Le Mas Théotime
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Forme de l'oeuvre (au sens FRBR)
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Description
« Pascal, véritable prêtre du Mas, aime la terre mais se défend de sa puissance obscure. Il est du parti de l’homme. Clodius, c’est le contraire. Il s’est donné tout à la terre, sorte de divinité magique qui l’envoûte. Il est du parti de la terre. » (Lettre à Mireille Nicolas, 21 novembre 1964, cité par Mireille Nicolas, « Henri Bosco. Le Mas Théotime », p. 21-22).
Résumé
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Relation(s)
« Le Mas Théotime » est écrit au moment où Henri Bosco, sous l’influence de François Bonjean, découvre et lit attentivement René Guénon. Cette influence se voit dès l’épigraphe qu’Henri Bosco projette d’y inscrire, comme il l’indique dans une lettre à François Bonjean le 15 novembre 1940 : « Le livre prend un sens, toujours latent, mais pour moi de plus en plus sûr, et peut-être y mettrai-je, en épigraphe, ces mots : « Si tu veux retrouver la Parole perdue et le Séjour de Paix, oriente-toi » ». Cette épigraphe, qui évoque « Le Roi du monde » de René Guénon, se retrouve finalement sur le bréviaire de Madeleine Dérivat (page 352). Des éléments travaillés par Guénon servent de bases doctrinales au Mas Théotime et en premier lieu le symbole du « Rose-Croix », central au récit. Ce symbole représentant un cœur surmonté d’une croix, orne la tapisserie brodée par Madeleine Dérivat, l’aïeule supérieure des Visitandines de Nazareth, cachée dans le grenier du Mas, est dessiné par Geneviève enfant et figure sur le maître-autel de l’ermitage de Saint-Jean ; il obsède Geneviève, Pascal et Jacques Lebreux. D’un côté, le coeur, dont Guénon parle abondamment dans « Le Roi du monde » et dans ses articles dans la revue « Regnabit », est symboliquement le centre spirituel du monde où vit le « Roi du monde », dont l’influence diffusée par l’intellectuel pur (le rayon céleste) est nécessaire à la marche positive du monde. La symbolique du rayon qui y est donc lié et qui permet de relier tous les états de l’être et de s’élever dans les états supérieurs est d’ailleurs également très présent dans « Le Mas Théotime » pour décrire les deux protagonistes : « cette part de noblesse que nous portons, plus ou moins cachée, dans nos âmes, et qu’un rayon heureux peut frapper tout à coup et élever dans la lumière » (page 139). Cette symbolique du rayon de René Guénon renforce le culte du Saint-Esprit d’Henri Bosco, qui assimilent ainsi sa foi chrétienne et son guénonisme. De l’autre côté, la croix (grecque, à deux branches de longueur égale) dont la symbolique est étudiée dans des termes empruntés au soufisme par René Guénon dans « Le symbolisme de la croix » en 1931, représente les deux phases de la réalisation spirituelle : l’ampleur et l’exaltation. Elle symbolise la réalisation de l’Homme universel ou « Roi du monde », épanoui intégralement et harmonieusement dans les deux sens. Henri Bosco utilise ces notions à plusieurs reprises dans « Le Mas Théotime », « Malicroix », et dans « Chellah » et en fait le titre d’un de ses articles paru dans la revue « Fontaine » en mars-avril 1942 . Le symbole de la « Rose-Croix » est donc inspiré par une lecture guénonienne tout en étant enrichi par les sens chrétiens de ces symboles composants. Une inspiration tout à fait libre et personnelle.
L’espace même du roman est traversé de cette croix, représentant le centre de l’être, l’exaltation et l’ampleur (ou amplitude) : Théotime est au centre de la croix formée par le village des Métidieu et Dérivat, Sancergues et la ferme des Alibert, deux opposés, tendresse et douceur des jardins face à la rigueur de la maîtrise de la terre. C’est donc au centre de cette croix que Geneviève arrive, en quête (mystique) de la tapisserie de Madeleine Dérivat. Dans cette quête, elle est traversée d’expériences d’illuminations, de progressions intellectuelles : « Si l’exaltation ne manquait point à Geneviève, qui, pour un rien, se portait tout à coup à la pointe extrême de son cœur et y flambait, elle ignorait encore les bienfaits de l’amplitude, qui compensent l’élan et équilibrent l’âme. Car l’exaltation nous emporte au-dessus de nous-mêmes, comme un jaillissement vers les hauteurs, tandis que l’amplitude, contrairement à l’apparence, ne s’acquiert que par le recueillement et une lente concentration. » (pages 77-78). Dans un premier temps, elle circule sur la branche verticale de l’exaltation, entre La Jassine et Théotime, centre spirituel secondaire, un lieu de refuge dans lequel Geneviève trouve la quiétude et doit atteindre le grenier, où est conservé le symbole de la Rose-Croix qui lui ouvrirait la porte d’autres centres spirituels. Ce temps de l’exaltation, caractérisé par la lutte entre Pascal et Clodius, entre Théotime et La Jassine, s’achève sur la scène des sangliers que Geneviève charme et vainc, allégorie de la victoire de l’esprit sur les sens : elle dépasse les ardeurs charnelles pour atteindre un autre ordre de la passion. Elle se pacifie et prend le chemin de l’amplitude. Si Pascal lui défend la voie d’initiation du mas Théotime, il offre à Geneviève par un élan du cœur l’autre centre spirituel secondaire, Micolombe. De ce centre, Geneviève se tourne vers un troisième centre spirituel, supérieur, plus pur encore, l’ermitage de Saint-Jean, équivalent du grenier du mas Théotime. Celui-ci la mènera ensuite vers l’Orient, le couvent des Trinitaires de Marseille, puis Nazareth, le « séjour de Paix ». Elle découvre via le symbole de la Rose-Croix reproduit dans la chapelle de Saint-Jean, la « Parole perdue », la Tradition décrite par René Guénon, et la Source est ravivée par la rénovation de l’ermitage, centre du monde, dont Pascal fait le récit dans son « Journal » : « je pense à l’ermitage Saint-Jean […] Pourquoi ce cœur et cette croix plantée au milieu de l’image, dans cette pauvre église de montagne consacrée à l’ami de Dieu ? Ni le cœur ni la croix ne bougent, comme s’ils se tenaient au centre invisible du monde » (page 334). L’ensemble du roman est donc le récit d’une initiation graduée à la Tradition guénonienne nourrie du christianisme d’Henri Bosco.
L’amour passionnel et possessif qu’éprouve Pascal pour Geneviève peut se rapprocher du désir de possession du magicien Cyprien pour Hyacinthe, désir qui le pousse à vouloir à tout prix l’amour de Hyacinthe et à la priver de son âme pour n’en faire qu’un objet. La conscience de Pascal de ce dévoiement du bien dans l’amour possessif est aussi ce qui le sauve, contrairement à Cyprien qui ne parvient pas à vaincre ce péché similaire au premier péché d’orgueil : « A persister dans un espoir inavoué, mais puissant, et sans doute bientôt terrible, bien loin de la sauver, en la maintenant dans une vie droite, je contribuais à sa perte. J'entrais, moi aussi, à mon tour, comme un instrument de déchéance, dans la succession de tous ceux qui, attirés, sans doute malgré elle, par l'attrait fatal de ses charmes, n'ayant pas su se l'attacher, n'avaient pu que l'abandonner aux instincts violents et malheureux dont leur propre passion avait attisé l'ardeur. » (« Le Mas Théotime », p. 195)
Ressources liées
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Titre | Libellé alternatif | Classe |
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“Mas Theotime Souvenirs notes” | Texte | |
Le Mas Theotime. Manuscrit | Texte |
Titre | Libellé alternatif | Classe |
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Bonjean, François (1884-1963) | Relations | Personne |
Titre | Libellé alternatif | Classe |
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Charlot, Edmond (1915-2004) | Biographie | Personne |