Le mouvement après les négociations de Grenelle
Au niveau national, les accords issus des négociations de Grenelle sont jugés largement insuffisants et le mouvement de grèves et d’occupations se poursuit.
Dans les Alpes-Maritimes, les unions départementales des grands syndicats suivent la base des ouvriers qui veulent poursuivre le mouvement et qui attendent les négociations par branche :
Louis Tenerini (CGT) « L’augmentation des salaires est insuffisante, la garantie contre l’augmentation du coût de la vie n’existe pas, le délai pour la réduction du temps de travail est trop long, et l’âge de la retraite doit être avancé »
M. Quaranta (CFDT) « le gouvernement et le patronat, sous la pression ont accepté de discuter. C’est une attitude positive [… ] les travailleurs demandent autre chose que de simples aménagements : ils veulent un pouvoir d’intervention et de contrôle dans l’entreprise. Ils décideront eux-mêmes de la valeur des textes résultants des négociations »
Roger Mai (FO) « obtenir des résultats plus sérieux, plus complets surtout en ce qui concerne l’abrogation des ordonnances de la Sécurité sociale, la sécurité de l’emploi, la revalorisation réelle du pouvoir d’achat pour une indexation réelle des salaires sur le coût de la vie. »
Dans certains secteurs extrêmement défavorisés et peu syndiqués, le transport, le bâtiment, le textile, les accords de Grenelle sont déjà une grande avancée et sont jugés satisfaisants, d’où quelques reprises du travail. Mais pour la majorité, le mouvement dépasse maintenant les revendications sociales : le 29 mai, dans une manifestation à l’appel de la CGT, où défilent 10 000 personnes, le thème mis en avant est désormais la constitution d’un gouvernement populaire avec participation communiste.
Après cette manifestation de la CGT du 29 mai, les autres syndicats et des groupes étudiants s’entendent pour une manifestation commune le 31 mai autour de quatre thèmes : la satisfaction des revendications, l’université démocratique au service de tous les travailleurs, la rénovation démocratique des structures économiques, sociales et politiques, un gouvernement du peuple au service du peuple. 30 000 personnes défilent à Nice, 3 000 à Cannes. Le succès de cette manifestation est accrue par le discours du Président De Gaulle la veille et des slogans hostiles fusent : « le fascisme ne passera pas », « dix ans ça suffit » … Nice est donc l’une des rares villes où les partisans de De Gaulle devront attendre le 1er juin pour défiler.
La politisation entraîne un durcissement de la grève, et c’est en cette fin de mai que surviennent les premières pannes de courant. En parallèle, les syndicats modérés s’éloignent du mouvement :
la CFTC « attire l’attention sur le fait que la grève est en train de dévier des objectifs professionnels pour devenir exclusivement politique, donne mandat à ses organisations de ne pas prolonger la grève dès que des résultats acceptables sont acquis, d’autant que la prolongation du mouvement provoque des difficultés de plus en plus graves pour les catégories les plus démunies. »