« Il voit passer les écrivains, il les regarde, il les touche, il les entend. C'est le Ciel ! (Il a bien tort). Je l'aime, à cause de cette ferveur, quelques fois excessive et mal orientée, mais la ferveur est le fruit rarissime des belles âmes. Et Denoël a une belle âme », ainsi Henri Bosco parle-t-il de son ami Jean Denoël, dans une lettre à François Bonjean du 9 mai 1942. A cette époque, Henri Bosco et Jean Denoël n’entretiennent encore qu’une relation épistolaire, comme Jean Denoël en entretient avec de très nombreux écrivains. Leurs premiers échanges semblent dater de 1936. Ils ont comme amis communs Christian Funck-Brentano, Armand Guibert, Jean Grenier, René Janon, les membres du comité de rédaction de la revue « Aguedal ».
Ils se rencontrent physiquement probablement en 1943 quand Denoël est mobilisé à Casablanca, Henri Bosco l’accompagne de ces lettres lors de sa difficile mobilisation : « Denoël, tout près des lignes, mène une vie cruelle, au milieu de tous ses blessés. Il m'écrit de courtes et pathétiques cartes. Ecrivez-lui. C'est une très belle âme. » demande-t-il à Jules Roy, dans une lettre du 8 mai 1943. C’est un peu plus tard qu’ils se fréquenteront intensément : « Nous voyons assez souvent Denoël que nous aimons bien. Il nous a appris
qu'une nouvelle revue politico-littéraire allait paraître à Alger, patronnée par Gide, avec le concours d'Alazard, d'Hytier et dirigée par Amrouche [L’Arche]» (Lettre à Jules Roy, 1er aout 1943). Après la guerre, Jean Denoël présente Henri Bosco à Florence Jay Gould, en 1947, et si Henri Bosco participe à quelques « déjeuners du jeudi » à Paris, ils se voient surtout lors des séjours de la milliardaire sur la Côte d’Azur.
Jean Denoël et Henri Bosco se retrouvent dans leur foi catholique profonde, ainsi que dans leur amitié pour Max Jacob : ainsi Jean Denoël compose-t-il un premier numéro « Hommage à Max Jacob » en 1939, qui devient le « Tombeau de Max Jacob » en 1944 après la mort de celui-ci. Dans une lettre du 9 mars 1967 à Henri Bosco, Jean Denoël revient sur la cérémonie du 23e anniversaire de la mort de Max Jacob à l’abbaye de Saint-Benoît-sur-Loire, nous donnant par ailleurs des éléments sur leurs premiers échanges : « Dimanche, nous étions une centaine à St Benoît pour le 23e anniversaire de la mort de M. J. : ferveur. / J'ai lu aux moines de l'abbaye la Prière (C'est la Prière du Vendredi Saint) de l'Abbé Chichambre d'un certain Henri Bosco et qu'il m'avait donnée en 1936. Ils ont été bouleversés, le père Prieur voudrait la publier dans la Renaissance de Fleury pour Pâques - dites-moi. » Le Père Prieure évoqué c’est le R. P. Grégoire directeur de publication de « Renaissance de Fleury » : ainsi par l’entremise de Jean Denoël, Henri Bosco participe au numéro hommage avec un article hommage « Max Jacob et la Croix », qui donne son nom à ce numéro spécial. Denoël seconde plus tard le R. P. Grégoire pour le numéro spécial de « Renaissance de Fleury » de Pâques 1970, « Spiritualité d’Henri Bosco ».