Etudiant en droit à Montpellier, Paul Valéry publie ses premiers vers d’inspiration symboliste, dans la Revue maritime de Marseille en 1889. En 1890, Il rencontre Pierre Louÿs, qui le présente à André Gide et Stéphane Mallarmé. Mais peu de temps après, dans la nuit du 4 au 5 août 1892, à Gênes, une crise existentielle le pousse à cesser d’écrire des poèmes : il est résolu à consacrer sa vie à la connaissance de soi et la vie de l’esprit, commençant à écrire ses réflexions tous les jours dans ses Cahiers, journaux intellectuels et psychologiques qui ne seront pour l’essentiel publiés qu’après sa mort.
En 1894, il s’installe à Paris et prend un poste de rédacteur au Ministère de la Guerre. Il n’écrit plus de poésie, mais fréquente toujours le cercle et les soirées de Stéphane Mallarmé, et écrit trois essais et textes critiques Introduction à la méthode de Léonard de Vinci (1895), La Soirée avec monsieur Teste (1896), Essai d'une conquête méthodique (1897). En 1917, sous l’action d’André Gide, il publie à nouveau de la poésie, La Jeune Parque chez Gallimard : initialement projet de préface de théorie poétique pour accompagner la réédition de ses premiers poèmes, il écrit un poème de 512 vers, monologue intérieur d’une jeune femme en proie au combat du corps et de l’esprit, dans un formalisme influencé par Mallarmé. Suivent Le cimetière marin (1920) et Charmes (1922) où toujours inspiré par Mallarmé il privilégie la construction et la maîtrise formelle au sens et à l’inspiration.
Son œuvre est orientée vers une réflexion sur le langage, vecteur entre l’esprit et le monde, instrument de connaissance. Ces essais traduisent par ailleurs son inquiétude face à la pérennité de la civilisation et la « montée des périls » des années 1930. Bien que considéré comme philosophe, Paul Valéry se méfie de la philosophie, et déclare « mon système est de ne pas avoir de système ». Il témoigne avant tout d’un scepticisme face aux mécanismes intellectuels et à la valeur intrinsèque des constructions et ouvrages humains. Mais son attention portée à la compréhension du monde et de la pensée en fait l’un des précurseurs du constructivisme.
La poésie est pour lui une science : « Mes vers ont le sens qu’on leur prête. Celui que je leur donne ne s’ajuste qu’à moi et n’est opposable à personne… C’est une erreur contraire à la nature de la poésie, et qui lui serait même mortelle, que de prétendre qu’à tout poème correspond un sens véritable, unique, et conforme ou identique à quelque pensée de l’auteur. Une conséquence de cette erreur est l’invention de l’exercice scolaire absurde qui consiste à faire mettre des vers en prose. Voilà qui est inculquer l’idée la plus fatale à la poésie, car c’est enseigner qu’il est possible de diviser son essence en parties qui peuvent subsister séparées. C’est croire que la poésie est un accident de la substance prose. Mais la poésie n’existe que pour ceux aux yeux desquels cette opération est impossible, et qui connaissent la poésie à cette impossibilité. » (Préface de Paul Valéry aux Commentaires de Charmes par Alain). Le Poète est un fabricant de vers, et n’a pas à chercher l’inspiration, mais par la forme poétique seulement, créer l’état poétique chez l’autre : « Un poète – ne soyez pas choqué de mon propos – n’a pas pour fonction de ressentir l’état poétique : ceci est une affaire privée. Il a pour fonction de la créer chez les autres » (« Poésie et pensée abstraite », Variété V, 1944, reproduit dans l’édition des Œuvres, La Pléiade, tome I, p. 1332).
Reconnu comme « poète national » après la Grande guerre, il est comblé d’honneurs, il est élu membre de l’Académie française en 1925, en 1932 il entre à la direction des musées nationaux. En 1933, il est nommé administrateur du Centre universitaire méditerranéen de Nice, en 1937, est créé pour lui une chaire de Poétique au Collège de France. Sous l’occupation, il prononce en tant que secrétaire de l’Académie française l’éloge du « Juif Henri Bergson », un de ses amis, ce qui lui vaut d’être expulsé de son poste à l’Académie française et au Centre universitaire méditerranéen. Il devient membre du Front national de la Résistance, et a droit à des funérailles nationales à la demande du Général De Gaulle après sa mort le 20 juillet 1945.