Pas de pénurie dans les Alpes-Maritimes

Malgré la durée et l'extension maximale de la grève, il faut relativiser l’impact sur la population de la grève dans les Alpes-Maritimes, contrairement à ce qui peut se passer à Paris ou dans d’autres grandes villes.

Département en bout de chaine des transports sur le territoire français, dont la production de vivres est limitée à 5 jours par an, du fait de la pauvreté de son agriculture, toute l'activité du département est suspendue aux transports, premiers à se mettre en grève. Mais les transports routiers de marchandises fonctionnent en fait normalement et le ravitaillement des produits de première nécessité ne connaît pas de problèmes. Cela n’empêche pas la population le 20 mai de prendre d’assaut les magasins d’alimentation et de longues files d’attente de s’y former. Les 20 et 21 mai, les ventes de sucre, huile et farine sont multipliées par dix. Le préfet est obligé de lancer un appel au calme. Le phénomène s’éteint de lui-même après ces deux jours, puisque le ravitaillement est bien assuré, et que de plus, les grands magasins en grève bradent leurs produits alimentaires périssables. On observe quand même une augmentation des prix face à cette demande et face à l’augmentation des coûts de transports par route.

C’est surtout l’approvisionnement en essence qui semble problématique : les autorités préfectorales décident de réquisitionner une trentaine de stations sur le département pour l’approvisionnement prioritaire des véhicules d’urgence et les transporteurs routiers. Les stocks locaux se révèlent finalement suffisants, notamment parce que les particuliers profitent de la grève des douanes pour s’approvisionner en Italie. Le phénomène le plus marquant sera donc les files de voitures sur plusieurs centaines de mètres, aux week-ends de l’Ascension et de la Pentecôte, vers l’Italie, lorsque plus de dix mille voitures franchissent la frontière en une journée.

Certains services en grève exercent quand même un service minimum : le personnel des hôpitaux garantit les soins, les pharmacies sont approvisionnées par les sociétés de distribution de produits pharmaceutiques ; les PTT assurent la distribution des vaccins, sérums et antibiotiques. Pour le ramassage des ordures, les grévistes sont soucieux de prouver qu’ils ne sont pas irresponsables : à Nice, un quartier tiré au sort chaque jour est nettoyé, et la veille du week-end de Pentecôte, les grévistes décident de leur propre chef de nettoyer toute la ville et ramasse le 31 mai 300 tonnes d’ordures.

Par contre, il n’y aucune distribution de courrier à partir du 21 mai. Les entreprises, qui tout d’abord postent depuis l’Italie, bénéficient ensuite d’un service d’échanges de lettres mis en place par la Chambre du Commerce et de l’Industrie. L’armée met en place au niveau national à partir du 20 mai un réseau de lignes aériennes avec pour base central Evreux, pour l’acheminement du courrier : deux lignes quotidiennes Nice-Evreux désenclave le département.

Commerçants niçois

La CFDT appelle à la solidarité des commerçants pour le  ravitaillement des grévistes. Certains donneront des centaines de kilo de pommes de terre, un restaurateur offre un repas aux grévistes de la TNL. Certaines munipalités organisent le repas des enfants des grévistes. Mais tout  cela sans structure véritable, le département ne disposant pas de Comité central de la grève veillant à l'approvisionnement comme dans les villes de Nantes, Reims ou Narbonne.