Les Français utilisaient le terme "annamite" pour désigner indifféremment tous les Vietnamiens, et pas seulement les habitants de l'Annam. Cette femme appartient probablement à la haute société saïgonnaise, à en juger par le soin apporté à son costume et à la composition de la photographie. Coiffée à la mode du Sud, elle est vêtue de l’áo dài, tunique longue tombant jusque sous les genoux, portée également par les hommes. En-dessous, un large pantalon flottant – les robes avaient été interdites par un édit impérial en 1837. Le chapeau reposant à ses côtés est en revanche typique du Nord du Viêt Nam. Il s’agit d'un nón ba tầm, chapeau à large bord et fond plat, qui évoque, vu du dessus, une feuille de lotus. Divers bijoux complètent son costume. Derrière elle, une toile peinte est fixée au mur du studio en guise de décor.

Émile Gsell a pris de nombreux portraits dans son studio et les conditions dans lesquelles ceux-ci étaient réalisés demeurent mystérieuses. Rémunérait-il les notables venant se faire photographier, afin de revendre leurs portraits ensuite ? Avait-il recours à des acteurs pour les nombreux portraits de marchands ambulants, ou débauchait-il ces marchands dans la rue ? Quelle place pour le consentement des personnes photographiées (notamment les femmes) ? Autant de questions auxquelles il est difficile de répondre aujourd'hui en l'absence de traces écrites à ce sujet.

Georges Condominas propose de la rapprocher du notable de PH02-113 et fait l'hypothèse qu'il s'agit peut-être de son mari. Ils appartiennent quoi qu'il en soit certainement au même milieu.

Source de la description : texte de Georges Condominas in Franchini, Philippe ; Ghesquière, Jérôme (dir.), Des photographes en Indochine. Tonkin, Annam, Cochinchine, Cambodge et Laos au XIXe siècle, Marval & Réunion des musées nationaux, 2001, p. 141.