Malicroix
Classe
Forme de l'oeuvre (au sens FRBR)
Titre
Créateur(s)
Langue(s)
Couverture spatiale
Puis je l’ai tenté, non sans crainte…
Ainsi j’ai créé Malicroix. Or, sauf un, tous les personnages de ce drame sont du Rhône, tiennent au Rhône, en tirent leur vie, leur pensée, leurs passions, et une certaine stature, qui n’est pas celle du commun, non plus que ne l’est leur Fleuve vital, qui a pour vocation de passer toujours la mesure ordinaire des fleuves. » (Henri Bosco, « Ce fleuve, le Rhône », postface à « Malicroix », pour l’édition du Club des Libraires de France, 1957). Le sentiment de la grandeur des eaux sauvages qu’il a décrit dans ses souvenirs d’enfance donne son sens au choix de placer son récit sur le fleuve : « Avignon, c'est l'enfance et surtout l'obsession des eaux. II y a là deux fleuves, le Rhône, la Durance. J'ai vécu longtemps à leur confluent. J'ai connu leur violence, leur brutale personnalité, leur grandeur… Très tôt, je les ai eus comme des créatures. Elles étaient très dangereuses, néfastes, mais nobles tout de même. J'ai aimé leurs rives, leurs îles, leurs bêtes. Universelle vie naturelle, image de l'écoulement, qui m'ont si bien hanté que j'en ai fait naître, plus tard, un récit dramatique, Malicroix, qui est le combat de l'homme et du fleuve. » (Henri Bosco, « Henri Bosco par lui-même », dans « Cahiers de l’Amitié Henri Bosco », numéro 1, novembre 1972).
Le Rhône est intimement lié à la Camargue : « Il a enfanté la Camargue, il la défend encore. Il en est le père… il fût là, épandu, farouche, depuis l’aube des âges. Le Rhône vivant aujourd’hui, pour puissant qu’il soit, n’est qu’un fils d’ancêtres plus puissants encore. » (Henri Bosco, « La Camargue » dans « La Mer », numéro 6, novembre 1968, p. 21). Paternité symbolique du Rhône qui s’étend dans « Malicroix » sur l’ensemble des personnages : le fleuve est origines et représente la race Malicroix à laquelle Martial doit s'initier. En ce sens, il est logique de constater que La Camargue, où Henri Bosco situe explicitement l’action, est décrite plutôt comme le delta du Rhône, avec sa végétation luxuriante, ces rives instables, ces bras morts et ces ilots. Le fleuve de « Malicroix » est à la fois le fleuve des eaux sauvages et vivantes, au courant violent, et le fleuve des eaux mortes, de la fange et des bourbiers — celui-ci est celui de la Camargue. Il symbolise à la fois le temps qui passe, s’écoule et la mort, et l’éternel retour de la vie, qui se retrouve dans le récit par la résurgence du couple Delphine-Cornélius dans le couple de Martial et Anne-Madeleine.
Récompense reçue
Identique à
Identifiant pérenne
Source(s) utilisée(s)
Description
Au terme d’épreuves, Martial s’initie spirituellement et atteint une compréhension supérieure des choses : « Il me semblait que je voyais les choses avant qu’elles ne fussent créées, en deçà de leurs apparences, dans la pure pensée de l’être qui les avaient conçues.
Je m’étonnais, tout en marchant, de la facilité avec laquelle je transposais les objets, les évènements, tel un arbre ou ma promenade, en sensations immatérielles. Don nouveau, inconnu de moi jusqu’à ce jour… » (p. 126). Il reçoit alors cette révélation de l’amour, car se révèle digne de confiance : « les êtres et les choses de ce monde sauvage et exclusif se donnaient à moi et m’aimaient » (p. 171). C’est au quatrième et central chapitre du récit, « Un sortilège », durant la nuit de Noël, où il erre sur l’île et affronte le fleuve, qu’il quitte le statut de personne étrangère à l’île et qu’il acquière la connaissance de l’île.
C’est parce qu’il a pu devenir Malicroix et affronter les épreuves de l’île, qu’il doit et qu’il parvient à traverser le fleuve pour accoster sur la rive orientale du fleuve. En réussissant l’épreuve finale, Martial conjure la fatalité et la mort en réunissant les deux amants dans l’au-delà et efface la malédiction de la famille Malicroix. La purification de la famille Malicroix et son pardon se fait également dans la constitution d’un nouveau couple Malicroix, Martial et Anne-Madeleine. Martial, pour réussir l’épreuve revivifiant le nom Malicroix, ne devient pas seulement un Malicroix, mais un Malicroix capable de pardon et de paix, non porteur de vengeance : « Il faut, me murmurais-je, atteindre à cette âme tentante ; et le puis-je sans Malicroix (sans devenir moi-même Malicroix), qui aima et qui fus aimé ? » (page 125). Le personnage de Delphine d’Or, symbole d’un amour parfait car non réalisé charnellement, sanctifie l’amour très humain entre Martial et Anne-Madeleine : elles sont les deux faces, surnaturelle et humaine, d’un même amour unissant ciel et terre, finalement placé sous le signe de la Croix, sous l’« image du Plus Grand Amour » (Henri Bosco, « Ce fleuve, le Rhône », postface à « Malicroix », Club des Libraires de France, 1957). Dans les héros bosquiens, Martial est le seul à connaître l’amour terrestre, en plus de l’amour de Dieu. Car Martial accoste au niveau d’un calvaire, sous lequel est enterré le corps du taureau blanc, au moment de l’Elévation de la messe en mémoire de Delphine d’Or prononcée par le prêtre sur le fleuve. Henri Bosco, encore une fois, opère une « fusion des sacrés » (Jean-Pierre Cauvin) et la rédemption face à un sacrilège païen arrive par l’amour divin.
Résumé
Table des matières
Mégremut
Dromiols
La Redousse
Un sortilège
Balandran
Un nom de cette terre
Halte
Malicroix
Collections
Relation(s)
« L’Enfant et la rivière » et « Malicroix » partagent leur caractère initiatique sur un terrain cher à Henri Bosco, le fleuve — l’un sur la Durance, l’autre sur le Rhône. Dans les deux récits, les héros, Pascalet et Martial, se retrouve à devoir apprendre la survie sur une île. Mais si Pascalet choisit de fuir pour trouver sur la rivière un refuge face à la solitude de sa vie familiale et trouve en Gatzo un double fictif, Martial se retrouve en réclusion forcée sur le fleuve sans l’avoir choisi, et doit s’initier pour en devenir le maître et pour atteindre la maturité.
Selon des propos tenus à Claude Girault en septembre 1963, Henri Bosco aurait été frappé par le récit de Joseph Conrad « Au bout du rouleau » dont le personnage principal était capitaine d’un vapeur naviguant sur le Mékong, devenu aveugle et continuant à remonter le fleuve d’après ses souvenirs. Cela lui donne alors l’idée d’un récit autour d’un personnage aveugle remontant son fleuve, le Rhône. Cette première idée engendra le personnage du Grelu de « Malicroix ».
De manière plus profonde, « Malicroix » et son héros Martial, égaré sur un terre inculte du delta marécageux du Rhône peut être rapproché de Willems le Hollandais d’« Un paria des îles » de Joseph Cornad : celui-ci, traître trahi par ses camarades et rejeté de la civilisation se retrouve dans les îles de Bornéo, dans la forêt équatoriale de l’estuaire du fleuve Panaï, donc comme Martial en exil sur une île sauvage. Les deux auteurs partagent le thème de la solitude dans une étendue d’eau sauvage, et du silence, ainsi que le motif à connotation biblique de l’hostilité de la nature et des métaphores épiques et homériennes où les vents deviennent rois. Mais si Joseph Conrad mène son personnage à la dissolution et à sa mort, « Malicroix » est un récit initiatique, où la solitude n’est pas destruction mais une condition nécessaire à l’évolution spirituelle. Henri Bosco transforme la claustration dans l’île sauvage en une exaltation et une élévation.
Ressources liées
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Titre | Libellé alternatif | Classe |
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Malicroix | Texte | |
Malicroix. Notes et brouillons | Texte | |
Malicroix. Notes et brouillons | Texte |
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Malicroix. Notes et brouillons | Sujet(s) | Texte |
"Taureau" | Sujet(s) | Texte |
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L'enfant et la rivière | Relation(s) | work |
Sylvius | Relation(s) | work |
Le Jardin d'Hyacinthe | Relation(s) | work |