une première ébauche. Elle s'inscrit dans un esprit de recherche qui cherche à dépasser l'extrême euphémisation des discours les plus fréquents sur l'immigration ».
Rapport et littérature grise